Pointe aux Esquimaux — Lettres des premiers missionnaires/02/1858

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Carte du Père Babel

J’ai dit à la suite de la lettre de labbé Ferland que le père Babel n’avait pas fait de rapport (du moins imprimé) de sa mission de 1858, mais voici quelques remarques que j’ai trouvée sur une carte qu’il avait fait (à l’œil) de ses missions de cette année là, c-à-d depuis Itemaniou jusqu’à l’entré du Saguenay.

Cette carte a été trouvé cette hiver (1915) au presbytère parmi d’autres vieilles paperasses par le révérend père Kerdelhué.

J’ai comme un vague souvenir qu’elle me fut montré autrefois par Mr Perron ou Mgr Bossé, mais je n’en suis pas bien certain.

Voici ces remarques inscrites sur cette carte.

I
Itamamu.

Mission sauvage, une excellente famille canadienne.

Cette famille canadienne était Michel Blais.

II
Matshiatic.

Trois postes de pêche[1] abandonné depuis deux années, ils ont été achetés par de nouvelles familles qui se proposent de venir les occuper cet été.

Je ne crois pas que ces postes furent habités de nouveaux,
c’était les postes des familles Rochette, Tanguay et Goulette.

III
Ste Marie.

Une famille canadienne vivant sur une île au large.

Ste Marie est plusieurs milles à l’est d’Itamaniou[2]. Il est probable que le père Babel a commis une erreur de nom. C’était plutot Wappitagun. Je ne sais pas quelle était cette famille. [3]

IV
Kuekuatsho (Cocopaotshoo)

Une famille canadienne vivant de pêche et de chasse.

c'était le bonhomme Fabien Bélanger ou Boulanger, marié à une sauvagesse. Il fut remplacé quelques années plus tard par Joseph Aubé marié lui aussi à une sauvagesse. Après qu'il eut cédé son poste à Aubé il vint habiter la Pointe avec sa vieille et mourut entre les années 1867 et 70 (il habita Watshershoo quelques temps avant de venir à la pointe.)

Avant de venir habiter la Pointe, Fabien Boulanger demeura quelque temps au Grand Watsheshoo. (2 ou 3 ans) Il était, dutant d’autant que je me souviens, très vieux lorsqu’il morut. Ce fut mon frère Louis qui accompagna Mr Pérusse lorsqu’il fut lui administrer les derniers sacrements. C’était en été et probablement en 1868. Cependant j’ai feuilleté tous les régistres des B M et L et n’ai rencontré son acte de décès nulle part, c’est drôle. PV

Il avait remplacé Ambroize Gaulette qui habita Piestebéquelque chose comme un an ou 18 mois avant de venir habiter la pointe


Branche Paternelle[4]
ils avaient passé en France
Acadie
Jean Vigneau
Marie Therrieau
Louis Nath. Vigneau
Bathilde Arseneau
Antoine Arseneau
Lisette Boudreau
Vital Vigneau
Élisabeth Boudreau
Placide Vigneau


V
Romaine.

Une famille Canadienne vivant du produit de la pêche et de la chasse.

C'était Georges Métivier marié à une fille du bonhomme Isidore Chiasson de Kegaska, acadienne.

VI
Uashikuteu. (Washikouté)

Deux familles canadiennes bâties sur une pointe de rocher vivant du produit de la pêche et de la chasse.

C’était deux familles Guilmette.

VII
Petit Maskuaro.

Une famille canadienne.

C’était je crois Anselme Guilmette.

VIII
Maskuaro.

Poste de la compagnie de la Baie d’Hudson, une famille canadienne. Entre tous les postes ci-dessus mentionné toute communication est impossible par terre durant l'été. Ces deux derniers postes ne sont distants que d'une lieue l'un de l'autre

Cette famille canadienne était Peter Noël

IX
Petit Casca (Kegaska)

Sept familles acadiennes, bons catholiques auquel aux quels je n'ai guère à reprocher que d'aimer la dance. Quelques hommes aussi manquant à leur tempérance. Ce poste n'est qu'à 4 lieues de Maskuaro, communications difficile pendant l'été. Il y avait ce printemps outre les familles établies dans ce poste quinze goëlettes venues pour la pêche à la morue. Chaque goëlette pouvait avoir en moyenne une dizaine d’hommes.

C’est à Kegaska que furent s’établir les premières familles parties des îles de la Madeleine en 1854.

X
Natashkuan. (Natashquan)

Poste de la compagnie de la Baie d’Hudson. Ce poste est à dix lieues de distance du petit Casca. Il y avait dans la rivière ce printemps une soixantaine d’hommes occupés à la pêche du saumon.

Chaque année environ vingt cinq familles sauvages montent dans cette rivière et passent un temps considérable sur la rive opposé au poste ou se trouve le tombeau d’un missionnaire enterré dans le bois. Entre ces deux postes la communication est facile jusqu’à une petite distance du petit Casca.

En ce temps la le poste de HBC était du côté sud de la rivière et fut transféré sur la rive Nord en 1859 ou 60. Le missionnaire enterré dans le bois est l’abbé Parent, mort croyons nous vers 1780.[5]

XI
Petit Natashkuan.

