Par nos champs et nos rives/56

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Imprimé au Devoir (p. 145-146).

LE SOUVENIR


Quand tu paraîtras, ô vieillesse,
Quand tu viendras frapper chez moi,
Je te recevrai sans faiblesse,
Et je t’ouvrirai sans émoi.

Alors, fais ton œuvre en silence :
Je t’attendrai sans te haïr,
Et même, ô vieillesse, je pense
Que l’on doit plutôt te bénir !…


Prends le sourire de mes lèvres,
Prends le clair reflet de mes yeux,
Prends mes chimères et mes fièvres,
Prends la toison de mes cheveux.

Prends cette ivresse qu’en mon âme,
La vie aura fait naître, un jour ;
De mes jeunes ans prends la flamme,
Prends mes rêves, prends mon amour ;

Prends tous mes projets de jeunesse
Que je ne pourrai pas finir ;
Prends mes espoirs, prends ma tendresse,
Mais laisse-moi le souvenir !…