Poètes Moralistes de la Grèce/Notice sur Aristote
Poètes Moralistes de la Grèce, Garnier Frères, 1892 (p. 313-315).
Aristote naquit à Stagire, en Macédoine, l’an 384 avant Jésus-Christ. Fils de Nicomaque, médecin du roi Amyntas, il eut pour maître d’abord son père, puis un certain Proxène, qui était d’Atarne, en Asie Mineure ; vers 367, il vint étudier à Athènes où Platon, qui le remarqua, l’appela l’Intelligence de l’École. Il y resta de longues années et devint maître à son tour, combattant le mauvais goût de l’école de rhétorique d’Isocrate et les doctrines de son ancien condisciple Xénocrate, qui dirigeait l’Académie.
Vers 349, il se rendit en Asie, auprès d’un de ses anciens élèves nommé Hermias, tyran d’Atarne, qui avait formé le projet d’arracher toutes les cités grecques de l’Asie Mineure au joug des Perses ; mais un transfuge grec attira Hermias dans un piège et le livra aux mains d’Artaxerxès Ochus qui le fit étrangler. Sous le coup de la douleur causée par la mort de ce disciple bien-aimé, Aristote composa l’Hymne à la vertu qui lui assure le premier rang parmi les poètes lyriques de son siècle et dont on a dit qu’il était l’une des plus sublimes inspirations du génie antique.
Plus tard Aristote éleva à Hermias un mausolée dans le temple de Delphes et y fit graver cette inscription qui nous a été conservée par Diogène Laerce :
« Un roi de Perse, violateur des lois, fit mourir celui dont on voit ici l’image. Un ennemi généreux l’eût vaincu par les armes : ce traître le surprit sous le voile de l’amitié. »
Après avoir quitté Atarne, Aristote se rendit à Mitylène, où il épousa Pythias, la sœur de son ami ; il en eut une fille qui fut nommée comme sa mère. En 343, Philippe, avec lequel il était lié depuis l’enfance, l’appela en Macédoine pour lui confier l’éducation de son fils Alexandre. Aristote resta huit ans auprès de son royal élève, puis il retourna à Athènes où il fonda l’école de philosophie si célèbre sous le nom de Lycée.
Il enseignait en se promenant ; de là le surnom de Péripatéticien qu’on donne aussi à son système et à ses disciples. Le matin, ses leçons s’adressaient aux élèves les plus avancés et avaient pour objet les questions les plus difficiles ; le soir, elles étaient faites pour le plus grand nombre, et l’enseignement était plus accessible et plus brillant.
Ce fut à ce moment qu’Aristote publia ses principaux ouvrages. Nous n’avons pas à les énumérer ici, nous dirons seulement qu’ils sont très nombreux, parce que pour lui la philosophie embrassait toutes les sciences, excepté l’histoire.
Après la mort d’Alexandre, Aristote se vit forcé, sur une accusation d’impiété, mais en réalité par suite de la haine du parti antimacédonien, de quitter Athènes et de se retirer en Eubée, à Chalcis, où sa vie était plus en sûreté. Il y mourut en 322, peu de temps avant Démosthène.
L’Hymne à la vertu, cité par Athénée (XV, 16), et par Diogène Laerce (V, 7), se trouve dans le recueil des Poètes lyriques grecs de Bergk que nous avons déjà cité ; il a été traduit en vers français par Firmin-Didot, Paris, 1832.