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(Volume IVp. 743-744-1107-1108).

même celles que son ordre lui offrait. Parmi ses nombreux ouvrages, nous devons signaler ici : 1° Expositio m Libros Judicum, in-8°, Venise, 1589 ; 2° In Cantica, Florence, 1599 ; 3° In Ruth, Florence, 1586 ; 4° InDanielem, in-8°, Venise 1588 ; 5° In Habacuc, Florence, 1584 ; 6° In Jonam, Camerini, 1581 ; 7° Super cantica Zachariœ et B. M. V., Florence, 1599 ; 8° In Tobiam, Rome, 1587. P. Apollinaire.

MARCHALIANUS (CODEX).

Histoire.

Ce célèbre codex a été écrit en Egypte, où il resta au moins jusqu’au IXe siècle, comme le montrent les corrections dues à des mains égyptiennes. Avant le XII" siècle il passa dans l’Italie méridionale et fut transporté de là, on ne sait par qui ni à quelle époque, à l’abbaye de Saint-Denis. Au xvi » siècle il devint la propriété de René Marchai dont il a gardé le nom. Le cardinal de la Rochefoucauld, qui le possédait vers 1636, l’offrit aux jésuites du collège de Clermont. En 1785, après la suppression de l’ordre des jésuites, le codex fut vendu à la Bibliothèque vaticane pour une somme de 300 écus romains. Il y porte maintenant le numéro 2125 du fonds grec.

Description, contenu.

Le Marchalianus renferme 416 feuillets de parchemin assez mince, fripé par l’usage, arrangés en cahiers de cinq doubles feuillets, soit vingt pages. Le dernier cahier, chose rare, a même vingt-quatre pages. Les douze premiers feuillets, contenant des extraits des Pères, n’appartenaient pas an manuscrit primitif, bien qu’ils soient d’une écriture sensiblement contemporaine. Les pages, qui mesurent 295 millimètres de haut sur 180 de large, sont à une seule colonne de 29 lignes. Les esprits et les accents ne semblent pas être de la première main. De grandes lettres en vedette indiquent le commencement des paragraphes. L’écriture est belle, mais présente quelques caractères singuliers. Le ç et le <i sont énormes ; le p a la boucle comprimée et la barre très allongée ; les lettres e, 8, o, ç sont d’un ovale aplati ; la barre transversale du 6 dépasse de beaucoup la périphérie du rond ; le ô et Va méritent aussi attention.

Les leçons et les signes diacritiques qui couvrent maintenant les marges ont été ajoutés après coup. Les signes employés sont l’astérisque et l’obèle (avec le métobèle correspondant). Les siglessonta’(Aquila), a’(Symmaque) 6’(Théodotion), oî y’ou simplement y’(tous les trois), iravtsç ou x’(tous), enfin o ! Xotxot (les autres). Il y a eu de nombreux correcteurs à diverses époques.

Le codex renferme les grands et les petits Prophètes selon l’ordre adopté par le Vaticanus : Osée, Amos, Michée, Joël, Abdias, Jonas, Nahum, Habacuc, Sophonie, Aggée, Zacharie, Malachie, Isaïe, Jérémie — avec Baruch, les Lamentations et PÉpitre — Ézéchiel, Daniel selon Théodotion, avec l’épisode de Suzanne et l’histoire de Bel. — Il est désigné en critique par la lettre M.

Age, caractère, valeur critique.

Montfaucon, Palseographia grseca, Paris, 1708, p. 225, regardant las accents et les esprits comme de la première main, date le manuscrit du vme siècle. Tischendorf, Monumenta sacra, t. iv, p. xx, ayant prouvé que les accents et les esprits ont été ajoutés après coup, se prononce pour le vil « ou le vi c siècle. Pitra, Analecta særa, t. iii, p. 554, 561, incline davantage pour la date la plus ancienne^ Enfin Ceriani, Commentatio critica, p. 36-41, opine sans hésiter en faveur du vie siècle. Il prouve que les caractères paléographiques ne s’y opposent pas. Le codex étant d’origine égyptienne, il faut le comparer non pas avec les manuscrits européens ou asiatiques de la même époque, mais avec les papyrus ou les manuscrits coptes contemporains. On se convaincra par cette comparaison que rien n’oblige à le faire descendre au-dessous du VIe siècle.

— M » r Ceriani a comparé quelques passages choisis du codex, Is., ix, 1-10 ; xliv, 7-21 ; Jer., xxv, 11-13 ; xxxii, 15-18, etc., avec les grands codex ( Vaticanus, Sinaiticus, .Alexandrinus’), la reccnsion de Lucien, le texte hexa plaire, la version copte-memphitique, les citations de saint Cyrille d’Alexandrie. Commentatio, p. 48-106. Il conclut de cette comparaison, p. 106, que le Marchalianus contient une recension différente de celle des Hexaples et de celle de Lucien et représente, en somme, la recension d’Hésychius.

Le codex porte, avant Isaïe et avant Ézéchiel, deux notes très intéressantes publiées depuis longtemps par Cozza, Field et Pitra, et qu’on trouvera dans Swete, The Old Testament in Greek, t. iii, p. viii-ix. Ces notes sont empruntées à un codex purement hexaplaire ; elles ne conviennent pas au texte du Marchalianus où les variantes hexaplaires sont reléguées à la marge. Lés astérisques du codex, suivant Ceriani, au moins ceux qui viennent de la première main, ne répondent pas au système d’Origène, mais à celui d’Hésychius.

Cet ensemble de caractères suffit à faire comprendre l’importance vraiment exceptionnelle du Marchalianus et justifie la. splendeur avec laquelle il a été édité.

La superbe photolypie publiée par les soins de Mo" 1 Cozza-Luzi, Prophetarum codex grœcus Vat. 2125, vetustate, varietate lectionum, notalionibus unicus leque et insignis phototypice editus, Rome, 1890, et l’Introduction composée avec tant de conscience et d’érudition par Ms r Ceriani, De codice Marchaliano Prophetarum Commentatio critica, Rome, 1890, rendent superflues toutes les études antérieures. F. Pbat.

    1. MARCHAND##²

MARCHAND (hébreu : rokêl, et au féminin : rokélé} ; sehoràh, terme collectif pour désigner un ensemble de marchands ; kena’ânî, « chananéen, » parce que les Chananéens et spécialement les Phéniciens faisaient beaucoup de commerce ; Septante : s(i.7copoç, ^avavatos, eotvixo ; , jtw).ûv ; Vulgate : mercator, negotiator, venditor, chananeus, vendens), celui qui fait profession d’acheter, de vendre ou d’échanger en vue d’un bénéfice. Voir t. ii, fig. 512, col. 1555. Sur le trafic des anciens et sur la manière dont il s’opérait, voir Commerce, t. ii, col. 878-890 ; Échange en nature, t. ii, col. 1557 ; Marché.

Dans les plus anciens temps, il n’est question que des marchands madianites qui achètent Joseph à ses frères. Gen., xxxvii, 28. Quand les Hébreux s’établirent en Palestine, chaque famille continua longtemps à se suffire à elle-même. Sans qu’il y eût de marchands proprement dits, on se procurait les objets indispensable auprès des artisans qui les fabriquaient. La Loi prescrivait, en vue de ces échanges ou de ces achats, la justesse et la loyauté des poids et des mesures. Lev., xix, 35, 36 ; Deut., xxv, 13-15, Les marchands phéniciens apparaissent les premiers en Palestine. Ce sont des colporteurs qui vendent et qui achètent. Dans le livre de Job, XL, 25, il est question de Chananéens pouvant acheter et revendre de gros animaux, et c’est encore à un Chananéen que la femme forte des Proverbes, xxxi, 24, vend les ceintures qu’elle a brodées et les étoffes qu’elle a tissées. Sous Salomon, le trafic se développant dans tout le royaume, le prince peut tirer beaucoup d’or de tous les marchands et négociants qui avaient des relations commerciales avec les Hébreux. III Reg., x, 15 ; II Par., IX, 14. Lui-même avait des marchands qui faisaient le commerce des chevaux avec l’Egypte. II Par., i, 16. Les colporteurs d’Arabie vendaient des aromates. Cant., iii, 6. Les marchands de blé étaient parfois tentés d’accaparer le grain afin de le vendre plus cher à la faveur d’une rareté factice. Prov., xi, 26. Les prophètes, Isaïe, xxiii, 2, 8, et surtout Ézéchiel, xvii, 4, xxvii, 13-23 ; xxxviii, 13, parlent des marchands étrangers, spécialement de ceux qui font grande fortune à Tyr et à Sidon. Baruch, iii, 23, mentionne les colporteurs arabes. En Palestine, le vendeur et l’acheteur seront enveloppés dans la même catastrophe, quand s’exercera la justice divine. Is., xxiy, 2 ; Ezech., vii, 12, 13 ; Soph., i, 11. Zacharie, xiv, 21, dit que dans le Temple restauré, il n’y auraplusdechananéen, fena’âm, xavavaïo ; ? mercator. Le

chananéen peut désigner ici le profane, l’étranger, l’incirconcis, et la pensée de Zacharie reviendrait à celle d’Ezéchiel, xliv, 9. Mais, comme dans les versets qui précèdent, il est question des dons volontaires qui afflueront de toutes parts dans le Temple, il est probable que le nom de chananéen désigne le marchand, comme dans Osée, xii, 8. On n’aura pas besoin de recourir aux marchands pour se procurer les chaudières et les ustensiles nécessaires au culte. Après le retour de la captivité, les marchands de Jérusalem se chargent de la construction d’une partie des murs. II Esd., iii, 30, 31. Plus tard, des marchands tyriens s’établissent dans la ville et y vendent du poisson et des denrées, même le jour du sabbat. Néhémiemet ordre à cet abus. II Esd., xiii, 1621. Le fils de Sirach remarque qu’au marchand il faut parler commerce, Eccli., xxxvii, 12, et il déplore la mauvaise foi avec laquelle on achète ou l’on vend. Ëccli., xlii, 5. Sous les Machabées, les marchands accourent en Palestine, dans le camp des Syriens, pour acheter les Juifs dont l’armée du roi de Syrie escomptait déjà la capture. I Mach., iii, 41 ; Jonathas entoure la citadelle de Jérusalem, occupée par les Syriens, afin que ceux-ci ne puissent plus rien acheter ni vendre. I Mach., xii, 36 ; xiii, 49. — Dans le Nouveau Testament, il est question de marchands de perles, Matth., xm, 45, et de marchands d’huile. Matth., xxv, 9. Par deux fois, Notre-Seigneur chasse du Temple les marchands d’animaux destinés aux sacrifices, qui se sont établis jusqu’à l’intérieur de la première enceinte. Il les accuse de faire du Temple une caverne de voleurs, d’où il suit qu’au sacrilège ces marchands ajoutaient l’improbité. Joa., ii, 14 ; Matth., xxi, 12 ; Marc, xi, 15 ; Luc, xix, 45. Saint Jean dit que la Bête empêchera l ceux qui ne portent pas son signe de vendre et d’acheter. Apoc, xiii, 16, 17. Il parle des marchands qui trafiquent avec la grande Babylone, Apoc, xviir, 3-23, dans des termes analogues à ceux qu’a employés Ezéchiel, xxvii, 13-23, à propos des marchands de Tyr.

H. Lesêtre.
    1. MARCHANDISES##

MARCHANDISES (hébreu : ’ma’ârâb, maqqâhfit ; Septante : è[utop(a, o-i(j.| « xxov, « mélange d’objets, » upSai ; , « vente ; s Vulgate : niera, negotiatio, venalia), objets sur esquels s’exerce le commerce, soit pour l’échange en nature, soit pour la vente contre, de la monnaie. Voir Commerce, t. ii, col. 879-889 ; Échange en nature, t. n, col. 1557 ; Foire, t. ii, col. 2298 ; Marchand, Marché.

— Voici l’énumération des principales choses mentionnées dans la Bible comme objets de commerce ou marchandises, les immeubles mis à part. Voir t. ii, col. 879-887.

1° Esclaves. — lo., iii, 5-8 ; Am., i, 9 ; Ezech., xxvii, 13, etc. Voir t. ii, col. 1921-1926.

2° Animaux. —Pour les sacrifices, Lev., v, 15 ; I Esd., vu, 17 ; Bar., i, 10 ; Joa., ii, 14 ; Matth., xxi, 12 ; Marc, xi, 15, etc., ou pour les usages ordinaires de la vie, Exod., xxi, 35 ; Job, xl, 25 ; II Reg., xii, 3 ; III Reg., x, 22 ; Is., lx, 7 ; Ezech., xxvii, 21 ; Luc, xiv, 19, etc., — chevaux, III Reg., x, 28-29 ; Ezech., xxvii, 14. Voir t. ii, col. 677.

3° Aliments. — Blé, Gen., xli, 57 ; xlii, 5 ; Ezech., xxvii, 17, etc. ; — pain, Marc, vi, 37 ; Joa., vi, 5 ; — viii, Ezech., xxvii, 18 ; — huile, IV Reg., IV, 7 ; Ezech., xxvii, 17 ; Matth., xxv, 9, 10 ; — miei, Ezech., xxvii, 17 ; — vivres en général, Deut., vi, 28 ; xiv, 26 ; IV Reg., VI, 25 ; Matth., xtv, 15 ; Marc, VI, 36 ; Luc, IX, 13 ; Joa., iv, 8 ; xiii, 29.

4° Étoffes. — Lin, Ezech., xxvii, 7 ; Marc, xv, 46 ; — byssus, Ezech., xxvii, 16 ; — laine, Ezech., xxvii, 18 ; ceintures, Prov., xxxi, 24 ; — manteaux et broderies, Ezech., xxvii, 24 ; — couvertures, Ezech., xxvii, 20 ; — tapi*, Prov., vii, 16 ; Ezech., xxvii, 20 ; xxviii, 13 ; — pourpre, Ezech., xxvii, 16.

5° Métaux. — Voir Argent, ! . i, col. 945 ; Bronze, t. i, col. 1943 ; Cuivre, t. ii, col. 1155 ; Fee, t. ii, col. 2205 ; Or ; Métaux.

6° Matières précieuses. — Pierres, Ezech., xxvii, 16, 22 ; Apoc, xviii, 12 ; — perles, Matth., xiii, 46 ; — ivoire, Ezech., xxvii, 15 ; — ébène, Ezech., xxvii, 15.

7° Parfums. — Gen., xxxvii, 25-28 ; Cant., iii, 6 ; Ps. Lxxll (lxxi), 10 ; Is., xlui, 24 ; lx, 6 ; Ezech., xxvii, 17, 19, 22 ; Matth., xxv, 9 ; Marc, xiv, 5 ; xvi, 1, etc. Voir Baume, t. i, col. 1517 ; Encens, t. ii, col. 1770 ; Parfums.

8° Objets ouvrés. — Armes, Luc, xxii, 36 ; — idoles, Bar., vi, 24 ; etc. Voir Meurles, et les différents mois cités dans l’énumération qui précède.

H. Lesêtre.
    1. MARCHÉ##

MARCHÉ (hébreu : ’izzabôn, ma’ârâb, markolêf ; Septante. àyopâ, aû|iu.niTov ; Vulgate : forum, nundinæ, mercatus), le lieu où l’on rassemble les marchandises pour en trafiquer par échange ou par ventes (fig. 215). — Chez les Égyptiens, les fêtes fréquentes qui se célébraient autour des différents temples étaient des occasions naturelles de foires ou de marchés périodiques, auxquels on se rendait en foule. Cf. Maspero, Histoire ancienne des peuples de l’Orient classique, t. i, 1895, col. 323-327. La figure 512 du t. ii, col. 1557, représente quelques-unes des scènes de ces marchés. Voir fig. 216 une vue d’un bazar du Caire. Les Ismaélites qui achetèrent le jeune Joseph, se rendaient aux marchés d’Egypte pour y vendre des parfums, Gen., xxxvii, 25, et plus tard Joseph lui-même établit dans le pays, pour la vente du blé aux Égyptiens et aux étrangers, des marchés qui étaient de grands entrepôts. Gen., xli, 57. Pendant leur séjour dans la terre de Gessen, les Hébreux eurent souvent l’occasion d’aller aux marchés du voisinage. Ceux-ci se tenaient naturellement sur les places des villes ou dans les terrains libres, qui entouraient les temples ou les villages. — Après leur établissement en Palestine, les Israélites furent amenés par la force des choses à pratiquer ce qui se faisait ailleurs. Les trois grandes fêtes, particulièrement celle de la Pâque, les attiraient en foule à Jérusalem, d’où la nécessité d’établir en ces occasions de nombreux marchés sur les places de la capitale et aux alentours. Cf. Munk, Palestine, 1881, p. 395. Les autres villes importantes avaient aussi les leurs, soit fixes, soit périodiques. À la suite d’une guerre, le roi de Syrie, Bénadad, dit au roi d’Israël, Achab : « Tu établiras pour toi des, rues à Damas, comme mon père en avait établi à Samarie. t> III Reg., xx, 34. Cette concession portait sur les constructions qui bordaient certaines rues, et ces constructions n’étaient autres que des bazars destinés à la vente des produits étrangers. Il y avait donc des bazars syriens à Samarie et des bazars Israélites à Damas. Certaines rues et certaines places étaient affectées à des commerces particuliers. Telles furent, sans doute, la rue des boulangers, Jer., xxxvii, 21, et la porte des poissons, Soph., i, 10, à Jérusalem. Après la captivité, il y avait dans la capitale des marchés que des Israélites approvisionnaient et d’autres qui étaient tenus par des Tyriens en résidence dans la ville. II Esd., xiii, 15, 16, 20. Amos, viii, 4-6, fait la description des fraudes qui se pratiquaient sur les marchés de son temps, fin Psalmiste dit également, sans doute à propos des marchés de Jérusalem : « La fraude et la tromperie ne quittent pas ses places. » Ps. lv (liv), 12. Josèphe, Dell, jud., V, viii, 1, signale, à l’intérieur des murs du quartier neuf de Jérusalem, des marchés où se vendaient la laine, les ustensiles de métal et les habits. — Ézochiel, xxvii, 3-34, dans le tableau qu’il trace de l’immense trafic de Tyr, parle de ses marchés. C’est seulement dans ce chapitre que se lisent les trois mots hébreux auxquels on donne le sens de « marché » : markolêf, jꝟ. 24, qui a indubitablement cette signification, Hzzâbon, Ae’dzab, « céder une chose, » et ma^ârdb, de’ârab, « échanger. » Ce dernier mot, auquel Gesenius, Thésaurus, p. 1064, attribue quelquefois le sens de « marché », signifie plutôt oc marchandise », [Image à insérer]

Ezech., xx’ii, 9, 13, 11, 19, 25, 27, 33. Le mot 'izzdbên, Ezech., xxvii, 12, 14, 16, 19, 22, 27, 33, est traduit par aYopâ, « place publique » et « marché », et par <j15(t[tixtov, « assemblage, » dans les Septante, par nundinm, « marché, » forum, « place publique » et « marché », et mercatus, « marché, » dans la Vulgate. Ce sens est donc à conserver. Cf. Buhl, Gesenius' Handwôrterbuch, Leipzig, 1899, p. 470, 509. — À Jérusalem, au temps de

16. — Boutique de parfums et de lanternes, dans le bazar du Caire.

D’après W. Lane, Manners

and Customs of the modem Egyptians, 1836, t. a, p. il.

Notre-Seigneur, les marchands qui vendaient les victimes et les changeurs s'étaient établis, avec la connivence des grands-prêtres, à l’intérieur même du parvis des gentils, faisant ainsi de la « maison de prière » un marché et une « caverne de voleurs ». Par deux fois, NotreSeignour les en chassa. Joa., H, 14-16 ; Malth., xxi, 12, 13. Voir Commerce, t. ii, col. 887-889 ; Foire, t. ii, col. 2298. Sur les mots àfopa, forum, employés dans le sens de « marché », Marc, vii, 4, voir Agora, t. i,

col. 275 ; Forum, t. ii, col. 2328.
H. Lesêtre.
    1. MARCHESCHVAN##

MARCHESCHVAN, huitième mois de l’année juive dans le calendrier emprunté par les Hébreux aux Babyloniens pendant la captivité. Il répond au mois phénicien de Bûl. Voir Bul, t. i, col. 1071. fTtfmD n’est que

la transcription hébraïque du mot assyrien ara)}, Samnu, « mois huitième » par lequel les Assyriens eux-mêmes désignaient ce mois. Il y avait une grande affinité de prononciation en assyrien et surtout en babylonien

entre le J et le D qui permutaient souvent dans l'écriture. Voilà pourquoi le J de ira, racine de arhu, « mois, » a été rendu en hébreu par D, tandis que le o de jdtt, racine de samnu, « huitième, » a été rendu par f comme kislimu par kislev, etc. — Le nom de marcheschvan n’est pas employé dans la Bible ; pour désigner ce mois elle se ser^ du nom de Bûl ou de l’expression hôdes haS&emînî qui signifie également « le mois huitième », III Reg., vt, 38, mais qui n’a pas comme marcheschvan la valeur d’un nom propre. On trouve le mot

marcheschvan en caractères hébraïques, fiimic (me rahsevan), dans un document araméen de 66-70 de notre ère, Roll of Fasts, dans G. Dalman, À ram. Dialectproben, 1896, n. 2 et p. 32 ; plus tard dans Josèphe, Ant. jud., i, iii, 3, sous la forme Mapa-ouivvjç, et dans le Talmud, par exemple Rosch hasch. ll b. Cf. Muss-Arnolt, The names of the assyrbbabylonian Months, dans le Journal of biblical Literature, xi « année, p. 160-176 ; Levy, Neuhebraïsches und Chaldâisches Wôrterbuch ùber die Talmudim, Leipzig, 1876 ; Levy, Chaldâisches Wôrterbuch ùber die Targumim, Leipzig, 1867.

F. Martin.

    1. MARCIANUS##

MARCIANUS (CODEX). Ce manuscrit grec oncial des quatre Évangiles, autrefois appelé Nanianus, du nom d’un précédent propriétaire, cf. Mingerelli, Grseci codices manuscripti apud Nanios asservati, Bologne, 1784, p. 1, appartient maintenant à la bibliothèque Saint-Marc de Venise, où il est coté I, VIII. Le scribe, qui vivait au ix « ou au xe siècle, bien qu’il affecte une écriture plus archaïque et cherche à éviter le style penché de l'époque, se trahit par une imitation assez, maladroite et par certaines lettres comme A, K, qui ont tous les caractères de la décadence. Mûnter copia des. extraits de ce codex pour Birch, Scholz le parcourut, Tischendorf en 1843, et Tregelles en 1846 le collationnèrent. Il est désigné en critique par la lettre U. Von Soden l’appellee 90. D’après Gregory, Textkrilik, 1900, p. 76, le texte serait syrien. Scrivener, Introduction^ 4e édit., 1894, en donne un fac-similé, planche ix, n » 22.

F. Prat.

    1. MARCKIUS##

MARCKIUS, DE MARK Jean, érudit calviniste, né à Sneck dans la Frise, le 10 janvier 1656, mort à Leyde, le 30 janvier 1731. Il étudia à l’université de Franèker, puis à celle de Leyde où il termina son coursde théologie. En 1675, il devint ministre de Midlum, près de Harlingue. Le 28 juin de l’année suivante, il se faisait recevoir docteur en théologie à Franèker et y obtenait une chaire. Après avoir enseigné quelque temps* dans cette université, puis à GroniDgue, il alla à Leyde en 1689, où il professa la théologie et l’histoire ecclésiastique. Parmi ses écrits, on remarque : Analysis exegetica capitis lui Jesaise in qua complura vaticinia d(r Messia illustrantur : accedit mantissa observationumtextualium, in-12, Groningue, 1687 ; Commentarius in Apocalypsim S. Joannis, seu analysis exegetica, in-4°, Amsterdam, 1689 ; Textuales exercitationes ad l, selecta loca Veteris et Novi Testamenti… Accedit Dissertatio de débita Sacrarum Scripturarum veneratione, in-4°, Amsterdam, 1694 ; InHoseam commentarius, seu analysis exegetica qua hebreus textus cum versionibusconfertur, vocum et phrasiwn vis indigatur, rerum nexus monstratur et in sensum genuinum cum examine variarum interpretationum inquiritur. Diatribe annexa est singularis de accipienda uxore et lïberis fornicationum, in-4°, Amsterdam, 1696 ; Exercitationes : exegeticse ad L selecta loca Veteris et Novi Testamenti f in-4°, Amsterdam, 1697, ouvrage différent de celui paru en 1694 ; Commentarius, seu analysis exegetica in pro~ phetas Joelem, Hamosium, Hobhadiam, et Jonam, in-4°>, Amsterdam, 1698 ; Commentarius seu analysis exegetica in prophetas Micham, Nahumum, Habhakkukum, et Tsephaniam, in-4°, Amsterdam, 1700 ; Commentarius

seu analyste exegetica in prophetas Haggxum, Zachariam et Malachiani, 2 in-4°, Amsterdam, 1700 ; Commentarius seu analyste exegetica in Canticum Shelomonis ; annexæstetiamanalysisexegeticaPsalmiXLV> in-4°, Amsterdam, 1703 ; Htetoria Paradisi illustrata librte quatuor, quibus non tantutn loci istius plenior descriptio exhibetur, sed et hominte integritas, lapsus ac prima restitutio declarantur secundum Genesios capita H et iii, in-4°, Amsterdam, 1705 ; Exercitationes Biblicse ad l loca Veteris et Novi Testamenti, 2 in-4°, Amsterdam, 1706-1707 ; Scripturarise exercitationes ad xxv selecta loca Veterte Testamenti, in-4°, Amsterdam, 1709 ; Scripturarise exercitationes ad xxv selecta loca Novi Testamenti, in-4°, Amsterdam, 1710 ; In prsecipuas quasdam partes Pentateuchi commentarius, in-4°, Leyde, 1713 ; Fasciculus dissertationum philologico-exegeticarum ad seleclos textus Veteris Testamenti, 2 in-4°, Leyde, 1725 et 1727. — Voir Wessel, Oratio funebris in obitum J. Marchii, in-4°, Leyde, 1731 ; Paquot, Mémoires pour servir à Vhist. littéraire

des Pays-Bas, t. ii, p. 339.
B. Heurtebize.
    1. MARDOCHAI##

MARDOCHAI (hébreu : Mordekai ; Septante : Map60-/ « ! o ; ), Israélite captif à Babylone qui revint en Palestine avec Zorobabel. I Esd., ii, 2. Son nom est en hébreu le même que celui de Mardochée, l’oncle d’Esther.

1. MARDOCHÉE (hébreu : Mordekai : Septante : MapSoxaïo ;  ; Vulgate : Mardocheeus), cousin (oncle, d’après la Vulgate) et tuteur d’Esther. Esth., ii, 7. Son nom n’est pas hébreu. Comme le nom babylonien Mardukêa, il paraît dérivé de Marduk, le dieu de Babylone. Voir Mérodach. Mardochée appartenait à la tribu de Benjamin. Esth., ii, 5. Josèphe, Ant. jud., XI, vi, 2, dit qu’il était un des princes de la nation. Il avait fait partie de la même déportation que le roi Jéchonias, au temps de Nabuchodonosor, ce qui signifie que la présence de sa famille en pays étranger remontait à cette époque ; car Jéchonias avait été déporté en 596, et les événements auxquels fut mêlé Mardochée se passaient vers 478, par conséquent 120 ans après. Voir Assiiérus, t. i, col. 1143 ; Esther, t. ii, col. 1973. Il habitait à Suse, capitale de l’empire des Perses. Il avait une cousine, nommée Edissa ou Esther. Celle-ci étant devenue orpheline, il s’en fit le tuteur. C’est donc sur son ordre ou au moins avec son consentement qu’Esther se présenta à l’eunuque Egée, chargé de recruter des jeunes filles pour le harem de Xerxés. C’est lui encore qui lui défendit de parler de sa nation et de sa patrie. Chaque jour, Mardochée se promenait devant la cour de la maison des femmes, pour veiller sur le sort d’Esther et savoir ce qui lui arriverait. Esth., ri, 5-11.

Quand Esther eut été accueillie favorablement par Xerxés et élevée à la dignité de reine, Mardochée continua à se tenir aussi près d’elle que possible, « à la porte du roi, » c’est-à-dire à la porte extérieure du palais, au pied du donjon (voir le plan du palais, t. ii, fig. 607, col. 1974), et il trouvait le moyen de communiquer avec elle, par l’intermédiaire des eunuques ou des servantes. Pendant qu’il se tenait à cette porte, deux eunuques, Bagathan et Tharès, qui étaient préposés à sa garde et que le grec appelle àpxKrcaiiaToçiXçxèç, officiers gardes du corps, formèrent le complot de mettre le roi à mort. Mardochée surprit leur secret, ce qu’il put parfaitement faire sans l’intermédiaire de l’esclave Barnabaze, que Josèphe, Ant. jud., XI, vi, 4, introduit ici, on ignore d’après quelle donnée. Il le fit connaître à Esther, et celle-ci en informa le roi, de la part de Mardochée. Après enquête, les deux coupables furent pendus, et le fait consigné dans les annales royales. Esth., II, 20-23.

Cependant Xerxés prit pour premier ministre Aman, originaire d’Agag, en Médie. Voir Ac AGITE, 1. 1, col. 260 ;

Aman, t. i, col. 433. Sur l’ordre du roi, les serviteurs qui se tenaient à la porte du palais devaient fléchir le genou devant lui et l’adorer, c’est-à-dire porter le front jusqu'à terre. Voir Adoration ; t. i, col. 234. Hérodote, vil, 136, raconte que les ambassadeurs lacédémoniéns, venus à Suse, se refusèrent à rendre pareil honneur à Xerxés lui-même, en alléguant qu’ils n’adoraient pas un homme. Mardochée fit comme eux, et bien qu’il se tint habituellement à la porte du palais et qu’on le connût comme Juif, il persista à rester debout au passage d’Aman. Celui-ci finit par en être informé. Sa colère s'étendit à toute la race juive, à laquelle appartenait celui qu’il regardait comme son insulteur, et il obtint du roi un décret ordonnant qu'à un jour donné tous les Juifs de l’empire fussent exterminés et leurs biens pillés. Esth., iii, 1-15.

A cette nouvelle, Mardochée prit des vêtements de deuil, fit éclater sa douleur sur la place de la ville et, en poussant des gémissements, vint jusqu’aux portes du palais, mais sans entrer dans la cour, ce qui ne lui était pas permis avec son costume de deuil. Les suivantes et les eunuques d’Esther, habitués à voir Mardochée, apprirent à la reine en quel état ils l’avaient aperçu. Celle-ci lui envoya aussitôt un vêtement, sans doute pour qu’il pût pénétrer dans la cour du palais et arriver plus près d’elle, personne du reste n'étant autorisé à entrer dans le harem. Mardochée ayant refusé le vêtement, Esther envoya près de lui son eunuque particulier, Athach, pour en savoir la cause. Mardochée révéla alors à celui-ci le projet d’Aman, lui remit pour la reine une copie du décret royal déjà affiché à Suse et lui dit de recommander à Esther d’intervenir auprès du roi en faveur de son peuple. Celle-ci fit répondre que, d’après la loi bien connue du pays, elle ne pouvait se présenter devant le roi sans être appelée, sous peine de mort immédiate. Mardochée lui renvoya dire que, sa vie étant en danger comme celle de ses concitoyens, elle devait profiter de sa dignité royale pour tenter d’assurer le salut commun. Esther consentit à se dévouer, mais elle voulut que tous les Juifs se préparassent avec elle à son audacieuse tentative par un jeûne de trois jours. Tout ce dialogue entre Mardochée et sa nièce eut lieu par intermédiaire, comme l’imposait la condition d’Esther. Hérodote, iii, 68, 69, rapporte un dialogue, par intermédiaire d’eunuques, entre Otanès et sa fille Phédyme, épouse de Cambyses, pour arriver à la découverte du faux Smerdis. Des deux côtés, le procédé employé est tout à fait le même. Cf. M. Dieulafoy, L’Acropole de Suse, Paris, 1892, p. 369-370.

Le troisième jour, Esther se présenta devant le roi, fut reçue favorablement, invita le roi à un festin avec Aman et lui fit agréer semblable invitation pour le lendemain. Cependant Aman, en sortant de chez la reine, aperçut assis à la porte du palais Mardochée, qui ne fit pas le moindre mouvement à son passage. Profondément irrité, Aman fit préparer une potence haute de cinquante coudées pour y pendre son ennemi. Le lendemain matin, il se rendit au palais pour obtenir du roi la condamnation désirée. Mais, pendant la nuit, Xerxés n’avait pu dormir. Il s'était fait lire les annales royales et, ayant appris que Mardochée n’avait reçu aucune récompense pour la dénonciation du complot de Bagathan et de Tharès, il consulta Aman sur les honneurs à rendre à quelqu’un que le roi voulait récompenser. Aman s’imagina qu’il était question de lui. Il donna ses conseils en conséquence. Lui-même aussitôt fut chargé de rendre ces honneurs à Mardochée. On revêtit ce dernier d’un vêtement porté par le roi, on le fit monter sur un cheval monté par le roi, on lui mit sur la tête une couronne royale, et Aman dut le précéder sur la grande place de la ville en criant : « Il mérite cet honneur, celui que le roi a voulu honorer. » Hérodote, iii, 84 ; vii, 116, mentionne les robes modiques

que les rois de Perse donnaient à ceux qu’ils voulaient honorer. Actuellement encore, une pelisse de cachemire déjà portée par le chah est, en Perse, la suprême récompense accordée à ses serviteurs. Cf. Dieulafoy, L’Acropole de Stise, p. 384. Hérodote, iii, 140-141, raconte aussi une anecdote qui rappelle d’assez près le cas de Mardochée. Un Grec de Samos, Syloson, avait jadis donné son manteau à Darius. Quand celui-ci fut devenu roi, Syloson vint à Suse, s’assit au vestibule du palais, et finit par dire aux gardes qu’il avait autrefois obligé Darius. Appelé par celui-ci, il lui demanda l’indépendance de Samos, sa patrie, et il l’obtint. Il dut être très humiliant pour Aman de promener en triomphe le Juif Mardochée, alors que le décret d’extermination des Juifs était affiché depuis plusieurs jours dans la ville et connu de tous. On s’est même demandé comment Xerxès, qui avait porté ce décret, put ensuite décerner tant d’honneurs à Mardochée. Rien n’est plus conforme au caractère du monarque que cette contradiction apparente. Un jour qu’il naviguait sur un vaisseau iphenicien pour passer de Grèce en Asie, une tempête s’éleva et le pilole déclara à Xerxès que le vaisseau allait sombrer, parce qu’il portait trop de passagers. Un bon nombre de Perses se dévouèrent alors et se jetèrent à la mer. Quand on eut atteint la côte d’Asie, le roi donna une couronne d’or au pilote pour l’avoir transporté sain et sauf, puis il lui fit couper la tête pour avoir causé la mort d’un grand nombre de Perses. Cf. Hérodote, viii, 118. Il se peut donc très bien qu’il ait procédé de même vis-à-vis de Mardochée ; prévoyant qu’il allait périr bientôt en vertu du décret, il se hâta de le récompenser au préalable. « Hâte-toi, » avait-il dit à Aman. Esth., vi, 10.

La femme du ministre et ses amis jugèrent de fort mauvais augure ce qui venait de lui arriver. En effet, dans le festin qui suivit, Esther fit sa dénonciation, qui bouleversa l’esprit de Xerxès. Ce dernier se retira dans Te parc, songeant peut-être à l’impossibilité de revenir sur un décret royal. Quand il revint dans la salle du festin, il aperçut Aman penché sur le lit de la reine pour implorer sa grâce. Il crut qu’il voulait faire violence à Esther et en manifesta son indignation. On couvrit aussitôt le visage d’Aman, comme celui d’un condamné, et un eunuque ayant parlé de la potence de cinquante coudées dressée pour Mardochée, le roi y fit aussitôt pendre son ministre. Esth., vii, 1-10. -Aman périt ainsi pour un crime de lèse-majesté qu’il n’avait pas commis, mais bien digne de mort pour le massacre qu’il préparait. Cf. Dieulafoy, L’Acropole de Suse, p. 385-389.

Le même jour, Mardochée fut admis à l’audience de Xerxès. Esther apprit au roi qu’il était son parent. Alors le roi remit à Mardochée l’anneau qu’il avait jadis confié à Aman, et à l’aide duquel ce dernier avait scellé le décret prescrivant l’extermination des Juifs. Esth., m, 10, 12. De son côté, Esther mit son parent à la tête de sa maison, c’est-à-dire de la maison d’Aman, que le roi venait de lui donner. Mais le plus important restait à faire. Il fallait conjurer l’effeî du décret précédemment porté contre les Juifs de l’empire. On sait que, chez les Perses, il était de règle absolue de ne jamais revenir sur un ordre royal. Cf. Dan., vi, 8, 9, 12, 15 ; Hérodote, ix, 108 ; Dieulafoy, dans la Revue des études juives, Paris, 1888, p. 269. Il fallait donc prendre un autre moyen pour préserver les Juifs. Aussi Esther affecte-t-elle d’attribuer à Aman les lettres qui ordonnent l’extermination. Esth., viii, 5. Le roi, se vantant alors d’avoir fait pendre Aman à cause de sa violence contre les Juifs, dit à Mardochée d’envoyer d’autres lettres scellées de son anneau. Le nouveau ministre se garda bien de contrevenir à la loi irrévocable du royaume. Il fit rédiger par les secrétaires royaux de nouvelles lettres, adressées aux cent vingt-sept satrapes de l’empire perse, libellées dans la langue propre à chaque province

destinataire, et scellées avec l’anneau royal. Le treizième jour du mois d’adar avait été designé par Aman pour le massacre des Juifs. Esth., iii, 13. Les satrapes reçurent l’ordre de faire rassembler les Juifs de chaque ville afin que tous ensemble pussent se défendre au jour marqué et, au besoin, exterminer leurs ennemis. Ainsi le précédent décret restait en vigueur. Mais les Juifs, maintenant couverts par la faveur royale, étaient en mesure de faire face à leurs persécuteurs. Mardochée sortit du palais avec la couronne d’or et les insignes de sa nouvelle dignité. On s’en réjouit à Suse et une ère de sécurité et de prospérité s’ouvrit pour les Juifs. Esth., viii, 1-15. Le treizième jour d’adar arrivé, les Juifs, soutenus par les autorités locales, tinrent tête à leurs ennemis. A Suse, ils en tuèrent cinq cents, et le lendemain, à la demande d’Esther et sur l’autorisation du roi, trois cents autres. Les dix fils d’Aman furent pendus. Dans les provinces, il y eut 75 000 morts. Le texte sacré remarque par deux fois que les Juifs ne touchèrent pas aux richesses de leurs victimes, bien qu’Aman eût stipulé le pillage de leurs propres biens. Mardochée écrivit ensuite le récit de ce qui s’était passé ; il l’envoya aux Juifs des provinces et régla que le quatorzième et le quinzième jour d’adar seraient désormais pour les Juifs des jours de réjouissance nationale, en souvenir du péril auquel ils avaient échappé. Esth., ix, 20-23.

