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Tableau de Paris/235

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CHAPITRE CCXXXV.

Répugnance pour le Mariage.


Tandis que tant de filles jouissent d’une liberté licencieuse & qui ne tourne pas même au profit de la population, que ferez-vous de ce nombre infini de filles, sous l’aile de leurs parens, austeres gardiens de leur pudicité, & qui sont condamnées par leur indigence, ou par leur sotte fierté, à passer leur vie dans le célibat ? Ne sont-elles pas incessamment sur le bord de l’abyme, & ne deviendront-elles pas tôt ou tard la proie de la mélancolie ou de la débauche ?

La beauté & la vertu n’ont parmi nous aucune valeur, si une dot ne vient à leur appui : il faut qu’il y ait un vice radical dans notre législation, puisque les hommes fuient & redoutent de signer le plus doux des contrats. Effrayé des charges qu’entraîne le titre de mari, l’homme ne veut plus payer le tribut à une patrie ingrate ou abusée.

Ou les femmes ont agi contre elles-mêmes en se livrant au luxe, ou nous ne sommes pas éloignés du dernier terme de la corruption. On ne prend plus de femmes sans dot ; les hommes ne se marient plus ou ne se marient qu’à regret. Quel renversement dans l’ordre social ! & quel est le remede à apporter à ce vice politique ?

Comment n’y auroit-il pas des célibataires dans une ville où le vice trouve tant de facilités ? & comment la dissipation de nos femmes, le mépris qu’elles font de leurs devoirs, n’épouvanteroient-ils pas les hommes sur les suites d’un nœud que l’usage tourne en ridicule, que les loix ne protegent que quand le mal est fait, & qu’il n’y a plus rien à ajouter au scandale ?

Détaillons dans les chapitres suivans ce qui fait, pour ainsi dire, du mariage un objet de dérision. Tout l’avantage est pour le vice ; & que reste-t-il à la vertu ?