Page:Zola - Vérité.djvu/527

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malade à chaque heure, en lui causant des frissons, des étouffements, dont elle avait grand-peine à se remettre. Aussi, pour échapper à ces sortes de peurs nerveuses où elle tombait, finissait-elle par ne plus descendre au petit salon. Elle vivait dans sa chambre, couchée sur une chaise longue, regardant la place déserte des Capucins, du matin au soir, de ses pauvres yeux mélancoliques, si navrés des joies perdues depuis tant d’années.

— On ne s’amuse guère va ! continua Louise. Maman dans sa chambre, grand-maman Berthereau dans la sienne, et grand-mère qui monte, qui descend, qui fait claquer les portes, en se disputant avec Pélagie, quand elle ne trouve plus personne à gronder… Moi, d’ailleurs, je ne me plains pas, je m’enferme aussi, je travaille. Tu sais, maman y consent, je me présente dans six mois à l’École normale, et j’espère bien être admise.

À ce moment, Sébastien Milhomme arriva de Beaumont, libre ce jour-là, voulant lui aussi embrasser son ancien maître, dont il savait le retour. Et, presque aussitôt, Joseph et Sarah se présentèrent également, pour remercier Marc de ses efforts, de son héroïsme inutile, au nom de leur mère et des Lehmann, que la nouvelle condamnation de Simon venait d’anéantir. Ils dirent quel coup de foudre s’était abattu de nouveau dans la misérable boutique de la rue du Trou, la veille, lorsque David avait télégraphié de Rozan la nouvelle affreuse. Mme  Simon avait préféré venir l’attendre là, avec ses parents et ses enfants, fuyant le milieu hostile de cette grande ville cléricale, où ses faibles ressources, d’ailleurs, ne lui permettaient pas de vivre. Et la triste maison était en larmes, instruite seulement de l’inique arrêt, ignorante encore de ce qui allait se passer, attendant le retour de David, resté près de son frère, pour aviser, selon les événements.

Alors, il y eut là une scène touchante entre les quatre