Mardochée resta premier ministre de Xerxès, Esth., x, 3, mais on ne sait pas combien de temps. Gilmore, The Fragments of the Persika of Ctesias, Londres, 1888, p. 153, a conjecturé qu’il pourrait être identifié avec Matacas, que Xerxès chargea d’aller piller le temple de Delphes. Cf. Ctesias, Persica, 27. La conjecture est à rejeter, le pillage du temple de Delphes ayant eu lieu avant l’arrivée de Mardochée au pouvoir. Voir AssuÉRtis, t. i, col. 1143. Les événements racontés au livre d’Esther eurent lieu au plus tôt en 479, et Xerxès fut assassiné en 465. Étant donné le caractère fantasque du monarque, il est douteux qu’Esther soit restée en faveur auprès de lui jusqu’à la fin et que Mardochée ait conservé sa fonction pendant’sept ou huit ans. Sur le tombeau d’Esther et de Mardochée à Ecbatane, voir Ecbatane, t. ii, col. 1532. — Cf. Oppert, Commentaire historique et philosophique du livre d’Esther d’après la lecture des inscriptions perses, dans les Annales de philosophie chrétienne, Paris, janvier 1864 ; Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, Paris, 6e édit., t. iv, p. 621-670 ; Les Livres Saints et la critique ralionalis

te, Paris, 5e édit., t. iv, p. 599-611.
H. Lesêtre.

2. MARDOCHÉE (JOUR DE), nom de la fête des Phurim dans II Mach., xv, 37. Voir Phurim.

    1. MARES##

MARES (hébreu : Mérés ; omis dans les Septante), un des sept conseillers d’Assuérus (Xerxès I er), roi de Perse. Esth., i, 14. On a rapproché son nom du sanscrit méréS, « digne. »

    1. MARÉSA##

MARÉSA (hébreu : Marêéâh ; Marê’sâh), nom d’un ou de deux Israélites et d’une ville de la tribu de Juda.

1. MARÉSA (Septante : Mapiaà), fils aîné de Caleb (voir Caleb 2, t. ii, col. 58), frère de Jéraméel, de la tribu de Juda, d’après les Septante. D’après l’hébreu et la Vulgate, le fils aîné de Caleb fut Mêsâ’, Mésa, qui est donné comme le père de Ziph, tandis que pour lés traducteurs grecs, qui ne nomment pas Mésa, c’est Marésa qui est le père de Ziph. Les trois textes portent ensuite : « Et les fils de Marésa, père d’Hébron ; » et filii Maresa patris Hebron. La phrase est incomplète et il est malaisé de la comprendre et de rétablir la leçon primitive. Parmi les nombreuses hypothèses qu’on a imaginées pour résoudre la difficulté, aucune n’est pleinement satisfaisante.

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2. MARÉSA (Septante : Maptsct), fils de Laada, de la tribu de Juda, descendant de Séla. I Par., iv, 21. Les uns voient en Marésa un nom d’homme, qui, d’après quelques commentateurs, ne serait pas différent de Marésa 1. D’autres pensent que les mots du texte : « Laada, père de Marésa, » signifient que Laada fonda ou restaura la ville de Marésa.

3. MARÉSA (Septante : tantôt Mapttra, tantôt Mapinoâ et tantôt Mapitrrj), ville de la tribu de Juda, dans la plaine des Philistins ou Séphéla.

1° Description. — Mentionnée avec Céila (Khirbet Qfyâ, t. ii, col. 387) et Achzib (Aïn el-Kezbéh, t. i, col. 136), Marésa est la dernière nommée du troisième groupe de la plaine. Jos., xv, 44. Eusèbe et saint Jérôme la placent à deux milles d’Éleuthéropolis (Beit Djibrin), Onomaslica sacra, édit. Larsow et Parthey, 1862, p. 276, 277. C’est le Khirbet Mer’asch actuel, au sud-sud-ouest de Beit Djibrin, au nord-est de Lachis. Voir la carte de Juda, t. iii, col. 1756. Cf. Survey of Western Palestine, Memoirs, t. iii, p. 262. « [II] s’étend sur une colline oblongue et peu élevée, aujourd’hui hérissée de broussailles et notamment de lentisques. La ville dont ce Khirbet présente les restes débordait, en dehors de cette colline, dans la plaine adjacente. Des amas confus de pierres, des silos, des cavernes et des excavations en forme d’entonnoirs renversés, voilà tout ce qui reste de l’antique Marésa. » V. Guérin, Judée, I. ii, p. 323.

2° Histoire. — Marésa fut donnée par Josué à la tribu de Juda. Jos, , xv, 44. Elle fut rebâtie, d’après quelques-uns, par Laadah. I Par., iv, 21. Voir Marésa 2. Plus lard, elle fut fortifiée par Roboam, pour défendre son royaume contre l’invasion menaçante des Égyptiens. II Par., xi, 8. — Lorsque Zara, l’Éthiopien, marcha, sous le second successeur de Roboam, Asa, contre le royaume de Juda, il arriva jusqu’à Marésa avec sa nombreuse armée. Asa l’attaqua dans la vallée de Séphata, qui est voisine de cette ville, le battit et le poursuivit jusqu’à Gêrare. II Par., xiv, 9-15. — Depuis cette époque jusqu’au temps des Machabées, Marésa n’est nommée dans l’Écriture que. deux fois ; une première fois comme la patrie du prophète Éliézer, fils de Dodaû, qui annonça à Josaphat que Dieu avait brisé les navires qu’il avait préparés pour aller à Tharsis, à cause de son alliance avec Ochozias, roi d’Israël. II Par., xx, 37. — Marésa est nommée la seconde fois dans la prophétie de Michée. i, 15, parmi les villes de la plaine des Philistins qu’il menace de la colère de Dieu, si elles ne se convertissent pas. Faisant un jeu de mots sur son nom, comme sur celui des autres villes qu’il énumère, il dit : « Je t’amènerai un nouveau possesseur (yôrês), habitant de Marésa {rnaréSâh, possession). » — Sous les Machabées, Marésa était tombée au pouvoir des Iduméens. Josèphe, Ant. jud., XIII, ïx, 1. Judas Machabée la ravagea dans son expédition contre Azot. Josèphe, Ant. jud., XII, viii, 6 ; cf. I Mach., v, 65-68. Au ꝟ. 66, Josèphe et l’ancienne Italique lisent Marésa, au lieu de Samarie, et leur leçon paraît être la véritable. Voir Reland, Palxstina, 1714, p. 889. Mais ce ne fut qu’une razzia ; Marésa ne demeura pas au pouvoir des Juifs et Gorgias, battu par Judas, s’y réfugia peu de temps après. II Mach., zu, 35. Voir Gorgias, t. iii, col. 277 (165 avant J.-C). Elle resta sous la domination syrienne jusqu’à Jean Hyrcan I er, qui s’en empara vers l’an 110 avant J.-C, et obligea les habitants à se soumettre à la circoncision. Josèphe, Ant. jud., Xlll, ix, 1 ; x, 2 (il appelle la ville Màpido-à). Voir Jean 4, t. iii, col. 1155. Sous le règne d’Alexandre Jannée (106-79 avant J.-C), elle était toujours sous la domination juive. Josèphe, Ant. jud., XIII, xv, 4. Pompée lui rendit son indépendance l’an 63 avant J.-C. Ant. jud., XIV, iv, 4 ; Bell, jud., i, vii, 7. Le proconsul Gabinius la fortifia. Ant. jud., XIV, v, 3 ; Bell, jud., VIII, iv ; mais elle fut détruite par les Parthe3, alliés avec Anti gone, quand ils envahirent la Palestine du temps d’Hérode, en l’an 40 avant J.-C ; Ant. jud., XIV, xiii, 9 ; Bell, jud., I, xiii, 9, et elle ne se releva plus de ses ruines.

F. Vigouroux.

    1. MARETH##

MARETH (hébreu : Ua’àrath ; Septante : Moq-apw6), ville de la tribu de Juda. Jos., xv, 59 (58). Elle fait partie du quatrième groupe des villes de la « montagne » et est nommé entre Gédor (voir Gédor4, t. iii, col. 152) et Béthanoth (t. i, col. 1633). On a proposé d’identifier Mareth avec le Beit Vmmar actuel, petit village à un kilomètre et demi de Gédor (Khirbet Djedùr). Il est traversé par une route ancienne. Dans le voisinage est une source de bonne eau appelée’AinKûfin. Cf. Survey of Western Palestine, Memoirs, t. iii, p. 303. Beit Vmmar lai-même, situé sur une montagne, n’a ni puits ni citernes. V. Guérin, Judée, t. iii, p. 298, 379. On ne sait rien de l’histoire de Mareth.

MARI (hébreu : ’îs, ba’al, gébér ; Septante : âv^p ; Vulgate : maritus, vir), celui qui est uni à une femme par le mariage. Dans plusieurs passages, Gen., xvi, 2 ; xxx, 1, 9 ; xxxviii, 14 ; xxxix, 16 ; Jud., xii, 9, la Vulgate ajoute le mot maritus absent du texte hébreu. — 1° Les droits et les devoirs du mari concernent la famille qu’il a à gouverner, voir Famille, t. ii, col. 2171-2173 ; la femme qu’il choisit ou que ses parents choisissent pour lui, voir Fiançailles, t. ii, col. 2230-2231, qu’ensuite il épouse et doit traiter avec affection et égards, Esth, , i, 17, 20 ; Tob., x, 13 ; I Cor., vii, 2-39 ; xi, 9-12 ; Eph., v, 22-33 ; Col., iii, 18, .19 ; I Pet., iii, 1-7, voir Mariage, Noce ; qu’il pouvait être amené à soupçonner légitimement, Num., v, 12-31, voir Eau de jalousie, t. ii, col.l522 ; avec laquelle il pouvait divorcer sous l’ancienne loi, Lev., xxi, 7 ; Deut. xxiv, 2, mais non sous la nouvelle, Marc, x, 2 ; Luc, xvi, 18 ; Rom., vii, 2, 3, voir Divorce, t. ii, col. 1448-1453, et dont il autorisait les vœux, Nuin., xxx, 7-16, voir Vœu ; les enfants, voir Éducation, t. ii, col. 1595-1598 ; Enfant, t. ii, col. 1788-1790 ; les biens de la famille, voir Dot, t. ii, col. 1496-1497 ; Héritage, t. iii, col. 610-611, etc. Au mari appartenait le droit de régler l’amende infligée à ceux qui avaient causé l’accouchement prématuré de sa femme. Exod., xxi, 22. — En raison de son alliance avec la nation d’Israël, le Seigneur dit qu’après sa conversion elle ne l’appellera plus ba’âlî, « mon maître, » mais’îsî, « mon mari. » Ose., ii, 9, 18 (Vulgate, 7, 16). — 2° C’est en lui donnant des enfants que la femme s’attachait le cœur de son mari. Gen., xxix, 34 ; xxx, 20. Mais quand la femme était stérile, le mari avait beau lui dire : « Ne vaux-je pas mieux pour toi que dix fils ? » 1 Reg., i, 8, elle n’en était pas consolée. — Quand la reine Vasthi eut refusé de paraître au banquet où l’appelait Assuérus, les courtisans prétendirent que cet exemple serait fatal à la suprématie maritale. Ils déterminèrent aisément leur fantasque maître à publier un édit irrévocable pour répudier Vasthi, et ordonner que toutes les femmes rendissent honneur à leur mari, depuis le plus grand jusqu’au plus petit et que tout homme fût le maître dans sa maison. Esth., i, 17-20. Cette prescription, qui relève avant tout de la loi naturelle et divine, a été rappelée par les Apôtres. I Cor., xi, 9 ; Eph., v, 22, 24 ; Col., iii, 18 ; I Pet., m, 1. — Saint Joseph est formellement appelé le mari de la Très Sainte Vierge. Matth., i, 19. — Notre-Seigneur dit à la Samaritaine d’appeler son mari et ajoute qu’elle a eu cinq maris, et que l’homme avec qui elle vit maintenant n’est pas le sien. Joa., iv, 16-18. Elle avait été séparée successivement de ses cinq maris soit par la mort, soit par le divorce, et maintenant elle vivait

irrégulièrement.
H. Lesêtre.
    1. MARIAGE##

MARIAGE, union légitime de l’homme et de la femme. — La Bible hébraïque ne renferme aucun mot pour désigner le mariage ; on trouve seulement hâfun759

né, νυμφρεύσις, desponsatio, Cant., rx, 11, qui se rap- '

porte ἃ la célébration du mariage, aux noces. Le mariage est appelé, dans le grec du Nouveau Testament, γάμος » et dans la Vulgate : conjugium, connubium, matrimonium. Les expressions suivantes, se rapportant au ma- riage, se lisent dans la Bible : Adfan, yau6peuetv, ἐπιγαμ- δρευεῖν, jungere connubium, sociare conjugium, « don- ner une fille à marier ; » nüsd ‘ifädh, yuvaixa ἐχεῖν, uxorem ducere, habere in conjugio ; lägah ᾿δδάξ, λαμδανεῖν γυναῖκα, accipere uxorem, ou simplement πάξα᾽, λαμδανεῖν, ferre, 1 Esd., 1x, 2, « prendre fem- me, ὃ se marier ; δά αἱ, συνοίκιϑεσθαι, dormire cum, « se marier ; » γαμεῖν, γαμῆσαι, nubere, « se marier ; » yauitw, matrimonio jungere, « marier. » — On appelle le mari : hdfän, νυμφίος, sponsus ; ba‘al, « 16 maître, » ἀνήρ, Mnaritus, et une fois, avec fe pluriel de majesté, bo‘älayik, « ton mari, » κύριος, dominabitur, Is., Liv, 5 ; δ, « l’homme, » par opposition à l'épouse, ἀνήρ, vir ; gébér, avec le même sens, ἀνήρ, vùr ; — l'épouse : be‘ü- Läh, γυνή, wxor, ou be‘üla ba‘al, συνῳκηκυῖα àvôp ! , ha- Lens virum, l'épouse, celle qui est sous la puissance d’un mari ; ‘#$8dh, « la femme, » par opposition au mari, γυνή, uæor ; häbérét et lebüë, γυνή, uxor, Mal., τι, 44, 15 ; fiddäh, « Yépouse, » Eccle., τι, 8, d’après beaucoup de modernes ; les versions anciennes ont traduit ce mot, qui ne se lit que dans ce passage, dans un tout autre sens : Septante : οἰνοχόον xat οἰνοχόας, « échansons (hommes) et échansons (femmes) ; » Vulgate : scyphos et urceos in ministerio ad vina fundenda, « des coupes et des cruches pour servir à verser le vin ; » fibbä'êl, μισητή γυνή, in Mmatrimonium assumpta, « la femme mariée ; » Ségal, l'épouse royale, βασίλισσα, regina, uxor ; — les conjoints, γεγαμηκότες, matrimonio juncti. Pour les autres relations de famille créées par le mariage, voir PARENTÉ. 1. DANS L’ANCIEN TESTAMENT. — 1. AU PARADIS TER- _ RESTRE. — Dieu créa d’abord le premier homme, mais comme un être qui n’était pas appelé à vivre seul ; car Dieu dit : « ΤΠ n’est pas bon que l’homme soit seul, je lui ferai une aide semblable à lui. » Gen., ii, 18. Cette aide ne se trouvait pas parmi les êtres déjà créés. Dieu la fit donc, en se servant d’une partie du corps d’Adam, pour bien marquer l’identité de nature et en même temps la dépendance de la femme vis-à-vis de l’homme, I Cor., ΧΙ, 8, et il présenta Êve à celui qui allait devenir son époux. Adam reconnut en elle « l’os de ses os et la chair de sa chair », c’est-à-dire un être tout semblable à lui et tiré de lui par la puissance du Créateur. Puis, sous l’inspiration de Dieu, il formula en ces termes la loi du mariage : « L’homme quittera son père et sa mêre et il s’attachera à sa femme, et à eux deux ils ne seront qu’une seule chair. » Gen., 11, 24. Il importe peu, au point de vue de la question du mariage, que cette for- mule soit d’Adam lui-même ou de l'écrivain sacré ; dans lun et l’autre cas, elle représente la pensée de Dieu et constitue la Hoi du mariage. Ainsi, d’après l’institution divine, le lien qui attache l’homme à son épouse est plus étroit et plus impérieux que celui qui l’attache à ses pa- rents. L’homme doit quitter ces derniers pour s’attacher à sa femme. Cette attache est exprimée par le mot débag, qui s’emploie pour marquer une nnion intime, de cœur et de volonté, à Dieu, Deut., x, 20, à des personnes très chères, Ruth, π, 8, 21, à la Loi, Ps. cxix (cxvint), 34, etc. L’effet de cette attache intime est indiqué par les mots : « Eux deux ne seront qu’une seule chair, » non seulement par origine, puisque le corps de la femme ἃ été tiré du corps de l’homme, mais encore par destination, de sorte qu’on ne puisse séparer l’homme de la femme sans une opération barbare, comme celle qui consiste à trancher la chair de quelqu’nn. Cꝟ. 5. Jean Chrysostome, Ir Maith., χιχ, t. Lvin, éol. 597. La traduction de 18 Vulgate : « Ils seront deux en une seule chair, » est moins expressive que le texte hébreu, mieux rendu par

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les Septante : « ils seront deux εἰς σάρχα piav, » ponr former « nne seule chair ». Notre-Seigneur rend ainsi le texte : « Ils ne sont plus deux, mais une seule chair. » Matth., χιχ, 6 ; Marc., x, 8 ; cf. I Cor., νι, 16. Dans cette première page de son histoire, le mariage apparaît comme une institution réclamée par la nature même de l’homme, comme voulu et réglé par Dieu, et soumis à la double loi de la monogamie et de l’union intime, par- faite et indissoluble entre les époux. L’indissolubilité n’est pas formulée expressément, mais seulement par compa- raison avec le lien filial et par la force même des termes employés pour caractériser l’union conjugale. Notre- Seigneur dira plus tard à ceux qui rappelleront l’autori- sation du divorce accordée par Moïse : « Au commen- cement, il n’en fut pas ainsi. » Matth., x1x, 8.

I1. À L'ÉPOQUE PATRIARCALE. — Lamech est signalé comme ayant pris deux femmes. Gen., 1v, 18. Il n’est d’ailleurs ni loué ni blämé pour ce fait ; on ne peut même pas affirmer qu’il ait été le premier à pratiquer la polygamie, bien que Tertullien, De exhort. ad cast., 5 ; De monogam., 4, t. ii, col. 920, 934, l’en accuse. Voir PoLYGAMIE. Noé n’a qu’une femme avant le déluge. Gen., vii, 18 ; νι, 16. Mais il est probable que beaucoup de ses descendants en prirent plusieurs, selon la cou- tume en pleine vigueur à l’époque d’Abraham. Celui-ci avait épousé Sara ; sur la demande de cette dernière, il fit d’Agar, esclave de Sara, sa concubine, et il en eut Ismaël. Gen., xvi, 2, 15. Les fils que le mari avait d’une esclave de sa femme étaient regardés comme les fils de l'épouse elle-même. Gen., xxx, 4-13. Voir CONCUBIKE, t. nr, col. 906. Le père demandait lui-même une épouse pour son fils, sans qu’il paraisse que celui-ci fût consulté. Ainsi procédèrent Abraham pour Isaac, Gen., χχιν, 3-7, 51, 67, Juda pour son premier-né, Gen., xxx viii, 6, etc. Agar fit de même pour Ismaël. Gen., xx1, 21. Il est à remarquer qu’on demandait le consentement de la jeune fille choisie pour épouse. Gen., xxIv, 58. Isaac envoya Jacob en Chaldée pour y prendre lui-même une épouse parmi ses cousines, Gen., xxviii, 2, et celui-ci obtint successivement Lia et Rachel. Gen., xx1x, 23, 30. Bien que Laban l’eût trompé, en lui donnant d’abord Lia au lieu de Rachel, Jacob ne regarda pas cette première union comme invalide. De son côté, Ésaü avait trois femmes, prises parmi les Chananéennes, Gen., xxxvi, 2, 8 ; ce choix déplut toujours à Isaac et à Rébecca. Gen., XxvI, 85 ; xxvII, 46. Abraham, Isaac et Jacob prirent seuls des femmes dans leur pays d’origine ; comme Esaü, plusieurs fils de Jacob se marièrent à des étrangères. Gen., xxxvint, 2 ; χει, 45. L’un des fils de Juda, Onan, fut puni de mort par le Seigneur, comme ayant manqué à la fois à la loyauté prescrite dans le mariage pour que sa fin soit atteinte, et à la coutume du lévirat, qui avait déjà force de loi. Gen., xxxviii, 840. En Égypte, Joseph fut marié par le pharaon à Aseneth, fille d’un prêtre de On. Gen., xLt, 45. Il n’eut d’ailleurs ni à la choisir, ni à la refuser, Voir ASENETH, t. 1, col. 1082.

IH. DANS LA LÉGISLATION MOSAIQUE. — Moïse dut ré- glementer la question du mariage, si importante pour la constitution de la famille. Les prescriptions législa- tives sur le mariage ont un triple but : rappeler aux Hébreux la pureté morale qui doit présider ἃ tous les actes de la vie, maintenir la vigueur et la fécondité de la race, et enfin détourner le peuple de Dieu des licences et des abus que se permettaient les autres peuples dans la pratique du mariage. Lev., xvir, 3.

4 Empêchements de parenté. — En règle générale, il est défendu de se marier avec quelqu’un du même sang, $e’êr besdrü, « chair de sa chair, » expression qui embrasse à la fois les consanguins et les alliés les plus proches. Lev., xviii, 6. Le dégislateur entre ensuite dans le détail, en visant ordinairement l’union avec les pa- rentes, parce qne c’étaient les hommes qui prenaient les femmes en mariage et non les femmes qui prenaient

les hommes. La prohibition était néanmoins valable dans l’un et l’autre cas, et elle portait à la lois sur l’union matrimoniale et sur l’union en dehors du mariage. Sont interdits les mariages entre parents et enfants en ligne directe, Lev., xviii, 7 ; les mariages d’un homme avec la femme de son père, c’est-à-dire avec sa belle-mère, même après la mort du père, bien entendu, autrement il y aurait adultère, Lev., xviii, 8 ; Deut., xxii, 30 ; xxvii, 20 ; avec sa sœur, soit celle qui a le même père et la même mère, soit celle qui a seulement le même père et est née à la maison, soit celle qui a seulement la même mère et est née par conséquent <lans une autre maison, Lev., xviii, 9 ; Deut., xxvii, 23 ; avec sa petite-fille, Lev., xviii, 10 ; avec une sœur née du même père, mais d’une autre mère, défense qui précise celle du ꝟ. 9, et ordonne de traiter comme sœur véritable celle qui n’est pas née de la même mère que le fils, Lev., xviii, 11 ; avec sa tante paternelle, Lev., xviii, 12 ; avec sa tante maternelle, Lev., xviii, 13 ; avec son oncle ou avec la femme de son oncle, Lev., xviii, 14 ; avec sa belle-fille, Lev., xviii, 15 ; avec la femme de son frère, Lev., xviii, 16, sauf le cas du lévirat, Deut., xxv, 5-10 ; voir Lévirat, col. 213 ; avec la fiile de sa femme, unie à un premier mari, ou avec sa petite-fille, ces enfants appartenant légalement au second mari, par suite de la mort du premier. Lev., xviii, 15. Dans cette dernière défense est comprise l’union avec la bellemère, formellement indiquée ailleurs. Deut., xxvii, 23. Ces sortes d’unions étaient incestueuses et frappées de mort ou d’autres peines graves par la Loi. Voir Incestf, t. iii, col. 864-867. Sur tes conséquences funestes des unions consanguines, voir Surbled, La morale dans ses rapports avec la médecine et l’hygiène, Paris, 1892, t. i, p. 245-257.

2° Empêchements temporaires. — Le mariage était encore prohibé avec la sœur de sa femme, du vivant de cette dernière ; en d’autres termes, malgré la tolérance de la polygamie, on ne pouvait épouser en même temps les deux sœurs, afin d’éviter les rivalités comme celles qui s’étaient produites dans la famille de Jacob. Gen., xxix, 30-31 ; xxx, 1, 2, 9 ; Lev., xviii, 18. L’usage du mariage était défendu pendant tout le temps que la femme avait ses règles. Lev., xviii, 19. L’union avec une femme mariée, tant que vivait son mari, ou bien tant qu’il ne l’avait pas répudiée légalement, constituait le crime de l’adultère. Lev., xviii, 20. Voir Adultère, t. i, col. 242-245 ; Divorce, t. ii, col. 1448-1453. Entre cet article de la Loi et un autre qui défend des actes criminels opposés à la fin du mariage. Lev., xviii, 22-23, . se lit celui-ci : « Tu ne donneras pas de ta race pour qu’elle soit consacrée à l’idole Moloch. » Lev., xviii, 21. Cf. Lev., xx, 2. Cette prohibition ne paraît pas ici à sa place, entre deux autres de nature différente. Au lieu de leha-’âbîr lam-Molék, « pour consacrer à Moloch, » les Septante ont lu : lehé"ébid lemélék, Xa-rpeûeiv ôépxovtt, « pour servir au roi. » Au lieu de lam-Molék, « a Moloch, » la version syriaque a lu lehêlék, par simple substitution d’un n à un b. Le hêlék est l’étranger qui passe, II Reg., Xli, 4, qui va et vient, d’où un sens qui paraît beaucoup plus naturel pour ce verset, le verbe âbar ayant aussi la signification de « laisser aller » : « Ne donne pas de toi-même en t’abandonnant à tout venant, » c’est-à-dire/ ne t’unis pas à la première venue. Cf. de Hummelauerj In Exod. et Levit-, Paris, VÊfr ; p. 484. Il serait donc ici question de la fornicatftmyu’ont la mention vient parfaitement à sa placé dansPlet contexte. Cette explication est néanmoins fort tfbdtéuse. Voie Fornication, t.ii. col. 2314-2317.

3° Mariages avec les étrangers. — Il était défendu de contracter mariage entre Isràéliter et Chananéens. Exod., xxxiv, 15, 16 ; Deut., vii, 3, 4. Les unions entre Israélites et Ammonites ou Moabites entraînaient l’exclusion de la société israélite pour les délinquants et

toute leur postérité. Deut., xxiii, 3. Les mariages avec les Édomites et les Égyptiens étaient tolérés, mais l’admission de la descendance dans la société israélite ne pouvait avoir lieu qu’à la troisième génération. Deut., xxm, 7, 8.

4° Mariages avec des esclaves. — Quand un Hébreu, acheté comme esclave, avait reçu une épouse de la main de son maître, il recouvrait sa liberté à la septième année et pouvait se retirer ; mais la femme et les enfants restaient la propriété du maître, à moins que le libéré consentit à demeurer en qualité d’esclave volontaire. Cet article suppose que la femme était étrangère, autrement elle aurait recouvré sa liberté dans les mêmes conditions que son mari ; il suppose également que le mariage était rompu par le fait même, et l’on conçoit que si le mari préférait sa liberté à son épouse, c’est qu’il n’avait pas grande affection pour cette dernière, peut-être imposée plus ou moins par le maître. Exod., xxi, 4-5. L’Hébreu qui achetait une jeune fille israélite pour en faire son esclave, avait la faculté soit de l’épouser lui-même, soit de la fiancer à son fils. Si, après les fiançailles, la jeune esclave n’était gardée ni par l’un ni par l’autre comme épouse, il fallait lui rendre la liberté et la renvoyer honorablement. Exod., xxi, 7-9. Celui qui avait saisi à la guerre une captive, pouvait en faire ensuite son épouse, pourvu qu’elle ne fût pas Chananéenne. Il devait lui laisser d’abord tout un mois pour pleurer ses parents, et si, après qu’il l’avait épousée, elle lui déplaisait, il devait la renvoyer libre. Deut., xxi, 10-14.

5° Mariages avec une jeune fille séduite. — Celufqui persuadait à une jeune fille, encore libre, de s’unir à lui, était ensuite obligé de payer sa dot au père et de l’épouser ; si le père refusait, le séducteur avait à lui payer l’équivalent de la dot. Exod., xxii, 16, 17. D’après une rédaction postérieure de la même loi, si le séducteur et la jeune fille étaient pris, le premier payait au père cinquante sicles d’argent et épousait la jeune fille, sans avoir jamais le droit de la répudier. Deut., xxii, 28, 29. La séduction d’une jeune fille déjà fiancée était traitée comme un adultère, à cause de la valeur attribuée aux fiançailles chez les Hébreux. Deut., xxii, 23-27.

6° Mariages des prêtres. — Un prêtre ne pouvait épouser, à raison de la sainteté de son caractère, ni une courtisane ni une répudiée. Lev., xxi, 7. Le grandprêtre ne devait prendre pour épouse qu’une vierge israélite, à l’exclusion de toute femme veuve, répudiée, deshonorée ou simplement étrangère. Lev., xxi, 13-14.

7 « Mariages des héritières. — Toute jeune fille qui possédait un héritage devait se marier avec quelqu’un de la tribu de son père, afin de ne pas troubler les partages faits entre les tribus. Num., xxxvi, 8.

8° Règles protectrices du mariage. — Le mariage était naturellement interdit à celui qu’une mutilation empêchait d’en remplir les obligations. Deut., xxiii, 1. La Loi ordonnait de lapider la jeune fille qui n’était pas trouvée vierge par son mari. Deut., xxii, 20-21. Quand le mari avait des soupçons sur la fidélité de sa femme, il la soumettait à une épreuve légale qui permettait soit de la punir, soit de reconnaître son innocence et ainsi de rendre la tranquillité au mari. Num., v, 11-31. Voir Eau de jalousie, t. ii, col. 1522. Quand le mari avait de justes raisons pour se séparer de sa femme, il pouvait la répudier légalement ; mais, pour que le caprice n’eût aucune part dans cette séparation, il n’était pas permis au premier mari de reprendre la femme répudiée, après qu’elle avait eu un autre mari. Deut., xxiv, 1-4 ; Jer., iii, 1. La peine de mort encourue par l’adultère, Deut., xxii, 22, devait contribuer à maintenir la fidélité entre les époux. Enfin, le nouveau marié était exempt du service militaire et de toute charge durant la première année de son union, , afin d’être tout entier à son épouse. Deut., xxiv, 5.

9° Caractère de cette législation. — La loi mosaïque s’accommodait aux mœurs du temps en autorisant le divorce et en laissant en vigueur l’usage de la polygamie, qui pratiquement n’était le plus souvent pour les Israélites que de la bigamie. Le plus grand malheur consistant pour eux à n’avoir pas d’enfants, il fallait bien leur permettre de prendre une seconde femme quand la première ne leur en donnait pas. Moïse ne pouvait « changer brusquement ces coutumes pour rétablir les institutions primitives de l’humanité, la monogamie et l’indissolubilité absolue du lien conjugal… Il fallait, pour établir cette loi dans sa pureté et sa rigueur, la grâce puissante attachée à la loi évangélique », et encore, on sait le grand étonnement des Apôtres quand Notre-Seigneur formula les conditions du mariage chrétien. Matth., xix, 10. « Moïse devait se tenir dans une région moins élevée et se borner à faire respecter le lien conjugal, par la répression de l’adultère et la prohibition de la prostitution. Il est yrai que l’on trouve à une époque très ancienne le principe de la monogamie en vigueur chez certains peuples, chez les Hellènes et les Latins. Mais cela ne rendait pas l’établissement de ce principe plus facile, chez les Hébreux, dont les mœurs étaient toutes différentes. Sous bien des rapports, le peuple choisi de Jéhovah était, quant à ses coutumes et ses instincts, inférieur à d’autres peuples. Sa mission venait du libre choix du Créateur et non de ses mérites. » De Broglie, Conf. sur l’idée de Dieu dans VA. T., Paris, 1890, p. 240, 241. Ces concessions avaient pour contrepoids les empêchements de parenté et les règles sévères de pureté légale, qui maintenaient l’idée et la pratique du mariage à un certain niveau moral et contrastaient heureusement avec la licence tolérée chez d’autres peuples sous ce rapport particulier.

IV. DANS L’ANCIENNE LÉGISLATION BABYLONIENNE. —

La législation du Pentateuque sur le mariage et sur la constitution de la famille devrait être, à en croire bon nombre d’auteurs, rapportée à une époque très postérieure à Moïse. La découverte du code des lois de Hammourabi, qui régnait à Babylone à une date qu’on fixe entre le xxme et le xxe siècle avant J.-C, suivant le ? assyriologues, cf. Maspero, Histoire ancienne des peuples de l’Orient classique, Paris, t. ii, 1897, p. 27, oblige au contraire à penser que Moïse n’a souvent fait que codifier des usages que les ancêtres de son peuple avaient rapportés de la Chaldée et auxquels les Hébreux avaient dû rester à peu près fidèles durant la période de leur développement en Egypte. Voici les articles du code babylonien sur le mariage qui se retrouvent dans la législation mosaïque ou dans les coutumes israélites :

1° Fiançailles, — La femme peut être unie à un homme, tout en étant encore vierge et en demeurant chez son père. L’union est pourtant déjà parfaitement légale et réelle, si bien que celui qui violente cette femme est puni de mort. Art. 130. C’est absolument la situation de la fiancée hébraïque. Voir Fiançailles, t. ii, col. 2231.

2° Dot. — La fiancée recevait de son père un trousseau et parfois d’autres biens ; mais le fiancé fournissait une dot au père de la jeune fille. De là, différentes éventualités possibles. Si le jeune homme, après avoir versé la dot, ne veut plus épouser la jeune fille, la dot reste au père de cette dernière. Art. 159. Si c’est le père qui ne veut plus donner sa fille après avoir reçu la dot, il doit rendre ce qu’il a reçu. Art. 160. Ce qu’une femme a apporté en se mariant appartient à ses enfants après sa mort. Art. 162. Si elle meurt sans enfants, ce qu’elle a apporté retourne à son père, restitution ou défalcation faite de la dot reçue par ce dernier. Art. 163, 164. Chez les Hébreux se retrouve l’usage invariable du mohar ou dot payée par le fiancé ou ses parents au père de la jeune fille. Voir Dot, t. ii, col. 1495. L’apport de la femme n’est constaté qu’une

fois, .Tud., xv, 18, mais il est certain que la fiancée pouvait être héritière, par conséquent posséder des biens personnels, auquel cas il était pourvu à ce que ces biens ne sortissent pas, sinon do la famille paternelle, du moins de la tribu. Num., xxxvi, 8.

3° Épouse et concubine. — Le mari dont la femme n’a pas d’enfants peut prendre une seconde femme, à condition toutefois de. garder dans sa maison et de sustenter la première, si celle-ci ne préfère retourner dans la maison de son père avec ses biens personnels. Art. 148, 149. Celui qui a eu des enfants de l’esclave que lui a donnée sa femme ne peut épouser une autre concubine. Art. 144. Si sa femme n’a pas d’enfants, il peut épouser une concubine, mais sans lui donner le rang d’épouse. Art. 145. Si l’esclave qui a eu des enfants du mari cherche querelle à sa maîtresse à propos de ses enfants, la maîtresse ne peut la vendre, mais elle la marque et la garde comme esclave. Art. 146. Elle ne pourrait vendre une pareille esclave que si elle n’avait pas d’enfants. Art. 147. Chez les Hébreux, on constate la même distinction entre épouses et concubines. Voir Concubine, t. ii, col. 906. On voit Sara, Gen., xvi, 3, Rachel, Gen., xxx, 4, Lia, Gen., xxx, 9, et d’autres donner leur esclave à leur mari pour qu’il en ait des enfants. Quand Agar eut un enfant d’Abraham, elle méprisa Sara, qui la maltraita et l’amena à s’enfuir. Gen., xvi, 6. Plus tard, Sara demanda impérieusement qu’Agar fût chassée. Cette demande déplut fort à Abraham, qui voulait sans doute s’en tenir à la règle de ses ancêtres, et il ne fallut rien moins que l’intervention de Dieu pour le décider. Gen., xxi, 10-12. La loi babylonienne limite, au moins en certains cas, le nombre des épouses et des concubines. Elle permet une seconde épouse, mais seulement quand la première est stérile, et elle interdit une seconde concubine à celui qui en a déjà reçu une de sa femme et en a obtenu des enfants. Voir la traduction des textes du code d’Hammourabi, col. 336. D’assez nombreux exemples montrent que, chez les anciens Hébreux, la polygamie s’est étendue bien au delà de ces limites.

