Répertoire national/Vol 1/La Misère du Peuple

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Collectif
Texte établi par J. Huston, Imprimerie de Lovell et Gibson (Volume 1p. 347-348).

1836.

LA MISÈRE DU PEUPLE.

    Portant le poids du jour,
Le laboureur, homme d’ouvrage,
    Affronte tour-à-tour
La chaleur, le froid et l’orage ;
Il prépare dans la saison
Des grains qu’il dépose dans l’aire :
Ainsi le peuple a sa misère,
Et la justice est sa moisson

    Quand l’ombre est encor loin,
Devant sa lampe qui scintille,
    L’artisan avec soin,
S’occupe au sein de sa famille,

Pour mériter le faible gain
Qui nourrit ses fils et leur mère :
Ainsi le peuple a sa misère,
Et dans ses maux trouve son pain.

    Peines, labeurs, efforts
Du marchand sèment la carrière ;
    Les soins minent son corps,
Et le sommeil fuit sa paupière ;
Il donne sa virilité
Pour une vieillesse prospère :
Ainsi le peuple a sa misère,
Sa richesse est sa liberté !

    Sur l’abîme des mers
Le marin brave la tempête ;
    Vents, rochers, foudre, éclairs,
Tout le poursuit, rien ne l’arrête :
Mais ses vieux ans de tant de maux
Auront le repos pour salaire :
Ainsi le peuple a sa misère,
La liberté, c’est son repos !

    Le soldat dans les camps
Se dévoue et se sacrifie ;
    Il veille ou dort aux champs ;
Combat ou meurt pour la patrie :
La gloire est le prix mérité
Du sang dont il rougit la terre :
Ainsi le peuple a sa misère,
Et sa gloire est la liberté !