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Page:Zola - Vérité.djvu/223

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quelques minutes, il se mit à fouiller partout, poussant son inspection jusqu’à regarder dans les armoires, si tout s’y trouvait bien en ordre. Il devait nourrir l’espoir d’y découvrir de mauvais livres, des brochures anarchistes. Et il critiquait chaque chose, s’attachait aux moindres négligences, parlant haut parmi les élèves, cherchant à humilier le maître devant eux. Enfin ceux-ci reprirent leur place à leur banc, l’inspection orale commença.

Il s’attaqua d’abord à Mignot, parce que le petit Charles Doloir, âgé de huit ans, ne put répondre à une question, ne l’ayant pas encore étudiée.

— Alors vous êtes en retard sur le programme ? Voilà deux mois que vos élèves en devraient être à cette leçon !

Mignot, debout, respectueux, mais visiblement agacé de ce ton agressif, se contenta de se tourner vers Marc. En effet, c’était celui-ci que visait Mauraisin. Aussi. finit-il par répondre.

— Pardon, monsieur l’inspecteur, c’est moi qui ai cru devoir intervertir certaines parties du programme, pour plus de clarté. Et puis, le mieux n’est-il pas de s’en tenir moins aux livres qu’à l’esprit des connaissances enseignées, de façon à faire vivre aux élèves, dans l’année, l’ensemble des leçons ?

Mauraisin affecta une véritable indignation.

— Comment, monsieur, vous vous permettez de toucher aux programmes, vous décidez à vous tout seul ce qu’il est bon d’en prendre et d’en laisser ? Et vous substituez votre fantaisie à la sagesse de vos chefs ? C’est bien, on saura à quel point votre classe est en retard.

Puis, avisant l’autre Doloir, Auguste, qui avait dix ans, il le fit se lever et le questionna sur la Terreur, lui en fit nommer les chefs, Robespierre, Danton, Marat.

— Marat était-il beau, mon enfant ?

Auguste, un peu conquis par Marc à plus de sagesse, n’en restait pas moins l’indiscipliné, le farceur de la