Page:Zola - Nouveaux contes à Ninon, 1893.djvu/247

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cette heure matinale. C’est le printemps lui-même qui te fait la leçon. La terre est un vaste atelier où l’on ne chôme jamais. Regarde cette fleur, à nos pieds : elle est un parfum pour toi ; pour moi elle est un travail, elle accomplit sa tâche en produisant sa part de vie, une petite graine noire qui travaillera à son tour, le printemps prochain. Et, maintenant, interroge le vaste horizon. Toute cette joie n’est qu’un enfantement. Si la campagne sourit, c’est qu’elle recommence l’éternelle besogne. L’entends-tu à présent respirer fortement, active et pressée ? Les feuilles soupirent, les fleurs se hâtent, le blé pousse sans relâche ; toutes les plantes, toutes les herbes se disputent à qui grandira le plus vite ; et l’eau vivante, la rivière vient aider le travail commun, et le jeune soleil qui monte dans le ciel, a charge d’égayer l’éternelle besogne des travailleurs.

Mon oncle, à ce moment, me força à le regarder en face. Il acheva en ces termes :

— Jean, tu entends ce que te dit ton ami le printemps. Il est la jeunesse, mais il prépare l’âge mûr ; son clair sourire n’est que la gaieté du travail. L’été sera puissant, l’automne sera fécond, car le printemps chante à cette heure, en accomplissant bravement sa tâche.