Page:Zola - Travail.djvu/239

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Il y eut des rires, des cris, et Luc s’inquiéta, car les choses n’allaient pas parfois sans quelque désordre. Au milieu d’une des classes, il venait d’apercevoir Nanet debout la cause sans doute du tumulte.

«  Est-ce que Nanet vous donne toujours du mal  ? demanda-t-il à Sœurette. C’est un diable, cet enfant.  »

Elle sourit, avec un geste d’indulgente excuse.

«  Oui, il n’est pas toujours commode. Et nous en avons d’autres qui sont aussi bien turbulents. Ils se poussent, se battent, n’obéissent guère. Mais ce sont tout de même de bons petits diables Nanet est un gamin exquis, très brave et très tendre… D’ailleurs lorsqu’ils se tiennent trop tranquilles, nous sommes désolés, nous nous imaginons qu’ils sont malades.  »

Après les classes, de l’autre côté du jardin, venaient les ateliers d’apprentissage. Des cours y avaient lieu sur les principaux métiers manuels, les enfants s’y exerçaient à ces métiers, moins pour les y apprendre à fond, que pour en connaître l’ensemble et déterminer leur vocation. Ces cours, du reste, étaient menés parallèlement avec les études proprement dites. Dès les premières notions de lecture et d’écriture, on mettait un outil dans la main de l’enfant en face, de l’autre côté du jardin  ; et si, le matin, il étudiait la grammaire, le calcul, l’histoire, mûrissant son intelligence, il travaillait de ses petits bras, l’après-midi, pour donner de la vigueur et de l’adresse à ses muscles. C’était comme des récréations utiles, un délassement du cerveau, une lutte joyeuse d’activité. On avait admis le principe que tout homme devait savoir un métier manuel de sorte que chaque élève, en sortant des écoles, n’avait plus qu’à choisir le métier de son goût, pour s’y perfectionner dans un atelier véritable. Et, de même, la beauté fleurissait, les enfants passaient par des cours de musique, de dessin, de peinture, de sculpture, où dans les âmes éveillées, naissaient les joies de l’existence.