Page:Zola - Thérèse Raquin, Lacroix, 1868.djvu/303

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— Réfléchis, ne refuse pas comme ça. Je te dis que je veux cinq mille francs, et je les aurai, tu me les donneras quand même.

Cet entêtement tranquille irrita Thérèse et acheva de la soûler.

— Ah ! je sais, cria-t-elle, tu veux finir comme tu as commencé… Il y a quatre ans que nous t’entretenons. Tu n’es venu chez nous que pour manger et pour boire, et, depuis ce temps, tu es à notre charge. Monsieur ne fait rien, monsieur s’est arrangé de façon à vivre à mes dépens, les bras croisés… Non, tu n’auras rien, pas un sou… Veux-tu que je te le dise, eh bien ! tu es un…

Et elle dit le mot. Laurent se mit à rire en haussant les épaules. Il se contenta de répondre :

— Tu apprends de jolis mots dans le monde où tu vis maintenant.

Ce fut la seule allusion qu’il se permit de faire aux amours de Thérèse. Celle-ci redressa vivement la tête et dit d’un ton aigre :

— En tout cas, je ne vis pas avec des assassins.

Laurent devint très-pâle. Il garda un instant le silence, les yeux fixés sur sa femme ; puis, d’une voix tremblante :

— Écoute, ma fille, reprit-il, ne nous fâchons pas ; cela ne vaudrait rien, ni pour toi, ni pour moi. Je suis à bout de courage. Il serait prudent de nous entendre, si nous ne voulons pas qu’il nous arrive malheur… je t’ai demandé cinq mille francs, parce que j’en ai be-