Page:Zyromski - Sully Prudhomme, 1907.djvu/258

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

244 SULLY PRUDHOMME

romantiques a rendu notre langue plus apte aux effets pittoresques, le développement de la musique nous a faits plus sensibles aux nuances de l'har- monie, et nous savons que des assonances lointaines peuvent être plus expressives que les plus écla- tantes sonorités. La rime, « ce bijou d'un sou », comme disait Verlaine, peut offusquer par son bruit la délicatesse de nos émotions : c'est pour- quoi un mélange de sourdines est quelquefois pré- férable à la richesse des sons associés, et les rythmes nets et vibrants qui décrivent doivent être souvent délaissés pour les rythmes impairs qui suggèrent :

De la musique avant toute chose, Delà musique encore et toujours!

J'ajoute enfin, avec les symbolistes, qu'il est possible d'élargir encore le clavier du vers. Victor Hugo n'a pas épuisé la puissance expressive de la métrique française et l'alexandrin n'est pas levers limite dont puisse s'accommoder notre oreille. Le vers de 14 syllabes peut paraître normal, car l'ampleur inaccoutumée de Ce rythme traduirait la force du sentiment ou de la pensée sans sur- mener notre mémoire auditive. Je suis rassuré dans cette opinion non seulement par le consen-