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Page:Zola - Naïs Micoulin, 1884.djvu/40

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tunnel de la Nerthe, le plus long de France. Rien n’égale la majesté sauvage de ces gorges qui se creusent entre les collines, chemins étroits serpentant au fond d’un gouffre, flancs arides plantés de pins, dressant des murailles aux colorations de rouille et de sang. Parfois, les défilés s’élargissent, un champ maigre d’oliviers occupe le creux d’un vallon, une maison perdue montre sa façade peinte, aux volets fermés. Puis, ce sont encore des sentiers pleins de ronces, des fourrés impénétrables, des éboulements de cailloux, des torrents desséchés, toutes les surprises d’une marche dans un désert. En haut, au-dessus de la bordure noire des pins, le ciel met la bande continue de sa fine soie bleue.

Et il y a aussi l’étroit littoral entre les rochers et la mer, des terres rouges où les tuileries, la grande industrie de la contrée, ont creusé d’immenses trous, pour extraire l’argile. C’est un sol crevassé, bouleversé, à peine planté de quelques arbres chétifs, et dont une haleine d’ardente passion semble avoir séché les sources. Sur les chemins, on croirait marcher dans un lit de plâtre, on enfonce jusqu’aux chevilles ; et, aux moindres souffles de vent, de grandes poussières volantes poudrent les haies. Le long des murailles,