Tableau du royaume de Caboul et de ses dépendances dans la Perse, la Tartarie et l’Inde/Tome 3/Sistaun

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SISTAUN.

Il n’est point de pays qui ait plus d’intérêt pour les amateurs de la poésie persane, mais il en est peu qui remplissent moins l’attente du voyageur. Ce n’est pas que l’on doive s’en prendre à l’exagération des poëtes ; les ruines dont cette province est parsemée attestent que ce fut un pays fertile, et rempli des cités les plus florissantes.

Excepté vers le nord où le Sistaun touche le pays des Douraunées, il est entouré de vastes et d’affreuses solitudes. Quelque vent qu’il fasse, on voit se lever des nuages de poussière, qui détruisent la fertilité des campagnes, et rendent peu à peu les villages déserts. La seule partie fertile est sur les bords de l’Helmund et du Furra-Roud dont le lac est formé par la jonction de ces deux rivières. Ce lac fameux est appelé mer de Dourra, ou de Zereng, par nos géographes. Les relations les plus vraisemblables en évaluent le circuit à cinquante lieues. L’eau n’est point salée, mais saumâtre et désagréable à boire. Au centre est une île ou montagne isolée, appelée Copi-Zour, ou Montagne de la Force, ou quelque fois Fort de Roustan. Les bords du lac sont remplis de marais où paissent des troupeaux de bœufs. Les conducteurs de ces animaux sont une race d’hommes différente des autres habitans du Sistaun. Ils sont grands et robustes, mais d’une laideur révoltante ; ils vont presque nus, et habitent des cabanes de joncs. Outre leurs occupations comme bergers, ils vivent de la pêche, et chassent les canards sauvages sur des radeaux.

Les habitans originaires du Sistaun sont les Taujiks ; mais d’autres tribus s’y sont mêlées.

Les Beloches, leurs voisins, ont des mœurs à peu près semblables. Ce sont des Afghans barbares et dépourvus des lumières de la civilisation ; mais ils sont laborieux, honnêtes et pénétrés des devoirs de l’hospitalité.