Page:Zola - Vérité.djvu/480

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Le silence retomba, une gêne les tint muets de nouveau. Il suffisait de cette allusion à la terrible querelle qui les avait séparés, au sujet de la première communion de leur fille. Mais c’était pourtant là un désaccord dont la virulence s’atténuait chaque jour, l’enfant ayant pris toute la responsabilité à son compte, par sa tranquille volonté d’attendre ses vingt ans, avant de faire acte de foi religieuse. Elle avait doucement lassé sa mère, et celle-ci, en en parlant, venait de laisser échapper un geste de fatigue, comme si elle parlait d’un bonheur, longtemps souhaité, dont elle n’espérait plus la joie.

Au bout d’un instant, il osa tendrement lui poser une question encore.

— Et toi, mon amie, tu as été si souffrante, comment vas-tu à présent ?

Elle eut un haussement d’épaules désespéré, elle dut retenir deux nouvelles larmes.

— Oh ! moi, je ne sais plus depuis longtemps comment je me porte. Ça ne fait rien, je me résigne à vivre, puisque Dieu m’en donne la force.

Il fut si navré, si pénétré d’un frisson de pitoyable amour, devant tant de souffrance, que le cri de son inquiétude lui échappa.

— Geneviève, ma Geneviève, quel est ton mal, quel est ton tourment, dis-le moi ? et si je pouvais te consoler, te guérir !

Mais déjà elle s’écartait de lui, en le voyant qui se rapprochait sur le banc, jusqu’à toucher les plis de sa robe.

— Non, non ! il n’y a plus rien de commun entre nous, tu ne peux plus rien pour moi, mon ami, car nous sommes de deux mondes différents… Ah ! si je te disais ! À quoi bon ? tu ne comprendrais pas.

Et elle parla pourtant, elle dit sa torture, son angoisse chaque jour grandissante, en petites phrases fiévreuses,