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plus à ses yeux un groupement de nations, une abstraction géographique : c’est le symbole grandiose de la conquête. Il ne méprise pas l’or et l’argent comme des agents de matérialisation dans la vie, mais estime en eux des stimulants qui nous poussent à de nouvelles ambitions. La mer, dont le rythme troublant se répercute sur toutes les côtes, n’est plus la force avide qui ronge la terre : c’est le flot sacré, symbole d’une énergie en perpétuel mouvement, c’est « la mer nue et pure, comme une idée[1] ». Dans la cohésion intime de toutes choses, le poète se sent en communion avec l’univers : il ne la perçoit plus, il l’aime ; la mer lui donne une impression physique.

Ma peau, mes mains et mes cheveux
Sentent la mer
Et sa couleur est dans mes yeux.[2]

De même que, chaque fois qu’il entre en contact avec les flots, il sent se renouveler son sentiment vital, de même il croit à une résurrection du corps au sein de la mer ; et l’émergence hors des flots lui apparaît comme un « nouveau

  1. « L’Eau » (les Visages de la Vie).
  2. « Au bord du quai » (idem).