Page:Zola - Vérité.djvu/362

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Tu le sais, ma chère, j’ai cédé sur tout, je ne céderai pas sur la confession.

Se contenant encore, Geneviève demanda :

— Et pourquoi ne veux-tu pas céder.

— Je ne puis le dire devant cette enfant. Mais tu connais mes raisons, je n’entends pas qu’on salisse l’esprit de ma fille, sous le prétexte de l’absoudre de fautes puériles, que la famille suffit à connaître et à corriger.

Il s’en était en effet expliqué avec elle, trouvant abominable cette initiation d’une fillette aux fièvres de la chair, par un homme que son vœu de chasteté peut conduire à toutes les curiosités, à toutes les aberrations sexuelles. Sur dix prêtres prudents, il suffit d’un détraqué, et la confession n’est plus qu’une ordure, dont il ne voulait pas laisser courir le risque à sa Louise. Puis, cette promiscuité troublante, ce colloque secret dans l’ombre et l’énervement mystique d’une chapelle, n’étaient pas seulement un outrage, une démoralisation possible, pour une petite femme de douze ans, âge inquiet où les sens s’éveillaient à la vie ; il y avait encore là comme une prise de possession de la jeune fille, de l’amante et de la mère à venir, qui à jamais restait ensuite l’initiée, la déflorée de ce ministre sacré, dont les questions, en violentant sa pudeur, la fiançaient à son Dieu jaloux. Dès lors, par ses aveux, la femme appartenait au confesseur, devenait sa chose tremblante et obéissante, toujours prête à être, dans ses mains, un instrument d’enquête et de servage.

— Si notre fille a commis quelque faute, répéta Marc, c’est à toi ou à moi qu’elle s’en confessera, le jour où elle en éprouvera le besoin. Ce sera plus logique et plus propre.

Geneviève haussa les épaules, en femme qui trouvait cette solution blasphématoire et grotesque.