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Barbeaux sur l’affiche, — ni de Célimène, une petite comédie de M. Louis Legendre, qui ouvre le spectacle et qui mériterait de le clore. Les vers de M. Legendre ont de la netteté, de la fraîcheur et de l’élégance : pour applaudir Célimène, il suffit d’avoir étudié, avec l’auteur, chez les classiques. Mais trêve de bagatelles, un autre objet nous réclame : c’est la Parisienne, de M. Becque, jouée à la Renaissance après avoir manqué d’être jouée à la Comédie-Française ; et comment ne forcerait-elle pas notre attention ?

Admirez au moins cette gageure. Au théâtre, ce qui détermine la sympathie et ce qui excite l’intérêt, c’est, d’une part, l’action morale, c’est-à-dire le duel de la volonté humaine et de la passion, — que l’une ou l’autre doive l’emporter, — et, d’autre part, les événemens. Tantôt l’action morale est toute pure : ainsi dans le Misanthrope. Tantôt les événemens sont bruts : ainsi dans un mélodrame. Ailleurs, — et c’est le cas le plus fréquent, — les deux causes d’émotion se réunissent : action morale extraordinaire, événemens extraordinaires dans le Roman d’un jeune homme pauvre ; action morale ordinaire, événemens ordinaires dans la Maison des Deux Barbeaux. M. Becque a entrepris de faire une pièce, il l’a faite, sans action morale ni événemens.

Est-ce un événement qu’une femme trompe son mari et son amant avec un troisième personnage, sans que ni l’un ni l’autre des deux premiers s’en aperçoive ? — Non, j’imagine. Si, d’ailleurs, cette femme trompe l’un et l’autre sans effort avant la trahison ni remords après, si aucun de ces trois hommes n’a de lutte à soutenir contre lui-même pour s’attacher à cette femme ou s’en détacher, l’action morale est nulle. Aussi bien, ce n’est pas seulement la volonté qui est absente d’ici, mais la passion. S’il y a eu duel entre les deux, ce duel est fini ; sur le terrain, il ne reste qu’un troisième pouvoir, qui a mis les adversaires d’accord et les a congédiés : c’est le vice.

Une étude de vice, voilà ce qu’est la comédie de M. Becque : « Entretiens familiers d’une femme, de son mari et de son amant, scènes de la vie adultère dans la bourgeoisie parisienne. » voilà, tout au long, quel en serait le titre exact. Ce groupe mis à la scène par MM. Labiche et Gondinet dans le Plus Heureux des trois, M. Becque l’y remet aujourd’hui, mais orienté autrement. De son point de vue, ce qu’il aperçoit et ce qu’il montre, ce n’est pas le contraste originel entre la condition douillette du mari et la condition épineuse de l’amant ! c’est la conformité à laquelle l’habitude réduit l’une et l’autre. Plutôt que trois individus, — le mari, la femme et l’amant, — qui peuvent se séparer encore, — puisque l’un des trois est mécontent de sa part et ne pense bientôt qu’à l’abdiquer, — c’est un organisme qu’il présente : le ménagea trois, — où deux organes parviennent à l’identité de fonctions. Il fait voir le jeu facile de cet organisme ; ainsi point de coups de théâtre. Il choisit