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Page:Zola - Naïs Micoulin, 1884.djvu/359

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— Pas possible !

— Lui, ce n’était pas l’estomac, c’était le ventre… Deux côtelettes, quinze sous ! La volaille est moins chère.

— Dame ! ce n’est pas notre faute, madame Vernier. Nous ne savons plus comment nous en tirer nous-mêmes… Qu’y a-t-il, Charles ?

Tout en causant et en rendant la monnaie, elle avait l’œil à la boutique, et elle venait d’apercevoir un garçon qui causait avec deux hommes sur le trottoir. Comme le garçon ne l’entendait pas, elle éleva la voix davantage.

— Charles, que demande-t-on ?

Mais elle n’attendit pas la réponse. Elle avait reconnu l’un des deux hommes qui entraient, celui qui marchait le premier.

— Ah ! c’est vous, monsieur Berru.

Et elle ne paraissait guère contente, les lèvres pincées dans une légère moue de mépris. Les deux hommes, de la rue Saint-Martin aux Batignolles, avaient fait plusieurs stations chez des marchands de vin, car la course était longue, et ils avaient la bouche sèche, causant très haut, discutant toujours. Aussi paraissaient-ils fortement allumés. Damour avait reçu un coup au cœur, sur le trottoir d’en face, lorsque Berru,