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Quand chantait la cigale/Coucher de soleil

La bibliothèque libre.
Édition Privée (p. 29).

COUCHER DE SOLEIL


Chaque soir, Dearest et moi, nous allons voir coucher le soleil au-dessus d’une ferme, loin de la route, dans la campagne verte, à moitié chemin entre notre petite maison et le village. Globe énorme et rouge, il plane un moment au-dessus de la métairie basse, à côté d’un haut peuplier, et nous offre ainsi un tableau des plus pittoresques. Un artiste n’aurait qu’à reproduire la scène sans y rien changer, pour avoir une œuvre saisissante.

À cette heure, les oiseaux font entendre leur dernier chant, tout vibrant de passion et de tristesse.

Nous avançons et nous avons l’illusion de voir le soleil se déplacer, s’éloigner. Un instant, il plane, tel un ballon de feu au-dessus d’un grand bois, près du lac. Puis, il descend et semble reposer sur le sommet des arbres. Il baisse encore, comme si son poids faisait ployer les rameaux et il s’enfonce graduellement dans le feuillage. Un moment, il n’est plus qu’une large flamme au-dessus de cette mer de verdure, une lueur rouge à la cime des chênes, au-dessus du taillis.¸

Brusquement, et sans raison, nous nous sentons tristes.

Et dans le soir qui descend, le sifflet d’un train en marche jette sur la campagne un long cri lugubre.