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lopins de terre, divisés à l’infini  ; la création d’un vaste domaine unique, d’où ils auraient tiré toute une richesse, en y appliquant les principes de la grande culture intensive. Et sa pensée de derrière la tête devait être, lorsque l’expérience aurait réussi, de décider Boisgelin à laisser entrer la ferme dans l’association nouvelle. S’il s’y refusait, les faits finiraient bien par l’y forcer. D’ailleurs, il y avait chez Feuillat, silencieux, se pliant sous les servitudes inévitables, un peu d’un apôtre rusé et patient, résolu à gagner le terrain pas à pas, sans se lasser. Son premier succès venait d’être de faire la paix entre Lenfant et Yvonnot, dont les familles se querellaient depuis des siècles. Le premier ayant été choisi comme maire par la commune, et le second comme adjoint, il leur avait fait entendre qu’ils seraient, à eux deux, les maîtres, le jour où ils marcheraient d’accord. Puis, il les avait lentement amenés à son idée d’une bonne entente générale, si la commune voulait sortir du désastre routinier où elle végétait et retrouver, dans la terre, une source d’inépuisable fortune. Justement, la Crêcherie se fondait alors, il la donnait en exemple, il en disait la prospérité croissante, il avait même fini par mettre en rapport Lenfant et Yvonnot avec Luc, en profitant d’une question d’eaux à régler, entre les Combettes et la Crêcherie. Et c’était ainsi que le maire et son adjoint se trouvaient à l’usine, ce matin-là.

Tout de suite, Luc leur accorda ce qu’ils venaient demander, avec une bonhomie qui rassura un peu leur continuelle défiance.

«  C’est entendu, messieurs, la Crêcherie canalisera désormais toutes les eaux qu’elle a captées, parmi les roches, et elle versera celles qu’elle n’emploiera pas dans le ruisseau du Grand-Jean, qui traverse votre commune, avant de se joindre à la Mionne. Avec peu de frais, si vous établissez des réservoirs, vous aurez un