4° Dignité du mariage. — Plusieurs lois consacrent la dignité du mariage et lui assurent une haute importance dans la constitution de la société babylonienne. Celui qui a calomnié une fiancée et ainsi a empêché son mariage ne peut ensuite prétendre à l’épouser. Art. 161. Si un homme a des enfants à la fois de sa femme et de sa concubine, ces enfants partagent ses biens à parts égales après sa mort, en laissant toutefois ceux de l’épouse choisir les premiers. Art. 170. La paternité met donc tous les enfants légitimes à peu près sur le même rang, avec une préférence cependant pour ceux qui sont nés de l’épouse. Si une jeune fille libre se marie avec un esclave, les enfants qui naissent du mariage sont libres. Art. 175. Du reste, l’épouse est considérée dans le mariage surtout par rapport aux enfants. Ainsi, la femme qui n’a pas d’enfants peut, en certains cas, se retirer chez son père. Art. 149. À défaut d’enfants, ses biens retournent à la famille paternelle. Art. 163, 164. Si elle devient veuve après avoir eu des enfants, elle se doit à ces derniers, ne peut se remarier qu’avec autorisation du juge et après inventaire des biens qui doivent revenir aux enfants du premier mariage et demeurent inaliénables. Art. 177. Elle peut disposer des biens que son mari lui a laissés, en faveur du fils qu’elle préfère, mais non en faveur d’un frère à elle. Art. 150. Les époux sont responsables solidairement des dettes contractées dans le mariage, mais nul n’est responsable de celles que son conjoint a contractées avant le mariage. Art. 151, 152. Ainsi, dans le mariage babylonien, tout vise à la procréation des enfants et à la prospérité de la descendance. Les mêmes idées ont régné chez les Hébreux ; chez eux, l’épouse compte surtout comme mère, et l’héritage passe aux enfants suivant des règles assez larges qui ne diffèrent

pas sensiblement des lois d’Hammourabi. Voir Héritage, t. iii, col. 610.

5° Répudiation. — La femme maudite par son mari jure par le nom de Dieu qu’elle n’est pas coupable d’adultère et peut retourner chez son père. Art. 131. La femme maudite est ici la femme qui déplaît sans qu’il y ait eu faute de sa part. La femme, épouse ou concubine, qui est répudiée après avoir eu des enfants, doit recevoir ce qu’elle a apporté et, de plus, de quoi élever ses enfants ; ceux-ci élevés, elle est libre. Art. 137. Si elle n’a pas d’enfants, elle n’emporte avec elle que ce qu’elle a apporté. Art, 138. Si elle n’avait pas eu de dot, elle a droit à une mine ou à une demi-mine d’argent. Art. 139, 140. L’épouse qui s’est mal conduite dans la tenue de sa maison peut être répudiée sans rien recevoir ou être gardée comme esclave, quand le mari épouse une autre femme. Art. 141. L’épouse à son tour peut se plaindre du mari ; si elle le fait à bon droit, elle prend tout ce qui lui appartient et retourne chez son père. Art. 142. Si sa plainte n’est pas fondée et qu’elle-même soit la coupable, on la jette à l’eau. Art. 143. La loi babylonienne n’exige donc aucune raison sérieuse de la part du mari pour lui permettre le divorce ; elle stipule seulement quelques garanties en faveur de la femme répudiée ; en revanche, celle-ci s’expose à une terrible pénalité si elle se permet de se plaindre de son mari quand elle-même a des torts sérieux à se reprocher. La tradition du divorce s’est conservée chez les Hébreux à peu près dans les mêmes conditions. Voir Divorce, t. ii, col. 1449. Moïse n’a fait que consacrer la coutume ancienne ; il restreint toutefois au mari le droit de divorcer. Cette restriction ne pouvait que rendre les divorces beaucoup moins nombreux. Mais on comprend que Moïse, se trouvant en face d’une coutume qui remontait si loin, n’ait pas tenté de la supprimer.

6° Crimes contre le mariage. — La femme qui fait tuer son mari, en vue d’en prendre un autre, est pendue. Art. 153. Cette loi se retrouve équivalemment, mais sous une forme plus générale, dans l’Exode, xxi, 14 : quiconque emploie la ruse pour faire périr son prochain est condamné à mourir. L’adultère est puni de mort ; on jette à l’eau les deux coupables, si le mari ne fait grâce à sa femme, et le roi au délinquant. Art. 129. La peine est sans condition dans la loi mosaïque. Lev., xx, 10 ; Deut., xxii, 22. Quand une femme est soupçonnée d’adultère par son mari, on lui fait subir l’épreuve de l’eau en la jetant dans le fleuve. Art. 132. Si elle échappe, elle est censée innocente. Les Hébreux n’avaient pas de fleuves à leur disposition, comme les Babyloniens. La loi mosaïque a substitué à l’ordalie par l’eau du fleuve le rite de l’eau de jalousie pour le cas où une femme est soupçonnée d’adultère. Num., v, 11-31. Voir Eau de jalousie, t. ii, col. 1522. Ce rite ne prêtait pas aux accidents fortuits, comme l’usage babylonien, et il nécessitait une intervention de Dieu plus directe et par conséquent plus significative. La femme qui, ayant de quoi vivre dans la maison de son mari emmené en captivité, s’unit à un autre, est jetée à l’eau. Art. 133. Elle a commis en effet un véritable adultère. S’il n’y a pas de quoi vivre à la maison du captif, sa femme peut aller avec un autre. Art. 134. Quand son premier mari revient, elle retourne avec lui, en laissant au second les enfants qu’elle a eus de lui. Art. 135. Mais si le premier mari a déserté ^sa. ville par mépris, la femme n’est pas obligée de retourner avec lui. Art. 136, Dans ces derniers cas, il y a véritable divorce, momentané ou définitif, imposé par les circonstances. La loi mosaïque ne prévoit pas ces cas particuliers. Elle proscrit absolument le retour de la femme répudiée auprès de son premier mari, quand elle en a eu un second. Deut., xxiv, 4. Mais le divorce provenait de la volonté du mari, et non de la force des choses, comme dans le code babylonien. Les empêchements au mariage portés par la loi mosaïque ne se trouvent pas dans le code babylonien, sauf pour les

unions du premier degré en ligne directe. Ainsi Phommfr qui a commerce avec sa fille est chassé de la ville. Art. 154. Celui qui a commerce, à la suite de son fils, , avec la fiancée de ce dernier, est jeté à l’eau. Art. 155. Si le père du fils a eu seul commerce avec la fiancée, il lui paye une demi-mine d’argent, lui rend tout cequ’elle a apporté, et celle-ci peut épouser qui elle veut. Art. 156. L’inceste entre la mère et le fils entraîne pour les deux coupables la mort par le feu. Art. 157. Celui qui a commerce avec la femme qui l’a élevé et a eu des enfants de son père, est chassé de la maison paternelle. Art. 158. Cf. Scheil, Textes élamites-sémitiques, iv sér. r Paris, 1902, p. 64-86, 145-151. Ces dernières lois tendent à sauvegarder la pureté du mariage, en frappant les unions les plus odieusemeut incestueuses. Il est manifeste que Moïse a trouvé à l’état traditionnel, chez soa peuple, la législation de’Hammourabi sur le mariage. Il en a maintenu lès articles principaux et a précisé ou perfectionné les autres. Nous n’avons donc pas dans la législation mosaïque un code créé de toutes pièces, ni un ensemble de lois qui sont venues avec le temps s’ajouter les unes aux autres. Les parties principales existaient déjà cinq cents ans avant Moïse.

v, de josué À jésus-christ. — La Sainte Écriture fait allusion à un assez grand nombre de mariages, ordinairement contractés conformément à la législation mosaïque. Les infractions graves sont signalées aux articles Adultère, t. i, col. 242, Fornication, t. ii, col. 2314, et Inceste, t. iii, col. 864. Deux points sont cependant à remarquer dans le cours de l’histoire des Israélites.

1° Intervention du père de la jeune fille. — C’est la père qui marie sa fille et qui, au besoin, la promet en. mariage sans demander son avis. Ainsi Caleb promet sa fille en mariage à celui qui s’emparera de Cariath Sépher, Jud., i, 12, et Saùl promet la sienne à celui qui vaincra Goliath. I Reg., xvii, 25. Abesan marie lui-même ~ses trente filles, Jud., xii, 9 ; le père de la femme de Samson dispose de sa fille, pourtant mariée déjà, Jud., xiv, 20 ; les officiers de David amènent Abisag au roi sans la consulter, III Reg., i, 2, et Salomon peut lui-même la donner en mariage à qui il lui plaît. III Reg., ii, 17. Esther est présentée à Assuérus, qui la prend pour épouse, Esth., ii, 15-17 ; mais elle avait été élevée dans un harem perse et en dehors des conditions ordinaires de la civilisation juive. C’est son parent Mardochée qui remplit auprès d’elle l’office de père.

2° Mariages avec des étrangers. — 1. Ces mariages sont relativement peu fréquents avant la captivité, alors que les Israélites étaient en contact moins immédiat avec les étrangers autres que les Chananéens. D’ailleurs on ne voyait pas ces unions d’un bon œil, comme en témoigne la répugnance des parents de Samson, quand celui-ci veut épouser une Philistine. Jud., xiv, 2-3. Les auteurs sacrés signalent le mariage d’une Israélite avec un Égyptien, au temps de Moïse, Lev., xxiv, 10, celui de Salomon avec la fille du roi d’Egypte, III Reg., vu, 8, celui de la fille de Sésan avec un esclave égyptien, I Par., ii, 34-35, celui d’Abigaïl, sœur de David, avec Jéther l’Ismaélite ( ?), I Par., ii, 17, celui d’une femme de Nephthali avec un Tyrien, qui en eut pour fils Hiram, III Reg., vii, 14, et celui d’Achab avec Jézabel, fille du roi de Sidon. III Reg., xvi, 31. Ces mariages n’étaient pas contraires à la Loi. Mais celui de Salomon avec Naama l’Ammonite, qui fut mère de Roboam, III Reg., xiv, 21, et ses unions avec d’autres étrangères, Moabites, Iduméennes, Sidoniennes et Héthéennes, étaient en opposition formelle avec les prescriptions mosaïques. 1Il Reg., xi, 1-2. La légitimité de Roboam, bien qu’issu d’un mariage réprouvé par la Loi, ne paraît pas avoir été mise en question au moment de la révolte de Jéroboam. Mais cette infraction de Salomon à une loi grave fut bien probablement au nombre des motifs qui por

tèrent le Seigneur à diviser son royaume après sa mort. III Reg., xi, 33. — 2. Pendant la captivité, les Hébreux déportés en différentes régions de l’empire chaldcen reçurent de Jérémie, xxix, 6, le conseil de se marier et de marier leurs fils et leurs filles. Les mariages avec les peuples de cet empire n’étaient pas proscrits par la Loi, et il est possible que des unions aient été contractées alors entre Israélites et étrangers, comme il arriva pour Esther. Néanmoins les déportés se marièrent généralement entre eux, ainsi qu’on le voit par l’exemple de Tobie, Tob., vi, 11 ; vil, 15 ; de Susanne, Dan., iiii, 1-2, etc.

— 3. Après la captivité, la petite colonie juive revenue en Palestine se trouva mêlée à la population étrangère qui avait occupé le pays. Les mariages entre Israélites et Chananéens, Héthéens, Ammonites, Moabites, Égyptiens, etc., devinrent assez nombreux pour constituer un vrai péril national, indépendamment de la grave infraction portée à la loi mosaïque. I Esd., IX, 1, 2. Sur l’initiative d’Esdras, on prit une mesure énergique pour réprimer cet abus : tous les Israélites furent mis en demeure de se présenter à Jérusalem dans les trois jours, et ceux qui avaient épousé des étrangères durent s’engager à les renvoyer. On a conservé dans le livre sacré le nom des prêtres, des lévites et des notables qui avaient contracté de ces unions. I Esd., x, 1-44. Le même abus se reproduisit plus tard. De mariages d’Israélites avec des femmes d’Azot, d’Ammon et de Moab, étaient nés des enfants qui ne savaient même plus parler la langue nationale. Un petit-fils du grand-prêtre Éliasib, Manassé, avait épousé la fille de Sanaballat, le Horonite. Néhémie cbassa ce violateur de la Loi, réprimanda sévèrement les autres, et leur fit promettre de ne plus retomber dans une faute qui avait perdu Salomon. II Esd., xiii, 23-28. Les prêtres qui ne voulurent pas se soumettre aux injonctions de Néhémie s’en allèrent rejoindre à Samarie le gendre de Sanaballat, afin de pouvoir conserver leurs femmes. Josèphe, Ant. jud., XI, viii, 2. Dans les temps postérieurs, les Juifs se montrèrent observateurs rigides de la loi qui prohibait ces sortes de mariages. Ce fut même une des marques caractéristiques de leur race. Alicnarum concubitu abstinent, « ils s’abstiennent de toute union avec des étrangères, » écrit Tacite, Hist.,

y, 5.,

3° Mariages scandaleux. — Josèphe parle d’un certain nombre de mariages contractés par des personnages en vue, dans des conditions telles qu’ils firent scandale parmi les Juifs. Joseph, neveu du grandprêtre Onias II et receveur des impôts, se maria avec sa propre nièce et en eut Hyrcan, qui fut le héros de singulières aventures. Le frère de Joseph avait ménagé ce mariage, d’ailleurs prohibé par la Loi, pour l’empêcher d’épouser une danseuse d’Alexandrie, ce qui l’eût déshonoré aux yeux des Juifs. Josèphe, Ant. jud., XII, IV, 6. Hérode le Grand eut dix femmes, et parmi elles une Samaritaine nommée Malthace, qui fut la mère d’Archélaûs. Josèphe, Ant. jud., XVII, i, 3. Voir Hérode le Grand, t. iii, col. 645. Du reste, dans sa famille, les mariages furent souvent contractés dans des conditions défendues par la loi mosaïque. Voir le tableau généalogique, t. iii, col 639. Le nombre des femmes prises par Hérode le Grand n’étonnait pas les Juifs. Leurs docteurs permettaient au roi d’en avoir jusqu’à dix-huit, tant épouses que concubines. Sanhédrin, il, 4. Cf. II Reg., iii, 2-5 ; xii, 8, 9. Archélaùs épousa Glaphyra, veuve de son frère Alexandre, dont elle avait eu des enfants, de sorte qu’on ne pouvait invoquer la loi du lévirat pour justifier cette union interdite par Moïse. Josèphe, Ant. jud., XVII, xiii, 1. Enfin Hérode Antipas, après avoir répudié la fille du roi arabe Arétas, épousa Hérodiade, femme de son frère Hérode Philippe, encore vivant, ce qui compliquait la transgression d’un adultère. Josèphe, Ant. jud., XVIII, v, 1 ; Malth., xiv, 3-12. Ces infractions à la loi mosaïque

contribuèrent à rendre les Hérodes encore plus odieux aux Juifs fidèles.

vi. les coutumes JUIVES. — 1° Interprétation de la loi. — La loi mosaïque sur le mariage est résumée par Josèphe, Ant. jud., IV, viii, 23, et par Philon, De specialibus legibus, iii, édit. Mangey, Londres, 1742, t. ii, p. 299-334. Elle est interprétée dans plusieurs traités du troisième livre de la Mischna : Yebamoth, sur le lévirat, Kethuboth, sur le contrat de mariage, Sota, sur la conduite à tenir quand il y a soupçon d’adultère, Gittin, sur le libelle de répudiation, et Kidduschin, sur les fiançailles. Voici les principaux articles précisés par les docteurs. Bien qu’une femme répudiée pût être assimilée à une veuve, son beau-frère ne pouvait l’épouser. Sota, IV, 1 ; viii, 3. Le prêtre ne pouvait épouser qu’une vierge ou une veuve israélite, mais il était permis à sa fille de se marier dans n’importe quelle tribu. Josèphe, Ant. jud., III, xii, 2. Si sa fille ainsi mariée à un Israélite d’une tribu quelconque avait à son tour une fille qui épousait un prêtre, le fils né de cette union pouvait même être désigné pour le souverain pontificat. Siphra, 236, 2. Le prêtre ne pouvait épouser ni une prisonnière de guerre, Josèphe, Ant. jud., III, xii, 2 ; XIII, x, 5 ; Cont. Apion., i, 7, ni une prosélyte, ni une esclave libérée ; l’interdiction ne portait pas sur la fille du prosélyte et de l’esclave libérée, si la mère était Israélite. Yebamoth, VI, 5 ; Bikkurim, i, 5. Le prêtre sans enfants devait s’abstenir de prendre une femme incapable d’en avoir, incapacité qu’on savait discerner à certains signes. Yebamoth, vi, 5. Les prêtres prenaient toutes les précautions pour s’assurer de la légitimité de leurs unions. Josèphe, Cont. Apion., i, 7 ; Kidduschin, iv, 4, 5. Ézéchiel, xliv, 22, dans sa description du nouveau Temple, défendait aux prêtres d’épouser soit une femme répudiée, soit une veuve, à moins qu’elle fût la veuve d’un prêtre. Mais cette défense du prophète n’était pas considérée comme obligatoire. D’après Philon, De monarchia, H, 9, t. ii, p. 230, le grand-prêtre ne pouvait épouser qu’une vierge de race sacerdotale. Cette prohibition paraît n’avoir d’autre autorité que celle de la traduction des Septante dans le texte du Lévitique, xxi, 13. Voir Grand-prêtre, t. iii, col. 300. — Les docteurs s’occupèrent aussi de l’application de la loi aux prosélytes. Les enfants qui n’avaient pas trois ans et un jour au moment de la conversion de leur mère étaient censés nés Juifs et soumis à toutes les obligations du judaïsme. Kethuboth, I, 2, 4 ; iii, 1, 2. Les enfants nés avant la conversion de leur mère n’étaient tenus ni à la loi du lévirat ni à celle qui concerne la constatation de la virginité de la jeune épouse. Deut., xxii, 13-21 ; Yebamoth, XI, 2 ; Kethuboth, iv, 3. Les prosélytes pouvaient épouser les mutilés et les bâtards. Yemaboth, viii, 2. Ils étaient tenus aux prescriptions concernant le rite de l’eau de jalousie, Eduyoth, v, 6, bien que Jochanan ben Sakkaï déclarât ce rite abrogé. Sota, IX, 9. — Les époux ne pouvaient se refuser à l’usage du mariage s’ils n’avaient déjà au moins deux fils, d’après Schammaï, un fils et une fille, d’après Hillel. Yebamoth, vi, 6. Les Esséniens, à part une petite minorité d’entre eux, réprouvaient le mariage, à cause des impuretés nombreuses auxquelles il entraînait. Josèphe, Ant. jud., XVII, i, 5 ; Bell, jud., II, viii, 2, 13.

2° Célébration du mariage. — jOn pouvait contracter mariage dès qu’on avait atteint l’âge nubile, treize ans et un jour pour les jeunes gens, douze ans et un jour pour les jeunes filles. En réalité, les jeunes gens attendaient leur dix-huitième année. Aboth, v, 21. Une veuve ou une répudiée ne devait pas se marier avant que trois mois se fussent écoulés depuis la mort du premier mari ou la répudiation. Ce délai était réputé suffisant pour permettre de juger de l’état de la femme. C’était ordinairement le père, ou à son défaut la mère,

qui demandait pour son fils une jeune fille en mariage, comme à l’époque patriarcale. Les docteurs permettaient à la jeune fille majeure, c’est-à-dire probablement ayant plus de douze ans et un jour, de se refuser à une union qui lui déplaisait, bien qu’elle fût déjà réglée par ses parents. Quand la demande en mariage était agréée, le père du jeune homme payait la dot ou mohar aux parents de la jeune fille. Voir Dot, t. ii, col. 1495-1497. On procédait ensuite aux fiançailles, qui avaient la même valeur légale que le mariage, duraient ordinairement un an et ne permettaient aux futurs « poux de communiquer normalement que par intermédiaires. Voir Fiançailles, t. ii, col. 2230, 2231. Au temps marqué, le mariage était célébré au milieu des festins et des démonstrations de joie. Voir Noces. Cette célébration ne comportait aucune cérémonie religieuse, bien qu’on y récitât certaines formules de bénédiction. Au sabbat suivant, les nouveaux époux étaient conduits à la synagogue, le mari par ses hôtes, la mariée par des femmes. Le mari était invité à faire la lecture et versait une aumône. Les époux étaient ensuite reconduits à leur maison par les mêmes cortèges, et, pendant un an, le nouveau marié jouissait des immunités que lui garantissait la Loi. Deut., xxiv, 5.

3° Droits et devoirs des époux. — La femme avait le droit d’exiger dix choses de son mari, trois qui étaient stipulées par la Loi : la nourriture, le vêtement, le devoir conjugal, Exod., xxi, 10, et sept qui étaient prescrites par les docteurs : les soins dans la maladie, le rachat dans la captivité, la sépulture après la mort, l’entretien aux frais du mari, le domicile même quand elle devenait veuve, la nourriture de ses propres filles jusqu’à leur mariage, la part d’héritage et la dot pour ses fils. La femme devait à son mari quatre choses : le fruit de son travail, sa présence habituelle, la jouissance des biens qu’elle possédait, et, après sa mort, le droit de profiter de ces biens avant tous les autres. Cf. Iken, Antiquitates hebraicse, Brème, 1741, p. 491503. Sur la condition des femmes mariées chez les Israélites, voir Femme, t. ii, col. 2189, 2190, et Mère.

4° Après le mariage. — Conformément à la loi, Deut., xxii, 20, 21, le mari faisait procéder contre la femme qu’il n’avait pas trouvée vierge. Il la déférait à un sanhédrin de vingt-trois membres, et, convaincue d’avoir eu des rapports criminels avec un autre depuis ses fiançailles, la coupable était lapidée, ou, si elle était la fille d’un prêtre, brûlée vive. Lev., xxi, 9. Si le mari l’avait accusée à faux, il ne pouvait plus jamais la répudier, payait au père ou à l’épouse elle-même, si elle n’avait plus de père, une double dot, soit cent sicles d’argent, et enfin subissait la flagellation. Quant aux faux témoins, ils étaient passibles du supplice qui eût été infligé à celle qu’ils accusaient. Celui qui avait fait violence à une jeune fille non encore fiancée, devait la prendre pour femme .sans jamais pouvoir la répudier, Deut., xxii, 28, 29, et en outre payait une amende de cinquante sicles à son _père, ou à la jeune fille même si le père n’existait plus. Dans ces sortes d’unions, le consentement du père et de la jeune fille violentée était requis ; en cas de refus, le délinquant avait d’autres amendes à payer. Cf. Iken, Antiq. hebr., p. 503, 504. Dans certains cas, le divorça intervenait plus ou moins longtemps après le mariage. Voir Divorce, t. îi, col. 1448. Cf. J. Cauvière, Le lien conjugal et le divorce, Paris, s. d., p. 3-9.

vu. symbolisme du mariage jniF. — Le mariage était le symbole de l’union de la race choisie avec son , Dieu. Cette idée est développée allégoriquement dans i le Cantique des cantiques. Voir t. ii, col. 194-196. Elle est familière aux prophètes. Le Psaume xlv (xliv) représente sous la figure d’un mariage l’union du Dieu sauveur avec l’humanité rachetée. Dans Isaïe, liv, 5, Dieu est l’époux de la nation Israélite, l’époux même de sa Jerre, et celle-ci fait la joie de son Dieu comme la fiancée


fait la joie du fiancé’. Is., lxii, 4, 5. Jérémie, ii, 2, dit que la race élue a été fiancée à Dieu au désert, et, pour exhorter ses contemporains à la conversion, il les appelle des enfants rebelles vis-à-vis de celui qui est leur ba’al, le maître et l’époux. Jér., iii, 14. Osée, ii, 18-22, appuie davantage encore sur ce symbolisme. I ! présente Dieu comme le fiancé irrévocable et comme le mari d’Israël. C’est en vertu de ce symbolisme que l’union de la nation israélite avec les faux dieux est qualifiée souvent de fornication, voir t. ii, col. 2316, et surtout d’adultère. Voir t. i, col. 242. — Sur les mariages des Hébreux, voir Selden, Vxores Hebrseor., seu de nuptiis et divortiis, Francfort-s.-O., 1673 ; Ugolini, Vxor hebrsea, dans le Thésaurus ant. sacr., Venise, 1744, xxx ; Buxtorf, De sponsalibus ac divortiis, Bâle, 1652 ; Iken, Antiquitates hebraicæ, Brème, 1741, p. 491-510 ; Munk, Palestine, Paris, 1881, p. 378-379 ; H. Zschokke, Die biblische Frauen des A. T., Fribourg, 1882.

II. Dans le Nouveau Testament. — I. l’enseignement de notre-sejgneur. — 1° Le divin Maître inaugure son ministère en honorant de sa présence, à Cana, le mariage tel qu’il se célébrait chez les Juifs. Joa., ii, 2-11. Il fait allusion aux noces dans ses paraboles. Matth., xxil, 1-14 ; xxv, 1-13. À cette époque, il n’était plus question de bigamie ni de polygamie parmi les vrais Juifs. C’est donc seulement au sujet de l’indissolubilité du mariage que Notre-Seigneur affirme énergiquement la volonté divine. Il condamne absolument le divorce et qualifie d’adultère le second mariage du vivant des conjoints. Matth., v, 31-32, Aux pharisiens qui l’interrogent, il rappelle la loi primitive du mariage, qui est l’indissolubilité absolue et l’union des époux formant « une seule chair ». Matth., xrx, 3-9. Voir Divorce, t. ii, col. 1451-1453. Les Apôtres, étonnés de la rigueur de cette doctrine, estiment qu’ainsi la loi du mariage impose un joug trop onéreux, et que mieux vaut né pas se marier. Ils semblant accuser Notre-Seigneur de détourner du mariage. Il leur répond en leur parlant de trois lois plus dures encore que celle du mariage : la loi de la nature, qui interdit le mariage à certaines catégories de personnes, malgré leur désir, la loi de la force, qui met certains hommes hors d’état de se marier, et enfin la loi de la grâce, qui portera des âjnes privilégiées à s’abstenir du mariage, non pas à cause de ses obligations, mais par esprit de sacrifice, « pour le royaume des cieux. » Matth., xix, 1012. — 2° Le concile de Trente, De sacram. matrim., can. 1, enseigne que le mariage est l’un des sept sacrements de la Loi nouvelle et qu’il a été institué par Jésus-Christ. Il renvoie â Matth., xix ; Marc, x ; Eph., v. Les Évangélistes n’indiquent pas en quelle occasion eut lieu cette institution. Mais n on prouve, d’après S. Paul, Eph., v, que le mariage entre chrétiens est le signe d’une chose sacrée dans le Christ et dans l’Église, et que la grâce lui est jointe ; toutefois, on ne prouve pas que la puissance de produire la grâce est attachée au contrat matrimonial lui-même. L’argument tiré de l’Apôtre pour établir la réalité du sacrement de mariage n’est donc pas complet ; c’est la tradition qui le complète. L’Apôtre enseigne seulement l’économie de cette élévation » du mariage à la dignité de sacrement. Gasparri, De matrim., Paris, 1893, t. i, p. 130. ; < Quand on considérera que Jésus-Christ a donné une nouvelle forme au mariage, en réduisant cette sainte société à deux personnes immuablement et indissolublement unies, et quand on verra que cette inséparable union est le’signe de son union éternelle avec son Église, on n’aura pas de peine à comprendre que le mariage des fidèles est accompagné du Saint-Esprit et de la grâce. » Bossuet, Expos, de la doct. chrét., IX, Bar-le-Duc, 1880, t. iii, p. 29. Cf. Turmel, Hist. de la Théol. positive, Paris, 1904, p. 157, 346, 348.

11. ENSEIGNEMENT DE SAINT PAUL. — Saint Paul est

le docteur du mariage chrétien ; il applique à l’union

IV. - 25

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MARIAGE

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conjugale les règles de l’Évangile. — 1° La loi chrétienne du mariage. — 1. Saint Paul flétrit les docteurs qui prohibent le mariage. I Tim., iv, 3. Les Esséniens professaient l’aversion du mariage. Josèphe, Ant. jud., XVIII, i, 5. En dehors de la Palestine, la réprobation du mariage faisait partie de la doctrine de la gnose alors â ses débuis. Les faux docteurs prétendaient, comme plus tard Saturnin et Basilide, que le mariage et la génération étaient des œuvres de Satan. Cf. S. Irénée, Adv. heures., i, xxiv, 2, t. vii, col, 675, et le pseudo-Ignace, Epist. ad Philadelp., 6, t. v, col. 829. Ces hérétiques ne s’abstenaient d’ailleurs du mariage que pour se livrer aux pires immoralités. L’Apôtre rappelle la loi évangélique sur l’indissolubilité abolue du mariage. Rom., va, 2, 3 ; I Cor., vii, 10, 11. Il ne permet qu’une exception à la règle : quand, dans un mariage, l’une des deux parties est chrétienne et l’autre infidèle, si cette dernière ne consent pas à vivre en paix, s’en va et se marie avec un autre, la partie chrétienne recouvre sa liberté et peut de son côté contracter un nouveau mariage. I Cor., vii, 1 2-15. Voir t. ii, col. 1453. Cf. M. Rossallus, De sententia Pauli I Cor., vii, 42-47, dans le Thésaurus de Hase et Iken, Leyde, 1732, t. ii, p. 798-809. En dehors de ce cas, le mariage ne cesse pas d’exister validement. À la manière dont s’exprime l’Apôtre, « je dis, non le Seigneur, » on conclut généralement qu’il conseille, mais qu’il n’ordonne pas au fidèle de rester avec l’infidèle. Les motifs pour lesquels la cohabitation est souhaitable sont la possibilité de convertir l’infidèle et l’intérêt qu’il y a à sauver les enfants. Mais ce sont là deux résultats souvent problématiques, auxquels il n’est pas toujours sage de sacrifier la liberté et la paix que Dieu veut assurer à ses serviteurs. Cf. Cornely, In I epist. ad Cor., Paris, 1890, p. 179-188. — 2. Saint Paul laisse à tous la plus grande liberté à l’égard du mariage. Il conseille’aux non-mariés et aux veufs de rester tels qu’ils sont, v-pourvu que leur abstention n’implique aucun blâme contre le mariage et ne se propose pour but que la pratique delà continence chrétienne. I Cor., vii, 26-28. Les parents sont donc parfaitement libres de marier leur fille, s’ils le jugent bon, et la veuve, bien que plus heureuse dans l’état où elle se trouve, peut se remarier, si tel est son désir. I Cor., vii, 36-40. Il en est cependant auxquels l’Apôtre recommande formellement le mariage ; ce sont les célibataires, les veufs et surtout les jeunes veuves qui se sentent incapables de garder la continence en dehors de l’état de mariage. I Cor., vii, 2, 8, 9 ; I Tim., v, 14. Il suit de là que les secondes noces sont permises, quelquefois même désirables. Toutefois, comme elles supposent en général une certaine incapacité de résister aux désirs charnels, saint Paul défend d’admettre au nombre des évêques, des diacres et des veuves employées au service de l’Église, des personnes qui ont été mariées plus d’une fois. I Tim., iii, 2, V& ; v, 9. — 3. Une grave infraction à la loi du mariage s’était produite à Corinthe. Un chrétien avait épousé la femme de son père, c’est-à-dire une femme prise en secondes noces par son père. Cf. Lev., xvhi, 8. Cette union allait contre les prescriptions mosaïques et surtout contre les convenances naturelles les plus élémentaires. Saint Paul n’hésita pas à excommunier le coupable. I Cor., v, 1-15.

2° La vie chrétienne dans le mariage. — 1. Tout en honorant le mariage comme une institution divine et nécessaire, l’Apôtre constate qu’il opposé généralement un obstacle à la vie parfaite. La femme mariée s’inquiète du monde et s’occupe de plaire à son mari. I Cor., vii, 34. On ne peut l’en blâmer. Mais il y a là un attrait d’ordre inférieur qui, joint aux tribulations de la vie de famille, rend l’étal de mariage moins désirable que le célibat chrétien. D’ailleurs la vie est courte ^’il ne faut donc pas s’absorber dans les soins temporels ; « que ceux qui ont des épouses soient comme n’en ayant pas, » c’est-à-dire qu’ils De laissent pas les soucis conjugaux prévaloir contre les

exigences ou même les convenances du service de Dieu. I Cor., vii, 29. — 2. L’Épitre aux Hébreux, xiii, 4, demande « que le mariage soit honoré et le lit nuptial sans souillure ». Saint Paul explique qu’en vertu du mariage, le mari se doit à sa femme et la femme à son mari, de sorte que le corps de chaque conjoint appartient, non à lui-même, mais à l’autre conjoint, lequel du reste n’est autorisé à s’en servir que pour les fins voulues de Dieu. Cette mutuelle servitude ne peut être interrompue que temporairement, par consentement réciproque et en vue d’un avantage spirituel, comme la prière. Encore faut-il revenir au plus tôt à la vie commune, pour se garantir contre la tentation. I Cor., vii, 3-5. — 3. D’autres devoirs s’imposent encore aux époux. Le mari doit aimer sa femme, Eph., v, 25 ; Col., iii, 19, la nourrir et en prendre soin. Eph., v, 29. La femme doit être soumise à son mari, Eph., v, 22-24 ; Col., iii, 18, le respecter, Eph., v, 33, et l’interroger à la maison pour s’instruire des choses de la foi. I Cor., xiv, 35. Saint Pierre recommande aussi aux femmes d’être soumises à leurs maris, afin de ramener à Dieu ceux qui en seraient éloignés ; il veut qu’elles gardent en tout la modestie et le calme, sous le regard de Dieu, Il exige que les maris se montrent intelligents dans l’honneur qu’ils doivent à leurs femmes, plus faibles qu’eux physiquement, mais leurs cohéritières au point de vue de la grâce et du salut. I Pet., iii, 1-7. — 4. Dans ces textes, il n’est point fait d’allusion directe au caractère religieux et sacramentel du mariage chrétien. Saint Ignace, Epist. ad Polycarp., 5, t. v, col. 724, dit qu’il est convenable que les époux ne s’unissent qu’avec l’avis de l’évêque, pour que les mariages soient selon le Seigneur et non réglés par la passion. Il ne connaît pas de rite particulier transmis par les Apôtres pour la célébration du mariage chrétien. Les premiers fidèles contractaient donc leur union à la manière de^ Juifs, ou même avec les formes légales en vigueur dans l’empire, en excluant toutefois ce qui pouvait avoir un caractère païen. Les mariages romains se contractaient d<> trois manières : par l’usage, en cohabitant pendant un an et un jour ; par contrat, quand les parties se liaient en simulant une vente, et par une cérémonie religieuse appelée confarreatio. Cette dernière forme ne pouvait être employée par les époux chrétiens, à cause de ses rites idolâtriques. Chez les Grecs, la célébration du mariage comportait également des actes idolâtriques dont ne pouvait s’accommoder la foi chrétienne. Cf. Rich, Dict. des antiq. grecques et romaines, trad. Chéruel, Paris, 1873, p. 186, 396 ; Fustel de Coulanges, La Cité antique, Paris, 7e édit., p. 43-45. Malgré l’absence de l’intervention ecclésiastique, saint Paul attribue au mariage chrétien d’importants effets de grâce. Comme le baptême et la pénitence, le mariage a le caractère de guérison et de préservation ; il contient dans de justes limites les instincts sensuels, en leur accordant la satisfaction à laquelle ils ont droit, I Cor., vii, 8, 9 ; I Tim., v, 14, en empêchant ainsi le péché, en coupant court à la tentation, I Cor., vii, 5, et en soumettant la chair à une discipline morale qui contribue à sanctifier un état dans lequel la nature tend toujours à avoir la première place. I Cor., vii, 5 ; Heb., xiii, 4. Le mariage chrétien devient aussi un moyen de sanctification, puisque l’épouse doit se sauver en engendrant des enfants, sans cesser pour cela de pratiquer les vertus chrétiennes. I Tim., ii, 15. Dans ces conditions, le mariage, qui sert à édifier, à compléter et à perpétuer l’Église, doit nécessairement recevoir d’elle l’appui et la bénédiction d’une grâce spéciale. Cf. Dôllinger, Le christianisme et l’Église, trad. Bayle, Paris, 1863, p. 510-512. Sur le mariage, sacrement de la loi nouvelle, voir Dictionnaire de théologie, au mot Mariage.’III. SYMBOUSUEDB MARIAGE CHRÉTIEN. — 1° DaDS le

Nouveau Testament, le Sauveur prend facilement le titre d’époux et fait représenter sous la figure du mariage son

union avec l’humanité régénérée. Matth., ix, 15 ; xxii, 1-14 ; xxv, 1-13 ; Joa., iii, 29 ; II Cor., xi, 2. Les noces de l’Agneau avec son épouse, l’Église triomphante, sont, dans saint Jean, la figure du bonheur céleste. Apoc, xix, 7 ; xxi, 2, 9 ; xxii, 17. — 2° Saint Paul assimile l’union de Jésus-Christ et de l’Église à l’union matrimoniale. La première est le type et l’exemplaire de la seconde. Pour le montrer, l’Apôtre établit un parallèle entre les deux unions. Jésus-Christ est le chef de l’Église, l’époux est le chef de l’épouse ; l’Église est soumise au Christ, les femmes doivent soumission à leurs maris ; le Christ aime l’Église, il s’est livré pour la sauver, la rendre belle et sans tache, la nourrir et l’entourer de soins, l’époux doit aimer l’épouse comme sa propre chair et la traiter en conséquence. Eph., v, 22-31. Ce symbolisme n’est pas arbitraire. Il suppose une relation réelle entre les deux ordres d’idées ; il élève le mariage à une hauteur qui le rapproche du type sacré et en fait quelque chose de supérieur à ce que la nature peut produire à elle seule. Saint Paul en effet ajoute : « Ce mystère est grand, mais il l’est eïç Xpcdrbv xai eïç rrjv èxxXvidtav, en vue du Christ et de l’Église ; » en d’autres termes, ce qui fait la grandeur de ce symbole, à savoir de l’union de l’époux et de l’épouse, c’est la chose qu’il symbolise, vers laquelle il tend, à savoir l’union du Christ et de l’Église. Cette tendance n’est pas seulement figurative, elle est réelle et effective, puisque l’Église se recrute avec les enfants que lui fournissent les mariages chrétiens. La Vulgate ne rend pas toute la force du grec par les mots in Christo et in Ecclesia, « dans le Christ et dans l’Église. » Elle traduit [tuarviptov, « mystère, » par sacramentum. Ce mot est en latin un terme technique qui désigne la consignation faite par les plaideurs, le procès lui-même, l’enrôlement et le serment militaires. Il est pris ici pour traduire |iu17T/ipiov, et il en a le sens. Lactance, Divin, institut., vii, 24, édit. Thomasius, Anvers, 1570, p. 434, appelle sacramentum le mystère de l’avenir révélé par les prophètes, et Prudence, Peristephan., x, 18, édit. Giselin, Leyde, 1596, p. 130, donne le même nom au mystère du Christ que les Apôtres auront à prêcher dans le monde. Ce mot n’apparaît que plus tard avec le sens particulier de « sacrement ». Saint Jérôme ne l’emploie avec ce sens, ni dans ses œuvres, ni dans la Vulgate. Eph., v, 32. Cf. S. Irénée, Adv. hœres., 1, viii, 4, t. vii, col. 532.

