Page:Zola - Naïs Micoulin, 1884.djvu/33

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

voir partir pour une de ces grandes courses dont il revenait affamé.

— Tu ne sors pas ? demanda-t-elle.

— Non, mère, répondit-il. Puisque papa n’est pas là, je reste avec vous.

Le méger, qui entendit cette réponse, murmura en patois :

— Allons, M. Frédéric ne va pas tarder à partir pour Marseille.

Frédéric, pourtant, n’alla pas à Marseille. La semaine s’écoula, il était toujours allongé, changeant simplement de place, quand le soleil le gagnait. Par contenance, il avait pris un livre ; seulement, il ne lisait guère ; le livre, le plus souvent, traînait parmi les aiguilles de pin, séchées sur la terre dure. Le jeune homme ne regardait même pas la mer ; la face tournée vers la maison, il semblait s’intéresser au service, guetter les bonnes qui allaient et venaient, traversant la terrasse à toute minute ; et quand c’était Naïs qui passait, de courtes flammes s’allumaient dans ses yeux de jeune maître sensuel. Alors, Naïs ralentissait le pas, s’éloignait avec le balancement rythmé de sa taille, sans jamais jeter un regard sur lui.

Pendant plusieurs jours, ce jeu dura. Devant