Tableau de Paris/409

La bibliothèque libre.

CHAPITRE CCCCIX.

Attitude des Parisiennes.


La foiblesse sied à une femme, elle le sait : elle sent qu’elle intéressera davantage en paroissant un être délicat. Voilà pourquoi nos femmes, quoique bien portantes, apprennent à marcher nonchalamment, à grasseyer, à faire la malade, à se plaindre de leurs nerfs. La nature leur inspire l’art de paroître éloignées du sentiment de la force. Et pourquoi la rougeur plaît-elle ? C’est qu’elle paroît l’aveu tacite de quelqu’imperfection, d’un défaut de force & de courage, & qu’elle flatte l’amour-propre de celui qui est témoin de cette modestie. Une belle femme est toujours touchante, mais dans l’infortune & noyée dans les larmes, elle excite un interêt qui va jusqu’à fléchir l’avare & désarmer le tyran. Pourquoi ? C’est que la foiblesse est à son dernier période, & l’on n’a alors que le parti d’être généreux.

Nos femmes ont voulu du tems de Tronchin se donner quelqu’exercice, monter à cheval. Un seul accident a suffi pour les replonger dans leur état favori, l’inaction. Mais c’est au bal qu’elles reprennent des forces presqu’incroyables ; là elles sont des héroïnes, ainsi qu’aux tables de jeu, où elles veillent tandis que les hommes tombent de lassitude & demandent quartier.