IV. LE MARIAGE DE LA SAINTE VIERGE ET DE SAINT

joseph. — Au moment où s’opéra le mystère de l’incar nation, Marie et Joseph étaient unis ensemble par des fiançailles, en vertu desquelles ils appartenaient déjà l’un à l’autre. Voir t. ii, col. 2231. Quand le moment de célébrer le mariage arriva, Joseph hésita, en constatant ce qui était advenu à sa fiancée. L’ange intervint alors pour lui dire de ne pas craindre de prendre Marie pour sa femme, itapaXaëeïv Mapîav tt|v yuvaîxa trou. Matth., i, 20. Le verbe itapaXaSeïv veut dire « prendre avec soi », spécialement celle dont on veut faire sa femme. Cf. Hérodote, iv, 155 ; Xénophon, (Economie, vii, 6. Marie, en effet, habitait encore dans la maison paternelle, comme c’était la règle pour toutes les fiancées. Joseph obéit à l’ordre divin et prit Marie chez lui comme étant devenue sa femme, itapIXccësv tï|v-pvaïxa avrcoû. Matth., i, 24. Ce1à x signifie que les noces furent célébrées suivant la coutume et qu’à partir de ce jour Joseph reçut et garda Marie dans sa maison. Cette union * constituait un véritable mariage, l’usage total du mariage n’étant nullement essentiel à sa réalité. Cf. Lehmkuhl, Theolog. moral., Fribourg-en-Br., 1890, t. ii, p. 482 ; Gasparri, De matrimon. , t. i, p. 120, 121. La vie fut commune entre les deux époux. Joseph exerça l’autorité dans la famille, Matth., i, 21 ; Luc, ii, 4, 22 ; Matth., ii, 14, 21-23, et eut les droits de père vis-à-vis de l’enfant Jésus. Luc, II, 48. Marie reçut de Joseph ce que la femme a le droit d’attendre de son mari, l’affection, le dévouement, la

protection dans des circonstances difficiles, l’habitation, la nourriture, et un concours respectueux et généreux dans les soins dont il fallait entourer le divin Enfant. Saint Joseph s’acquitta si dignement et si discrètement de sa tâche que le monde ne le connut que comme époux de Marie et père de Jésus. Luc, iii, 23 ; IV, 22 ; Matth., xiii, 55 ; Marc, vi, 3. Saint Augustin, Cont. Julian., V, xii, 45, t. xliv, col. 810, explique comment on trouve dans cette union les trois liens constitutifs du mariage : le contrat par lequel les époux se donnent l’un à l’autre, l’amour conjugal qu’ils ont l’un pour l’autre, l’affection qu’ils ont en commun pour l’enfant. Cf. Bossuet, p* Panégyrique de S. Joseph, 1™ part.

H. Lesêtre.
    1. MARIAM##

MARIAM (hébreu : Miryâm ; Septante : Mapwv), fils d’Ezra, descendant de Caleb, fils de Jéphoné, de la tribu de Juda. I Par., iv, 17. Quelques-uns pensent que Mariam peut être une femme, qui aurait porté le même nom que Marie, sœur de Moïse. Les Septante lui donnent pour père Jéther, qui est son frère d’après l’hébreu et la Vulgate. Le texte des ꝟ. 17-18 paraît d’ailleurs altéré et il est difficile de rétablir la leçon primitive.

    1. MARIE##

MARIE, nom de la sœur de Moïse, de la mère de Jésus et de plusieurs autres femmes du Nouveau Testament.

I. Forme du nom. — Marie se lit en hébreu miryâm. Ce nom désigne toujours la sœur de Moïse, la seule qui s’appelle ainsi dans l’Ancien Testament. Le même nom, il est vrai, est assigné à un homme, I Par, , iv, 17 ; mais en cet endroit les Septante le traduisent par Mapwv, et quoique la Vulgate ait conservé Mariam, il est fort probable que l’orthographe de l’hébreu a été altérée, surtout dans un passage rempli de noms propres dont la transcription exacte est très peu sûre. Dans les Septante, miryâm devient Mapiâpi, orthographe analogue à celles du syriaque et de l’araméen, qui écrivent Maryam. Dans le Nouveau Testament, le nom de la Sainte Vierge est toujours Mopiâfi, comme le nom de la sœur de Moïse ; il n’y a d’exception que pour un passage de saint Luc, II, 19, dans lequel le Vaticanus et le Codex Bezse, suivis par un certain nombre de critiques, lisent Mapi’a. Au génitif, Mapiâp. devient Maptaç, au datif Mapfa, à moins que Maptân ne soit traité comme indéclinable. Cette dernière forme sert également à l’accusatif et au vocatif. Les autres femmes de l’Évangile sont toujours appelées Mapia. Il est possible qu’en conservant exclusivement pour la Sainte Vierge la forme archaïque du nom, Maptâ[i, les Évangélistes aient tenu à la distinguer des autres femmes jusque dans ce détail de l’appellation. La Vulgate traduit invariablement par Maria, dans l’Ancien comme dans le Nouveau Testament. Dans Josèphe, AnX. jud., II, IX, 4, le nom prend la forme Mapiômiïi.

II. Signification du nom. — En recherchant les explications que les écrivains anciens et modernes ont données du nom de « Marie », on arrive à compter soixante-sept étymologies différentes. Cf. Bardenhewer, Der Name Maria, Fribourg-en-Brisgau, 1895, p. 157-158. Ces explications supposent toujours que le mot miryâm appartient à la langue hébraïque. Les unes le traitent comme nom composé, les autres comme nom simple. Voici les principales :

1° Nom composé. — « Mer amère, » de mar, « amère, n et yâm, « mer. » Mais le composé hébreu devrait être yâm-mar, et non pas mar-ydm. — « Leur révolte, » miryâm, de merî, « révolte, » suivi de l’adjectif possessif. Le mot se trouve II Esd., îx, 17. Il n’y a là qu’une simple coïncidence syllabique, et l’on ne conçoit guère un nom pareil donné à une jeune fille. — « Maltresse de la mer, » de l’araméen mdri, « maître, » Dan., iv, 16, et de yâm, « mer. » — « Myrrhe de la mer, » de mor, « myrrhe, » et de yâm, « mer, » — ï Goutte de la’mer, »

stilla maris, de mar, v( goutte, » Is., xl, 15, et yâm, « mer. » — « Étoile de la mer, » Stella maris. Cette explication, devenue si populaire, est présentée par saint Jérôme, De nomin. hebraic., de Exod., de Matth., t. xxiii, col. 789, 842. Un seul manuscrit, datant de la fin du IXe siècle et conservé à Bamberg, porte stilla maris au lieu de Stella maris. Saint Jérôme connaissait trop bien l’hébreu pour donner à mar le sens d' « étoile ». Dans Isaïe, XL, 15, il traduit parfaitement ce mot par stilla, « goutte. » Il a donc dû écrire primitivemeut dans son commentaire stilla maris, qui est devenu sous la plume des copistes Stella maris, par suite de la facilité avec laquelle on substituaite à i dans l’ancienne orthographe latine. Ainsi les paysans disaient vea pour via, vella pour villa, speca pour spica. Vairon, Ber. rustic, I, ii, 14 ; xlviii, 2. Quintilien, Inst. oral., i, iv, 17, constate aussi

, qu’on substituait Menerva, leber, magester, etc., à Minerva, liber, magister, etc. Aulu-Gelle, Noct. Attic, X, xxiv, 8, fait une remarque analogue. Bien d’autres exemples pourraient être fournis ; cf. Bardenhewer, Ber Name Maria, p, 69, 70. En voici un qui porte sur le mot ici en question. Dans son commentaire sur Job, xxxvi, 27 : Qui aufert stillas pluvite, saint Grégoire le Grand, Moral., xxvii, 8, t. lxxvi, col. 405, donne des explications

. qui supposent nécessairement dans le texte : steUas plu~ vise. Il lit de même stellse pluviarum au lieu de stillse pluviarum dans Jérémie, iii, 3, t, lxxv, col. 867. Cette manière de lire et de transcrire explique naturellement la substitution de Stella maris à stilla maris dans le texte de saint Jérôme, puis la consécration définitive de la première étymologie, dont le caractère poétique et sym . bolique était si bien fait pour fournir matière aux développements oratoires.

2° Nom. simple. — D’autres auteurs ont traité miryâm comme un nom simple, pouvant avoir les sens suivants : èXiti ; , « espérance, » d’après Philon, De somn., Il, 20, édit. Mangey, t. H, p. 677, sans qu’on voie de quelle racine hébraïque ce sens peut provenir, môraS, « espérance, » étant trop éloigné de miryâm ; — « amère, s de mar, qui a ce sens ; — « hauteur, » de mârôm, qui a ce sens ;

. — « rebelle, » de moréh, qui a ce sens ; — « maîtresse, » de l’arméen mârî, « maître ; » — « don, » en faisant dériver miryâm de rûm, comme ferùmdh, qui veut dire « présent » ; — « illuminatrice, » en rattachant miryâm à 'ôr, « briller, » ou à rd'âh, « voir, » d’où mar'éh, « faisant voir ; » — « myrrhe, » de rnôr, qui a ce sens. Ces étymologies, et d’autres analogues, ne sont guère satisfaisantes, parce que les dérivations proposées sont vagues, lointaines ou arbitraires.

3° Sens le plus probable. — Hiller, Onomasticutn sacrum, Tubingue, 1706, p. 173, a montré que dans miryâm, la terminaison dm, n’est qu’une forme finale sans signification précise. P. Schegg, Evang. nach Matthàus, Munich, 1856, p. 419, a fait dériver miryâm de la racine mara', « ; être gras, bien portant, » en assyrien marû,

. « gras, » en arabe marjâ, « gras, fort ; » d’où le mot mery',

. « bétail gras. » II Reg., vi, 13, etc. Avec les idées orientales sur la beauté, « bien portante » ou « bien nourrie » a le sens de « belle ». De son enquête sur les sens donnés au nom de « Marie », Bardenhewer, Der Name Maria, p. 154-155, tire plusieurs conclusions, dont les plus importantes sont celles-ci. Il n’y a point de raison pour ne pas s’en tenir à la ponctuation massorétique, Miryâm, bien que les versions supposent Maryàm. Ce mot conslitue un nom simple, auquel est ajoutée une finale. Il ne peut venir que de mârâh, « être rebelle, récalcitrante, » ou de mârâ, « être bien portante » et conséquemment « belle ». Le premier sens ne pouvait convenir pour former le nom d’une jeune fille ; c’est donc le second qui est le plus probable.

4° Nom égyptien — H ne serait pas impossible cependant que le nom de « Marie » ait une origine égyptienne. Moïse, Aaron et leur sœur étaient nés en Egypte.

Le nom d’Aaron ne peut s’expliquer en hébreu. Voir Aaron, t. i, col. 2. Lé nom de Moïse, donné à l’enfant par la fille du pharaon, était nécessairement un nom égyptien, bien qu’une étymologie hébraïque lui soit attribuée. Exod., ii, 10. Voir Moïse. Il est donc au moins possible que le nom de leur sœur, Marie, ait eu une origine égyptienne. Il signifierait alors « chérie », de mery, meryt, qui veulent dire « chéri ». Ce sens conviendrait bien au nom d’une fille aînée. Cf. De Hummelauer, In Exod. et Levit., Paris, 1897, p. 161. Ce qui pourrait confirmer cette dernière hypothèse, c’est que, si le nom de « Marie » avait une origine hébraïque, on le rencontrerait plus fréquemment dans l’Ancien Testament, où il n’est porté que par la sœur de Moïse. Mais d’autre part on se demande alors pourquoi il a été choisi par les parents de la Sainte Vierge et par plusieurs autres dans le Nouveau Testament. — On ne peut donc rien affirmer de certain quant au sens et quant à l’origine de

ce nom.
H. Lesêtre.

1. MARIE, sœur de Moïse. — 1° Elle était fille d’Amram et de Jochabed. Exod., vi, 20 ; Num., xxvi, 59 ; I Par., vi, 3. Aaron, son frère, avait trois ans de plus que Moïse, Exod., vii, 7, et elle était l’aînée des deux frères, âgée au moins d’une dizaine d’années à la naissance de Moïse, comme le suppose le rôle qu’elle joua au bord du Nil pour sauver son petit frère. C’est en cette circonstance qu’elle apparaît pour la première fois. Jochabed, après avoir caché son jeune fils durant trois mois, vil qu’elle ne pouvait pas le dérober plus longtemps aux recherches et l’exposa sur le Nil, en laissant sa fille aux environs pour voir ce qui se passerait. La fille du pharaon aperçut la corbeille qui contenait l’enfant, la fit prendre et eut pitié du petit malheureux. Marie s’approcha alors et proposa à la princesse d’aller lui chercher une femme du peuple hébreu, pour nourrir l’enfant. La proposition fut acceptée et la jeune fille alla chercher sa propre mère, à laquelle la fille du pharaon confia Moïse. Exod., ii, 4-10. Le dévouement et l’ingéniosité de Marie, probablement conseillée par sa mère, contribuèrent ainsi à assurer le salut et la destinée de son frère. D’après Josèphe, Ant. jud., III, ii, 4 ; VI, 1, Marie aurait épousé Hur, qui soutint avec Aaron les bras de Moïse pendant la bataille contre les Amalécites, Exod., xvii, 10-13, et fut le grandpère de Béséléel. Voir Hur, t. ii, col. 780.

2° Marie était âgée d’environ quatre-vingt-dix ans au moment du passage de la mer Rouge. Exod., vii, 7. Quand Moïse et les enfants d’Israël eurent chanté le cantique de la délivrance, Marie devint prophétesse, neby'âh, c’està-dire saisie par l’esprit de Dieu. Elle prit en main le tambourin, et, suivie des femmes qui avaient aussi des instruments et commencèrent les danses de joie, elle répondit aux hommes d’Israël en reprenant les premiers mots du cantique, comme un refrain qu’ensuite les femmes ne se lassèrent pas de redire. Exod., xv, 20, 21 ; Mich., vi, 4. Plus tard, Marie fit allusion à l’inspiration que Dieu lui avait communiquée en ce jour. Num., xii, 2.

3° On était arrivé dans le désert, après le départ du Sinaï, à la station de Haséroth, quand Marie et Aaron se laissèrent aller à un mouvement de jalousie contre Moïse. Le prétexe mis en avant fut que Moïse avait pris pour femme une Éthiopienne, soit qu’on qualifiât ainsi Séphora, qui était Madianite, Exod., ii, 21, mais pouvait compter des Éthiopiensparmi sesancêtres, cf. De Huminelauer, In Num., Paris, 1899, p. 97, soit qu’après la mort de Séphora Moïse ait réellement épousé une Éthiopienne d’Arabie. Cf. Rosenmûller, In libr. Num., Leipzig, 1798, p. 214. Voir Moïse, Séphora. On se plaignait sans doute de l’influence que l'épouse de Moïse exerçait sur lui, alors que des femmes d’Israël eussent mérité, semblait-il, d’avoir plus de crédit auprès de lui qu’une étrangère. Aaron et Marie firent sonner haut le privilège qu’ils avaient eu, aussi bien que Moïse, de recevoir les comniunications particulières de Dieu. Exod., xv, 20 ; xxviii, 30 ; Lev., x, 8. Ils en concluaient qu’ils avaient plus de droits à partager les honneurs et le pouvoir que sa femme, et aussi peut-être que les soixante-dix anciens que le Seigneur venait d’adjoindre à Moïse pour le règlement des affaires courantes. Num., xi, 16, 17. Moïse, doux et patient, ne fit aucune opposition à ces prétentions. Mais le Seigneur intervint pour venger l’autorité de son serviteur, et, en punition de sa témérité, Marie fut frappée de la lèpre. Aussitôt Aaron, comprenant qu’il était lui-même aussi coupable que sa sœur, conjura Moïse de ne pas la laisser comme un enfant mort-né, dont la chair est consumée par le mal. À son tour, Moïse implora le Seigneur. Dieu se laissa toucher. Il voulut cependant que Marie, qui avait mérité sa malédiction, fût enfermée sept jours, hors du camp, après quoi elle y serait reçue. Le texte ne dit pas si Marie fut guérie sur-le-champ ou seulement le septième jour. Cette seconde hypothèse paraît plus vraisemblable, à cause de l’exemple à donner au peuple. D’ailleurs, le texte emploie ici le mot sâgar, qui ne veut pas dire seulement « exclure », exclusa, mais « enfermer », ἀφωρίσθη, « elle fut séparée et mise à part, » ce qui convient mieux pour une personne atteinte de la lèpre auprès d’un camp autour duquel chacun peut aller et venir. On attendit la guérison de Marie pour partir de Haséroth. Num., xii, 1-15. La lèpre de Marie est rappelée dans le Deutéronome, xxiv, 9, pour faire comprendre au peuple que cette maladie comporte une intervention de Dieu, et que, dans son traitement, il faut se comporter, comme le prescrit la loi divine.

4° Marie mourut à la station de Cadès et y fut ensevelie. Num., xx, 1. Voir Cadès, t. ii, col. 22. C’est à la station suivante, à la montagne de Hor, qu’Aaron mourut, Num, xx, 28, la quarantième année après la sortie d’Egypte. Num., xxxiii, 38. Il ne s’ensuit nullement que Marie soit morte cette même année, comme le dit Josèphe, Ant. jud., IV, iv, 6 ; car les Hébreux restèrent très longtemps à Cadès, Deut, i, 46, et la mention de la mort de Marie suit immédiatement celle de l’arrivée à cette station. Josèphe ajoute qu’on l’enterra sur la montagne de Sin et que le peuple prit le deuil pendant trente jours. Saint Jérôme, De sit. et nomin., t. xxiii, col. 885, dit que, de son temps, on voyait encore le tombeau de Marie.

H. Lesêtre.

2. MARIE, mère de Jésus (fig. 217). Elle avait été figurée et prophétisée dans l’Ancien Testament et les Évangiles nous font connaître les principales circonstances de sa vie.

I. Figures et prophéties dans-l’Ancien Testament. — Ces figures et ces prophéties sont signalées par les Pères et par la liturgie de l'Église.

I. figures.

Ève.

La première femme reçut d’Adam le nom d’Ève, c’est-à-dire « vie », parce qu’elle fut la mère de tous les vivants. Gen., iii, 20. Mais en leur transmettant la vie naturelle, elle leur transmit la mort spirituelle. Marie est la mère de tous les vivants dans l’ordre de la grâce, et elle n’a pas failli à sa mission. Les Pères l’appellent la nouvelle Ève et signalent le contraste qui existe entre la mère du Sauveur et la mère du genre humain. Cf. S. Justin, Dial. cum Tryphon., 100, t. vi, col. 709-711 ; Tertullien, De carne Christi, 17, t. ii, col. 782 ; S. Irénée, Adv. hæres., iii ; 22 ; v, 19, t. vii, col. 958, 1175 ; S. Cyrille, Cateches., xii, 15, t. xxxiii, col. 741 ; S. Jérôme, Ep. xxii ad Eustoch., 21, t. xxil, col. 408 ; S. Augustin, De agone Christi, 22, t. XL, col. 303 ; etc. Voir Newman, Du culte de la Sainte Vierge dans l'Égl. cath., trad. du Pré de Saint-Maur, Paris, 1866, p. 36-51 ; Terrien, La mère de Dieu et la mère des hommes, Paris, 1902, t. iii, p. 8-13, 353.

Le buisson ardent, que le feu embrase sans le consumer, Exod., iii, 2, figure de Marie qui porte en elle le Fils de Dieu incarné, sans nulle altération de sa virginité. Cf. Ant. 3 ad Laud. Circumcision.

L’arche d’alliance, sur laquelle se manifeste la présence de Dieu, figure de Marie qui porte Dieu en elle. Voir Arche d’alliance, t. i, col. 923.

La toison de Gédéon, sur laquelle la rosée s’arrête sans mouiller la terre, Jud., vi, 37, 38, figure de Marie qui reçoit dans son sein le Sauveur venu du ciel. Cf. S. Ambroise, De Spirit. sanct., i, 8, 9, t. xvi, col. 705 ; S. Jérôme, Epist cviii, 10, t. xxil, col. 886 ; Ant. 2 ad Laud. Circumcision.

L'épouse du Cantique. Voir Cantique des cantiques, t. ii, col. 197. Parce que l'épouse du Cantique est une figure de Marie, l'Église a emprunté à ce livre la plupart des éléments de son office de la Sainte Vierge. Sur l’interprétation du Cantique appliqué à la Sainte Vierge, voir Gietmann, In Eccles. et Cant. cant., Paris, 1890, p. 417-418.

Le jardin fermé, Cant., iv, 12, voir Jardin, t. iii, col. 1132, figure de la virginité de Marie. Cf. Respons. 7 Noct. Immac. Concept.


217. — La Vierge de Ravenne. Bas-relief grec du vie siècle. D’après Anna Jameson, Legends of the Madonna, 1858, p. 3.

7° La fontaine scellée, Cant., iv, 12, voir Aqueduc, t. i, col. 799, même signification.

La sagesse. Prov., viii, 22-31 ; Eccli., xxxiv, 551. Cf. Bulle Ineffabilis, Lect. iv ad Noct. x decemb. L'Église emprunte les textes de ces passages dans ses offices de la Sainte Vierge.

9° Différents personnages comme Sara, Débora, Judith, Esther, etc., ont été aussi considérés comme des figures de Marie.

10° Enfin beaucoup d’autres figures de Marie sont indiquées soit par les Pères, soit par l'Église dans ses prières. Cf. Terrien, La mère de Dieu, t. i, p. 120, 121 ; t. ii, p. 117, 118 ; Lecanu, Histoire de la Sainte Vierge, Paris, 1860, p. 51-82. Plusieurs sont rappelées dans l’ Ave maris Stella, les Litanies de la Sainte Vierge, etc.

II. Prophéties.

Le protévangile.

Dans la sentence portée contre le tentateur, le Seigneur s’exprime ainsi : « J’établirai inimitié entre toi et la femme, entre ta race et la tienne ; elle (cette race) te broiera (yešùf) la tête et tu lui broieras (tešûf) le talon. » Gen., iii, 15. Le même verbe hébreu, šûf, est employé dans les deux membres de la seconde phrase. Les Septante emploient dans les deux cas le verbe τηρέω, « guetter, » qui atténue la force de l’hébreu. L'édition de Complute lui substitue le verbe τείρω, « accabler, briser. » Aquila, Symmaque, le Syriaque et le Samaritain traduisent par des verbes qui ont le sens de « broyer ». S. Jérôme, Quœst. Hebr. in Gen., t. xxiii, col. 943, dit que le verbe contero, « broyer, » rend mieux l’hébreu que servo, « garder, » par lequel l’Itala rendait les Septante. C’est sans doute pour concilier les deux textes et ne pas trop heurter l’usage reçu de son temps qu’il se sert des deux verbes contero, « broyer, » et insidiori, « dresser des embûches : » « Elle te broiera la tête et tu attenteras à son talon. » Les deux actions marquée » par le même verbe sont donc de même nature : la race de la femme exercera sur le serpent un sévice qui appellera une riposte de la part de ce dernier. Seulement la blessure sera mortelle pour le serpent, dont la tête sera broyée, tandis que pour la race de la femme, dont le talon seul sera broyé, la blessure, si cruelle qu’elle soit, n’entraînera pas la mort et sera guérissable. — La Vulgate actuelle rend par ipsa, « elle, » la femme, le pronom hébreu hû’, αὐτός, qui est masculin et se rapporte à la race. La tête du serpent sera donc écrasée non par la femme elle-même, soit Eve, soit sa descendante, Marie, mais par la race de la femme. Cette race est prise collectivement, comme la race du serpent. Mais de même que la race maudite a triomphé au paradis par Satan, la race de la femme triomphera plus tard par Jésus-Christ. Cf. S. Irénée, Adv. Haeres., iii, 23, t. vii, col. 964 ; S. Justin, Dial. cum Tryphon., 100, t. vi, col. 712 ; S. Cyprien, Testim. cont. Judaeos, ii, 9, t. iv, col. 704 ; S. Épiphane, Haeres., III, ii, 18, t. xlii, col. 729 ; etc. La Sainte Vierge n’est donc pas personnellement visée par la prophétie, comme le texte de la Vulgate le donne à croire ; mais il est question d’elle par voie de conséquence directe. La bulle Ineffabilis, après avoir rappelé la première partie de la sentence : « J’établirai des inimitiés entre toi et la femme, entre ta race et sa race, » indique en ces termes la part qui revient à la Sainte Vierge dans l’accomplissement de l’oracle : « La très sainte Vierge, unie au Christ par un très étroit et indissoluble lien, avec Lui et par Lui, a exercé contre le serpent d’éternelles inimitiés, et, en triomphant de celui-ci de la manière la plus complète, lui a écrasé la tête de son pied immaculé. » Lect. vi ad Noct. xiv decemb.

L’Almah et l’Emmanuel. Is., vii, 10-17. Voir ’Almah, t. i, col. 390-397 ; Lagrange, La Vierge et Emmanuel, dans la Revue biblique, Paris, 1892, p. 481-497 ; A. Lémann, La Vierge et l’Emmanuel, Paris, 1904.

Le texte de Jérémie, XXXI, 22. Il est traduit dans la Vulgate : « Le Seigneur a créé une chose nouvelle sur la terre : une femme entourera un homme. » Saint Jérôme, In Jerem., t. xxiv, col. 880, seul parmi les Pères latins, entend ce texte de la Vierge qui doit enfanter le Messie. Les Septante traduisent tout autrement : « Le Seigneur a créé le salut en plantation nouvelle, les hommes entoureront dans le salut. » Aquila traduit : « Le Seigneur a créé quelque chose de nouveau dans la femme. » Saint Athanase, t. xxv, col. 205 ; t. xxvi, col. 1276, combinant les deux textes, dit que la nouvelle plantation est Jésus, et que ce qui a été créé de nouveau dans la femme, c’est le corps du Seigneur enfanté par la Vierge Marie sans la coopération de l’homme. Quant au texte hébreu, il semble avoir souffert en cet endroit, ce qui explique la diversité des traductions. Le sens parait être celui-ci : « Dieu crée sur la terre une chose nouvelle : la femme retourne vers l’homme. » Il s’agit, dans ce chapitre de Jérémie, du retour en grâce de la nation israélite, répudiée par le Seigneur. Quand un homme avait répudié sa femme, il ne pouvait plus la reprendre. Deut, xxiv, 1-4 ; Jer., iii, 1. Or le Seigneur va faire une chose nouvelle, que la Loi n’a jamais permis de faire : il va permettre à la femme répudiée de revenir à son mari, c’est-à-dire il va permettre à la nation coupable de retrouver l’amitié de son Dieu. À s’en tenir à ce sens du texte hébreu, il n’y aurait donc pas là de prophétie concernant la Sainte Vierge. Cf. Condamin, Le texte de Jérémie, xxxi, 22, est-il messianique ? dans la Revue biblique, 1897, p. 396-404.

4° On peut encore considérer comme concernant indirectement la Sainte Vierge les prophéties qui se rapportent au Fils de Dieu fait homme par l’incarnation. Voir Jésus-Christ, t. iii, col. 1432-1434.

II. Avant la naissance du Sauveur.

I. ORIGINE ET PARENTS DE MARIE.

La Sainte Vierge était de la tribu de Juda et de la descendance de David. Saint Luc, ii, 4, dit avec insistance que saint Joseph se rendit à Bethléhem parce qu’il était « de la maison et de la famille de David ». Mais, dans le chapitre précédent, 32, 69, les mentions qui sont faites de la maison de David se rapportent à Marie, en tant que mère du Sauveur. Saint Paul parle du Fils de Dieu « né de la race de David selon la chair ». Rom., i, 3. C’est seulement de la Sainte Vierge que le Fils de Dieu est né selon la chair ; c’est donc par elle qu’il appartient à la descendance de David. Cf. Tertullien, De carn. Christi, 22, t. ii, col. 789 ; S. Augustin, De consens. Evangelist., ii, 2, 4, t. xxxiv, col. 1072.

2° Les parents de la Sainte Vierge ne sont connus que par la tradition. Voir Anne, t. i, col. 629 ; HÉLI, t. iii, col. 570 ; Généalogie de Jésus-Christ, t. iii, col. 169. Saint Jean Damascène, Hom. i, de Nativ. B. V., 2, t. xcvi, col. 664, appelle les parents de la Sainte Vierge Joachim et Anne, et il ajoute que, dans un âge avancé, ils durent à de ferventes prières la naissance de leur fille. Saint Grégoire de Nysse, t. xlvii, col. 1137, reproduit le même renseignement en l’attribuant à une histoire « apocryphe ». La source ainsi indiquée est l’apocryphe appelé « Protévangile de Jacques », qui commence par le récit de l’annonciation de la naissance de Marie faite à Anne et à Joachim, et dont la composition remonte à la fin du iie siècle. Voir Évangiles apocryphes, t. ii, col. 2115, et le De nativitate sanctae Mariae, à la suite des œuvres de S. Jérôme, t. xxx, col. 298-305. Cette tradition est acceptée par saint Germain de Constantinople, Or. de praesentat., 2, t. xcviii, col. 313 ; le pseudo-Épiphane, De laud. Deipar. , t. xliii, col. 488 ; l’auteur d’un sermon De Nativ. B. V. M., dans les œuvres de S. Hilaire, t. xcvi, col. 278; S. Fulbert de Chartres, In Nativ. Deipar., t. cxli, col. 324, etc.

3° L’auteur de l’Évangile apocryphe fait habiter Joachim et Anne à Nazareth. Cf. Acta sanctorum, 26 juillet, t. vi, 1729, p. 233-239 ; 3 mars, t. iii, 1668, p. 78-79. Ils habitaient plus probablement à Jérusalem une maison que saint Sophrone de Jérusalem, en 636, Anacreontic., xx, 81-94, t. lxxxvii, col. 2822, appelle « la sainte Probatique où l’illustre Anne enfanta Marie ». Un siècle plus tard, saint Jean Damascène, Hom. in Nativ. B. M. V., t. xcvi, col. 667, dit également que la mère de Dieu est née dans la sainte Probatique, Des témoignages d’auteurs postérieurs reproduisent la même indication. Voir Bethsaïde (Piscine de), t. i. col. 1730-1731, et le plan, col. 1725. L’emplacement de la maison des parents de Marie serait occupé par l’église de Sainte-Anne, qui n’est qu’à une trentaine de mètres de l’ancienne piscine, d’où le nom de « sainte Probatique » que les anciens ont donné à cette église. Le 18 mars 1889, on a retrouvé la crypte qui avait jadis renfermé le tombeau de sainte Anne (fig. 218). Il est probable qu’à la place de cette crypte, il y avait primitivement un jardin dans lequel Anne et Joachim auraient été inhumés, selon la coutume ancienne. I Reg., xxv, 1 ; xxviii, 3 ; III Reg., ii, 34 ; IV Reg., xxi, 18. D’ailleurs cet emplacement se trouvait alors en dehors de la ville, à environ cent vingt mètres de l’enceinte du Temple. On croit que la crypte contiguë à celle des tombeaux occupe la place de la chambre dans laquelle serait née la Sainte Vierge. C’est pour cette raison que l’église anciennement bâtie à cet endroit s’appela d’abord SainteMarie de la Nativité. Cf. Guérin, Jérusalem, Paris, 1889, p. 284, 351-357, 430 ; A. Socin-Benzinger, Palästina und Syrien, Leipzig, 1891, p. 80 ; L. Cré, Tombeau de saint Joachim et de sainte Anne, dans la Revue biblique, 1893, p. 245-274 ; H. Vincent, La crypte de Sainte-Anne à Jérusalem, dans la Revue biblique, 1904, p. 228-241. Il est vrai que quand, dans la vallée du Cédron, l’on descend l’escalier qui mène à l’église de l’Assomption, où l’on vénère le tombeau de Marie, on rencontre à droite une petite chapelle, avec deux autels qui recouvrent des tombeaux dits de sainte Anne et de saint Joachim. Mais cette attribution est erronée et ces tombeaux appartiennent à des personnages de l’époque des croisades. Cf. de Vogüé, Les églises de la Terre-Sainte, Paris, 1850, p. 310.



218. — Plan de l’église Sainte-Anne à Jérusalem. — A. Antique citerne. — G. Chambre située sous l’abside. — N. Crypte de la Nativité. — T. Tombeau de sainte Anne. D’après la Revue biblique, 1893, p. 273.


II. l’immaculée conception.

1° Aucun texte de la Sainte Écriture n’énonce explicitement ce dogme. Mais, étant donnée la définition de l’Église, déclarant que la Vierge Marie a été préservée de toute atteinte du péché originel, on est en droit de retrouver le dogme à l’état implicite dans le texte sacré. — L’inimitié entre la femme et le serpent et la victoire promise à la race de la femme s’étendent donc jusqu’à la soustraction totale de Marie à l’influence de Satan. Gen., iii, 15. La bulle Ineffabilis note la convenance du triomphe total de la mère de Dieu sur l’antique serpent. Cf. Noct. ix dec, lect. v ; xiv dec., lect. vi. — De même, la plénitude de grâce que l’ange Gabriel salue en Marie comprend l’innocence parfaite et l’exemption même de la faute originelle. Luc., i, 28. — Enfin, l’application que l’Église fait à Marie, dans un sens dérivé, de ce qui est dit de la Sagesse : « Le Seigneur m’a créée au commencement de ses œuvres, avant qu’il se fût mis à faire tout autre être, » Prov., viii, 22 ; cf. Missal., viii dec, Epist., permet de conclure que, fille d’Adam quant à la succession du temps, la Vierge Marie lui est antérieure dans le plan divin, et dès lors elle reçoit la vie spirituelle dans des conditions qui, en vertu des mérites de Jésus-Christ, ne dépendent en rien de celles que le péché du premier homme a imposées à tous ses autres descendants. Rom., v, 12. Cf. S. François de Sales, Traité de l’amour de Dieu, ii, 4-6, édit. Pages, p. 89-97.

2° Ce privilège de la Sainte Vierge commença à être fêté à Constantinople à la fin du viie siècle, fut insinué pour la première fois en Occident par saint Anselme, De conceptu virginal., xviii, t. clviii, col. 451, célébré d’abord en Angleterre, dès le xie siècle, puis à Lyon, en 1140, malgré le blâme de saint Bernard, Epist., 174, t. clxxxii, col. 332, défendu énergiquement par l’Université de Paris, érigé en fête solennelle par le concile de Londres de 1328, proclamé article de foi par le concile de Bâle, le 17 septembre 1439, mais à un moment où ce concile n’avait plus aucune autorité, célébré dans l’Église universelle à partir de Sixte IV, qui introduisit la fête de la Conception dans le Bréviaire romain, en 1477, enfin défini dogmatiquement par Pie IX, le 8 déc. 1854. Cf. H. Kellner, Heortologie oder das Kirchenjahr und die Heiligenfeste in ihrer geschichtl. Entwickelung, Fribourg-en-Brisgau, 1901, p. 151-155 ; Le Bachelet, L’Immaculée Conception, Paris, 1903 ; Lesêtre, L’Immaculée Conception et l’Église de Paris, Paris, 1904.

III. naissance.

1° D’après le De nativ. S. Mariæ, 2, 6, t. xxx, col. 298, 301, Marie serait née à Nazareth. Antonin de Plaisance, Itiner., 5, t. lxxii, col. 901, semble le supposer, assez vaguement, du reste. Les bulles des papes Paul II (1471), Jules II (1507), Léon X (1519), Paul III (1535), Pie IV (1565), Sixte V (1586) et Innocent XII (1698), sur la Santa Casa de Lorette, disent que la Sainte Vierge est née, a été élevée et a été saluée par l’ange dans cette maison, par conséquent qu’elle est née à Nazareth. Ces papes n’entendent pas assurément décider sur un fait historique, et ils ne font sans doute qu’adopter l’opinion courante à leur époque. — Une autre tradition fait naître Marie à Sepphoris, à cinq kilomètres au nord de Nazareth. Là habitèrent en effet sainte Anne et saint Joachim. Du moins, une église bâtie sous Constantin en cet endroit avait pour but de consacrer ce souvenir. Cf. Liévin, Guide de la Terre-Sainte, Jérusalem, 1887, t. iii, p. 183. Saint Épiphane, Hær. xxx, 4, 11, t. xii, col. 410, 426, parle de ce monument. Si les parents de la Sainte Vierge ont vraiment possédé une maison à Sepphoris, il est possible et naturel que Marie y soit allée ; mais rien ne démontra qu’elle y soit née. — Le plus probable est donc que la naissance de Marie eut lieu à Jérusalem, comme nous l’avons vu attesté plus haut par saint Sophrone et saint Jean Damascène, et comme permet de le supposer la découverte de l’emplacement de la maison de sainte Anne et de saint Joachim près du Temple. L’affirmation de saint Jean Damascène est d’autant plus significative qu’elle n’est pas conforme à celle des apocryphes, dont pourtant ce Père a fait usage pour parler de la Sainte Vierge.

2° La naissance de Marie n’a guère été célébrée à Rome que vers la fin du VIIe siècle. Peut-être en faisait-on mémoire auparavant dans d’autres églises. Deux sermons de saint André de Crète, t. xcvii, col. 806, se rapportent à cet événement et supposent la fête. Cf. Kellner, Heortologie, p. 146. Le synode de Salzbourg, can. 10, en 799, prescrit quatre fêtes en l’honneur de la Mère de Dieu : la Purification le 2 février, l’Annonciation le 25 mars, l’Assomption le 15 août et la Nativité le 8 septembre.

