Page:Zola - Nouveaux contes à Ninon, 1893.djvu/101

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— Est-ce à vous cette ombrelle ? Elle est charmante.

Lili devint très-rouge. Elle faisait des grâces avec l’ombrelle de sa mère, voyant qu’elle écrasait son amie qui n’avait pas d’ombrelle. La question de celle-ci l’embarrassa, elle comprit qu’elle était vaincue, si elle disait la vérité.

— Oui, répondit-elle gracieusement. C’est papa qui m’en a fait cadeau.

C’était le comble. Elle savait mentir, comme elle savait être belle. Elle pouvait grandir : elle n’ignorait rien de ce qui fait une jolie femme. Avec de telles éducations, comment voulez-vous que les pauvres maris dorment tranquilles ?

À ce moment un petit garçon de huit ans passa, traînant une charrette chargée de cailloux. Il poussait des hue ! Terribles ; il faisait le charretier ; il jouait de tout son cœur ; en passant, il manqua heurter Lili.

— Que c’est brutal un homme ! dit-elle avec dédain. Voyez donc comme cet enfant est débraillé !

Ces demoiselles eurent un rire passablement méprisant. L’enfant, en effet, devait leur paraître bien petit garçon de faire ainsi le cheval. Dans vingt ans d’ici, si une d’elle l’épouse, elle le trai-