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Page:Zola - Thérèse Raquin, Lacroix, 1868.djvu/71

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naient, et étendit sur le tout un jupon blanc qu’elle avait retiré. Elle fit ces choses avec des gestes lestes et précis, sans rien perdre de sa tranquillité. Puis elle se coucha, échevelée, demi-nue, encore rouge et frissonnante.

Madame Raquin ouvrit doucement la porte et s’approcha du lit en étouffant le bruit de ses pas. La jeune femme feignait de dormir. Laurent suait sous le jupon blanc.

— Thérèse, demanda la mercière avec sollicitude, es-tu malade, ma fille ?

Thérèse ouvrit les yeux, bâilla, se retourna et répondit d’une voix dolente qu’elle avait une migraine atroce. Elle supplia sa tante de la laisser dormir. La vieille dame s’en alla comme elle était venue, sans faire de bruit.

Les deux amants, riant en silence, s’embrassèrent avec une violence passionnée.

— Tu vois bien, dit Thérèse triomphante, que nous ne craignons rien ici… Tous ces gens-là sont aveugles : ils n’aiment pas.

Un autre jour, la jeune femme eut une idée bizarre. Parfois, elle était comme folle, elle délirait.

Le chat tigré, François, était assis sur son derrière, au beau milieu de la chambre. Grave, immobile, il regardait de ses yeux ronds les deux amants. Il semblait les examiner avec soin, sans cligner les paupières, perdu dans une sorte d’extase diabolique.

— Regarde donc François, dit Thérèse à Laurent.