Page:Zola - Travail.djvu/606

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Léonie, la fille de Ma-Bleue et d’Achille Gourier. Lui-même venait d’épouser, quinze jours plus tôt, Hélène Jollivet, fille d’André Jollivet et de Pauline Froment. Mais, lorsque Bonnaire voulut expliquer ces filiations à Ragu, celui-ci eut le geste d’un homme dont la tête se perd, au milieu d’une telle complication des alliances. Et le jeune ménage était charmant, elle très jeune, d’une adorable beauté blonde, lui blond également, grand et fort. Leur maison, où des enfants n’avaient pas encore eu le temps de naître, sentait bon l’amour, avec ses pièces si claires, si gaies, son ameublement tout neuf, d’une élégance simple. Ce jour-là, d’ailleurs, elle était, comme les rues, pleine de roses, car il semblait avoir plu des roses dans Beauclair, il y avait des roses partout, et jusque sur la toiture. On visita la maison entière avec des rires, on revint à la pièce qui servait d’atelier, une vaste pièce carrée, où se trouvait un moteur électrique. Félicien, tourneur sur métaux par goût, en dehors des trois ou quatre autres métiers qu’il exerçait concurremment, préférait travailler chez lui  ; et il en était de même pour plusieurs camarades de son âge, un mouvement s’indiquait dans cette génération nouvelle, le petit travailleur à domicile, libre, maître de sa fabrication, en dehors des grands ateliers sociaux, fondements jusque-là nécessaires de la Cité. Pour ces ouvriers individuels, la force électrique faisait merveille, ils l’avaient chez eux comme ils avaient l’eau des sources. C’était le travail désormais aisé, pouvant être exercé chez soi, proprement, sans fatigue, c’était chaque maison changée en un atelier de famille, un lien de plus groupant les énergies au foyer, le travailleur entièrement libre dans la ville libre.

«  À ce soir, mes enfants, dit Bonnaire en prenant congé. Dînez-vous à notre table  ?

— Oh  ! non, grand-père, impossible cette fois, nous