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NANA

Puis, poussant le journaliste dans un coin et changeant de voix, d’un air victorieux :

— Hein ! c’est pour demain… J’en suis, mon brave !

— Ah ! murmura Fauchery, étonné.

— Vous ne saviez pas… Oh ! j’ai eu un mal pour la trouver chez elle ! Avec ça, Mignon ne me lâchait plus.

— Mais ils en sont, les Mignon.

— Oui, elle me l’a dit… Enfin, elle m’a donc reçu, et elle m’a invité… Minuit précis, après le théâtre.

Le banquier était rayonnant. Il cligna les yeux, il ajouta, en donnant aux mots une valeur particulière :

— Ça y est, vous ?

— Quoi donc ? dit Fauchery, qui affecta de ne pas comprendre. Elle a voulu me remercier de mon article. Alors, elle est venue chez moi.

— Oui, oui… Vous êtes heureux, vous autres. On vous récompense… À propos, qui est-ce qui paye demain ?

Le journaliste ouvrit les bras, comme pour déclarer qu’on n’avait jamais pu savoir. Mais Vandeuvres appelait Steiner, qui connaissait M. de Bismarck. Madame Du Joncquoy était presque convaincue. Elle conclut par ces mots :

— Il m’a fait une mauvaise impression, je lui trouve le visage méchant… Mais je veux bien croire qu’il a beaucoup d’esprit. Cela explique ses succès.

— Sans doute, dit avec un pâle sourire le banquier, un juif de Francfort.

Cependant, la Faloise osait cette fois interroger son cousin, le poursuivant, lui glissant dans le cou :

— On soupe donc chez une femme, demain soir ?… Chez qui, hein ? chez qui ?

Fauchery fit signe qu’on les écoutait ; il fallait être convenable. De nouveau, la porte venait de s’ou-