faire des découvertes personnelles, cherchait la vérité avec ses élèves, comme s’il ne l’avait jamais eue, finissait par s’émerveiller de la trouver, grâce à leur aide ; et cela passionnait chaque leçon, les élèves s’y intéressaient ainsi qu’au plus amusant des jeux, tout en l’adorant lui-même d’être de la sorte un si bon camarade. On obtient ce qu’on veut des enfants par la chaleur de la sympathie, il suffit de les aimer pour réussir à être entendu et compris. Puis, il tâchait de leur faire vivre ce qu’il leur enseignait, il leur expliquait dans les champs les travaux de la terre, il les menait chez des menuisiers, des serruriers, des maçons, afin de leur donner de premières notions exactes sur les métiers manuels. Selon lui, la gymnastique devait se confondre avec les jeux, les récréations se trouvaient naturellement consacrées aux exercices du corps. Il se faisait aussi le justicier, il priait ses élèves de lui soumettre tous leurs petits différents, et il mettait un soin extrême à rendre des sentences inattaquables, acceptées des deux parties, car il n’avait pas seulement une foi absolue en la force bienfaisante de la vérité sur de jeunes cerveaux, il était encore convaincu de la nécessité de la justice, pour les contenter et les mûrir. Par la vérité, par la justice, pour aboutir à l’amour. Un enfant, à qui on ne ment jamais, et que l’on traite toujours justement, devient un homme amical, raisonnable, intelligent et sain. Et c’était pourquoi il veillait tant sur les livres que les programmes le forçaient à mettre entre les mains de ses élèves, sachant combien les meilleurs, même ceux écrits dans d’excellentes intentions, sont encore pleins des séculaires mensonges, des grandes iniquités consacrées par l’histoire. S’il redoutait les phrases, les mots dont le sens échappait à ses petits paysans, et s’il s’efforçait de les traduire en paroles simples et claires, il craignait davantage les légendes dangereuses, les erreurs devenues
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