IV. la présentation et l’enfance de Marie.

1° Le Protevangelium Jacobi, vii-viii, et le De nativitate En cours Marije, vil-vm (Evangelia apocrypka, 2e édit., Tischendorf, Leipzig, 1876, p. 1W7, 117-179), racontent qu’en accomplissement du vœu fait par ses parents, Marie fut conduite au Temple à l’âge de trois ans, qu’elle en monta seule les degrés, y fit son vœu de virginité et y demeura pour être élevée avec les autres vierges. Là elle jouit des visites quotidiennes des anges et de visions divines. Quand elle eut atteint sa quatorzième année, le grand-prêtre voulut la renvoyer dans sa famille pour qu’elle se mariât. Mais elle objecta son vœu. Le grandprêtre embarrassé consulta le Seigneur, puis fit venir les jeunes gens de la famille de David et promit Marie pour épouse à celui dont la verge fleurirait et sur laquelle le Saint-Esprit se reposerait en forme de colombe. Joseph fut l’heureux privilégié. Cette légende est adoptée par saint Grégoire de Nysse et saint Germain de Constantinople, dans leurs sermons cités plus haut. Le Coran, xix, 16, parle aussi de Marie née de parents très âgés, s’éloignant ensuite de sa famille du côté de l’Orient et prenant en secret un voile pour se couvrir. L’auteur du Christus patiens, faussement attribué à saint Grégoire de Nazianze, t. xxxviii, col. 244, écrit également d’après la même légende. — 2° En fait, les enfants mâles premiers-nés avaient seuls à être présentés au Temple, parce qu’ils appartenaient de droit au Seigneur. Exod., Xiil, 2, 12. Pourtant, il n’est nullement étonnant que les parents de Marie, surtout s’ils habitaient à Jérusalem près du Temple, aient eu la pieuse pensée d’y présenter leur enfant, pour remercier le Seigneur de la leur avoir donnée à la suite de longues prières, s’il faut en croire les apocryphes. Cette démarche se conçoit encore mieux de la part de Marie. Les paroles qu’elle adressera bientôt à l’ange : « Comment cela se fera-t-il, puisque je ne connais point d’homme ? » Luc, i, 34, indiquent qu’elle avait consacré à„ Dieu sa virginité par un vœu exprès. Cf. S. Augustin, De sancta virginit., i, 4, t. XL, col. 398. Il est possible qu’elle ait fait ce vœu à un âge très Rendre, surtout si le développement de son intelligence et de sa conscience a, par la grâce de Dieu, devancé les lois de la nature, ainsi que plusieurs Pères l’admettent pour saint Jean-Baptiste, d’après Luc, I, 41. Cf. Tertullien, De carne Christi, 21, t. ii, col. 788 ; S. Ambroise, De fide, iv, 9, 113, t. xvi, col. 639 ; S. Cyrille de Jérus., Catech., iii, 6, t. xxxiii, cot. 436, etc. Cependant on ne peut rien affirmer de précis à ce sujet, et l’argument en vertu duquel Notre-Seigneur n’a dû refuser à sa mère aucun des dons naturels ou surnaturels qui dépendaient de sa munificence filiale, est un argument a priori, dont l’application doit être réglée par l’enseignement ou la pratique de l’Église. Or, dans sa liturgie, l’Eglise admet le fait de la présentation de la Sainte Vierge au Temple, mais elle se tait et sur l’âge de Marie quand elle accomplit cet acte et fit son vœu, et sur les dons naturels et extranaturels dont elle fut gratifiée. — 3° L’éducation de Marié dans le Temple, affirmée par les apocryphes, est assez problématique. Nulle part la littérature juive ne mentionne la coutume d’élever des jeunes filles dans le Temple. Voir Éducation, t. ii, col. 1595. Josèphe, Bell, jud., V, v, 5, décrit par le détail les locaux dont se composait l’édifice sacré ; aucun n’est indiqué comme destiné à recevoir des jeunes filles. Cf. Reland, Antiguitates sacrée, Utrecht, 1741, p. 52-54 ; Schûrer, Geschichte des jûdischen Volkes im Zeit J. C, Leipzig, t. ii, 1898, p. 262-279, 325. Sans doute, le jeune Joas fut élevé dans l’ancien Temple jusqu’à l’âge de sept ans. IV Reg., XI, 3. Mais il était roi et ce séjour lui était imposé par les circonstances. Quant aux jeunes filles « enfermées », que l’attentat sacrilège d’Héliodore faisait courir de tous côtés, II Mach., iii, 19, rien ne fait supposer qu’elles habitassent le Temple. Autour du parvis des prêtres, il est vrai, il existait des salles qui avaient une double entrée, l’une par l’intérieur de ce parvis, et l’autre par la grande cour des gentils. Les femmes pouvaient ainsi accéder au moins dans la partie de ces salles qui se trouvait en dehors de l’enceinte sacerdotale. C’est apparemment dans’l’une de ces salles que plus tard Marie et Joseph trouvèrent l’enfant Jésus au milieu des docteurs. Luc, ii, 46. Y avait-il des chambres au-dessus de ces salles, ou d’autres locaux en dehors des cours du Temple, pour y recevoir des jeunes filles, et les élever ? Rien n’autorise à l’affirmer. Dans sa description de la vie de la Sainte Vierge avant l’annonciation, saint Ambroise, De virgin., II, ii, 9, 10, t. xvi, col. 209, 210, suppose expressément que Marie vivait dans la maison de ses parents. La maison de sainte Anne était séparée du Temple par une route et par le Birket Israël, piscine qui avait quarante mètres de largeur. Voir t. iii, col. 1348, et le plan, col. 1326. Rien, n’était donc plus facile à la jeune enfant que d’être conduite et ensuite de se rendre elle-même dans la maison du Seigneur pour y prier. Ainsi faisait, à cette époque même, Anne la prophétesse, qui « ne s’éloignait pas du Temple et servait Dieu jour et nuit dans les jeûnes et les supplications », Luc, ii, 37, sans qu’on soit en droit d’en conclure qu’elle habitait dans le Temple même. Cf. Corn. Jansénius, Tetrateuchus in sanct. J. C. Evang., Louvain, 1699, p. 484 ; Knabenbauer, Evang. sec. Luc, Paris, 1896, p. 138. Une basilique fut bâtie par Justinien sur l’esplanade de l’ancien Temple en l’honneur de la Sainte Vierge. Elle prit le nom de Sainte-Marie la Neuve, pour qu’on ne la confondît pas avec l’église de la Nativité. Par la suite, on l’appela l’église de la Présentation, quand on voulut localiser en cet endroit le séjour de Marie dans le Temple. C’est maintenant la mosquée el-Aksa. Cf. V. Guérin, Jérusalem, p. 362 ; Liévin, Guide de la Terre Sainte, t. i, p. 447. — 4° La présentation de la Sainte Vierge est mentionnée officiellement pour la première fois comme objet de fête dans une constitution de Manuel Comnène, en 1166. D’Orient, la fête s’introduisit à la cour papale d’Avignon, en 1371. Sixte IV en institua l’office, un siècle plus tard, et Sixte V en étendit la célébration à toute l’Église, en 1585. Cf. Kellner, Heortologie, p. 155, 156. La liturgie ecclésiastique de cette fête ne garantit officiellement que le fait même de la présentation de Marie, en négligeant tous les détails consignés dans les apocryphes. Voir Gosselin, Instructions sur les principales fêtes de l’année, 3 in-12, Paris, 1880, t. iii, p. 360-385.

v. les fiançailles.

1° Les jeunes filles juives se mariaient très jeunes. Elles étaient nubiles dès l’âge de douze ans et demi. Suivant les circonstances, on attendait plus ou moins pour les marier. Les fiançailles précédaient et se célébraient suivant un certain cérémonial. A partir de ce moment, la fiancée appartenait légalement à son fiancé, bien que la cohabitation ne commençât qu’au mariage, ordinairement postérieur d’un an aux fiançailles. Voir Fiançailles, t. H, col. 2230-2232. Marie fut fiancée à Joseph, qui était son parent. Voir Joseph (Saint), t. iii, col. 1670. Il est possible que la Sainte Vierge, dont on connaît une sœur, mais à laquelle aucun frère n’est attribué, ait été une héritière, comme le donne à penser son voyage à Bethléhem à l’époque du recensement, et qu’en conséquence elle ait été obligée de se marier avec un homme de sa tribu. Num., xxxvi, 6. Mais la loi ne l’obligeait pas à épouser un parent et même elle excluait formellement certains degrés de parenté. Voir Mariage, col. 760. Cette union fut donc le résultat d’un choix probablement fait, suivant la coutume, par les parents de saint Joseph.

2° On peut se demander comment se concilient en Marie le vœu de virginité et le consentement aux fiançailles. Sans-doute, la Sainte Vierge comptait bien que Dieu, qui lui avait inspiré son vœu, interviendrait providentiellement pour en assurer l’exécution » 785

    1. MARIE##

MARIE, MÈRE DE DIEU

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D’autre part, elle ne pouvait se refuser aux fiançailles sans se singulariser grandement, dans un pays où toute jeune fille aspirait au mariage comme à l’accomplissement d’un devoir. Il est donc à présumer que Marie avait agréé personnellement le choix qui avait été fait de son fiancé, et que d’autre part elle le connaissait assez pour avoir l’assurance que, prévenu ou non, il respecterait la promesse qu’elle avait faite à Dieu. Tout s’accomplit comme elle l’avait souhaité. Voir t. H, col. 2231.

ri. l’annonciation. — 1° Quand Marie, fiancée à Joseph, reçut la visite de l’ange, elle ne partageait pas encore la demeure de son futur époux, ce qui n’avait lieu qu’après la célébration publique du mariage. L’Évangile dit qu’elle résidait alors à Nazareth. Luc, i, 26. Elle avait donc quitté Jérusalem, soit que ses parents fussent morts, soit qu’elle voulût se rapprocher de son fiancé. Le voyage de Marie à Bethléhem, à l’époque du recensement, permet de supposer qu’elle était alors devenue héritière et par conséquent orpheline. Cependant cette conclusion n’est pas rigoureuse, parce que d’autres motifs, et même le simple désir de ne pas quitter son époux si tôt après la célébration du mariage, pouvaient déterminer Marie à se mettre en route. L’ange qui vint trouver la Sainte Vierge à Nazareth était Gabriel. Voir Gabriel, t. iii, col. 22. Quand il eut rempli son message, Marie se soumit à la volonté divine et le mystère de l’Incarnation s’accomplit. Voir Annonciation, t. i, col. 649-654. — À raison de son caractère évangélique, le souvenir de l’annonciation a été célébré de bonne heure dans l’Église, quoique à des dates différentes. Dès le milieu du ve siècle, saint Proclus, à Constantinople, Orat., i, t. lxv, col. 679, et saint Pierre Chrysologue, à Ravenne, Serm., cxl, clxii, t. lii, col. 575, 579, font mention d’une fête de dévotion ayant pour objet ce mystère.

vu. la Visitation. — 1° L’ange avait averti Marie que sa parente Elisabeth, bien qu’avancée en âge et réputée stérile, avait été favorisée d’une bénédiction inespérée et en était à son sixième mois. Luc, I, 36. Voir Elisabeth, t. ii, col. 1689. « En ces jours-là, » c’est-à-dire dans les jours de son annonciation, peu de temps après la visite de l’ange, Marie partit avec empressement pour aller visiter sa cousine, « sans incrédulité sur l’oracle de l’ange, sans hésitation à croire la nouvelle, sans aucun doute sur la réalité de l’exemple, mais joyeuse de sa résolution, ne songeant qu’à remplir un pieux devoir et empressée à faire plaisir. » S. Ambroise, Expos. Evang. sec. Lue., ii, 19, t. xv, col. 1560. Elle partit donc ; mais l’Évangéliste ne dit pas dans quelles conditions. Elle ne pouvait guère se dispenser de faire part à son fiancé de son projet de voyage et au moins de quelques-unes des raisons qui lui inspiraient sa résolution. Joseph ]’accompagna-t-il ? On ne saurait le dire. Le voyage de ce dernier était naturel si l’on se trouvait alors à l’époque de la Pàque ou de quelque grande fête juive. Mais l’Évangéliste garde le silence à ce sujet et l’on en est réduit aux conjectures. Toutefois l’on ne peut supposer l’absence de saint Joseph en se basant sur ce seul fait qu’il continua à ignorer ce que Dieu avait accompli en Marie. Les paroles d’Elisabeth, Luc, I, 43, ont pu n’être pas entendues par lui ou n’être pas assez claires pour le renseigner sur ce qui s’était paisse en sa fiancée. Cf. Goleridge, La vie de votre vie, Jrad. Petit, Paris, 1888, t. ii, p. 162. En tous cas, Dieu qui avait fait connaître à sainte Elisabeth la mystérieuse maternité de Marie se réservait de la révéler à son heure à saint Joseph.

2° Quand elle fut arrivée à la ville où demeurait Zacharie, voir Jeta, t. iii, col. 1518, Marie entra dans la maison de ce dernier et salua Elisabeth. L’enfant que celle-ci avait dans son sein tressaillit de joie à la voix de la Sainte Vierge, qui portait en elle le Verbe incarné. En même temps, Elisabeth fut remplie de l’Esprit-Saint.

Par sa présence, le Fils de Dieu sanctifiait ainsi en même temps l’enfant qui devait être son précurseur et la mère de cet enfant. Cf. S. Augustin, Epist., clxxxvii, ad Dardan. , VU, 23, 24, t. xxxiii, col. 840. « L’enfant tressaillit, la mère tut remplie ; mais elle ne le fut pas avant son fils : quand le fils eut été rempli de PEsprit-Saint, il en remplit sa mère. d S. Ambroise, Expos. Evang. sec. Luc, n, 23, t. xv, col. 1561. Sous l’inspiration de ce divin Esprit, Elisabeth s’adressa à haute voix à Marie et lui dit : « Tu es bienheureuse entre les femmes et béni est le fruit de ton sein. Et d’où me vient que la mère de mon Seigneur me visite ? Car dès que la voix de ta salutation est arrivée à mes oreilles, l’enfant a tressailli de joie dans mon sein. Heureuse es-tu d’avoir cru, car ce qui t’a été dit par le Seigneur s’accomplira. » Luc, i, 39-45. Il est à remarquer qu’Elisabeth reprend une partie des paroles de l’ange Gabriel, Luc., i, 28, ce qui indique que les deux personnages parlent en vertu de la même inspiration. L’Esprit de Dieu continue ses révélations à Marie par l’organe de sa parente, et à celle qui s’est déclarée la servante docile du Seigneur il fait donner l’assurance que, à cause de sa foi, tout ce que l’ange lui a annoncé s’accomplira. Marie prit la parole, non pour répondre à Elisabeth, mais pour adresser ses hommages et ses actions de grâces à Dieu, l’auteur de tant de merveilles accomplies en elle et en sa parente. Luc, i, 39-46.

3° La Sainte Vierge resta environ trois mois dans la demeure d’Elisabeth. Luc, i, 56. Pourquoi cette mention du temps que dura le séjour de Marie, sinon pour insinuer discrètement qu’elle assista à la naissance du Précurseur ? Cf. S. Ambroise, Expos. Evang. sec. Luc., _ n, 29, 30, t. xv, col. 1562, 1563. Il ne sera plus question d’elle dans le récit de cette naissance ; mais il est dans les habitudes de saint Luc d’épuiser tout ce qui concerne un fait ou un personnage, avant de passer à un autre. Cf. Lesêtre, La méthode historique de S. Luc, dans la Revue biblique, 1892, p. 179-182. Un certain nombre d’auteurs pensent cependant que Marie n’assista pas à la naissance de saint Jean-Baptiste.

4° La Visitation de la Sainte Vierge, à raison même de la place qu’elle occupe dans le récit évangélique, n& pouvait manquer d’être célébrée par une fête. Celle-ci n’apparaît cependant qu’au xin « siècle, sous l’influence franciscaine. Pendant le grand schisme, elle fut instituée officiellement, en 1389, par Urbain VI et Boniface IX, et en 1441, le concile de Bàle, dans sa xliii" session, statua qu’elle serait célébrée le 2 juillet. Cette date rattache la fête à celle de saint Jean-Baptiste, dont elle suit immédiatement l’octave. Cf. Kellner, Heortologie, p. 156.

VIII. LE MAGNIFICAT. — 1° Après qu’Elisabeth eut félicité sa parente, sîjtsv Mapiâ[i, ait Maria, dit saint Luc, i, 46. Trois anciens manuscrits occidentaux, le Vercellensis, le Veronensis et le Rhedigerianus lisent la variante : ait Elisabeth. Le manuscrit Vatic. du De psalmodiée bono de Nicétas, t. lxviii, col. 373, présente aussi, dans une énumération des cantiques liturgiques, la mention suivante : cum Helisabeth Bominum anima nostra magnificat. Cf. G. Morin, dans la Revue biblique, 1897, p. 286, 287. Mais le nombre infime des manuscrits portant cette variante ne saurait contrebalancer un instant l’autorité de tous les autres et celle des Pères, qui sont unanimes à lire le texte actuel. D’ailleurs, après les humbles paroles prononcées par Elisabeth dans la salutation à Marie, la formule : Et ait Elisabeth : Magnificat, est aussi anormale que la formule : Et ait Maria est naturelle et justifiée par la suite du cantique. On a voulu voir à tort une preuve de l’existence de la variante dans Origène, Hom. ru in Luc., t. xiii, col. 1817. Cf. A. Durand, L’origine du Magnificat, dans la Revue biblique, 1898, p. 74-77 ; Lepin, Le Magnificat doit-il être attribué à Marie ou à Elisabeth ? Lyon, 1902. — 787

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2° Le Magnificat est l’œuvre d’une âme très familiarisée avec les textes sacrés. Les expressions et souvent les pensées en sont empruntées aux écrits de l’Ancien Testament, particulièrement au cantique d’Anne, mère de Samuel. I Reg., ïi, 1-10. Dans son cantique, Marie commence par faire éclater sa joie à la pensée du Dieu Sauveur qui a abaissé un regard de bonté sur la bassesse, TomsiviiXTic, de sa servante, c’est-à-dire de son esclave, SovXt, ancilla. Bien que convaincue de sa bassesse et ne s’estimant qu’une esclave aux yeux de Dieu, ’elle prophétise que toutes les nations la proclameront bienheureuse, comme vient de le faire Elisabeth, Luc, i, 42, 45, comme le fera la femme de l’Évangile, Luc, xi, 27, comme le feront jusqu’à la fin des temps les chrétiens qui réciteront Y Ave Maria.

ix. l’hésitation de saint joséph. — 1° À son retour à Nazareth, ou peu de temps après, Marie fut trouvée, E’SpéOï), avec les signes extérieurs de ce que le Saint-Esprit avait opéré en elle. On comprend que Joseph, qu’il ait accompagné Marie chez sa parente ou non, se soit au retour montré plein de sollicitude à son égard. Il constata donc ce qui se passait en elle, mais il ne connaissait pas le secret que Dieu n’avait encore révélé qu’à Marie et à Elisabeth. L’épreuve fut dure pour lui, et aussi pour sa sainte fiancée, à laquelle il ne put sans doute dérober longtemps les indices de son inquiétude. Celle-ci garda néanmoins le silence, comptant avec raison que Dieu, qui avait pris soin d’informer Elisabeth, avertirait aussi Joseph. Dieu mit fin à l’épreuve de Joseph par le moyen sur lequel comptait Marie. Un ange lui apparut pendant son sommeil et lui révéla le mystère. C’était justice. Joseph avait droit, autant du moins qu’une créature peut avoir un droit visà-vis de Dieu, d’être informé de ce qui avait été fait à une fiancée qui lui appartenait légitimement. L’ange lui dit donc que ce qui était engendré en Marie, àv aûrij Yevv » )9év, venait du Saint-Esprit, et qu’en conséquence il n’hésitât pas à la prendre pour sa femme. Matth., i, 1820.

x. le mariage. — 1° Tous Ces événements s’étaient passés avant que Marie et Joseph habitassent ensemble, wpv 5] (njveXôeïv aùioûç, antequam convertirent, Matth., i, 18, comme c’était la règle entre fiancés. Sur l’ordre de l’ange, Joseph, à son réveil, prit pour sa femme, tt|V -yuvatxa aÛToï, celle qui n’était précédemment que sa fiancée, [ivi)<TTeu8efoT<i. Les paroles de l’évangéliste, « à son réveil, » exsurgens a sonino, « Joseph la prit pour sa femme, » indiquent que le doute de Joseph ne fut levé qu’à peu de jours de l’époque à laquelle devait se célébrer le mariage, et conséquemment l’introduction solennelle et définitive de Marie dans la maison de son époux. Matth., i, 24. Voir Mariage, col. 773. — 2° Ces faits de la vie de la Très Sainte Vierge ne peuvent être datés sûrement. Chez les Juifs, les jeunes filles étaient considérées comme nubiles dès l’âge de douze ans. On ne sait pas quel âge avait Marie quand elle se fiança. En tous cas, l’usage du mariage au cours des fiançailles ne présentait absolument rien d’anormal, si bien que personne, sauf Joseph, n’eut à s’étonner de l’état de Marie entre ses fiançailles et son mariage. Rien n’indique non plus le temps qui s’écoula entre les fiançailles de Marie, et la visite de l’ange. Entre cette visite et le mariage, il faut compter au moins trois mois, temps du séjour de Marie chez Elisabeth. Luc., i, 56. Mais on ne sait pas davantage combien de jours séparèrent le retour de Marie d’avec la célébration de son mariage, ni cette célébration d’avec la naissance du Sauveur. On laissait d’ordinaire un an s’écouler entre les fiançailles et le mariage ; mais ce délai était abrégé, quelquefois jusqu’à un mois, à la volonté des fiancés. Cf. Iken, Ant. hébr., p. 497. Il s’écoula naturellement plus de trois mois entre les fiançailles de Marie et de Joseph et leur mariage ; on ne peut pas savoir si le délai fut porté jus qu’à un an. Enfin, étant données les coutumes orientales, la Sainte Vierge a parfaitement pu n’avoir que treize ans quand elle a mis au monde Notre-Seigneur. Avait-elle davantage ? Dépassait-elle cet âge de plusieurs années ? Aucun document ne permet de le dire.

III. Pendant l’enfance du Sauveur. — I. la naissance A BETHLÉHEM. — 1° En vertu d’un édit de l’empereur Auguste, un recensement fut fait dans les provinces de l’empire. La Judée, soumise alors à l’autorité romaine, malgré la royauté d’Hérode, dut subir cette opération administrative. Voir Cyrinus, t. ii, col. 1189. Cf. Knabenbauer, Evang. sec. Luc, Paris, 1896, p. 104114. Le recensement se fit suivant la méthode juive. Les titres généalogiques des familles Israélites étaient soigneusement conservés. I Esd., ii, 59, 62. Josèphe, Vit., 1, témoigne qu’il a établi sa propre généalogie d’après les tablettes publiques ; il dit ailleurs, Cont. Apion., i, 7, que les familles sacerdotales tenaient avec le plus grand soin leurs tables généalogiques. Il en était certainement de même chez les principales familles du pays, et en premier lieu dans la famille de David, héritière de si grandes promesses. Les tables généalogiques se conservaient dans des conditions qui garantissaient leur authenticité, et naturellement dans le lieu d’origine delà famille. La famille de David, à laquelle appartenaient Marie et Joseph, était originaire deBethléhem ; c’est donc à Bethléhem qu’ils se rendirent pour le recensement, l’empereur Auguste ayant formellement autorisé les peuples relevant de l’autorité romaine à procéder dans les actes publics suivant leurs coutumes nationales. Ci. Dion Cassius, Liv, 9. Marie accompagna Joseph, soit pour obéir à un désir personnel ou à une inspiration divine, soit parce qu’elle était héritière ou qu’il s’agissait de fixer l’impôt personnel qui frappait les femmes depuis l’âge de douze ans. Digest., L, xv, 3, Mommsen, 1872, p. 356 (du IIIe siècle). Cf. Vigouroux, Le Nouveau Testament et les découv. qrchéol. mod., Paris, 2 8 édit 1896, p. 109 ; Schûrer, Geschichte des jùdischen Volkes im Zeit J. C, Leipzig, t. i, 1901, p. 513.

2° Un grand concours de Juifs avait afflué à Bethléhem à l’occasion du recensement. Aussi les nouveaux arrivants ne trouvèrent pas de place dans le khan de la ville, voir Bethléhem, t. i, col. 1691, et Caravansérail, t. H, col. 253, 254, et furent obligés de se réfugier dans une grotte servant d’étable aux animaux. Voir Crèche, t. ii, col. 1107-1109 ; cf. S. Justin. Dial. cum Tryph, , 78, t. vi, col. 657 ; Origène, Cont. Gels., i, 51, t. xi, col. 756 ; Eusèbe, VU. Constant., iii, 43, t. xx, col. 1101 ; S. Jérôme, Epist. xlvi, 10 ; cviii, 10, t. xxii, col. 490 r 884. C’est là que Marie enfanta le Sauveur pendant la nuit. Luc, ïi, 1-7. Des mots : « pendant qu’ils étaient là, le temps où Marie devait enfanter arriva, » on conclut que Marie et Joseph se trouvaient peut-être à Bethléhem quelques jours déjà avant la naissance de l’enfant Jésus. Il semble que ce dut être pour Marie une très dure épreuve que d’avoir à quitter subitement sa maison de Nazareth, dans laquelle elle avait tout préparé pour accueillir dignement l’Enfant à sa naissance, et ensuite de n’avoir à lui offrir qu’une étable et la paille d’une crèche. Mais sa foi en la conduite de la Providence était si vive que, dans tous ces événements, elle ne vit certainement que l’expression de la volonté divine, à laquelle elle se soumit avec autant de joie que de docilité. Les évangélistes, inspirés par elle, ne témoignent ici que de son attention à méditer ce qui arrivait.

3° Saint Luc, ii, 7, 16, dit que, quand l’Enfant fut né, Marie l’enveloppa elle-même de langes et le coucha dans la crèche, où les bergers le trouvèrent ensuite, au cours de la même nuit. Cette manière de parler permet d’affirmer que l’enfantement ne causa à Marie ni douleur ni faiblesse. C’est là ce qu’ont enseigné S. Ambroise, In Ps. xlvii, ~iî, t. xiv, col. 1150 ; S. Grégoire de Nysse, Or. i de resurrèct., t. xlvi, col. 604j S. Jean 789

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Damascène, Di fid. orthod-, iv, 14, t. xcxiv, col. 1160 ; Fortunat, viii, 7, t. lxxxvhi, col. 282 ; l’auteur du Christus patiens, 63, 64, 70, jt. xxxviii, col. 142 ; l’auteur du Serm, . 194 inséré dans S. Augustin, t. xxxix, col. 2105 ; S. Thomas, Summ. theol., III a, q. xxxv, a. 6 ; Bossuet, Élév. sur les myst., XVI, 6, etc. Il ne convenait pas en effet, semble-t-il, que Marie fût soumise à la sentence portée contre Eve désobéissante et contre les autres femmes : « Tu enfanteras avec douleur. » Gen., iii, 16.

4° Marie vit donc les bergers adorer l’enfant Jésus et dut apprendre d’eux ce qu’ils avaient pu contempler et entendre en gardant leurs troupeaux. L’Évangéliste ne reproduit d’elle aucune parole ; il rapporte seulement que « Marie conservait toutes ces choses », les faits et les paroles, « les méditant dans son cœur. » Luc., ii, 19.

5° Le huitième jour, Marie assista à la circoncision du divin Enfant, auquel on donna le nom de Jésus, qui lui avait été révélé à elle d’abord, Luc, i, 31, et ensuite à Joseph. Matth, , i, 21. Cette cérémonie se faisait ordinairement à la maison ou à la synagogue. L’Évangile mentionne la circoncision de Jésus sans indication de lieu. Il est à croire que la sainte Famille n’était plus alors dans la grotte. Dès le matin de la naissance, les habitants de Bethléhem, avertis par les bergers des événements merveilleux de la nuit, Luc., ii, 18, avaient dû probablement la recueillir dans une maison de la ville.

u. la purification. — 1° La loi obligeait Marie à se présenter au Temple le quarantième jour après la naissance de l’Enfant, pour se purifier elle-même, Lev., xii, 2-8, et pour consacrer au Seigneur son premier-né. Exod., xiii, 2 ; Num., xviii, 15. La loi de purification ne Ja concernait nullement ; elle se comporta néanmoins comme toutes les autres mères, par humilité et pour obéir au dessein de la Providence qui voulait que rien ne parût alors au dehors de son éminente dignité. U fallait d’ailleurs qu’elle s’associât à la consécration officielle de Jésus, comme elle devait être associée plus tard à son immolation. Il est à noter que Marie et Joseph offrirent à la place de Jésus non un agneau, comme les riches, mais deux petits oiseaux, comme les pauvres. Ils étaient donc sans grandes ressources et devaient sans doute ménager, loin de leur séjour habituel, le peu dont ils disposaient. Cette pauvreté était très conforme aux volontés du Sauveur. II Cor., viii, 9.

— 2° Dans le Temple, le vieillard Simêon prit l’Enfant dans ses bras et bénit Dieu de son apparition. Joseph,

. qui passait pour le père de Jésus, et Marie étaient dans l’admiration en entendant le vieillard annoncer que le divin Entant venait pour éclairer les nations et glorifier Israël. Chaque révélation successive, celle de l’ange, celle d’Elisabeth, celle de Zacharie, celle de Siméon, apportait à Marie de nouvelles lumières sur sa destinée et celle de son Fils. Siméon s’adressa ensuite personnellement à Marie pour lui annoncer des événements qui ne devaient se produire qu’après la mort de Joseph et auxquels elle aurait à prendre une très large et très douloureuse part : « Celui-ci est établi pour la ruine pour la résurrection de beaucoup en Israël, et en signe auquel on contredira ; le glaive transpercera même ton âme. » Toutes ces choses arriveront « afin que soient révélées les pensées qui sont en beaucoup de cœurs ». Luc, ii, 22r35. La première douleur était venue.sk Marie de son fiancé Joseph, lorsque celui-ci, ignorant le mystère, avait hésité à la prendre pour épouse. La seconde lui vient maintenant de son Fils, à l’occasion duquel un jour le glaive transpercera son âme. Quand ? comment ? pour combien de temps ? dans quel but ? avec quelle utilité ? Elle l’ignore et cette incertitude même va lui causer désormais une peine de fous les instants.

— 3° Après la purification, Marie et Joseph retournèrent à Nazareth. Luc, ii, 39. Il est possible que saint Luc parle ainsi en passant complètement sous silence l’adoration des mages et la fuite en Egypte, déjà racontées

par saint Matthieu, ii, 1-23. Cf. S. Augustin, De cons. Evangeli&t., ii, 5, t. xxxiv, col. 1078. Toutefois, il semble unir si étroitement l’accomplissement des rites de la purification et le départ pour Nazareth, qu’une autre hypothèse devient fort plausible. À la suite des événements merveilleux dont il avait été témoin, Joseph se serait persuadé que l’Enfant, né à Bethléhem, devait être élevé dans cette ville. Il avait encore cette idée au retour d’Egypte. Matth., ii, 22. Après la purification, il serait donc parti directement pour Nazareth avec Marie pour tout disposer en vue d’un changement de séjour, puis il serait revenu à Bethléhem. Cf. Cornely, lntrod. spec. in N. T. libr., Paris, 1886, t. iii, p. 204.

m. l’adoration des mages et léséjovr en Egypte.

— 1° Le sainte Famille était établie à Bethléhem, dans une maison, quand les mages vinrent adorer l’Enfant. Matth., ii, 11. Celui-ci avait alors plus de quarante jours, car sa présentation n’eût pas été possible après l’arrivée des mages, et moins de deux ans. Matth., ii, 16. Les mages « trouvèrent l’Enfant avec Marie sa mère », paroles qui n’excluent pas la présence de saint Joseph, mais qui indiquent que Marie tenait la place principale et que les mages virent surtout Jésus entre ses bras. Les présents qu’offrirent ces étrangers furent sans doute pour la sainte Famille la ressource ménagée par la Providence en vue du voyage qui allait s’imposer. Voir Mages, col. 551.

2° Averti par l’ange des desseins homicides d’Hérode, Joseph prit l’Enfant et sa mère, et s’enfuit avec eux en Egypte. Plus de trois cents kilomètres séparent Bethléhem de la région habitable la plus voisine, sur les bords du Nil. C’était donc un voyage d’au moins une dizaine de jours à entreprendre. On ne sait en quel endroit la sainte Famille s’arrêta, ni combien de temps elle demeura en Egypte. Voir Jésus-Christ, t. iii, col. 1443. Elle y rencontra certainement de nombreux compatriotes. Les Juifs habitaient surtout le Delta, cf. Josèphe, Bell, jud., II, xviii, 8, et le nombre de ceux qui résidaient en Egypte atteignait un million, au dire de Philon, In Flaccum, 6, édit. Mangey, t. ii, p. 523. Ils avaient même à Léontopolis, dans le nome d’Héliopolis, un temple qui subsista de 160 avant J.-C à 73 ap. J.-C. Cf. Schûrer, Die Geschichle des jùdischen Volkes ira Zeit J. C, Leipzig, t. iii, 1898, p. 1925, 99. Marie et Joseph trouvèrent donc en ce pays des familles capables de leur assurer aide et protection dans une certaine mesure. Sur les traditions et les légendes coptes concernant le séjour en Egypte, voir Jullien, L’Egypte-, Lille, 1891, p. 241-251 ; Id., L’arbre de la Vierge à Matariéh, 4e édit., in-4°, Le Caire, 1904.

3° À la mort d’Hérode, l’ange ordonna à Joseph de retourner dans le pays d’Israël. Joseph pensa d’abord à s’établir en Judée ; mais, quand il apprit qu’Archélaûs régnait à la place de son père, il craignit qu’il en eût gardé la cruauté, et il remonta à Nazareth, en Galilée, qui était sous la domination d’Antipas, prince d’un caractère plus humain. Matth., ii, 13-23. En toutes ces circonstances, Mcrie se laissa guider par saint Joseph qui, en sa qualité de chef de la famille, recevait les communications divines, prenait les décisions commandées parles circonstances et pourvoyait à leur exécution.

IV. La vie a Nazareth. — I. la sainte famille. — La vie de Marie à Nazareth fut celle de toutes les femmes de son temps et de son pays. Joseph était charpentier ; il travaillait pour subvenir aux besoins de la mère et de l’Enfant. Marie donnait ses soins maternels à Jésus, qui grandissait, se fortifiait, se montrait plein de sagesse et de grâce. Luc, ii, 40. Chaque année, Marie et Joseph se rendaient à Jérusalem pour la fête de Pâque. Les hommes seuls avaient l’obligation de faire ce voyage, Exod., xxiii, 17, mais les femmes l’entreprenaient par piété, et Marie n’y manquait pas chaque année. Luc, ii, 41-42. Peut-être l’enfant Jésus était-il 791

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alors laissé à Nazareth, à la garde’de parents ou de voisins, auxquels Marie le confiait quand il y avait lieu de le faire. Luc, ii, 44. Le silence et l’humilité gardaient contre toute indiscrétion le trésor que renfermait la maison de Nazareth. Jésus, Marie et Joseph passaient pour des personnes ordinaires, ainsi que le montre la suite de l’Évangile. Il est même à croire que le divin Enfant, pour laisser à sa mère le mérite de sa foi et de sa confiance en Dieu, ne lui révéla jamais rien des mystères de l’avenir, et que, pendant près de trente années, Marie, assurée de posséder auprès d’elle le Fils de Dieu, vécut surtout des souvenirs de ce qu’elle avait entendu et vu au moment de l’incarnation et de la naissance du Sauveur. Luc, ii, 19.

II. le voyage À jéhusalem. — 1° À l’âge de douze ans, Jésus devint ben-hatfôrâh, « fils de la Loi, » c’est-à-dire soumis aux obligations qu’elle imposait à tout Israélite. Il accompagna donc dès lors ses parents à Jérusalem aux fêtes de la Pâque. La première fois qu’il s’y rendit, il resta à dessein dans la ville quand ses parents s’en retournèrent après l’achèvement des fêtes. Ceux-ci, ne le voyant pas auprès d’eux le premier jour, crurent qu’il cheminait avec d’autres personnes de la nombreuse caravane des gens de Galilée. Voir t. ii, col. 249, 250. Le soir venu, ils constatèrent son absence, reprirent le lendemain la route de Jérusalem et, le troisième jour venu, le retrouvèrent dans le Temple. Ce fut une grande épreuve pour Marie et comme un avantgoût de ce qu’elle aurait à subir plus tard pendant la passion et la sépulture du Sauveur. Elle connaissait trop bien ce qu’était Jésus pour redouter un accident fortuit ; mais elle se demandait pourquoi l’Enfant, ordinairement si docile, si prévenant et si affectueux, avait jugé à propos de se dérober ainsi à l’improviste aux soins de ses parents. Ce fut le sentiment douloureux qu’elle exprima par sa question : « Mon fils, pourquoi nous avoir traités de la sorte ? Voici que ton père et moi nous te cherchions tout éplorés. » À la réponse de Jésus : « f Pourquoi me cherchiez-vous 1 Ignoriez-vous qu’il me faut être aux affaires de mon Père ? » ni Marie ni Joseph ne comprirent rien. Luc, ii, 41-50. Ce renseignement n’a pu venir â l’évangéliste que par Marie elle-même, avouant humblement qu’elle ne comprenait pas tout dans la conduite du Sauveur. Quelle que fût en effet la science surnaturelle mise par l’Esprit-Saint dans l’âme de Marie, il n’était pas nécessaire que Marie eût sur-le-champ l’intelligence de tous les mystères qui se présentaient et que sa science allât plus loin que ne le réclamait l’accomplissement actuel de sa mission.

2° Au retour du voyage, ’Jésus « leur était soumis », reprenant pour de longues années encore la vie d’humilité et d’obéissance qu’il n’avait voulu interrompre qu’un moment. Ce nouveau fait s’ajouta aux précédents pour alimenter les méditations de Marie ; « sa mère conservait toutes ces choses dans son cœur. » Les deux passages dans lesquels saint Luc, ii, 19, 51, note que Marie conservait dans son cœur tout ce qu’elle voyait et entendait, sont comme l’indication de la source principale à laquelle l’évangéliste a puisé les récits de l’enfance de Jésus. Cf. Richard, Zur Quellenkritik der Kindheitsgeschichte Jesu, dans les Akten des Kongr. kathol. Gelehrten, Munich, 1901, p. 169. Quant au divin Enfant, elle le voyait grandir en sagesse, en âge et en grâce devant Dieu et devant les hommes. Luc, ii, 51, 52. La vie de Marie se poursuivit tranquillement à Nazareth, sans qu’aucun accident ait été relaté par les évangélistes. Le seul événement qu’on peut sûrement attribuer â cette période fut la mort de saint Joseph, qui disparut quand son rôle de protecteur de Jésus fut devenu inutile, et que sa survivance eût plutôt constitué un embarras au moment où le divin Maître commençait son ministère public.

