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œuvres complètes de maximilien robespierre

médecine, et dont le cœur palpitait encore au souvenir des doux poèmes d’Anacréon et d’Horace, s’étaient donné rendez-vous à Blangy, le juin 1778, sous un berceau tout embaumé de troène et d’acacia.

Ils étaient réunis, dit un correspondant de l’abbé Ménage, « par l’amitié, par le goût des vers, des roses et du vin. » Après avoir honnêtement sacrifié à Bacchus, récité, comme aux anciens Puys d’Amour, d’aimables poésies et chanté le bonheur et l’espoir d’une jeunesse pleine d’illusions, ils dépouillèrent les rosiers voisins et se tressèrent des couronnes de fleurs.

Cette journée avait laissé un délicieux souvenir dans leur esprit ; aussi se promirent-ils de se retrouver chaque année à pareille époque, sous ces odorantes tonnelles.

Ainsi naquit la société des Rosati, consacrée, dès l’origine, à Chapelle, à la Fontaine et à Chaulieu.

Une égalité parfaite, une camaraderie de bon aloi ne cessèrent de régner au sein de cette compagnie ; tout ce que la ville d’Arras comptait de littérateurs, de savants et d’artistes, tint à honneur de s’y inscrire, et les puissants seigneurs du jour, les magistrats les plus estimés, les avocats et les officiers en renom vinrent s’asseoir auprès des plus modestes débutants, à qui ils prodiguaient leurs encouragements et leurs conseils.

La Chanson qui se trouvait bannie des graves assises de l’Académie, et la Poésie, qui eut difficilement pu y conserver ses allures gracieuses et légères, élurent bientôt domicile sous le berceau en fleurs des Rosati.

Ceux-ci, du reste, répudiaient toute contrainte ; ils écrivaient pour eux-mêmes, non pour la postérité, et une telle modestie n’étonne point de la part de jeunes gens dont les travaux obligés consistaient à faire, sur des modes variés, l’éloge de la Rose, du Vin et de l’Amour.

Dans cette aimable compagnie, une place était naturellement réservée à Maximilien Robespierre ; présenté par le savant Harduin, il fut reçu Rosati en 1787 et non 1782,