Large dune de sable. Communication facile. Il y a dans ce poste quinze familles acadiennes aux quelles j’ai les mêmes choses à reprocher qu’à celles du petit Casca. Leurs moyens d’existance sont la pêche à la morue et la chasse au loup-marin sur les glaces. Outre ces familles il y avait ce printemps cinquante goëlettes venues pour la pêche à la morue

Le père Babel ne parle pas de l’établissement de pêche de Mr De la Cerrelle établi dans le grand Natashquan l’année précédente (1857) et qui devait occuper au moins une centaine d’hommes ou à peu près, venant des côtes de la Gaspésie. Je n’ai pas d’explication à donner sur les habitants du Petit Natashquan.

XII
Guanis. (Aguanus)

Une famille canadienne vivant du produit de la chasse et de la pêche au saumon.

XIII
Napissipi.

Communication facile sur une large dune de sable qui unit ces deux postes. une famille canadienne.

Les familles des deux postes d’Aguenus et Nabessippi était les deux familles Rochette partis de Meutshietik quelques années auparavant, deux frères mariés aux deux sœurs, deux petites Giroux, peu de temps après le Rochette d’Aguenus étant mort, la veuve épousa Sylvestre Kennedy son engagé, le quel mourut à l’asile de Beauport entre 1875 et 1880.

XIV
Petit Uatshisho (Watsheshoo)

Communications impossible par terre durand l’été, une famille canadienne

C’était Joseph Tanguay parti des environs de Matshiatik en même temps que les Rochette. Un certain nombre d’années plus tard sa maison ayant brulé par l’imprudence des engagés de Mr Molson qui pêchait à Wetsheshoo à la mouche, il fut habiter Piestebé, (Piasterbaie) où ses enfants avec quelques autres, forment un petit vilage et où demeure à présent Mr Yohan Beetz, millionnaire belge marié à une de ses petites filles, lequel a presque tout perdu par la présente guerre ce qu’il possédait en Belgique. Madame Tanguay était une métisse née à Mingan. Cet endroit est désigné aujourd’hui sous le nom de la maison brulée.

XV
Uatshisho.

Une famille canadienne et poste de pêche de la compagnie de la Baie d’Hudson.

C’était Ambroise Gaulette qui comme Tanguay et les Rochette était parti des environs de Matshiatik. Il vint habiter la Pointe en 1860 et se noya en 1864 à l’Ouest de la Romaine à l’endroit que nous nommons aujourd’hui la Pointe à Goulette. Les enfants sont restés ici.[6]

XVI
Corneille.

Une famille canadienne. Communications impossibles par terre.

C’était Johnny Garneau marié à une métisse sœur de madame Tanguay. Il se noya dans la rivière l’hiver de 1861. Peu de temps après Adolphe Dufour épouse la veuve et habita cette rivière et c’est son fils Eugène qui l’habite encore aujourd’hui où il pêche une quantité de saumon suffisante pour le faire vivre.

XVII
Pointe aux Esquimeaux.

17 familles acadiennes aux quelles je n’ai guère à reprocher que la dance et quelques uns manquent aussi à leur tempérance. Communications impossible par terre.

Naturellement je n’ai pas d’explication à donner ici.

XVIII
Mingan.

Poste sauvage, Cinq familles canadiennes bâties sur l’île en face du poste.

Elles s’étaient bâties là pour la pêche et s’y sont demeurés que ce seul été.

XIX
Longue Pointe.

1 poste de morue environ 60 hommes

C’était Hamilton

XX
Rivière St Jean.

Pendant l’été il y a une vingtaine d’ommes pour la pêche au saumon. Dune de sable jusqu’à Mingan.

De la rivière St Jean à la rivière Moisie 24 lieues. Communications impossible par terre pendant l’été. Dans ce parcours il y a cinq postes de pêche pour la morue, environ 800 hommes, il hiverne qu’un gardien par poste.

XXI

Deux familles métisses.

D’ici sur sa carte le père Babel ne donne pas le nom de l’endroit. C’est la Rivière à la truite où demeurait Mr Chisolm, un écossais marié à une sauvagesse, ainsi qu’une autre famille métisse dont je ne connais pas le nom.

XXII
Rivière Moisie.

Pendant l’été il y a environ 130 hommes pour la pêche au saumon et celle de la morue, dune de sable jusqu’au poste.[7]

XXII

Chapelle Sauvage, poste des 7 Îles[8], un poste de morue d’environ 60 hommes.

Le père Babel fait des remarques de cette nature jusqu’à l’entrée du Saguenay. Mais je n’ai pas jugé à propos de continuer plus loin quoique l’on pourait encore y trouver quantité de renseignements relatifs à ces temps là.

P Vigneau
Pointe aux Esquimeaux
15 mars 1915.
  1. Le père Babel donne les distances d'un poste à l'autre, je n'ai pas jugé utile de les mettre ici. PV
  2. Le père Babel écrit presque tous les noms avec l’orthographe montagnaise. P.V.
  3. Probablement Jean Giroux où demeure Gilbert Jones.
  4. Information ajoutée à la page 68 du carnet de Placide Vigneau de source inconnue
  5. appris plus tard, mort le 7 avril 1784. PV
  6. A. Goulette cédà la Place à F. Boulanger cette même année et fut habiter Piestebé avant de venir ici c-à-d à la Pointe.
  7. c-à-d des 7 iles
  8. En ce temps là il n’y avait aucun habitant sédentaire aux 7 Îles excepté le poste de la Cie de la Baie d’Hudson. PV