puissance noble et régulatrice en ce monde, et pour que les richesses de la terre fussent justement réparties, réalisant enfin le bonheur dû à tous les hommes !
Bien que la pluie eût de nouveau cessé, Luc finit par redescendre lui aussi, vers Beauclair. Des ouvriers sortaient encore de l’Abîme, marcha parmi eux, dans cette reprise rageuse du travail, à la suite des désastres de la grève. Une telle tristesse de révolte et d’impuissance l’avait envahi, qu’il serait reparti le soir, à l’instant même s’il n’avait craint de fâcher Jordan. Celui-ci, le maître de la Crêcherie, était dans un grand embarras, depuis la mort subite du vieil ingénieur qui dirigeait son haut fourneau ; et il avait écrit à Luc, l’appelant, pour qu’il examinât les choses et qu’il lui donnât un bon conseil. Puis, comme le jeune homme accourait, par affection, il venait de trouver une autre lettre, où Jordan lui contait toute une catastrophe : la brusque fin tragique d’un cousin, à Cannes, qui l’obligeait à partir sur-le-champ, à s’absenter trois jours, avec sa sœur. Il le suppliait de les attendre jusqu’au lundi soir, de s’installer dans un pavillon qu’il mettait à sa disposition, où il vivrait comme chez lui. Luc avait donc deux jours à perdre encore, et désœuvré, jeté ainsi dans cette petite ville qu’il connaissait à peine, il était sorti pour flâner ce soir-là, il avait même dit au domestique chargé de le servir qu’il ne rentrerait pas dîner, se proposant de manger n’importe où, dans quelque cabaret, passionné toujours des mœurs populaires, aimant à voir, à comprendre et à s’instruire.
Des réflexions nouvelles l’envahirent, pendant que, sous la tempête effarée du ciel, il marchait dans la boue noire, au milieu du lourd piétinement des ouvriers harassés et silencieux. Il eut honte de sa faiblesse sentimentale. Pourquoi donc serait-il parti, lorsqu’il retrouvait là si poignant, si aigu, le problème dont la solution le han-