Théorie de l’écoulement tourbillonnant et tumultueux des liquides dans les lits rectilignes à grande section/Tome 1/IX

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§ IX. — Du régime uniforme, quand la largeur et la profondeur sont insuffisantes pour que l’agitation masque entièrement l’effet des frottements réguliers.


» 35. Nous avons admis jusqu’ici, dans le fluide, une ampleur et une agitation tourbillonnaire suffisantes pour que la partie tant du frottement extérieur que du coefficient des frottements intérieurs, due à cette agitation, excède dans une forte proportion celle qui subsisterait seule avec des mouvements bien continus, où les vitesses moyennes locales sciaient du même ordre. C’est un cas extrême ou limite, relativement simple, opposé au cas plus simple encore de mouvements bien continus, accessible théoriquement depuis Navier et expérimentalement résolu par Poiseuille. Il y a lieu de supposer que, dans le cas intermédiaire, moins abordable, mais très usuel, de rayons moyens ou de vitesses moyennes assez faibles pour que l’agitation masque en majeure partie les effets du frottement régulier sans les annihiler, les lois de l’écoulement s’écartent un peu des précédentes, dans le sens indiqué par celles de Poiseuille.

» C’est surtout la vitesse moyenne dont se déduit le débit, qui offre de l’intérêt. Or, d’après la formule (33) qui la donne, le produit de la pente motrice par le rayon moyen et par l’inverse du carré de la vitesse est constant, tandis que les lois de Poiseuille font ce même produit, lorsqu’on en élimine la pente réciproquement proportionnel (pour chaque forme de section) au rayon moyen et à la vitesse Donc, dans le cas intermédiaire considéré ici, croîtra avec les inverses de ces deux quantités ; et, s’ils sont assez petits, son développement par la formule de Mac-Laurin, réduit à la partie linéaire, sera, en appelant ce qui reste de quand ils s’annulent, et deux coefficients positifs,

(36) ou


» 36. Les hydrauliciens, jugeant sans doute le trinôme trop complexe dans cette formule, ont supprimé l’un des deux derniers termes. C’est le dernier, en qu’ils avaient conservé d’abord ; mais Darcy et M. Bazin ont reconnu que l’approximation était bien meilleure en gardant, au contraire, le précédent, et ils ont posé mais croissants avec le degré de rugosité des parois. Par exemple, la seconde et le mètre étant les unités de temps et de longueur, Darcy trouve dans le cas de tuyaux circulaires en fer étiré ou en fonte lisse, et M. Bazin, pour les canaux à parois très unies, mais pour les canaux en terre et les grands cours d’eau[1].

  1. Raison probable pour laquelle le coefficient de la formule du régime uniforme dépend alors beaucoup plus du rayon moyen que de la vitesse moyenne, à moins que le rayon moyen ne devienne extrêmement petit.   Il est naturel que chaque degré de rugosité de la paroi exige une certaine ampleur de section, une certaine grandeur minima du rayon moyen en rapport avec ce degré, pour que le coefficient du frottement extérieur se réduise à la valeur constante figurant dans notre formule (14). Au-dessous du rayon moyen minimum dont il s’agit, si l’écoulement reste néanmoins assez rapide par l’effet d’une pente motrice convenable, le courant, manquant en quelque sorte de place pour son passage, doit laisser moins de fluide mort entre les aspérités de son lit, les contourner ainsi plus profondément ou plus complètement, et y produire des chocs plus forts, à égalité de la vitesse de translation. De là, sans doute, dans l’expression du coefficient de frottement extérieur et, par suite, d’après la première formule (32), dans le numérateur du coefficient usuel l’augmentation qu’exprime proportionnellement le second terme du facteur