Page:Zola - Nouveaux contes à Ninon, 1893.djvu/68

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Quand il allait dîner chez la petite baronne, le jeudi, elle le soignait en chère créature que le moindre courant d’air pourrait enrhumer, et à laquelle un mauvais morceau donnerait infailliblement une indigestion. Au salon, son fauteuil était au coin de la cheminée ; à table, les gens de service avaient ordre de veiller particulièrement sur son assiette, de verser à lui seul un certain pomard, âgé de douze ans, qu’il buvait en fermant les yeux de ferveur, comme s’il eût communié.

Il était si bon, si bon, le vicaire ! Tandis que, du haut de la chaire, il parlait d’os qui craquent et de membres qui grillent, la petite baronne, dans l’état de demi-sommeil où elle était, le voyait à sa table, s’essuyant béatement les lèvres, lui disant : « Voici, chère madame, une bisque qui vous ferait trouver grâce auprès de Dieu le Père, si votre beauté ne suffisait déjà pas pour vous assurer le paradis. »


V


Le vicaire, quand il eut usé de la colère et de la menace, se mit à sangloter. C’était, d’habitude, sa tactique. Presque à genoux dans la chaire, ne