IU. LA PERPÉTUELLE VIRGINITÉ DE MARIE. — 1° Marie

eut le privilège d’associer en sa personne la virginité et la maternité divine. Sa virginité ressort des textes évangéliques, de sa question à l’ange, Luc, I, 34, de la réponse de celui-ci, Luc, i, 35, 37, de la conduite de saint Joseph, Matth., i, 19-25, de l’application à Marie de la prophétie d’Isaïe, vil, 14 ; Matth., i, 22, 23, des allusions de Notre-Seigneur s’adressànt aux Juifs. Joa., viii, 19. La virginité de Marie avant son enfantement, affirmée par saint Ignace, Ad Ephes., xviii, 2, t. v, col. 660, est ensuite prouvée par les Pères au moyen du texte d’Isaïe. Cf. S. Justin, Apol., 133 ; Dial., 43, 66, 67, 77, t. vi, col. 381, 568, 628, 629, 656 ; S. Irénée, ffæ »-es v iii, 21, 1, 5, t. vii, col, 946, 951 ; Tertullien, Adv. Jtidmos, 9, t. ii, col. 618, etc. Sa virginité dans l’enfantement même, d’abord suspecte à quelques Pères, cf. Origène, In Luc, Hom. xiv, t. xiii, col. 1834 ; Tertullien, Adv. Marc, iii, 11 ; iv, 21 ; De carne Christ., 23, t. ii, col. 336, 411, 412, 790, etc., à cause de l’abus que les docètes faisaient de ce point de doctrine, cf. Clément d’Alexandrie, Strom., vu, 16, t. ix, col. 529, fut ensuite démontrée à l’aide du texte d’Isaïe, vii, 14, et d’un texte d’Ézéchiel, xliv, 2. Cf. S. Irénée, Heeres., iv, 33, t. vii, col. 1080 ; S. Ambroise, Epist. xlii, 5, t. xvi, col. 1125. Le texte de la loi, Exod., xhi, 2 ; Num., viii, 16, cité par saint Luc, il, 23, implique seulement que Jésus est le premier-né de Marie, mais ne veut pas dire nécessairement que sa naissance s’était produite selon les règles ordinaires. La loi parlait de ce qui arrive communément, mais ne visait pas la naissance miraculeuse du Fils de Dieu. Aussi la virginité de Marie dans son enfantement ne fait-elle aucun doute pour saint Augustin, Epist. cxxxvii, 8, t. xxxiii, col. 519 ; Serm., li, 18, t. xxxviii, col. 313 ; Enchirid.t 34, t. XL, col. 249 ; saint Léon, Serm., xxi, 2, t. liv, col. 192 ; saint Fulgence, De fide ad Petr., 17, t. xl, col. 758 ; Gennade, De eccl. dogniat., 36, t. xlii, col. 1219 ; saint Cyrille d’Alexandrie, Hom. xi, t. lxxvii, col. 1031 ; saint Jean Damascène, De fide orthodox., iv, 14, t. xciv, col. 1161 ; Paschase Radbert, De partu Virginis, t. cxx, col. 1367, etc.

2° Après la naissance du Sauveur, Marie persévéra dans une virginité constante. Les paroles de saint Matthieu, i, 18, 25 : « Avant qu’ils ne fussent ensemble, » et « Il ne la connut pas jusqu’à ce qu’elle eut enfanté son fils premier-né », ne constituent pas d’objection contre la virginité de Marie. « Avant qu’ils ne fussent ensemble » marque seulement le temps où Marie et Joseph, n’étant encore que fiancés, n’habitaient pas dans la même maison. Il est vrai que le verbe uuveXÔeîv s’emploie pour signifier non seulement « se réunir », mais aussi « avoir commerce » avec quelqu’un. Cf. Xénophon, Memor., II, II, 4, etc. Alors même que, malgré le contexte, on admettrait ce sens, , comme l’ont fait quelques Pères, il ne s’ensuivrait nullement que ce qui ne s’était pas produit jusque-là se produisit après. Cf. S. Jérôme, In Malth., i, 2, t. xxvl, 24, 25. L’autre expression, « il ne la connut pas jusqu’à ce qu’elle eut enfanté, » doit s’expliquer de même. Elle ne prouve en aucune façon qu’après la naissance du Sauveur, Joseph sortit de la réserve que lui commandaient les plus hautes convenances, les mystères dont il avait été témoin et l’éminente vertu que suppose sa vocation. Cf. S. Jean Chrysostome, In Matth., v, 3, t. lvii, col. 58 ; S, Jérôme, De perpet. virginit. B. M., 6, t. xxiii, col. 183-206 ; S. Ambroise, De institut, virgin., 38, 43, t. xvi, col. 315, 317 ; S. Thomas, Sunim. theol., III a, q. xxviii, a. 3 ; Pétau, De incarn., XIV, iii, 11, etc. Le titre de premier-né donné par saint Matthieu, i, 25, à Jésus ne suppose pas nécessairement qu’il y ait eu d’autres enfants après lui. Le premier-né est avant tout celui qui n’a été précédé d’aucun autre. Ce nom s’imposait d’autant plus impérieusement chez les Juifs que le premier enfant mâle devait être consacré au Seigneur, sans qu’on eût à s’inquiéter s’il en viendrait d’autres après lui. Exod., xxxiv, 19 ; Num., xviii, 793

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15. Cf. S. Epiphane, Rser. lxxviii, 17, t. xlii, col. 728.

3° La virginité et la maternité divine, au lieu de se nuire dans la Très Sainte Vierge, n’ont fait que se rehausser mutuellement. Il en devait nécessairement être ainsi ; car l’action du Saint-Esprit en Marie ne pouvait que donner plus de valeur aux vertus et aux privilèges qu’elle possédait déjà. L'Église dit qu’en naissant de la Vierge, le Fils de Dieu t n’a pas amoindri mais consacré l’intégrité de sa mère ». Miss. Puritat. B. M. V., secret. Les Pères enseignent de même que la maternité divine n’a fait que consolider et embellir la virginité de MarieCf. S. Pierre Chçysologue, Serm. cxhll in Annunt. B. M. V., t. lii, col. 581 ; Hesjchius, Rom. y, de S. M. Deip., t. xciii, col. 1461 ; S. Ildefonse de Tolède, De virg. perpet. S. M., t. xcxvi, col. 95 ; S. Bernard, De xii prserog. B. V. M., 9, t. clxxxiii, col. 434, etc. Il est incontestable que malgré sa propre virginité et la divinité de son Fils, Marie eut une maternité aussi réelle qu’aucune autre femme.

4° Il est plusieurs fois question dans l'Évangile de personnages appelés « frères de Jésus », quelquefois mentionnés en même temps que la mère de Jésus. Matth., xii, 46, 47 ; xiii, 55, 56 ; Marc, iii, 31, 32 ; vi, 3 ; Luc, viii, 19, 20 ; Joa., ii, 12 vii, 3, 5, 10 ; Act., i, 14 ; I Cor., ix T 5 ; Gal., i, 19 ; Jud., 1. Ces frères ne sont ni des fils de Marie, ni des frères proprement dits du Sauveur, mais seulement des cousins plus ou moins rapprochés, suivant le langage familier aux Juifs. Voir Frère, t. ii, col. 2403-2405. C’est donc prendre ces passages à contre-sens que de les interpréter de manière à nier la virginité perpétuelle de Marie. Cf. Lagrange, Le récit de l’enfance de Jésus dans saint Luc, dans la Revue biblique, 1895, p. 174-183.

IV. LA MATERNITÉ DIVINE DE MARIE. — 1° Elle est

aussi nettement affirmée que possible par les textes évangéliques. Marie « met au monde son premier-né », Matth., i, 25, et ce Fils est le « Verbe fait chair », Joa., i, 14, par conséquent Dieu même s’unissant en Marie une nature humaine. Les premiers Pères n’ont pas d’hésitation à ce sujet. Cf. S. Ignace, Ad Ephes., 7, t. v, col. 652 ; S. Irénée, Adv. hœres., iii, 19, 2, 3, t. viii, col. 940, 941. Tertullien, Adv. Prax., 27, t. ii, col. 190, dit à l’hérétique Praxéas : « Ce qu’elle a conçu, elle l’a engendré, et celui qui est né, est Dieu. » Saint Ambroise, In Luc., ii, 25, t. xv, col. 1521, dit avec la même énergie : « La Mère du Seigneur, enceinte du Verbe, est remplie de Dieu. » Quand Nestorius, Serm., i, 6, 7, t. xlvui col. 760, 761, dénia à Marie le titre de Mère de Dieu, sous prétexte que la créature ne peut engendrer le Créateur, et que d’elle ne peut naître qu’un homme instrument de la divinité ou porte-Dieu, le concile d'Éphèse proclama son titre véritable de Œoxtfxoc, « celle qui engendre Dieu, » la mère de Dieu. Cette proclamation n'était que l'écho des affirmations de plus savants écrivains ecclésiastiques. Cf. S. Cyrille d’Alexandrie, Apol. pro xii cap. ; Cont. Julian., viii, t. lxxvi, col. 320, 901 ; Epist. ad Acac., 14, t. lxxvii, col. 97 ; Jean d’Antioche, Epist. ad Nestor., 4, t. lxxvii, col. 1456 ; Théodoret, Heret. fab., iv, 2, t. lxxxiii, col. 436 ; S. Grégoire de Nazianze, Epist. ad Cledon., i, t. xxxvii, col. 177 ; Proclus, Hom. de Matr. Dei, t. lxv, col. 680, etc. Cf. Terrien, La mère de Dieu et la mère des hommes, Paris, 1902, t. i, p. 3-14> Turmel, Histoire de la théologie positive, Paris, 1904, p. 210-211.

r. la sainteté de marie. — 1° Cette sainteté est la conséquence des grâces reçues par Marie et de l’usage qu’elle en a fait. Aux dons divins les plus magnifiques, elle répond par l’humililé et l’obéissance, Luc, i, 38, 48, et dans les circonstances les plus douloureuses, elle n’a ni impatience ni murmure. Luc, ii, 7, 35, 48 ; Joa., xix, 25-27. Marie, exemptée de la faute originelle, n’a jamais connu le péché. Cf. S. Thomas, Summ. theol., III », jj. xxvii, a. 4 ; Terrien, La mère de Dieu et la mère des

hommes, t. ii, p. 67-84. — 2° Quelques Pères grecs ont pourtant attribué à Marie certaines fautes légères. Saint Basile, Epist. cclx, t. xxxii, col. 965-968, croit que la Sainte Vierge succomba au doute quand Siméon lui fit sa prophétie et ensuite pendant la Passion. Saint Jean Chrysostome, Hom. iv, in Matth., t. lvii, col. 45, dit que Marie dut être avertie par l’ange de ce qui allait se passer en elle, car autrement elle serait tombée dans le trouble et la crainte. Il l’accuse de vaine gloire aux noces de Cana et quand plus tard elle arriva publiquement avec les frères de Jésus. Matth., xii, 46, 47 ; Hom. xhir, in Matth., t. lvii, col. 464, 465 ; Hom. xxi, in Joan., t. lix, col. 130. Saint Cyrille d’Alexandrie, In Joan., t. lxxiv, col. 661-66 i, avance qu’au pied de la croix Marie fut scandalisée, découragée, en proie au doute sur la puissance de son Fils. Quelques autres Pères ont exprimé des pensées analogues. Cf. Pétau, De incarn., XIV, i, 3-7. En somme, ces Pères accusent moins la volonté de la Sainte Vierge que sa nature féminine. On ne peut pas dire que, quand ils attribuent certaines défaillances morales à Marie, ils représentent une tradition apostolique. Ils ne font qu’interpréter, dans un sens personnel, certains passages de l'Évangile, et obéissent plus ou moins consciemment aux préjugés communs de leur temps sur l’infériorité naturelle de la femme. Cf. Newman, Dit culte de la Sainte Vierge, note F, p. 154170. La vraie tradition de l'Église a ici pour organes les Pères qui ne font pas dire aux textes évangéliques plus qu’ils ne contiennent, et qui professent avec saint Ambroise, InL uc., ii, 16-22, t. xv, col. 1558-1560 ; De virgin., i, 15 ; Epist., lxiii, 110 ; De obit. Valentin., 39, t. xvl, col. 210, 1218, 1371 ; saint Augustin, De nat. et grat., xxxvi, 42, t. xliv, col. 267 ; le Vén. Bède, /n Luc, ii, 35, t. xcii, col. 346 ; etc., que, quand il est question de péché, il faut toujours excepter Marie, et cela pour l’honneur de son Fils. C’est la doctrine qu’a définitivement consacrée le concile de Trente, sess. VI, can. 23. « On sait les propositions de saint Chrysostome sur la Sainte Vierge, qui ne peuvent guère s’accorder avec le canon 23 de la VIe session du concile de Trente : en ces occasions on se donne la respectueuse liberté de préférer au saint, non pas ses sentiments particuliers, mais ceux d’autres saints où la vérité s’est plus purement conservée. » Bo|suet, Préf. suri’instr. pastor. de M. de Cambrai, sect. xi, Bar-le-Duc, 1870, t. v, p. 733. Cf. J. Turmel, Histoire de la théologie positive, Paris, 1904, p. 72-77 ; Dict. dé théologie, Paris, t. i, 1903, col. 1378-1382.

V. Pendant la vie publique du Sauveur. — I. aux noces de cana. — 1° Dès le début du ministère public du Sauveur, il y eut des noces à Cana, « et la mère de Jésus était là. » Cana n’est guère qu'à six kilomètres de Nazareth. Les jeunes époux et leur fomille avaient des liens de parenté ou d’amitié avec la Sainte Vierge, ce qui explique qu’elle se trouvât là naturellement comme a une place qui lui revenait de droit. À cause d’elle, sans doute, Jésus fut invité avec ses disciples. Les parents des jeunss époux ne devaient pas jouir d’une grande aisance, car le vin fit défaut. Marie, à qui la maison était familière, s’en aperçut au cours du festin, et non pas dès le début. Les mots ûoxep^davto ; olvou, déficiente vino) ne signifient pas nécessairement : « le vin étant en quantité insuffisante, » ce dont la Sainte Vierge aurait pu se rendre compte dès le commencement, mais : « le vin manquant, » ce qu’elle constata au moment où l’incident se produisit. Aussi dit-elle à Jésus : « Ils n’ont pas de vin, » ofvov ojx è'xoutnv, ce qui ne signifie pas : « Ils n’auront pas assez de vin. » On lit d’ailleurs dans le Sinaiticus, et dans plusieurs autres manuscrits anciens ; <s Us n’ont plus de viii, parce que le vin de la noce a été consommé. » Cf. Griesbach, Nov. Test, gresce, Halle, 1796, 1. 1, p. 432. La Sainte Vierge prit ainsi l’initiative d’une demande discrète adressée à son Fils. Elle voulait épargner la confusion à une famille aimée, et elle ne  ; yo

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douta pas que Jésus n’eût le pouvoir et l’intention d’être secourable.

2° Jésus lui dit : « Femme, qu’y a-t-il à moi et à toi ? Mon heure n’est pas encore venue. » Le Sauveur aurait pu dire : « ma mère, » comme Salomon, III Reg., ii, 20, et Jérémie, xv, 10. Il se sert toujours de l’appellation « femme » quand il s’adresse à des femmes, même à sa mère. Matth., xv, 28 ; Luc., xiii, 12 ; Joa., iv, 21 ; viii, 10. Il interpelle sous ce nom Marie-Madeleine après sa résurrection. Joa., xx, 15. À la croix, il dit encore à sa mère : « femme, * bien qu’il y ait là d’autres femmes avec elle. Joa., six, 26. Chez lés classiques, cette appellation est usitée comme fort honorable. Cf. Iliad., iii, 204 ; Xénophon, Cyroped., v, 1, 6 ; Dion Cassius, Hist., li, 12, etc. L’usage qu’en fait Notre-Seigneur et les circonstances dans lesquelles il l’emploie ordinairement montrent que ce terme n’avait de son temps rien que de respectueux. Les mots : « qu’y a-t-il à moi et à toi ? »-ci é(iol xat <roi, reproduisent un hébraïsme, mah lî vâlâk, assez fréquent dans la Sainte Écriture. Jud., xi, 12 ; II Reg., xvi, 10 ; xix, 23 ; III Reg., xvii, 18 ; IV Reg., iii, 13 ; ix, 18 ; II Par., xxxv, 21, etc. Cette expression se retrouve équivalemment dans d’autres passages du Nouveau Testament. Matth., vm, 29 ; Marc, i, 24 ; Luc, iv, * 34 ; viii, 28 ; Matth, , xxvii, 19. Comme tous les idiotismes, elle ne peut se traduire littéralement. Elle signifie, selon les circonstances : « ne vous occupez pas de ce qui me regarde, ne vous inquiétez pas de ce que je dois faire, laissez-moi faire, » ou « qu’est-ce que cela nous fait, à moi et à vous ? ce n’est pas notre affaire ». Le sens de l’expression peut aller de l’opposition la plus formelle à l’acquiescement le plus courtois, suivant la nature des interlocuteurs, des sentiments qui les animent et des circonstances dans lesquelles ils parlent. Sur les lèvres de Notre-Seigneur, l’expression pourrait se traduire par : « Que ne me laissez-vous faire ? i> L’expression qui suit, « mon heure n’est pas encore venue, » peut aussi s’entendre de plusieurs -manières. Elle pourrait signifier simplement : « Le moment n’est pas encore venu, » attendez donc un peu. Mais cette explication suppose que la demande de Marie iut formulée avant que le vin manquât réellement, ce qui n’est pas conforme au texte qui précède. De plus, si tel était le vrai sens, le Sauveur aurait dit, ce semble : « L’heure n’est pas encore venue, » et non pas « mon heure ». Cette expression « mon heure », ou s l’heure », indique toujours dans saint Jean, non pas la minute précise, mais le jour ou l’époque qui doivent voir se produire quelque grand événement messianique, la révélation de la mission du Sauveur, Joa., iv, 21, 23 ; v, 25, 28, sa passion et sa glorification. Joa., vii, 30 ; viii, 20 ; xii, 23 ; xiii, 1 ; xvii, l. Même quand il s’agit de la femme qui va enfanter, « spn heure » indique moins un moment précis que l’ensemble d’heures ou de jours pendant lesquels celle-ci doit souffrir avant sa délivrance. Joa., xvi, 21. Quand donc Notre-Seigneur dit aux noces de Cana : « Mon heure n’est pas encore venue, » il ne veut nullement déclarer qu’il n’interviendra que dans tant de minutes, à tel moment du repas. Son heure, c’est l’époque fixée par le Père pour la première manifestation de sa mission messianique par le moyen d’un miracle. Il suivrait de là que Jésus-Christ aurait devancé cette heure fixée par son Père, pour obéir à la prière de sa mère, prière nécessairement prévue par le Père, qui disposa les événements en conséquence. Saint Irénée, Cont. hxres., III, xvi, 7, t. vii, col. 926, comprend ainsi le texte quand il dit qu’à Cana le Sauveur « repoussa la hâte intempestive de Marie », c’est-à-dire sa demande faite à une heure prématurée, alors qu’elle ignorait l’heure marquée par Dieu. On obtient une exégèse bien plus satisfaisante de ce passage en donnant aux mots : ofotw fy.u r, cJpa iioy, la forme interrogative. C’est ce qu’ont fait Tatien, d’après la version arabe du Diatessaron, Rome, 1888, et saint Grégoire de Nysse, t. xuv,

col. 1308. Dans les textes grecs du Nouveau Testament, l’omission des particules interrogalives est relativement fréquente. Matth., vi, 25 ; viii, 29 ; xii, 10 ; Marc, vii, 18 ; Luc., xiii, 2 ; xx, 4 ; Joa., vi, 14 ; vii, 23 ; xiii, 6 ; xvi, 31 ; xviii, 37 ; xix, 10, etc. Cf. Beelen, Grammat. grœciiat. N. T., Louvain, 1857, p. 508-511 ; Viteau, Étude sur le grec du N. T., Paris, 1896, p. 23-26. La réponse de Notre-Seigneur devrait donc se traduire : « Femme, n’ayez aucune inquiétude, mon heure n’est-elle donc pas venue ? » L’heure de se manifester par un miracle était en effet arrivée, puisque Notre-Seigneur venait d’inaugurer son ministère public par son baptême, ejfrque Jean-Baptiste l’avait présenté comme l’Agneau de Dieu et le Messie. Joa., i, 29-51. C’est même pour « manifester sa gloire » qu’if avait voulu venir à Cana avec ses disciples. Joa., Il, 11. Cf. Ollivier, Les amitiés de Jésus, Paris, 1895, p. 23, 24 ; Bourlier, Les paroles de Jésus à Cana, dans la Revue biblique, 1897, p. 405-422, et surtout Knabenbauer, Evang. sec, Joan., Paris, 1898, p. 118-122.

3° Ce que Marie demandait n’était pas d’une nécessité absolue. Sa requête est une preuve de sa sollicitude vis-à vis de ceux qu’elle aimait, et la manière dont elle fut exaucée montre à la fois le crédit dont elle jouissait auprès de son divin Fils et la bonté du Sauveur disposé à faire des miracles pour procurer même le superflu aux protégés de sa mère, quaDd la gloire de Dieu y est intéressée. Joa., ii, 1-11.

II. AU COURS DE LA PRÉDICATION ÉVANGÉHQVE. —

1° Bien que les évangélistes n’en disent rien, il est fort probable que la Vierge Marie faisait partie de ces pieuses femmes qui accompagnèrent Notre-Seigneur et ses disciples dans leurs courses apostoliques, au moins à partir de la seconde année. Luc, viii, 1-3. Toutefois sa présence ou son souvenir ne sont mentionnés qu’en de rares circonstances.

2° Un jour que le divin Maître conversait longuement avec des pharisiens, dans l’intérieur d’une maison, sa mère et ses frères arrivèrent pour lui parler, et s’efforcèrent en vain de pénétrer jusqu’à lui, tant la foule était grande. La présence de Marie indique immédiatement que cette démarche était commandée par un motif honorable et respectueux. Quelqu’un de l’assistance, s’apercevant de leurs efforts, dit à Jésus : « Voici votre mère et vos frères qui sont dehors et vous demandent. » Le Sauveur, promenant alors ses regards autour de lui et étendant les mains vers ses disciples, répondit : « Ma mère et mes frères sont ceux qui font la volonté du Père, qui écoutent la parole de Dieu et la pratiquent. » Matth., xii, 46-50 ; Marc, iii, 31-35 ; Luc, viii, 19-21. Notre-Seigneur met ainsi au-dessus de la parenté naturelle le lien qui unit à Dieu l’âme obéissante et fidèle. Cette déclaration ne pouvait en rien déshonorer sa mère, qui, aux prérogatives de sa maternité, joignait éminemment celles de sa docilité parfaite à toutes les volontés du Père céleste.

3° Il faut expliquer de même l’autre parole que prononce le Sauveur en réponse à cette femme qui s’est écriée dans la foule : « Bienheureux le sein qui vous a porté et les mamelles auxquelles vous vous êtes allaité ! » Jésus réplique : « Oui, mais (|ievo0v) heureux ceux qui écoutent la parole de Dieu et la gardent ! » Luc, xi, 2728. Ce n’est pas là mettre la Sainte Vierge au second plan, mais tout au contraire faire un éloge délicat de son mérite et inviter toutes les âmes à se procurer le même bonheur qu’elle. Elisabeth a déjà constaté ce bonheur en Marie. Luc, i, 45. Cf. S. Augustin, De virgin., 3, t. xl, col. 398. Un auteur qui écrivait tout au plus au commencement du Ve siècle, et dont les œuvres sont mises à la suite de celles de saint Justin, Qusest. et respons. ad orthod., i, q. 136, t. vi, col. 1389, après avoir remarqué que jamais Notre-Seigneur n’adressa de reproche à sa mère, ajoute : « Dieu n’avait pas choisi une femme quelconque pour qu’elle devint la mère du Christ, mais celle qui dépassait toutes les autres en vertu. Aussi 797

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le Christ voulut-il que sa mère fût proclamée bienheureuse, à-cause de cette vertu même qui lui a valu d’être mère en restant vierge. »

4° Quand le Sauveur vint dans la synagogue de Nazareth, on affecta de s’étonner de sa renommée et de le traiter avec un certain dédain. On disait : et N’est-ce pas le fils du charpentier ? Sa mère n’est-elle pas Marie, et ses frères Jacques, Joseph, Jude et Simon ? Ses sœurs ne sont-elles pas au milieu de nous ? » Matth., an, 55, 56 ; Marc., vi, 3. De ces textes il ressort que saint Joseph était mort, puisqu’on ne parle plus de lui comme habitant Nazareth, et que la Sainte Vierge avait mené dans cette ville une vie assez simple et assez humble pour que rien ne la distinguât des autres femmes de la ville. Les gens de Nazareth n’ont aucune idée du mystère de l’incarnation, et ils croient rabaisser Jésus en prétendant que son père a été le charpentier, et que sa mère a été Marie, une femme en tout semblable aux femmes ordinaires.

5° En dehors de ces circonstances, l’Évangile ne fait aucune mention de Marie, même dans les occasions où sa présence semblerait naturelle. Ainsi elle n’est signalée ni dans les voyages du Sauveur à Jérusalem, ni à la montagne des Béatitudes, ni à la multiplication des pains, ni au cours du voyage de Galilée à Jérusalem, que saint Luc, x-xix, raconte avec tant de détails, ni à Béthanie, ni à Jérusalem au jour de l’entrée triomphale, ni à l’institution de la sainte Eucharistie. Cet effacement peut s’expliquer en partie par un désir de la Sainte Vierge de n’être mentionnée dans les récits évangéliques que quand c’était absolument nécessaire. Mais il indique surtout la règle de discrétion absolue que la mère du Sauveur tint à suivre pendant tout le ministère apostolique de son divin Fils. N’étant appelée elle-même ni à prêcher ni à agir, elle s’appliquait à ne gêner en rien, par sa présence, l’activité et la liberté d’action de Notre-Seigneur et des hommes qu’il formait à l’apostolat. Son humilité profonde lui défendait d’ailleurs de paraître partout où sa qualité de mère de Jésus eût pu lui attirer quelque gloire.

III. PENDANT LA PASSION DU SAUVEUR. — 1° Marie se

trouvait à Jérusalem au moment de la Passion de son divin Fils. C’était l’époque de la Pàque, à laquelle elle ne pouvait manquer de venir prier au Temple. C’était aussi le moment où allait s’accomplir pour elle la prophétie de Siméon. La tradition suppose une rencontre de Marie avec Jésus sur le chemin de la croix. Un plan de Jérusalem, de 1308, indique l’église de Saint-Jean-Baptiste avec le titre de Pasni. Vgis, « le Spasme de la Vierge. » Cf. de Yogûé, Les églises de la Terre-Sainte, Paris, 1860, p. 438 ; Liévin, Guide de la Terre-Sainte, Jérusalem, 1887, t. i, p. 175. Vllinerarium Burdigalense, de 333, et la Peregrinatio Sylviss, un peu postérieure, ne disent rien qui se rapporté à cette tradition, En réalité, c’est seulement au xiv" siècle qu’on commença à localiser les endroits marqués par quelque souvenir de la Passion, et entre autres, celui où la Sainte Vierge se serait évanouie à la vue de son Fils mené au supplice. À partir du xv siècle, il y a toujours une station de Sancta Maria de Spasmo dans les chemins de la croix établis en Europe, à l’imitation de celui de Jérusalem. Cf. Thurston, dans The Month, 1900, juil.-sept., p. 1-12, 153-166, 282-293 ; Boudinhôn/ Le Chemin de la Croix, dans la Revue du clergé français, 1 er nov. 1901, p. 449-463. La tradition du spasme n’est pas très conforme à l’attitude de Marie au pied de la croix. Néanmoins on comprend cette défaillance physique à un moment où la Sainte Vierge se présente comme femme et comme mère, tandis qu’à la croix elle a à remplir un rôle officiel en vue duquel Dieu lui donne une grâce particulière.

2° Quand Notre-Seigneur fut attaché à la croix, après les premiers moments de tumulte et lorsque les phénomènes extraordinaires qui se produisirent dans la nature

commencèrent à répandre l’effroi, la Sainte Vierge, quelques saintes femmes et saint Jean vinrent se placer au pied même de la croix. Marie était debout, dans l’attitude ferme et intrépide qui convenait à la mère du Rédempteur mourant. Cf. S. Ambroise, De institut, virgin., 7, t. xvi, col. 318. Le glaive prédit par Siméon perça alors son âme, mais ne la terrassa pas. Jésus vit à ses pieds sa mère et son disciple bien-aimé. S’adressant à Marie, il lui dit : « Femme, voici ton fils, » puis il dit à saint Jean : « Voici ta mère. » Les Pères expliquent ce texte en ce sens que Notre-Seigneur, sur le point de mourir, ne voulut pas laisser à l’abandon sa mère tendrement aimée, et la confia à saint Jean, auquel il demanda d’être pour elle un véritable fils. Ceux que les évangélistes appellent des « frères de Jésus » n’étaient donc nullement des fils de Marie. C’eût été pour eux une honte que leur mère fût confiée à un autre et Jésus ne l’eût fait d’ailleurs que s’ils avaient été des indignes ; or ils l’étaient si peu que trois d’entre eux avaient été mis au nombre des apôtres. Cf. S. Épiphane, Hser. Lxxvili, 9, t. xlii, col. 714. À dater de ce jour, saint Jean reçut Marie eîç ta îêià, in sua, dans ce qui était à lui, dans sa maison. Joa., xix, 25-27. Seul parmi les Pères, Origène fait une application de ce texte à d’autres que saint Jean. Il dit en effet dans sa préface au commentaire In Joa, , 6, t. xiv, col. 32 : « Personne ne peut saisir le sens de l’Évangile s’il n’a reposé sur la poitrine de Jésus ou s’il n’a reçu de Jésus Marie pour qu’elle devienne sa mère… Quiconque est parfait ne vit plus lui-même désormais, mais le Christ vit en lui, et puisque le Christ vit en lui, il est dit de lui à Marie : voici ton fils le Christ. » D’après le savant interprète, un homme n’a donc Marie pour mère qu’indirectement, quand lui-même s’identifie à Jésus par la vie de la grâce. L’idée d’une maternité directe n’apparait que plusieurs siècles après lui. Au ixe siècle, Georges de Nicomédie, Or. vm in S. Mai : assist. cruci, t. c, col. 1476, fait dire à Notre-Seigneur parlant à sa mère : « Vous tiendrez ma place auprès de lui et de ses compagnons. Car avec lui et en lui je vous confie mes autres disciples. » Puis il le fait parler ainsi à saint Jean : « Je la fais mère et maîtresse non seulement pour toi, mais encore pour tous mes autres disciples. » En Occident, l’explication du texte dans le sens d’une maternité spirituelle de la Sainte Vierge ne se constate qu’au commencement du xiie siècle, avec Rupert de Deutz. Même saint Bernard, qui meurt dix-huit ans après le précédent, ne songe pas encore à interpréter le texte en ce sens. Il donne à la Sainte Vierge toutes sortes de noms, mais jamais celui de « mère des hommes ». Cf. Serm. dom. infr. oct. Assumpi., 15, t. clxxxiii, col. 438. Par contre, son contemporain, Géroch, prévôt de Reichersperg, qui meurt en 1169, trente-quatre ans après Rupert, s’exprime dans les mêmes termes que ce dernier. Cf. Géroch, De glor. et honor. Fil. hom., x, 1, t. cxciv, col. 1105. À partir de ce moment, la doctrine devient de plus en plus commune. Cf. Tract, de Concept. B. M., 33, t. clix, col. 315 ; Bellarmin, De sept. verb. Christ., i, 12, Cologne, 1618, p. 105-113 ; Bossuet, Serm. pour la fête de la Nativ., 2° part., Bar-le-Duc, 1870, t. vii, p. 244, et note ; Knabenbauer, Evang. sec. Joan., Paris, 1898, p. 544-547 ; Terrien, La mère de Dieu et la mère des hommes, t. iii, p. 247-274.

3° Marie, présente au Calvaire, assista à la mort de son divin Fils, et très vraisemblablement, avec les saintes femmes venues jusque-là, Joa., xix, 25 ; Matth., xxvii, 56 ; Marc, xv, 40 ; Luc, xxiii, 49, à sa descente de la croix et à sa sépulture. Le jour du sabbat dut se passer pour elle dans le deuil et dans l’espérance. — Un concile de Cologne, en 1423, can. 11, institua, contre les Hussites, la fête des Douleurs de Marie, à célébrer le vendredi d’après le troisième dimanche qui sait Pâques. Benoît XIV, en 1725, rendit la fête universelle 799

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et la fixa au vendredi de la semaine de la Passion. VI. Après la résurrection du Sauveur. — I. les

APPARITIONS DU SAUVEUR RESSUSCITÉ. — Les récits

évangéliques ne font aucune mention de la Sainte Vierge dans le peu qu’ils racontent à propos des jours qui ont suivi la résurrection. Les Pères s’en sont tenus à ce silence. Georges de Nicomédie, Or. ix, t. c, col. 1500, est probablement le premier à dire que, la Sainte Vierge avant eu une part de choix aux angoisses de la croix, dut jouir avant tous et plus que tous du triomphe de son Fils. Au XIIe siècle, , l’idée d’une apparition du Sauveur ressuscité à sa sainte Mère commence à se répandre en Occident avec Rupert, De div. offic, vii, 25, t. clxx, col. 306, et est admise comme un fait de convenance par Eadmer, De excell. V. M., 6. t. eux, 568, puis par saint Bernardin de Sienne, Quadrag. l, in Resurrect., Serm. Lll, 3 ; saint Ignace de Loyola> Exercic. spir., de resurrect., I a appar. ; Suarez, De myst. vit. Christ., xlix, 1 ; Maldonat, In iv Evang., ad xxviii Matth., etc. Cf. Terrien, La mère de Dieu et la mère des hommes, t. i, p. 322-325. Les mêmes raisons de convenance permettent de supposer plusieurs apparitions du divin Maître à Marie, entre sa résurrection et son ascension. Peut-être la Sainte Vierge assistat-elle d’ailleurs avec grand empressement aux rendez-vous assignés en Galilée, Matth., xxviii, 7, 10, 16 ; Marc, xvi, 7, et à l’ascension de son divin Fils. L’Évangile et la tradition sont muets à ce sujet.

II. la Pentecôte. — 1° Aussitôt après l’ascension, les Apôtres et les disciples se retirèrent à Jérusalem, dans le cénacle, au nombre d’environ cent vingt. Il y avait avec eux plusieurs des saintes femmes venues de Galilée, et « Marie, mère de Jésus ». Malgré sa haute dignité et son incomparable sainteté, ce n’était pas elle qui exerçait l’autorité et prenait la parole dans l’assemblée, mais Pierre, établi chef de l’Église par le Sauveur. Act., i, 15. Tous priaient ensemble d’une manière continue, Act., i, 14, se rendant également dans le Temple pour louer et bénir Dieu. Luc, xxiy, 53. La Vierge Marie remplissait ainsi vis-à-vis de l’Église à son berceau des devoirs analogues à ceux dont elle s’était acquittée jadis envers l’enfant Jésus. Sa prière contribuait à la ferveur des autres et communiquait à leurs désirs des instances plus capables d’attirer la grâce de l’Esprit-Saint.

2e Le jour de la Pentecôte, Marie priait encore au milieu des disciples quand l’Esprit descendit « sur chacun d’eux ». Act., ii, 3, 4. Elle le reçut donc aussi. L’Esprit de Dieu avait pris possession de l’âme de Marie dès le premier instant de sa conception. Il était venu en elle pour opérer le mystère de l’incarnation, Luc, i, 35, et lui donner les grâces nécessaires à l’accomplissement de sa mission vis-à-vis du Verbe incarné. Il revint à la Pentecôte augmenter encore la grâce en elle, peut-être aussi la mettre en mesure de remplir de nouveaux devoirs vis-à-vis de l’Église et de l’humanité.

in. les dernières annébs de marie. — 1° Après la Pentecôte, la Sainte Vierge demeura à Jérusalem, à la garde de saint Jean, auquel Notre-Seigneur l’avait confiée. Sa présence cependant ne paralysa en rien le ministère de l’Apôtre, non seulement à Jérusalem, mais même en dehors de la ville. Act., viii, 14-17. Il en était absent au premier et au dernier voyage de saint Paul, Gal., i, 18, 19 ; Act., xxi, 18 ; mais il assistait au concile de Jérusalem, en l’an 51 ou 52. Son départ définitif pour Éphèse n’eut très probablement lieu qu’après la mort de la Sainte Vierge. Voir Jean (Saint), t. iii, col. 1161, 1162. Un voile épais couvre la rie de Marie durant cette période. Sans nul doute, elle était pour tous un exemple et un, encouragement. S’il est dit des premiers chrétiens qu’ils « persévéraient dans la doctrine des Apôtres, restaient unis, rompaient le

pain et priaient assidûment », Act., ii, 42, ces paroles s’appliquent éminemment à elle.

