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Poèmes (Canora, 1905)/Prologue

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(p. 177-178).


PROLOGUE


 
Vos cheveux sont parés de jeunes aubépines,
Vierges ! où portez-vous ces branches de lilas,
Ces nénuphars, joyaux des sources cristallines,
Et ces roses de mai qui roulent sous vos pas ?

Est-il vrai que l’on voit, des portes de la ville,
Les villageois, serrant dans leurs calleuses mains
Des rameaux printaniers, et qu’ils viennent par mille.
Chantant des hymnes clairs le long des grands chemins ?

Oh ! pourquoi ces parfums, ces chants et ces parures,
Ce rêve d’harmonie exquise et de beauté,
Dites, quel est ce nom que la foule murmure,
Et qui s’élance au ciel, du cœur de la cité ?


les jeunes filles

 
Vers ce blanc monument que la foule environne,
À Comte nous portons ces riantes couronnes,
À Comte s’en iront, plus fraîches que les fleurs,
Les paroles d’amour écloses dans nos cœurs.
Aux lieux où nous passons, il vécut solitaire,
Très digne, sans souci des honneurs éphémères.
Quand la haineuse envie ou l’infidélité
Firent saigner son âme avide de bonté,
Alors, interrogeant la science féconde,
De l’ensemble des lois immuables du monde,
Il tirait la robuste et lumineuse foi
Qui guérit notre cœur de son antique émoi.
Quarante ans sont passés, et des rives lointaines
Au buste du héros qui sut briser leurs chaînes,
Savants, dont il guida le lent et rude effort,
Ouvriers, qu’il rendit plus nobles et plus forts,
Femmes, qu’il emporta du doute à l’espérance,
Artistes, qu’il sauva des stériles démences,
Un peuple ! dont son âme éclaira l’avenir,
S’en vient jeter des fleurs et se ressouvenir.