Petite grammaire bretonne/VI

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VI

ADJECTIFS


38. L’adj. qualificatif joint au nom se met après lui : môr bihan petite mer (d’où Morbihan). Il est invariable, sauf les mutations initiales (§ 8).

39. Cependant on met avant le nom kôz (vieux) au sens de méchant, mauvais ; briz (tacheté) au sens de demi, gwall terrible, surtout au sens de mauvais (tréc. gwell bôt méchant garçon, et aussi gars dégourdi, gwell zarmoner bon prédicateur), mais tân gwall « feu terrible, » incendie ; hevelep tel, fals faux, et quelquefois berr court, bihan petit (e berr gomzou en peu de mots, bihan dra peu de chose) ; dister chétif, de peu de valeur, gwe(z) sauvage, gwîr vrai, hen̄vel semblable, neve(z) nouveau, holl tout (an holl eüned tous les oiseaux), pell lointain, treuz de travers (voir § 9).

Le mot kaez, keaz, kez, pauvre, cher, fait souvent au plur. keiz : an dud keiz les pauvres gens (voir § 29).

40. On ajoute au positif oc’h pour le comparatif, a, tréc. an̄ pour le superlatif absolu, et, dans une partie du pays trécorois, et, at pour l’exclamatif : tom chaud, tomoc’h plus chaud, an toma, an toman̄ le plus chaud (fém. an d.) ; tréc. tomet, tomat, combien chaud ! Devant ces terminaisons, la consonne finale est dure : pinvidig ou -ik riche, pinvidikoc’h plus riche.

On peut aussi dire muioc’h (tréc. muoc’h) tom, ar muia (tréc. muan̄) tom, et pegen tom ! na tom ! ou toma ! tréc. toman̄ !

Formes spéciales : mâd bon, comparatif guelloc’h et guell, superlatif guella, -an̄ (tréc. gwe-) ; drouk mauvais, gwasoc’h et gwas, gwasa, -an̄ ; les formes régulières matoc’h, etc. existent aussi en Tréguier.

Le comparatif et le superlatif peuvent se mettre avant le nom auquel ils sont joints.

Pour le comparatif d’égalité, on met avant le positif, en tréc. toujours ken, en léon. ken devant une voyelle, n, d, t, kel devant l, ker devant une autre consonne. Au lieu de ken mad, ken braz, ken hir aussi bon, grand, long, on peut dire kerkouls, tréc. kenkouls ; kemen̄t, tréc. kement, kemet ; keit.

Après le comparatif de supériorité, que se rend en léon. par eget, evit, en tréc. evit, ewit, ’vit, ’wit ; après le comparatif d’égalité, par ha, devant une voyelle hag (tellement… que se rend par ken… ken ou ken… ma).

Constructions du superlatif relatif : ar guella dén, an dén gwellan̄, le meilleur homme, ar guella euz, ou tréc. deuz an dud le meilleur des hommes ; ma gwellan̄ mignon mon meilleur ami. L’article ou l’adj. possessif manque seulement dans les exclamations ; là le nom doit suivre : gwellan̄ den ! quel excellent homme !

41. Pour le superlatif absolu, on peut répéter le positif : tom tom très chaud ; ou dire, par exemple, meurbed tom, ou tom meurbed (beaucoup), tom brâz (grandement), tom mâd (bien) ; gwall dom, tréc. gwell dom (terriblement). Il y a aussi une foule d’expressions intensives telles que tom skot (de skot échaudé), tom parat (de paredi cuire) ; ien sklas froid (comme) glace, yac’h pesk sain (comme) poisson, etc., etc.

42. Les formes adjectives peuvent aussi avoir le sens d’adverbes : mâd bien, gwell mieux ; tréc. gwasad e tom ! qu’il fait terriblement chaud !

Le diminutif est en ik comme pour les noms : tomik un peu chaud, tomik mad assez chaud, assez chaudement. On dit même gwelloc’hik ou gwellikoc’h un peu meilleur ; gwellaik a hellan̄ « du petit mieux que je puis. » Il y a bien d’autres locutions expressives, telles que tomik-lom, ou tom-ha-tom tout à fait chaud, tom pe domoc’h, tomoc’h-tom, tom ouz tom ou tomoc’h-toma de plus en plus chaud, gwell ouz gwell de mieux en mieux, etc.