2° L’absence de documents authentiques ne permet pas de dire si la Sainte Vierge passa une partie de ses dernières années hors de Jérusalem ou de Palestine. Ceux qui supposent qu’elle fit un séjour à Éphèse, s’appuient sur un texte obscur et incomplet de la lettre synodale du concile d’Éphèse, qui peut vouloir dire tout simplement que « là le théologien Jean et la Vierge sainte Marie » avaient une église consacrée en leur honneur. Cꝟ. 1. 1, col. 1136, et Labbe, Colleet. Concil., t. iii, p. 573. L’apôtre saint Jean avait été inhumé à Éphèse, Eusèbe, H. E., iii, 31 ; v, 24, t. xx, col. 280, 493, et l’église élevée sur son tombeau était YApostolieon, voir t. ii, col. 1847-1849, et non celle dans laquelle se réunit le concile d’Éphèse. La phrase de la lettre synodale ne peut donc signifier que « là même », é’vûb, . se trouvaient les tombeaux de Jean le théologien et de la Vierge sainte Marie. Il est vrai que Tillemont, Mém. pour servir à Vhist. ecclés., t. i, p. 467-471 ; dom Calmet, Dict. de la Bible, art. Jean, Marie, Paris, 1846, t. ii, col. 902 ; t. iii, col. 975-976, et d’autres pensent que la Sainte Vierge a vécu à Éphèse et y a été inhumée. Mais cela ne ressort nullement du texte de la lettre. Bien plus probablement celle-ci visait la double église dont on a retrouvé les ruines à Éphèse. Ce monument forme un rectangle de 88 mètres de long sur 33 de large. À l’intérieur, il y avait une première abside au milieu de l’église et une seconde au chevet, ce qui permet de supposer une basilique ayant une partie dédiée à la Sainte Vierge et l’autre à saint Jean. Cf. Le Camus, Les sept Églises de l’Apocalypse, Paris, 1896, p. 131-133. On a cru trouver à Panaghia Kapouli, sur une colline à 15 kilomètres d’Éphèse, les restes d’une maison qu’aurait habitée la Sainte Vierge. Cf. JPoulin], Panaghia-Capouli, Paris, 1896 ; Gabriélovich, Ephèse ou Jérusalem, tombeau de la Sainte Vierge, Paris, 1897 ; Gouyet, Découverte dans la montagne d’Ephèse de la maison où la T. S. Vierge est morte, Paris, 1898. Cette maison, recherchée et découverte d’après les indications de Catherine Emmerich, Vie de la Sainte Vierge, Tournai, 1869, p. 480, 481, serait celle où Marie a vécu ses dernières années et près de laquelle elle a été inhumée. Une pareille affirmation ne saurait avoir plus de valeur historique que les autres descriptions de Catherine. L’exactitude de ce qu’elle a pu dire des ruines de Panaghia-Kapouli, dans leur état actuel, n’entraîne pas logiquement celle de la destination qu’elle lui attribue. Ms r Timoni, archevêque de Smyrne, écrit judicieusement en tête de Panaghia-Capouli ; « Chacun est libre entièrement de garder son opinion personnelle. » La thèse ne s’impose donc à aucun titre. On ne conçoit guère d’ailleurs saint Jean s’établissant dans la montagne, à 15 kilomètres d’Éphèse, avec la Sainte Vierge, qui ne serait venue là que pour ne pas se séparer de celui auquel Notre-Seigneur l’avait confiée. On concevra moins encore que les anciens Pères, qui mentionnent à Éphèse le tombeau de saint Jean, et même celui d’une fille de Philippe, cf. Polycrate, dans Eusèbe, H. E., xiii, 31, t. xx, col. 280, ne fassent jamais la moindre allusion au séjour et au tombeau de Marie. Le premier qui en parle est un évêque jacobite du xine siècle, G. Aboulfarage, surnommé Bar-Hébrseus, qui raconte que saint Jean conduisit avec lui la Sainte Vierge à Patmos, fonda ensuite l’Église d’Éphèse, et ensevelit la bienheureuse Marie, sans qu’on sache où il l’inhuma. Cf. Assemani, Bibliot. orient., Rome, 1719-1728, t. iii, p. 318. L’inexactitude des deux premiers renseignements dispose assez peu à accepter 1er troisième. Benoit XIV, De fest. D. N. J. C, I.^vn, 101, dit que Marie suivit saint Jean à Éphèse^et y mourut. En parlant de l’assomption de Marie, il ne paraît pas très ferme dans son opinion favorable à Éphèse. Il voulait cependant 801

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enlever du bréviaire les leçons qui mentionnent la mort de la Sainte Vierge à Jérusalem. Le temps lui manqua pour faire exécuter sa décision. Cf. Arnaldi, Super transitu B, M. V., Gênes, 1879, t. i, c. I. En somme, le séjour de la Sainte Vierge à Éphèse est possible. Mais les documents authentiques qui l’attesteraient font défaut jusqu’à ce jour, et les probabilités sont presque toutes contraires à cette hypothèse. Cf. Le Camus, Les sept Églises, p. 133-136 ; Jos. Nirschl, Das Grab der heiligen Jungfrau Maria, Mayence, 1896 ; Id., Das H ans und Grab der heïligen Jungfrau, Mayence, 1900 ; Barnabe d’Alsace, Le tombeau de la Sainte Vierge à Jérusalem, in-8°, Jérusalem, 1903 ; Gabriélovich, Le tombeau de la Sainte Vierge à Éphèse, réponse au P. Barnabe, in-8°, Paris, 1905.

3° Le séjour continu de la Sainte Vierge à Jérusalem jusqu’à sa mort ne laisse pas non plus de présenter certaines difficultés. Saint Jean ne demeura pas lui-même dans cette ville d’une manière constante. D’autre part, la persécution y sévit plusieurs fois et dispersa les chrétiens. Act., viii, 1 ; xii, 1. Que devint pendant ce temps la Très Sainte Vierge ? Après tout, il n’était pas nécessaire que, pour réaliser le vœu du Sauveur, saint Jean fût sans cesse auprès de Marie. Il ne manquait pas de disciples pour le suppléer momentanément, et quand les temps devenaient difficiles, il ne devait pas être malaisé de ménager un refuge à la Sainte Vierge à distance de la ville. L’antiquité n’a laissé aucun renseignement à ce sujet.

IV. LA MORT, LA RÉSURRECTION ET il’ASSOMPTION DE

marie. — 1° L’histoire ne dit rien au sujet de ces événements. Les apocryphes ont cherché à suppléer à son silence. Il existe un écrit grec connu sous le nom A’Historia dormitionis et assumptionis B. M. V., mis sous le nom de saint Jean lui-même. Cf. Assemani, Bibl. orient., t. iii, p. 287. C. Tischendorf, Apocal. apocriph., Mariai dormitio, Leipzig, 1856, p. xxxiv, estime que les parties essentielles du texte pourraient remonter au ive, peut-être même au IIe siècle. De ce premier texte paraissent dériver d’autres récits ou des versions arabes, syriaques et autres, et spécialement le De transitu V. M., mis sous le nom de saint Méliton de Sardes, t v, col. 1231-1240. Cf. Le Hir, Études bibliques, Paris, 1869, t. ii, p. 131-185. Le pape Gélase, t. Lix, col. 152, rangea cet écrit parmi les livres qu’il condamnait. On trouve aussi dans le pseudo-Aréopagite, Div. nom., iii, 2, t. iii, col. 681, une allusion à la mort de la Sainte Vierge. Cf. P. Halloix, VU. Dionys. Areop., 6, t. iv, col. 747-750 ; J. de Voragine, La légende dorée, trad. Roze, Paris, 1902, t. ii, p. 415-459. Ces récits, diversement remaniés, n’ont probablement atteint leur forme définitive qu’au v « siècle. On y voit intervenir, autour de la Sainte Vierge mourante, les anges Gabriel et Michel, Notre-Seigneur lui-même, les Apôtres rassemblés miraculeusement de diverses régions, des disciples marquants, et enfin, par une réplique servile des récits évangéliques, Joa., xx, 24-29, saint Thomas arrivé après tous les autres, provoquant la réouverture du tombeau et la constatation de la disparition du corps. Cet épisode de saint Thomas ne se lit pas dans le De transitu V. M. Il est rejeté, avec plusieurs autres détails, par la fausse lettre de saint Jérôme à Paula et à Eustochium, t. xxx, col. 122-145, qui ne date d’ailleurs que du ix « siècle. Voir t. i, col. 1134. 2° Modeste, évêque de Jérusalem dans le premier tiers du vn « siècle, Serm. in Assumpt., t. lxxxvi, col. 32883300, est le témoin le plus ancien qui place au mont Sion le lieu de la dormition de la Sainte Vierge. Il y avait à cet endroit une église célèbre, qui renfermait, assurait-on, le cénacle de l’Eucharistie et la chambre haute de la Pentecôte. À dater du vn « siècle, on localisa dans cette église l’emplacement précis qui aurait été illustré par la mort de Marie. On peut s’étonner que cette tradition, si elle est exacte, n’apparaisse que si tardivement, alors que celle qui concerne le cénacle peut remonter

DICT. DE LA. BIBLE.

jusqu’aux temps apostoliques. D’autres traditions placent le lieu de la dormition au mont des Oliviers, où le Commemoratorium de Casis Dei adressé à Charlemagne signale une église dédiée à sainte Marie. Cf. Tobler, Itiner. Terr. sanct., t. i, p. 302. Peut-être cette seconde tradition n’était-elle qu’une tentative pour rattacher le souvenir de la Sainte Vierge à l’Éléona, comme la première la rattachait au cénacle. Ces localisations avaient pour but de fixer près des lieux de réunion des fidèles de Jérusalem le souvenir de la mort de Marie ; elles sont relativement trop récentes pour fournir des données certaines sur le lieu même de la dormition. Cf. Zahn, Die Dormitio Sanctse Virginis und das Haus des Johannes Marcus, dans la Neue Kirchl. Zeitschrift, Leipzig, t. x, 1898, p. 5 ; Séjourné, Le lieu de la dormition de la T. S. Vierge, et Lagrange, La dormition de la Sainte Vierge et la maison de Jean Marc, dans la Revue biblique, 1899, p. 141-144, 589-600 ; Mommert, Die Dormitio, Leipzig, 1899. En somme, on ne peut rien dire de précis ni sur le lieu où Marie passa ses dernières années, ni sur l’âge qu’elle atteignit, ni sur les circonstances particulières de sa morl, ni sur l’endroit où arriva cet événement.

3° Saint Épiphane, Dser., lxxviii, 11, t. XL, col. 716, a cru devoir douter de la réalité de cette mort. Il n’a pas été suivi. On a compris que la mère n’avait pas à être exemptée d’une loi que son divin Fils avait voulu subir. L’enseignement commun, à partir d’Albert le Grand, Super missus, q. cxxxii, Oper., t. xx, p. 89, est que la Vierge Marie mourut sans douleur et par l’effet de son amour. Cf. Terrien, La mère de Dieu et la mère des hommes, t. ii, p. 326-339.

4° C’est l’évêque de Jérusalem, Juvénal, qui le premier, en 451, signala la présence du tombeau de la Sainte Vierge à Jérusalem. Il est à noter que saint Jérôme, le pèlerin de Bordeaux et sainte Sylvie n’en font aucune mention. L’empereur Marcien et l’impératrice Pulchérie, désirant consacrer à la Vierge Marie une église aux Blaquernes, à Constantinople, auraient demandé à l’évêque de Jérusalem de prendre dans le tombeau de Gethsémani les précieux restes de la mère de Dieu, et de les leur envoyer. Juvénal, invoquant une ancienne tradition, répondit que le corps sacré avait été emporté au ciel. Il se contenta d’envoyer à Constantinople le cercueil et les linges du tombeau sacré. Toute cette histoire est racontée par un certain Euthymius, dont le récit est inséré dans une homélie de saint Jean Damascène, Hom. H in dormit. B. V. M., 18, t. xcvi, col. 748, qu’on lit encore au Bréviaire, Lect. iv infr. oct. Assumpt, , il noct. Scheeben, Bandbuch der katholischen Dogmalik, Fribourg, 1875, t. iii, p. 572, ’pense que [le passage d’Euthymius a été ajouté après coup dans l’homélie. On se demande aussi quel est cet Euthymius qui cite, à pareille date, le pseudo-Denys l’Aréopagite, De div. nomin., m, 2, t. iii, col. 690. Enfin, l’évêque Juvénal n’est pas digne d’une confiance absolue. On connaît ses intrigues pour se faire attribuer une juridiction patriarcale par les conciles d’Éphèse et de Chalcédoine. Saint Léon, Epist., cxix, 4, t. Liv, col. 1044, l’accuse d’avoir fabriqué de fausses pièces pour arriver à ses fins. Il lui écrit à lui-même pour déplorer une conduite par laquelle il s’est mis hors d’état de résister aux hérétiques ; il lui rappelle les lieux saints qu’il a sous les yeux, même le mont des Oliviers, mais sans aucune allusion au tombeau de la Sainte Vierge. Epist. cxxxix, 1, 2, t. liv, col. 1103, 1105. Ce silence ne doit pas étonner, le saint pape entrant trop peu dans le détail pour être amené à parler du tombeau de Gethsémani. Toujours est-il qu’on doit se demander jusqu’à quel point il faut s’en rapporter à ce que dit Juvénal, ou à ce que lui fait dire Euthymius. Il ne suit pas de là cependant que le fond de la tradition sur l’existence du tombeau de Marie à Gethsémani soit à rejeter. Tout ce que contiennent les deux apocryphes

IV. - 26 803

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MARIE, MÈRE DE DIEU

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n’est pas faux, cf. Épiphane, rnonach., De vit. sanct. Deip., t. cxx, col. 148, et depuis Juvénal et saint Jean Damascène, l’opinion la plus générale a été que la Sainte Vierge fat inhumée dans la vallée de Josaphat, à l’endroit où existe aujourd’hui l’église de l’Assomption. En somme, la tradition en faveur de l’authenticité de ce tombeau remonterait au moins à l’époque des apocryphes, c’est-à-dire aux environs de l’an 400.

5° La basilique qui recouvre le tombean aurait été fondée à peu près dans le même temps. Le tombeau lui-même a dû être taillé primitivement dans un massif rocheux ; il est maintenant à une grande profondeur, à cause de l’exhaussement du sol de la vallée. L’église actuelle a été bâtie par les latins, pour remplacer l’ancienne,

il est à croire que le jardin de Gethsémani appartenait à des amis du Sauveur, Joa., Xvm, 2, il paraîtrait tout naturel que ceux-ci y eussent offert une sépulture, peut-être même auparavant, quand besoin était, un asile à la Vierge Marie. Cf. Le Camus, Notre voyage aux pays bibliques, Paris, 1894, t. î, p. 253.

6° Sur l’assomption de la Sainte Vierge, voir Assomption, t. i, col. 1132-1138, et Dict. de théologie catholique, t. i, col. 2127-2140 ; Kellner, Heortologie, p. 148151.

VII. Dans les écrits des Apôtres. — 1° Les Épîtres.

— Un seul passage fait une allusion directe à la Sainte Vierge. C’est celui où saint Paul dit aux Galates, iv, 4, que Dieu a envoyé son Fils « fait de la femme », yevo I

1 !

1. Tombeau des parents de

la Sainte Vierge. — 2. Tom beau de saint Joseph. — 3. Tombeau de la Sainte Vierge. —

4. Autel des grecs. — 5. Autel

des arméniens. — 6. Mihrab

des musulmans. — 7. Voûtos.

— 8. Autel des Abyssins. —

9. Citerne. — 10. Grotte de

l’Agonie.

219. — Plan de l’église de l’Assomption.

qui tombait en ruines. Un escalier de quarante-huit marches conduit à la petite basilique souterraine en forme de croix latine, de trente mètres de long sur huit de large. Toutes les communautés chrétiennes peuvent officier dans ce sanctuaire ; les musulmans mêmes y ont une place pour prier ; les latins en sont seuls exclus depuis 1757. Cf. Guérin, Jérusalem, Paris, 1889, p. 346350. Au deux tiers de l’église, en allant vers l’est, s’élève un petit édicule à peu près carré, relié par un mur à la paroi sud et surmonté d’une coupole à peine visible. On accède dans cet édicule par deux portes ; quatre ou cinq personnes peuvent à peine y tenir, et de nombreuses lampes y brûlent continuellement. Une banquette en pierre, creusée en forme d’auge, et recouverte par un autel, occupe la partie orientale de Pédicule. C’est là qu’aurait été déposé le corps de la Vierge Marie (fig. 219). Cf. Socin-Benzînger, Palâstina und Syrien, Leipzig, 1891, p. 90-91. À droite de la petite façade de l’église de l’Assomption s’ouvre un couloir aboutissant à un escalier de quelques marches par lequel on accède dans la grotte de l’Agonie. Voir t. iii, col. 232. Le tombeau de la Sainte Vierge est à peine à vingt-cinq mètres de cette grotte en ligne droite. Comme

uivov êx fuvatxrfç, factupi ex muliere. Quelques manuscrits grecs et latins, suivis par plusieurs Pères, lisent : fevv<j)u.évov èx yuvatxôç, natum ex muliere, « né de la femme. » Photius, Ad Âmphiloch., q, 228, t. ci, col. 1024, montre que la leçon Y£vv<j>[iivov est inacceptable, parce que le Christ n’est pas « naissant » de la Vierge, mais « né » une fois pour toutes, YeYevvïiiiévo ; ou-fEvvviŒti. La variante latine natum ne présente pas le même inconvénient ; mais le V. Bède, In Luc, xi, 27, t. xcii, col. 480, la réprouve avec raison parce qu’elle affaiblit le sens. Dans un autre passage, saint Paul emploie la première expression en parlant du même sujet : y^viiiievo ; èx a71lp[la-roç AaueiS xaxà <ràpxa, factus ex semine David secundum camem. Rom., i, 3. Tertullien, De cam. Christ., 20, t. ii, col. 786, remarque que le mot factum dit plus que le mot natum ; en employant le premier terme, l’Apôtre « rappela le Verbe fait chair et affirma la réalité de la chair faite de la Vierge ». Le mot mulier, « femme, » ne constitue aucune atteinte à l’idée de la virginité de Marie ; il désigne simplement le sexe, comme le grec "fuvïj, sans impliquer d’autre sens. Telle est bien du reste la pensée que saint Paul veut insinuer aux Galates, puisqu’il parle d’un homme uniquement « . fait deJa 805

    1. MARIE##

MARIE, MÈRE DE DIEU

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femme ». Cf. Tertullieti, De virgin. vel., 6, t. ii, col. 897 ; S. Cyrille Hieros., Catech., xii, 31, t. xxxiii, col. 766 ; S. Jérôme, In epist. ad Galat., Il, 4, t. xxvi, col. 372. 2° L’Apocalypse. — Saint Jean ne nomme pas une seule fois la Sainte Vierge par son nom de « Marie » ; il l’appelle « mère de Jésus ». Joa., H, 1, 3 ; xix, 25, 26. Les rapports plus intimes qu’il a eus avec elle, durant un bon nombre d’années, la connaissance plus parfaite qu’il a acquise de sa sainteté et l’intelligence qu’il a dû avoir de sa mission auprès de l’Église naissante, permettent d’attendre de lui au moins quelque allusion à cette Vierge dont la garde lui avait été confiée. Cette allusion paraît de prime abord se rencontrer dans le passage suivant de l’Apocalypse, xii, l-6 : « Une grande merveille apparut dans le ciel : Une femme revêtue du soleil, la lune sous ses pieds, et sur sa tête une couronne de douze étoiles. Elle portait dans son sein, criait en enfantant et était à la torture pour enfanter. Un autre signe apparut dans le ciel : Un grand serpent roux, ayant sept têtes et dix cornes… Le serpent se tint devant la femme qui allait enfanter, afin de dévorer son fils quand elle l’aurait mis au monde. Et elle enfanta un fils qui devait gouverner toutes les nations avec une verge de fer. Et son fils fut enlevé vers Dieu et vers son trône. Et la femme s’enfuit dans la solitude, où elle avait une demeure préparée par Dieu. » La femme décrite dans ce passage est avant tout l’Église, dont saint Jean annonce les destinées dans tout le cours de ce livre. C’est l’Église et non la Sainte Vierge, qui crie et souffre pour mettre au monde ses enfants. Mais Marie est à la fois la figure et le personnage le plus saillant de l’Église. Marie et l’Église se superposent l’une à l’autre dans la vision de saint Jean, et, si certains traits conviennent mieux à cette dernière, d’autres semblent mieux s’adapter à la Sainte Vierge. C’est elle dont le Fils a gouverné les nations avec la verge de fer, Ps. ii, 9, et ensuite a été enlevé vers Dieu et vers son trône, au jour de son ascension, pendant que la femme, sa mère, se retirait dans la solitude préparée par Dieu, sous la garde de l’apôtre saint Jean. Marie et l’Église ont également le soleil pour parure, la lune pour escabeau, les étoiles pour couronne. Le serpent, le diable du paradis terrestre, Apoc, xii, 9 ; xx, 2, a voulu dévorer l’enfant de Marie dès sa naissance, quand il le fit poursuivre par Hérode ; à mesure que l’Église enfante les âmes à la grâce, il est encore là pour les perdre. Bien que l’Église soit au premier plan dans cette description, il paraît donc indéniable que saint Jean avait aussi la Sainte Vierge devant les yeux. Cette idée est déjà exprimée dans le Serm. IV de symbolo ad catechum., 1, attribué à saint Augustin, t. XL, col. 661, où on lit au sujet du texte de l’Apocalypse : « Personne de vous n’ignore que le serpent est le diable. Cette femme désigne la Vierge Marie qui, dans une intégrité parfaite, a engendré notre chef, et qui a représenté en « Ile-même la figure de la sainte Église ; de sorte que, <le même qu’elle est restée vierge en engendrant son Fils, ainsi l’Église ne cesse d’engendrer ses enfants sans perdre sa virginité. » Cette interprétation, bien que n’ayant très probablement pas saint Augustin pour auteur, tire une importance particulière de ce fait que l’Église l’a insérée dans son office. In vigil. Pentecost., II Noct., lect. v. L’Église a également introduit le passage de l’Apocalypse dans l’office de l’Immaculée Conception, Il Noct. resp. vi, ce qui indique la légitimité de son application à la Sainte Vierge. Cette application avait d’ailleurs été déjà faite par d’autres anciens auteurs, celui d’une Exposit. in Apocal., dans les œuvres de saint Ambroise, t. xvii, col. 876 ; Haymon d’Halberstadt, In Apoc, ni, 12, t. cxvii, col. 1080 ; Alcuin, Comm. in Apoc, v, 12, t. C, col. 1152 ; Cassiodore, Complexion. in Apoc, ad xii, 7, t. lxx, col. 1411 ; Richard de S. Victor, Explic. in Cant., 39, t. cxcvi, col. 517 ; Rupert, Comm. in Apoc, vii, 12, t. clxix, col. 1039 ; S. Bernard, Serm.

de xii prœrog. B. V. M., 3, t. CLXXxm, col. 430, etc. Bossuet, qui dans son Explication de l’Apocalypse, Bar-le-Duc, 1870, t. ii, p. 228, entend de l’Église le commencement du chapitre xii, ne laisse pas ailleurs, Serm. pour la fête de VAssompi., 2e p., t. vil, p. 643, d’appliquer les mêmes paroles à la Sainte Vierge. Newman, Du culte de la Sainte Vierge dans l’Église catholique, p. 62-71, explique le silence des plus anciens Pères, par rapport à cette interprétation, en remarquant qu’ils ne demandaient des lumières à la Sainte Écriture que sur les points de doctrine attaqués de leur temps. Il ajoute que l’idée de la Vierge avec son Enfant était familière aux premiers chrétiens, comme le démontrent les peintures des catacombes, et que « l’Église n’eût pas été représentée par l’Apôtre sous cette image particulière, si la bienheureuse Vierge Marie n’eût pas été élevée au-dessus de toute créature et vénérée par tous les fidèles ». P. 68 ; cf. Hist. du développement de la doct. chrét., trad. J. Gondon, , Paris, 1848, p. 385-387. Il n’y a pas là, en ce qui concerne la Sainte Vierge, un simple sens accommodatice, comme on l’a prétendu quelquefois, cf. Drach, Apocal., Paris, 1873, p. 114, mais un vrai sens littéral, qui tantôt lui convient à elle seule et tantôt convient en même temps à l’Église. Cf. R. M. de la Broise, Mulier amicta sole, dans les Études des RR. PP. Jésuites, t. lxxi, avril-juin 1897, p. 289 ; Terrien, La mère de Dieu et la mère des hommes, t. iv, p. 59-84.

VIII. Chez les premiers chrétiens. — Les monuments des premiers âges du christianisme révèlent quelle place tenait déjà la Sainte Vierge dans la piété et dans le culte. — 1° Aucune peinture ne nous a conservé les traits de la mère du Sauveur. Les madones byzantines, dites de saint Luc, ne datent guère que du vr= siècle et ne reproduisent qu’un type de convention. On en connaît au moins vingt-sept exemplaires, dont dix dans la seule ville de Rome. Cf. Lecanu, Histoire de la Sainte Vierge, p. 454-456. Voir Martigny, Dict. des antiq. chrét., Paris, 1877, p. 792. Aussi saint Augustin, De Trinit., viii, 5, t. xi.il, col. 952, pouvait-il dire : « Nous ne connaissons pas la figure de la Vierge Marie… Son visage était-il tel qu’il se présente à notre esprit quand nous parlons d’elle ou que nous nous la rappelons, nous n’en savons absolument rien, nous ne le croyons pas. » Les images de Marie qu’ont exécutées les premiers chrétiens ne sont donc pas des portraits. La plus ancienne est celle du cimetière de Priscille. Elle représente la Vierge tenant l’enfant Jésus comme pour l’allaiter ; une étoile brille au-dessus d’elle et près d’elle se tient un prophète, Isaïe, ou peut-être Michée (t. i, fig. 102, col. 394). La peinture est d’un beau style classique, comparable à celui des peintures de Pompéi. On s’accorde à la dater du commencement du n « siècle. La Vierge est plusieurs fois figurée dans des scènes de l’adoration des mages, au me siècle, dans les cimetières de Domitille et de Calixte ; au iv « , dans celui des Saints-Pierre-et-Marcellin. Voir fig. 170 et 171, col. 547. Dans cette dernière scène, elle apparaît nu-tête, contrairement à l’usage. Au cimetière Ostrien, la Vierge est représentée avec une gracieuse figure, les bras à demi étendus et l’enfant Jésus devant elle (fig. 220). Cette peinture, qui est du rv « siècle et postérieure à Constantin, a servi ensuite de type à beaucoup d’autres. Les saints figuraient sur les tombes des premiers chrétiens surtout comme avocats des âmes. Or Marie était avocate par excellence, ainsi que la nomme saint Irénée, Adv. hseres., v, 17, t. vii, col. 1175. Aussi est-elle toujours à la place d’honneur, ordinairement assise sur une chaise voilée, ce qui marque la puissance qu’on lui attribue. « Assurément on ne peut affirmer que ces images elles-mêmes aient été d’abord un objet de culte ; on avait trop soin, dans les premiers siècles, d’écarter tout ce qui avait quelque ressemblance avec l’idolâtrie… Mais supposé que les chrétiens n’aient pas eu dés lors une dévotion spéciale envers la T. S. Vierge, comment expliquer qu’ils aient tant multiplié son image sur les parois des catacombes, où on l’a retrouvée une vingtaine de fois, sur les verres dorés et sur les sarcophages ? Sans doute, il y en aurait un bien plus grand nombre encore, si tant de monuments n’avaient été détruits et si même nous connaissions tous ceux qui subsistent cachés sous les décombres. » H. Marucchi, Élém. d’arehéol. chrét., . i, Paris et Rome, 1899, p. 321. Cf. De Rossi, Imagini scette délia B. V. Maria, traite dalle Cala saint Pierre et saint Paul (fig. 221), comme un personnage supérieur aux deux autres. Les premiers chrétiens ne pouvaient indiquer d’une manière plus claire quelle place ils attribuaient à Marie dans leur vénération. Sur un autre verre, on voit sainte Agnès à côté de la Sainte Vierge. Ces objets, antérieurs au concile d’Éphèse, ainsi que les peintures des catacombes, démontrent que le culte de la Sainte Vierge n’est pas la conséquence de ce concile, mais qu’il est contemporain des origines chrétiennes, au moins sous sa forme la plus élémentaire. Cf. F. A. von Lehner, Die Marienvèrehrung in~

[Image à insérer] .220. — La Vierge et l’enfant Jésus. Peinture du cimetière Ostrien. D’après Wilpert, Die Malereien der Katakomben Roms, pi. 173.

combe Romane, Rome, 1863 ; M. Wolter, Les cata~ combes de Rome, trad. Alter, Paris, 1872, p. 38-52.

2° Des tombeaux des catacombes et de la chaux des « loculi » on a retiré, entre autres objets, des verres dorés composés ordinairement de deux disques soudés au feu, entre lesquels on a gravé ou dessiné sur or différents sujets. Cf. Garrucci, Vetri ornati di figure in oro, Rome, 1858. Ces verres remontent en général au lïi<> on au iv » siècle. La Sainte Vierge y est assez souvent représentée, avec la légende MARIA ou MARA. Un

[Image à insérer] 221. — Marie et les Apôtres Pierre et Paul. Fond de verre. D’après Garrucci, Vetri ornati di figure in oro, 1868, pi. îx, n. 7.

des spécimens les plus significatifs est celui dans lequel Marie apparaît debout, les mains étendues, entre

den ersten Jahrhunderten, Stuttgart, 1886 ; Martigny, Dict. des antig. chrét., p. 788-792.

3° Une autre forme de dévotion des premiers chrétiens pour la Sainte Vierge est le nom de « Marie » qu’ils aiment à porter et qui se rencontre dans les inscriptions, à partir de la fin du ive siècle. Cf. Martigny, Dict. des antiq. chrét., p. 515.

IX. Chez les Juifs.

Quand les disciples du Sauveur se multiplièrent et que l’Évangile se propagea dans le monde, les Juifs s’efforcèrent de jeter le discrédit sur la personne de Notre-Seigneur et sur son œuvre. Saint Justin, Dial. cura Tryph., 17, 108, t. vi, col. 512, 719, atteste qu’ils envoyèrent dans ce but des émissaires dans toutes les synagogues de la dispersion. Afin de déshonorer le Sauveur dans sa naissance, ils lui attribuaient pour père un misérable aventurier, Joseph Pandéra, qui aurait été le séducteur de Marie. Cette allégation se trouve déjà dans Celse. Cf. Origène, Cont. Çels., ii, 32, t. xi, col. 852. Us l’appelaient aussi « fij£ de satda », c’est-à-dire de l’adultère. Ces odieux outrages reviennent fréquemment dans la Gémara. Cf. Sanhédrin, fol. 67, 1 ; Schabbath, fol. 104, 2 ; 1er. Chaghigah, fol. 77, 4 ; Babyl. Chaghigah, fol. 4, 2 ; Midrasch Koheleth, x, 5, etc. Le nom de Pandéra est le même que celui de Panther, qui se trouve introduit dans la généalogie deNotre-Seigneur, on ne sait sur quel fondement, par saint Épiphane, Hxr. lxxviii, t. xui, col. 728, et par saint Jean Damascène, De fide ortho— dox., iv, 14, t. xciv, col. 1157. D’après le premier, Panther serait le grand-père de saint Joseph, et, d’après le second, le père de Barpanther, père lui-même de saint Joachim. Cf. In f est. S. Joachim, lect. vin. C’était probablement le nom d’un ancêtre du Sauveur, qui n’entrait pas dans la généalogie directe. Saint Épiphane et saint Jean Damascène lui donnèrent une place dans la généalogie, et les Juifs en abusèrent en le faisant servir de base à leurs calomnies. D’après le Talmud, le nom de Panther fut celui d’un ami et d’un officier d’Hérode Antipas, qui résidait à Magdala, et auquel Marie-Made809

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MARIE, MÈRE DE DIEU — MARIE-MADELEINE

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leine se serait attachée après avoir quitté son mari, Pappus ben Juda. Cf. Lightfoot, Hor. hebraic. in Matth., xxvii, 56. Il se peut que les talmudistes aient choisi ce nom décrié pour en tirer prétexte à leurs calomnies, en confondant à dessein la’mère de Jésus avec Marie-Madeleine. Tout ce que la haine des Juifs avait inventé contre Notre-Seigneur depuis l’origine, prit corps au xii « siècle dans un livre intitulé Tholdoth Yeschu, « histoire de Jésus. s Les calomnies sur la naissance de Jésus y sont longuement reproduites. Ses miracles sont reconnus, mais attribués à la vertu magique du nom de Jéhovah. Jésus les aurait opérés, prétend-on, pour prouver que sa mère l’avait enfanté sans cesser d’être vierge, conformément à la prophétie d’Isaïe, vii, 14. Ainsi, jusque dans le mensonge, la vérité se fait jour. On peut voir une analyse de ce pamphlet dans les Démonstrations évangéliques de Migne, Paris, 1843, t. xii, col. 444463. Cf. Pauvert, La vie [de N.-S. J.-C, Paris, 1867, p. 26-30. Il a été vigoureusement réfuté par un protestant, d’ailleurs acharné contre le catholicisme, J. C. Wagenseil, Tela ignea Satanx, hoc est arcani et horribilis Judseorum, adversus Christum Deum et christianam religionem, libri àvéxSotot, 2 in^i", Altorꝟ. 1681. Quant aux allégations du Talmud contre la Sainte Vierge, on ne les imprima pas toujours dans toutes les éditions, par crainte de l’indignation des chrétiens ; mais il était enjoint aux rabbins de les enseigner de vive voix. Cf. Drach, De l’harmonie entre l’Église et la Synagogue, Paris, 1844, t. i, p. 167, 168. Mahomet lui-même réprouva les procédés employés par les Juifs ; il dit dans le Coran, Sur., iv, 155 : « À l’infidélité ils ont joint la calomnie contre Marie. » En plusieurs autres endroits, Sur., iii, 37-42 ; xix, 16-21 ; Lxvi, 12, il affirme avec respect la virginité de Marie. Voir J.-J. Bourassé, Summa aurea de landibus B. Mariée Virginis, omnia complectens qux de gloriosa Virgine Deipara reperiuntur, 13 in-4°, Paris, Migne, 1866 ; A. Kurz, Mariologie oder Lehre der katholischen Kirche uber die allersel. Jung frau Maria, in-8°, Ratisbonne, 1881 ; Warner, Compendium histoHcum eorum qusc Mahumedani de Christo tradiderunt, Liège, 1643 ; Weil, Biblische Légende der Muselmànner, Francfort, 1845, p. 230. — Voir aussi von Lehner, Die Marienverehrung in den ersten Jahrhunderlen, 2e édit., Stuttgart, 1886 ; ’Benrath, Zur Geschichte der Marienverehrung, dans les Theologische Studien und Kriti~ ken, 1886 ; Marianus, Jésus und Maria in ihrer ausseren Gestalt und Schônheit, Cologne, 1870 ; *M re Jameson, Legends of the Madonna as represented in the fine arts, Londres, 1852 ; Rohault de Fleury, La Sainte Vierge, études archéologiques et iconographiques, 2 in-4°, Paris, 1878 ; Liell, Die Darstellungen der allerseligen Jungfrau und Gottesgebârin Maria, Fribourg-en-Brisgau, 1887 ; A. Jannucci, De Deiparentis Assumptione, Turin, 1884 ; A. Schàfer. Die Gottesmutter in der heiligen Schrift, in-8°, Munster, 1887 ; A. Venturi, La Madonna, Milan, 1900 ; Olav Sinding, Maria Tod und Himmelfahrt. Ein Beitrag zur Kenntniss der frûhmiltelalterlichen Denkmâler, Christiania, 1903 ; H. Detzel, Christliche Ikonographie, Band I, Die bildilichen Darstellungen Gottes, der allerseligsten Jungfrau, Fribourg-en-Brisgau, 1894 ; Wetzer et Welte, Kirchenlexicon, 2e édit., t. viii, 1883, articles Maria, Marienfésïè, Marienlegende, Marienwallfahrtsorte, col. 711, 802,

831, 846.
H. Lesêtre.

3. MARIE-MADELEINE (grec : Mapfa T| MaySaXT, ’^ ; Vulgate : Maria Magdalena), femme de Magdala, qui fut convertie par le Sauveur et s’attacha à lui. Les Évangélistes nomment trois femmes : la pécheresse, Marie de Béthanie sœur de Marthe et Marie-Madeleine, qui ont été identifiées par les uns et distinguées par les autres. Il y a donc lieu de voir d’abord ce qui est

raconté de chacune d’elles et ensuite d’étudier les raisons favorables et défavorables à l’identification.

I. La. pécheresse. — 1° Notre-Seigneur était en Galilée, dans une ville, probablement à Capharnaûm, quand un pharisien, nommé Simon, l’invita à un repas. Une femme connue dans la ville sous le nom de « pécheresse » le sut, vint dans la salle du festin avec un vase d’albâtre rempli de parfum, et, se tenant en arrière du Sauveur, près de ses pieds (ce que rendait possible la disposition des lits, voir Lit, col. 1289), elle se mit à arroser ses pieds de ses larmes, à les essuyer de ses cheveux, à les baiser et à les oindre de parfum. Ce spectacle scandalisa le pharisien ; il pensait en lui-même que, si Jésus était un prophète, il aurait su quel genre de femme il avait près de lui et l’aurait écartée. Le Sauveur fit alors ressortir ce que l’acte de cette femme avait de louable, par comparaison surtout avec l’accueil quelque peu froid que Simon lui avait ménagé à lui-même. Il ajouta : « Beaucoup de péchés lui sont remis parce qu’elle a beaucoup aimé. » Puis il dit à la pécheresse : « Tes péchés te sont remis. » Comme on s’étonnait, il la congédia en lui disant : s Ta foi t’a sauvée, va en paix. » Luc, vii, 36-50.

2° La pécheresse en question était une femme qui avait acquis un mauvais renom par ses désordres publics, soit dans la ville même de Capharnaûm, soit dans les environs. Il fallait aussi qu’elle fût d’un certain rang pour attirer ainsi l’attention sur elle ; il est probable qu’une femme du menu peuple eût passé à peu près inaperçue, malgré sa mauvaise conduite. Elle cherchait évidemment à se rencontrer avec Jésus, car, dès qu’elle le sut dans la maison de Simon, elle accourut, avec un parfum qui avait du prix et que n’aurait pu se procurer une personne sans aisance. Le récit de saint Luc ne dit pas si auparavant cette femme avait reçu quelque avertissement ou quelque bienfait du Sauveur. Mais, au témoignage même de celui-ci, elle a au cœur la foi et un grand amour ; son attitude est celle de l’humilité et du repentir ; son assurance atteste à la fois l’habitude qu’elle doit avoir des usages de la société aisée et l’impérieux besoin qu’elle éprouve de manifester à Jésus les sentiments qui l’animent. — 3° Notre-Seigneur attend l’intervention tacite de Simon pour sembler s’apercevoir de ce qui se passe. La petite parabole qu’il lui adresse sur les deux débiteurs auxquels le maître remet des dettes très inégales est une merveille de délicatesse et d’à-propos. Simon est autorisé à se reconnaître dans le débiteur qui doit moins et qui, en conséquence, montre moins d’amour ; mais dès lors il est obligé d’avouer que, vis-à-vis de la femme qu’il incrimine, avec raison d’ailleurs, l’indulgence de son hôte s’explique par l’équilibre constaté entre le péché passé et l’amour présent. — 4° Les mots : « Tes péchés te sont remis, » opèrent ce qu’ils expriment. Les auditeurs les entendent comme tels. On pourrait penser que la pécheresse a au cœur un tel amour et un tel repentir que déjà ses péchés lui ont été remis, et que le Sauveur ne fait que lui donner l’assurance du pardon. Mais les paroles qui précèdent : « Beaucoup de péchés lui sont remis, parce qu’elle a beaucoup aimé, » paraissent plutôt signifier que la rémission est actuelle et que, par conséquent, l’amour qu’a eu jusque-là la pécheresse, si grand qu’il ait été, n’a pas encore été assez parfait pour opérer la rémission sans l’intervention du Sauveur.

