Page:Zola - Vérité.djvu/226

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il ne comprenait même pas ce qu’on lui demandait, à neuf ans à peine.

— Eh bien ! quand vous me regarderez, petite bête, ma question est claire !

Marc ne put se contenir davantage. L’embarras de son élève le plus cher, qu’il finissait par aimer tendrement, lui fut insupportable. Et il vint à son secours.

— Pardon, monsieur l’inspecteur, ce que la religion enseigne se trouve dans le catéchisme, et le catéchisme n’est pas dans le programme. Comment voulez-vous que cet enfant vous réponde ?

C’était ce que Mauraisin devait attendre. Il affecta de se fâcher.

— Je n’ai pas à recevoir de leçon de vous, monsieur le maître. Je sais ce que je fais, et il n’est pas d’école un peu bien tenue où un enfant ne puisse répondre en gros à une question sur la religion de son pays.

— Je vous répète, monsieur l’inspecteur, déclara Marc d’une voix nette, où commençait à monter un peu de colère, que je n’ai pas à enseigner le catéchisme. Vous vous trompez, vous n’êtes point ici chez les frères de la Doctrine chrétienne, qui en font la base de leur enseignement. Vous êtes ici dans une école républicaine et laïque, résolument en dehors de toute église, ne basant la connaissance que sur la raison et la science. Et s’il le faut, j’en appellerai à mes chefs.

Mauraisin comprit qu’il était allé un peu loin. Chaque fois déjà qu’il s’était efforcé d’ébranler Marc, il avait senti son supérieur hiérarchique, l’inspecteur d’académie Le Barazer, passivement acquis au jeune homme, demandant des faits graves contre lui ; et il n’ignorait pas son opinion sur l’absolu neutralité religieuse de l’école. Aussi, sans insister, brusqua-t-il la fin de son inspection, avec des critiques encore, résolu à ne trouver rien de bien. Les élèves eux-mêmes le jugeaient