Souvenirs d’outre-mer/09
LOURDES.
Laissons Paris pour Lourdes.
Traversons la France du nord au sud : nous admirons des terres fertiles, cultivées comme des jardins, divisées et subdivisées à l’infini, séparées par des haies vives, sillonnées par des routes superbes.
Sur le parcours donnons une mention spéciale à Poitiers, célèbre par la victoire de Charles Martel sur les Sarrasins ; Orléans, où s’illustra Jeanne d’Arc ; Bordeaux, célèbre par sa cathédrale, son pont sur la Garonne, ses vins généreux et son port magnifique.
Portés sur l’aile rapide de la vapeur, nous voici déjà à Lourdes comme par enchantement.
Que dire de Lourdes, la ville privilégiée, la ville de Marie ?
C’est en même temps un lien de tendre dévotion et de charmante villégiature.
C’est un nid de fauvette, délicieusement perché au milieu de la verdure, des vallons et des collines qui l’environnent.
Le Gave, roulant ses ondes torrentielles, répand une douce fraîcheur dans cette atmosphère déjà parfumée par les fleurs et les plantes odoriférantes.
La main de l’homme a su ajouter à l’œuvre de la nature :
Des routes superbes, des allées bordées de grands arbres, de charmantes promenades, des boulevards pittoresques invitent le touriste à prendre un bain de soleil, en longeant le contour de la vallée.
Vous admirez le versant des Pyrénées, où s’élèvent cà et là de nombreux couvents et monastères, où broutent de paisibles troupeaux de chèvres blanches gardés par des bergers et des bergères munis de la houlette traditionnelle, et fredonnant, comme au bon vieux temps, des chansons champêtres et légendaires.
Sur les hauteurs sud-ouest, un vieux fort construit au moyen âge nous rappelle les guerres et les incursions du temps des barbares.
Les chants mélodieux des pèlerins ont succédé aux cris de guerre, dans ces lieux privilégiés, et la Vierge immaculée y fait maintenant régner la paix et le bonheur.
Pour couronner ce panorama, voici l’église de Notre-Dame de Lourdes, l’une des plus belles du beau pays de France, majestueusement assise sur le rocher miraculeux, vers lequel depuis un demi-siècle accourent les pieux fidèles de tous les coins du globe.
Dans le flanc du rocher de Massabielle, contemplons la grotte et la statue miraculeuse, l’eau sainte coulant incessamment et puisée par des milliers de malades et d’infirmes, des couronnes de fleurs déposées par des mains pieuses, d’épaisses rangées de béquilles, bandages, appareils et autres compagnons muets, mais incontestables, de la misère humaine, laissés là en témoignage de reconnaissance pour guérisons obtenues.
Ajoutez à ce tableau la chapelle du Rosaire, la colonne et la statue de St-Michel, les calvaires érigés en plusieurs endroits, les statues de l’auguste Madone dominant et gardant comme des sentinelles le fronton des hôtels, des résidences, des jardins, les armées de pèlerins y affluant de toutes les parties du monde, ayant à leur tête des évêques, des archevêques ou des cardinaux ( on a enregistré jusqu’à 80,000 visiteurs en une semaine ), et vous aurez la douce conviction que Lourdes est une pieuse citadelle gardant la France et la chrétienté.
Il est impossible de visiter le sanctuaire de Lourdes sans être profondément impressionné.
Émile Zola, lui-même, respirant ce milieu imprégné de foi, n’a-t-il pas senti son incrédulité ébranlée et chanceler ?
Marie a fait de Lourdes son château fort, contre lequel ne pourront prévaloir les assauts de l’impiété.
La croix et la statue miraculeuse y brilleront et régneront toujours : « In hoc signo vinces ».
Je t’ai vu de mes yeux, Roc de Massabielle,
J’ai vu tes monuments, Ville sainte, immortelle ;
Tes merveilles sans nombre ont ranimé ma foi ;
Voir Lourdes et mourir ! Lourdes, je crois en toi !