II. Marie dé Béthanie, sœur de Marthe. — 1° L’hospitalité donnée au Sauveur. — 1. Au cours de son voyage à travers la Galilée et la Pérée, le Sauveur arriva sî ; xto[i.Tiv Ttvâ, in quoddam castellum, « dans un certain bourg, » que l’évangéliste ne détermine pas autrement. Luc, x, 30. Beaucoup pensent que ce bourg n’est autre que Béthanie, que saint Jean, xi, 1, appelle x(i|i » i, castellum, « bourg de Marie et de Marthe. » L’identité des deux localités n’est cependant pas démontrée. Béthanie pouvait être la résidence habituelle de Marie, de Marthe et de Lazare, sans empêcher les deux sœurs d’avoir une maison dans un autre bourg, en Galilée. Si d’autre part on observe que saint Luc, ix, 44-xix, 40, raconte tout d’un trait le dernier voyage de Nôtre-Seigneur de la Galilée à Jérusalem, il est difficile de placer à Bëthanie, par conséquent au terme du voyage, un épisode qui, dans le récit de l’évangéliste, vient presque au commencement et a dû se passer en Galilée. Ou bien il ne faut tenir aucun compte de l’ordre que saint Luc, i, 3, déclare avoir mis dans son récit et admettre que l’écrivain sacré, qui ailleurs nomme deux fois Béthanie, ’xix, 29 ; xxiv, 50, a ici des raisons pour ne le désigner que par une vague appellation. Ces remarques ont, ce semble, plus de poids que celles qu’on met en avant pour identifier avec Béthanie le bourg dont il est ici question. — 2. Marthe reçut dans sa maison le Sauveur et son cortège, et pendant qu’elle se multipliait pour tout préparer, sa sœur, Marie, se tenait aux pieds du Sauveur et l’écoutait. Sur une observation de Marthe, le Sauveur dit de Marie : « Elle a choisi la bonne part, ttjv âfafi-rjv (j-epi’Sa, optimam partem, qui ne lui sera pas ôtée. » Luc., x, 38-42. Cette bonne part, la part par excellence, c’est celle qui consiste à écouter le Sauveur, à recevoir ses lumières, à méditer ses enseignements, à vivre de sa grâce. Voir Marthe.

2° La résurrection de Lazare. — 1. Lazare n’était pas avec ses deux sœurs dans le bourg de Galilée où s’arrêta Notre-Seigneur. Quand celles-ci furent revenues à Béthanie, leur frère tomba dangereusement malade. Saint Jean, xi, 2, dit ici que « Marie était celle qui oignit le Seigneur avec le parfum et lui essuya les pieds avec ses cheveux ». — 2. Les deux sœurs envoyèrent avertir Notre-Seigneur de la maladie de leur frère. Plusieurs jours après, le Sauveur arriva quand le malade était mort depuis quatre jours. Marthe alla au-devant de lui. Marie silencieuse et contemplative, telle qu’elle s’était montrée dans la précédente rencontre, était demeurée à la maison. Informée par sa sœur de la présence de Jésus, elle alla à lui aussitôt et, se jetant à ses genoux, elle lui répéta les mêmes paroles que Marthe : « Seigneur, si vous aviez été ici, mon frère ne serait pas mort. » Les larmes de Marie et celles de tous les Juifs qui se trouvaient là émurent le Sauveur, qui alors ressuscita Lazare. Joa., xi, 1-44.

3° Le festin de Béthanie.

1. Quelque temps après cette résurrection, six jours seulement avant la Pâque, Simon le lépreux, de Béthanie, offrit un festin à Notre-Seigneur. Lazare fut au nombre des convives. Marthe servait, c’est-à-dire présidait au service ; car elle se trouvait dans une maison amie et les femmes ne prenaient pas ordinairement part au festin, surtout avec des docteurs juifs. Pendant le repas, une femme que saint Matthieu, xxvl, 7, et saint Marc, xiv, 3, ne nomment pas, mais que saint Jean, xii, 3, appelle Marie, entra avec un vase de parfum précieux, le brisa, en répandit le contenu sur la tête et sur les pieds du Sauveur, et essuya ses pieds avec ses cheveux. C’était, de la part de Marie, le même silence discret, la même générosité et le même amour que dans la première onction. Mais cette fois la pécheresse pardonnée, comblée de nouveaux bienfaits et admise dans l’intimité du divin Maître, s’enhardissait jusqu’à répandre son parfum sur la tête même de celui qu’elle vénérait. Quelques assistants, Judas surtout, murmurèrent de ce qu’ils tenaient pour une profusion inutile. Notre-Seigneur leur dit : « Pourquoi êtes-vous désagréables à cette femme ? Ce qu’elle a fait pour moi est bien. En répandant ce parfum sur mon corps, elle a préludé à ma sépulture. Je vous le dis en vérité, partout où sera prêché cet évangile, dans le monde entier, xrn racontera à sa louange ee qu’elle a fait. » Matth., xxvj, 6-13 ; Marc, xiv, 3-9 ; , Joa., xii, 1-11. Saint Matthieu et saint Luc racontent ce 1 festin après avoir dit qu’on était à deux jours de la

; Pâque. Matth., xxvi, 2 ; Marc, xiv, 1. Mais l’indication  précise fournie par saint Jean, xii, 1, autorise à penser

que les deux premiers évangélistes ont assigné cette place à leur récit non pour qu’il soit commandé par la date qui précède et qui se rapporte au complot des princes des prêtres, mais pour le rattacher à ce qu’ils disent immédiatement après du marché conclu par Judas.

2. Après s’être demandé, à la suite de quelques autres, si le récit des quatre évangélistes ne se rapporterait pas au même fait, saint Ambroise, Evang. sec. Luc., vi, 12-30, t. xv, col. 1671-1676, commente le récit de saint Luc en y mêlant les traits particuliers aux autres évangélistes, comme s’il n’y avait eu qu’un seul repas et une seule onction. Depuis lors, un certain nombre d’auteurs ont affirmé l’identité des deux récits. A y regarder de près, on n’y voit de commun que le nom de l’hôte, Simon, le repas et l’onction. Toutes les circonstances diffèrent. On a d’un côté une pécheresse, de l’autre Marie, sœur de Marthe, désignée par son nom ; d’un côté, une onction sur les pieds, de l’autre une onction sur les pieds et sur la tête ; d’un côté un vase dont on répand le contenu, de l’autre un vase qu’on brise ; d’un côté, un murmure intérieur de Simon sur l’accueil fait par Jésus à l’acte d’une pécheresse, dé l’autre un murmure formulé à voix haute par Judas et des disciples sur la prodigalité de Marie ; d’un côté une parabole adressée à Simon et la rémission des péchés accordée à la pécheresse, de l’autre des observations aux disciples et des éloges à Marie. De plus, le premier Simon est un pharisien, le second un lépreux guéri. Le nom de Simon était si commun chez les Juifs que, sur douze Apôtres, deux le portaient. On ne doit donc guère s’étonner qu’il y ait eu un Simon invitant Notre-Seigneur en Galilée plus d’un ah avant sa mort, et un autre lui offrant un repas à Béthanie six jours avant sa mort. Enfin saint Jean, xi, 2, suppose deux onctions de Marie et il est excessif de dire avec Faillon, Monuments inédits sur l’apostolat de sainte Marie-Madeleine, Paris, 1865, t. i, p. 64, qu’on ne peut nier l’unité des deux onctions sans mériter une censure théologique.

III. Marie-Madeleine.

1° À la suite du Sauveur.

Marie-Madeleine apparaît pour la première fois parmi les saintes femmes qui accompagnaient le Sauveur dans ses courses apostoliques et le servaient à l’aide de leurs propres ressources. C’étaient donc des personnes do quelque aisance. La première nommée est « Marie, qui est appelée Madeleine », Magdalena, et qui devait très probablement son nom à la ville de Magdala, sur la côte occidentale du lac de Tibériade, voir Magdala, col. 539, soit qu’elle y fût née, soit qu’elle y habitât depuis longtemps et y fût bien connue. Saint Luc achève de la qualifier en disant « de qui sept démons étaient sortis ». Elle n’était pas seule dans ce cas ; car les quelques femmes qui accompagnaient ainsi le Sauveur « avaient été guéries d’esprits malins et de maladies ». Luc, viii, 2. C’est évidemment Notre-Seigneur qui les avait guéries, Marc, xvi, 9, et la reconnaissance inspirait leur dévouement. De ce que Marie-Madeleine avait été possédée de sept démons, il ne suit pas nécessairement qu’elle avait été pleine de vices, comme le croit saint Grégoire. Hom. in Evang., xxxiii, 1, t. lxxvi, col. 1239. La possession du démon pouvait à la rigueur s’expliquer par d’autres causes que le péché. Le Talmud réprésente Marie-Madeleine comme mariée d’abord à un Juif, Pappus ben Juda, qu’elle aurait abandonné pour suivre un officier d’Hérode Antipas, nommé Panther, et résidant à Magdala. i Ailleurs, il la traite de satda, « adultère, » et dit qu’elle était magdila, c’est-à-dire pliant des cheveux de femme. Cf. Lightfoot, Horse hebraicçe in Matth., xxvii, 56 ; in Luc., viii, 2 ; Buxtorf, Lexicon chald. talmud., p. 389, I 1459. On ne peut ajouter grande foi à ces renseigne’

ments. Cf. Sepp, La vie de N.-S. J.-C, trad. Ch. Sainte-Foi, Paris, 1861, t. i, p. 461-463.

2° Au Calvaire. — 1. Marie-Madeleine n’était pas au nombre de ces femmes qui se lamentaient en suivant Jésus conduit au Calvaire ; ces femmes en effet étaient de Jérusalem et Notre-Seigneur leur parla comme à des mères de famille. Luc, xxiii, 27-29. Mais elle se tenait au pied de la croix, quand le Sauveur parla à sa mère et à saint Jean. Joa., xix, 25. Comme toutes les autres, elle restait debout, stabant, et non dans cette attitude tourmentée et désespérée que les peintres lui ont prêtée si souvent. Il ne convenait pas que son dévouement pour le divin Maître crucifié se départit alors de cette réserve dont la fermeté courageuse de Marie lui donnait l’exemple.

— 2. Quand Jésus eut expiré, elle se mit respectueusement à dislance, avec les autres femmes, pour contempler le solennel et douloureux spectacle que présentait le Calvaire. Malth., xxvii, 55, 56 ; Marc, xv, 40, 41 ; Luc, xxm, 49. — 3. Elle assista pieusement à la sépulture hâtive du Sauveur, sans que rien n’indique qu’elle y ait pris part. Mais elle regarda attentivement où l’on plaçait le corps du divin Maître, Marc, xv, 47 ; Luc, xxm, 55, et quand la pierre eut été roulée à l’entrée du sépulcre, elle s’assit à côté. Matth., xxvii, 61. Avant le commencement du sabbat, c’est-à-dire avant l’apparition des étoiles, le vendredi soir, elle dut s’en retourner à la ville, pendant que les autres femmes préparaient déjà des aromates et des parfums, pour compléter l’ensevelissement du Sauveur. Luc, xxiii, 56.

3° Au sépulcre du ressuscité. — 1. Au soir du sabbat, après l’apparition des étoiles qui marquait le commencementd’une nouvelle journée, Marie-Madeleine et lesautres femmes achetèrent des aromates, pour aller ensuite achever l’ensevelissement, et avant la fin de la nuit, elles partirent pour le sépulcre où elles arrivèrent quand il faisait à peine jour. Matth., xxviii, 1 ; Marc, xvi, 1, 2 ; Luc, xxiv. 1 ; Joa., xx, 1. — 2. Quand elles furent auprès du sépulcre, elles virent que la pierre qui en fermait l’entrée avait été roulée de côté. Voir Jésus-Christ, t. iii, col. 1477. Elles entrèrent alors et furent consternées en constatant que le corps ne s’y trouvait plus. Luc, xxiv, 34. Aussitôt Marie-Madeleine tira la conclusion qui lui paraissait s’imposer, et, revenant à la hâte vers les apôtres Pierre et Jean, elle leur dit, comme parlant en son nom et en celui de ses compagnes : « Ils ont enlevé le Seigneur du sépulcre et nous ne savons pas où ils l’ont . placé. » Joa., xx, 2. Elle ne désigne que vaguement les auteurs de l’enlèvement, car elle ne sait si ce sont des amis ou des ennemis. Pierre et Jean partirent aussitôt et constatèrent que le sépulcre était vide. Joa., xx, 3-10. — 3, Marie-Madeleine, qui les avait suivis, resta après leur départ à pleurer debout près du monument. Bien qu’elle le sût vide, elle s’inclina à un moment, par un instinct bien naturel, afin de regarder encore par la porte surbaissée. Elle vit alors deux anges vêtus de blanc, assis sur la banquette funéraire, l’un à la tête et l’autre aux pieds. Ils lui dirent : « Femme, pourquoi pleures-tu ? » Elle répondit : « Ils ont enlevé mon Seigneur et je ne sais où ils l’ont mis. ; Puis, se retournant, elle vit Jésus, debout devant elle ; mais, au lieu de le reconnaître, même quand illui dit : « Femme, pourquoi pleures-tu ? Qui cherches-tu ? » elle le prit pour le jardinier, dont la présence s’expliquait mieux que toute autre à pareille heure, et elle lui « lit : s Seigneur, si tu l’as enlevé, dis-moi où tu l’as mis et je le prendrai. » Elle est si pleine de la pensée du Sauveur enseveli qu’elle ne le désigne même pas nommément. Jésus lui dit alors ces simples mots : « Marie ! » — « Maître ! » s’écria-t-elle aussitôt en se retournant tout à fait vers lui, et elle se jeta à ses pieds pour les embrasser et le retenir. Mais Jésus reprit : (i-r) âmou (iou. Joa., xx, 17. La Vulgate traduit : noli me tangere, « ne me touche pas. » D’autres traduisent autrement, parce qu’ils ne s’expliquent pas comment le Sauveur défendrait à

Marie-Madeleine de le toucher, alors qu’il le permet aux saintes femmes, Matth., xxviii, 9, et qu’il le commande à saint Thomas. Joa., xx, 27. Le verbe grec, tZircu, disent-ils, est comme un fréquentatif de la racine âç, « toucher, » il indique un contact prolongé, intensif, et signifie « ajuster, attacher, se saisir d’une chose », d’où le substantif ôiinià, * attache. » Cf. Bailly-Egger, Dict. grecfrançais, Paris, 1895, p. 255, 2202. D’après eux, le sens du » grec est donc : « Ne t’attache pas à moi, » ne me traite pas comme si tu ne devais plus être séparée de moi, comme si tu étais appelée à me suivre là où je vais. — Le Seigneur ajouta qu’il n’était pas monté vers son Père avec son humanité, que par conséquent il n’apparaissait pas encore pour prendre avec lui ceux qui étaient ses amis. Il commanda enfin à Marie-Madeleine d’aller dire à ses frères : « Je monte vers mon Père et votre Père, mon Dieu et votre Dieu. » Joa., xx, 11-17. Cette apparition est indiquée par saint Marc, xvi, 9, en ces termes : « Ressuscité le matin du premier jour de la semaine, il apparut d’abord à Marie-Madeleine, de laquelle il avait chassé sept démons. » — 4. Marie-Madeleine s’acquitta de son message et dît aux disciples : « J’ai vu le Seigneur et voici ce qu’il m’a dit. » Joa., xx, 18. Ceux-ci étaient dans la désolation et dans les larmes ; mais loin d’ajouter foi aux paroles de Marie-Madeleine et des autres saintes femmes, ils prirent leurs affirmations pour des inventions d’esprits en délire. Marc, xvi, 10, 11 ; Luc, xxiv, 10, 11. Les deux disciples d’Emmaùs font allusion à ces récits des femmes, mais sans y croire. Luc, xxiv, 22-24. Les Évangélistes ne parlent plus ensuite de Marie-Madeleine. — 5. Il est très vraisemblable qu’elle assista aux principales manifestations de Notre-Seigneur en Galilée et ensuite à son ascension. Elle devait être aussi au nombre des femmes qui se trouvaient dans le cénacle avec la Sainte Vierge et qui reçurent le Saint-Esprit à la Pentecôte. Act., i, 14 ; ii, 3. Mais son nom n’apparaît plus dans les Livres Saints.

IV. Identité des trois Marie. — 1° Diversité des opinions. — 1. Les Pères ne sont pas tous du même sentiment sur la question des trois Marie. Clément d’Alexandrie, Pœdag., ii, 8, t. viii, col. 430, n’en admet qu’une. Origène, In Matth., xxxv, t. xiii, col. 1721, fait de la pécheresse de saint Luc, des Marie de saint Matthieu et de saint Marc, et de la Marie-Madeleine de saint Jean, trois personnes différentes. Il est suivi par Théophylacte, Euthymius, Sévère ou Servius dans la Catena Lucm, vii, t. i, col. 775, etc. Les Constitutions apostoliques, m, 6, t. i, col. 769, et saint Jean Chrysostome, Hom., lxii, 1, t. viii, col. 342, distinguent nettement entre la pécheresse et la sœur de Lazare. Tertullien, De pudicit., xi, t. ii, col. 1001, les identifie. Saint Ambroise, In Luc, ri, 14, t. xv, col. 1672, regarde la non-identité comme possible, mais il ajoute que la pécheresse a fort bien pu devenir une femme plus parfaite. Saint Hilaire, In Ps. cxxil, 5, t. ix, col. 748, est pour la distinction. Saint Jérôme, Interpret. Origen. in Cant., Hom. i et ii, t. xxiii, col. 1123, 1130 ; In Matth., iv, 26, 7, t. xxvi, col. 191, sans doute sous l’influence d’Origène, admet que les deux onctions ont été faites par deux femmes différentes. Saint Augustin tantôt croit à l’identilé, De consens. Evang., l, 79, t. xxxiv, col. 1155, et tantôt hésite à l’affirmer. In Joa., xlix, 11, t. xxxv, col. 1748. L’auteur du Sermo xxxv, ad frat. in eremo, inséré dans ses œuvres, t. XL, col. 1298, bien que postérieur à ce Père, affirme catégoriquement que Marie la pécheresse est la sœur de Marthe et qu’à la résurrection elle est devenue « l’apôtre des apôtres ». Saint Grégoire le Grand, In Ezeck., i, 8, 2 ; Hom. in Evang-, ii, 33, 1, t. lxxvi, col. 854, 1239 ; Epist., xxv, t. lxxvii, col. 877 ; Expos, in I Reg., iv, 3, 13, t. lxxix, col. 243, est invariablement pour l’identité des trois Marie. Saint Bernard partage le même avis, Serm. ni Dont, vi post Peut., 4 ; Serm. m in Assumpt. B. M., 2 ; Serm. iv in Dedic. Eccles., 3, non cependant

sans quelque hésitation. Serin, xil in Cant., 6, t. clxxxiii, col. 342, 422, 527, 831. L’opinion de saint Grégoire fit néanmoins autorité dans l’Église ; au moyen âge, on admit en général l’identité des trois Marie. L’hymne de saint Odon de Cluny, en l’honneur de sainte Marie-Madeleine, ne fait qu’une même personne de la pécheresse, de la sœur de Lazare et de la Madeleine de la résurrection. L’hymne de Godescalc ne fait aucune allusion à la sœur de Lazare et de Marthe. Cf. U. Chevallie », Poésie liturgique traditionnelle, Tournai, 1894, p. 200-201. La même remarque s’applique à l’hymne Collaudemus, du XIVe ou XV siècle, cf. Daniel, Thésaurus hymnologicus, Halle, 1841, p. 311, à la prière de Fr. Pétrarque à sainte Marie-Madeleine, cf. F. Clément, Carminae poetis christ, excerpta, Paris, 1867, p. 551, et aux hymnes actuelles du Bréviaire romain. — 2. Les auteurs modernes ont été également divisés sur la question, J. Bollandus, Acta Sanctoruni, julii t. v, p. 187, admit l’identité des trois personnages. Lefèvre d’Étaples, De Maria Magdalena, Paris, 1516, 1518 ; De tribus et unica Magdalena, Paris, 1519, soutint avec éclat la thèse de la distinction des trois Marie. Il fut combattu par l’évêque de Rochester, John Fisher, De unica Magdalena libri très, Paris, 1519, et par le théologien français Noël Beda, Scholastica declaralio sententise et ritus Ecclesise de unica Magdalena, Paris, 1519. En 1521, la faculté de théologie de la Sorbonne prescrivit d’enseigner la thèse contraire à celle de Lefèvre d’Étaples. Cf. Duplessis d’Argentré, Collect. judicior. de novis error., Paris, 1728, t. iii, 1, p. VI. Néanmoins Bossuet, Sur les trois Magdeleine, édit. Migne, Paris, 1856, t. v, col. 1647, croit plus conforme à la lettre de l’Évangile de distinguer trois personnages. Plusieurs anciens bréviaires français fêtaient aussi trois Marie distinctes. Aujourd’hui l’office de l’Église, au 22 juillet, fait appel au triple souvenir évangélique de la pécheresse, de la sœur de Lazare et de la fervente amie de Jésus ressuscité. Sans constituer un argument proprement dit, cette identification liturgique indique au moins qu’il n’existe aucune raison démonstrative contre l’unité des trois Marie. Parmi les auteurs plus récents, Sepp, La vie de N.-S. J.-C, trad. C. Sainte-Foi, Paris, 1861, t. i, p. 464 ; Lecanu, Histoire de N.-S. J.-C, Paris, 1863, p. 225, et Pauvert, Vie de N.-S. J.-C, Paris, 1867, t. i, p. 261, font deux personnes de la pécheresse et de Marie-Madeleine ; l’identité des deux est admise par Faillon, Monuments inédits sur l’apostolat de sainte Marie-Madeleine en Provence, 2 in-4°, Paris, 1865, t. i, p. 1-283 ; Lacordaire, Sainte Marie-Madeleine, Paris, 1872, p. 93-100 ; Curci, Lezionisopra i quattro Evangeli, Florence, 1874, t. ii, p. 418 ; Fouard, La vie de N.-S. J.-C, Paris, 1880, t. i, p. 381 ; Bougaud, Le christianisme et les temps présents, Paris, 1877, t. ii, p. 261 ; Fillion, Évang. selon S. Luc, Paris, 1882, p. 166, 167 ; Didon, Jésus-Christ, Paris, 1891, t. i, p. 352 ; Ollivier, Les amitiés de Jésus, Paris, 1895, p. 214-245 ; Coleridge, La vie de notre vie, t. xvir, trad. Petit, Paris, 1896, p. 430-435 ; Chevallier, Récits évangéliques, Paris, 1891 r p. 218-220 ; Le Camus, Laviede N.-S. J.-C, Paris, 1901, t. ii, p. 324 ; Il santo Vangelo di N. S. G. C, Rome, 1902, p. 90, 188. Cf. Acta sanctorum, 22 juillet.

2° Exposé des arguments. — 1. Ceux qui admettent la distinction des trois Marie font valoir les raisons suivantes : Saint Luc, vii, 37, parle d’une femme qui était connue dans la ville comme pécheresse ; or, la sœur de Marthe paraît avoir été dans une situation qui ne permet guère de supposer qu’elle ait pu mériter une qualification si déshonorante. — Le même Évangéliste, après avoir ainsi nommé la pécheresse, mentionne immédiatement après, parmi les pieuses femmes qui suivaient Jésus, « Marie, qui est appelée Madeleine, et de qui sept démons étaient sortis. » Luc, viii, 2. Comme il n’établit aucune relation entre les deux personnages,

nommés si près l’un de l’autre avec des qualifications différentes, c’est donc qu’ils sont distincts. — Notre-Seigneur ne semble pas avoir connu la pécheresse avant le repas chez le pharisien, Luc, vii, 37-39, tandis que la sœur de Lazare appartenait à une famille amie dont le Sauveur fréquentait volontiers la demeure à Béthanie. Joa., xi, 32 ; xii, 3. — Marie-Madeleine était vraisemblablement originaire de Galilée, puisque son nom se tire de la ville de Magdala, tandis que la sœur de Marthe, selon toute probabilité, était de Béthanie, en Judée. — Il est vrai que saint Jean, xi, 2, dit que Marie, sœur de Lazare, est celle qui oignit le Seigneur et lui essuya les pieds avec ses cheveux ; mais ce verset est une parenthèse qui sert à mieux faire connaître Marie par une action qui n’était pas encore accomplie, mais qui appartenait à l’histoire du passé au moment où l’Évangéliste écrivait. Des noms différents désignent les trois femmes. Or, dit Bossuet à la fin de sa note sur les Trois Magdeleine, « il ne s’agit pas de prouver qu’il est impossible que les trois soient la même ; il faut prouver que l’Évangile force à n’en croire qu’une, ou du moins que ce soit son sens le plus naturel. » — 2. Ceux qui n’admettent que deux Marie acceptent l’identification de Marie-Madeleine et de Marie, sœur de Marthe, mais distinguent d’avec elle la pécheresse, comme semble le faire saint Luc, vii, 37 ; viii, 2. — 3. Les partisans de l’identité des trois Marie établissent ainsi leur thèse : Saint Jean, xi, 2, en présentant Marie, sœur de Marthe, comme celle qui avait précédemment oint le Sauveur, ne peut que se référer au récit de saint Luc, vii, 36-50, le seul qui ait parlé avant lui d’une onction faite au Sauveur par une femme. Or cette femme était la pécheresse. Marie, sœur de Marthe, que l’Évangile présente comme une contemplative, Luc, x, 38-42, une femme pleine de foi en Notre-Seigneur, Joa., xi, 32, 33, et animée à son égard de la plus affectueuse vénération, Matth., xxvi, 7 ; Marc, xiv, 3 ; Joa., xii, 2, n’était donc autre que l’ancienne pécheresse convertie. — Cette première identification entraîne naturellement celle de Marie, sœur de Marthe, avec Marie-Madeleine. Partout où elle apparaît dans l’Évangile, à la suite de Jésus, au Calvaire, à la résurrection, Marie-Madeleine est l’âme « qui aime beaucoup », Luc, vii, 47, qui s’attache à Notre-Seigneur comme à « la meilleure part », Luc, x, 42, qui montre le caractère généreui, décidé, profondément dévoué, propre à l’héroïne du festin dé Béthanie. Joa., Xii, 3. II fallait être averti pour ne faire de la pécheresse et de Marie, sœur de Marthe, qu’une même personne ; mais, de prime abord, il semble tout naturel d’identifier Marie-Madeleine d’une part avec la pécheresse, d’autre part avec la sœur de Marthe. Sans doute, sa possession par sept démons, Marc, xvi, 9 ; Luc, viii, 2, ne la désigne pas nécessairement comme pécheresse scandaleuse ; mais elle n’empêche pas non plus cette dernière qualification d’avoir été possible, elle la rend même probable.

— Le verset de saint Jean, xi, 2, ne peut se rapporter à l’onction qui se fera à Béthanie même, dans quelques jours. L’Évangéliste parle d’un fait passé, T| àXstyasoc, quse unxit, « qui oignit ; » il parle de la même manière quand il s’agit d’actions déjà accomplies par les personnes qu’il nomme, vii, 50 ; xviii, 14 ; xxi, 20, tandis que, de Juda qui doit trahir, il dit : eneXXev irapaSiSôvoct, erat traditurus, vi, 72. Or la seule femme qui antérieurement se soit signalée par l’acte que rappelle saint Jean, c’est la pécheresse dont saint Luc, vil, 36-50, a raconté le trait sans la nommer. Cf. S. Augustin, De consen. Evangel., ii, 79, 154, t. xxxiv, col. 1155. Les textes présentent toutefois de graves dificultés, qui rendent l’identification quelque peu difficile à expliquer. Ainsi, comme le font remarquer les partisans de la distinction, saint Luc, vii, 36-50, après avoir raconté l’épisode de la pécheresse, passe aussitôt au récit des courses apostoliques du Sauveur et dit qu’il était accompagné de femmes, entre 817 MARIE-MADELEINE — MARIE, MÈRE DE JACQUES ET DE JOSEPH 818

lesquelles « Marie, qu’on appelle Madeleine, de qui sept démons étaient sortis ». Luc, vin. 2. Il n’établit aucune relation entre cette dernière et la pécheresse dont il vient de parler ; il présente au contraire Marie-Madeleine comme un personnage tout nouveau. Cette façon de parler peat s’expliquer cependant d’une manière assez plausible. Saint Luc se sera abstenu à dessein de donner le nom de la pécheresse soit pour ne point déshonorer Marie-Madeleine, devenue ensuite si illustre, soit pour ne pas scandaliser quelques-uns de ses lecteurs en montrant ïapécheresse convertie si vite admise à la suite de Jésus. Ce scandale a du reste ému un certain nombre d’auteurs, qui se sont refusés à croire que le Sauveur pût admettre parmi les saintes femmes une personne si décriée précédemment. Mais, aux yeux des Juifs, cette admission ne fut pas plus étonnante que celle de Matthieu au nombre des apôtres. Il se peut aussi que saint Luc ait transcrit ses sources telles qu’il les trouvait. Tous conviennent qu’il l’a fait dans ses deux premiers chapitres ; pourquoi n’aurait-il pas reproduit l’histoire de la pécheresse sans la nommer, parce qu’on ne la nommait pas de son temps ? Saint Jean, la fit connaître plus tard, alors qu’il n’y avait plus d’inconvénient à dire son nom. Saint Marc, il, 14, et saint Luc, v, 27, ne pouvant se dispenser ni de raconter la vocation du publicain Matthieu, ni de désigner cet homme par un nom propre, ne l’appellent-ils pas du nom moins connu de Lévi ? L’évangéliste aura écrit avec la même réserve au sujet de Marie-Madeleine. Cf. Coleridge, La vie de notre vie, t. xvii, trad. Petit, Paris, 1896, p. 430-435. — On constate aussi que saint Jean parle tantôt de Marie, soeur de Marthe, xi, 1-45 ; xii, 3, tantôt de Marie-Madeleine, xix, 25 ; xx, 1-18, sans jamais indiquer qu’il s’agit du même personnage. Mais il faut remarquer que, dans les récits de la passion et de là résurrection, plusieurs Marie sont en scène et que dès lors il devient indispensab le de désigner la sœur de Marthe par son surnom de Madeleine. D’ailleurs, quand la clarté du récit n’exige pas ce surnom, saint Jean ne lui donne que le nom de Marie, et c’est avec ce seul nom, son nom habituel par conséquent, que Notre-Seigneur l’interpelle pour se faire reconnaître. Joa., xx, 11, 16. — Ces difficultés tirées des textes ne sont donc pas insurmontables, et, en tenant compte surtout de l’identité des ca ractères, on est en droit d’affirmer comme probable que les trois Marie n’en font qu’une. « L’opinion qui tient pour une seule et même personne Marie-Madeleine, Marie, soeur de Lazare, et la pécheresse, est la plus probable ; elle n’est pas en opposition avec le texte évangélique, a un appui solide dans la tradition ancienne et ne se heurte à aucune difficulté assez sérieuse pour atténuer la valeur de cette tradition. » Corluy, Comment, in Evang. S, Joa., Gand, 1880, p. 263-279. Cf. Wouters, Inhistor. elconcord. Evang., xv, 1, dans le Sacrée Scripturx Curs. compl., tle Migne, Paris, 1840, t. xxiii, col. 917-925 ; Knabenbauer, Evang. sec. Matth., Paris, 1893, t. ii, p. 399-401.

V. Marie-Madeleine après la Pentecôte. — On ne sait rien de certain sur la vie de Marie-Madeleine après la Pentecôte ni sur le lieu de sa mort. Au vt » siècle, on vénérait son tombeau à Éphése. Cf. Grégoire de Tours, De gloria martyr., 29, t. lxxi, col. 731. L’higoumène Daniel prétend avoir vu encore à Ephèse, en 1106, le tombeau et la tête de Marie-Madeleine. Cf. Tomasének, Comptes rendus de VAcad. de Vienne, t. cxxiv, /p. 33. Les historiens byzantins racontent que l’empereur Léon VI, en 899, fit transporter à Constantinople le corps de la sainte. Cf. Léo Grammaticus, t. cviii, col. 1 108, etc. Les martyrologes et les écrivains d’Occident, à cette époque, ne disent de Marie-Madeleine que ce qui est consigné dans l’Évangile. Un manuscrit provençal du martyrologe d’Adon, datant des premières années du Xn « siècle, et à l’usage des églises de la région d’Arles et d’Avignon, se contente de mentionner, au 19 janvier, « Marie et Marthe sœurs de Lazare, dont la messe est

contenue dans le livre de Gélase, » et, au 22 juillet, Marie-Madeleine, sans autre addition, comme dans tous les martyrologes. Cf. G. Morin, Un martyrologe d’Arles, dans la Revue d’hist. et de littérat. religieuses, Paris, 1898, p. 23, 24. Au xie siècle, les moines de Vézelay prétendaient posséder le corps de la sainte ; vers la fin du Xil « , on admit que sainte Madeleine était venue finir sa vie aux environs de Marseille, et en 1283, on crut découvrir ses reliques à Saint-Maximin, en Provence. La légende de sainte Marie-Madeleine, accrue des éléments apocryphes qui s’y sont ajoutés avec le temps, selitdans J. de Voragine, La légende dorée, trad. Roze, Paris, 1902, t. ii, p. 242-260. Sur le séjour de la sainte en Provence, voir, en faveur de l’authenticité, C. F. Bellet, Les origines des Églises de France, Paris, 1898, p. 246-255 ; J. Bérenger, Les traditions provençales, Marseille, 1904, p. 28-1 50, et contre l’authenticité, L. Duchesne, Fastes épiscopaux de l’ancienne Gaule, Paris, 1894, 1. 1, p. 340-344. Voir Lazare, col. 139.

H. Lesêtre.

4. marie, sœur, de Marthe et de Lazare. Voir Marie-Madeleine (de Béthanie), ii, col. 810.,

5. MARIE (grec : Mopi’a), épouse de Cléophas, Joa., xix, 25, mère de Jacques et de Joseph, Matth., xxvii, 56 ; Marc, xv, 40, 47 ; Luc, xxiv, 10, appelée aussi 1’  « autre Marie », Matth., xxvii, 61 ; xxviii, 1, pour la distinguer de Marie, mère de Jésus, et de Marie-Madeleine. Cléophas est probablement le même qu’Alphée. Voir Alphée, t. 1, col. 418-419. Les femmes sont ordinairement nommées d’après le nom de leur mari, et non d’après celui de leur père. Cf. Luc, viii, 3 ; Matth., i, 6, etc. Marie de Cléophas est donc épouse et non pas fille de Cléophas. Jacques, Joseph, Simon et Jude sont nommés frères de Jésus, Matth., xiii, 55, c’est-à-dire ses cousins. Voir Frère, t. ii, col. 2403. Les textes précédents n’indiquent comme fils de Marie que Jacques et Joseph. Les deux autres seraient-ils des fils qu’Alphée aurait eus d’une autre épouse, morte à l’époque de la vie publique de Notre-Seigneur ? Pourquoi alors, dans l’énumération de saint Matthieu, xiii, 55, occupent-ils le second rang et non le premier, en leur qualité d’aînés ? Ou bien faut-il supposer qu’avant leur mariage commun, Marie aurait eu Jacques et Joseph d’un premier époux, et Alphée, Simon et Jude d’une première épouse, et qu’ensuite on aurait rangé les quatre fils par ordre de naissance ? Mais Jacques est aussi fils d’Alphée. Matth., x, 3 ; Marc, m, 18 ; Luc, vi, 15 ; Act., i, 13. Il doit en être de même de Jude, et les quatre frères sont ensemble fils d’Alphée et de Marie. Lors donc que saint Matthieu, xxvii, 56, et saint Marc, xv, 14, appellent Marie mère de Jacques et de Joseph, ils n’excluent pas plus les autres fils que quand saint Marc, xv, 47, l’appelle simplement mère de Jacques, et saint Luc, xxiv, 10, mère de Joseph. — Le titre de « frères du Seigneur » donné aux quatre fils de Marie, épouse de Cléophas, suppose un degré assez rapproché de parenté entre cette Marie et les parents du Sauveur. Les textes ne permettent pas de déterminer le degré de cette parenté. Quelques-uns ont pensé que Marie Cléophas était une sœur aînée de la Sainte Vierge. Le même nom donné à deux sœurs dans une même famille ne constituerait pas une difficulté absolue contre cette hypothèse, surtout si l’une des deux le portait sous sa forme usuelle. Maria, et l’autre sous sa forme archaïque, Miryâm, Une note originale de la Peschito dit que Cléophas et Joseph étaient frères, que Marie et Marie, mère du Seigneur, étaient sœurs, et qu’ainsi les deux frères avaient épousé les deux sœurs. Cf. Tischendorf, Nov. Teslam. grœc., 8e édit., t. i, p. 945. Mais la parenté des « frères du Seigneur » peut provenir d’une origine toute différente. Hégésippe, dans Eusèbe, H. E., 111, xi, 4, t. xx, col. 248, affirme que Siméon, frère de Jacques et second évêque de Jérusalem, était cousin, àveJnoç, du Seigneur, parce que son père, Cléophas, était 819

    1. MARIE##

MARIE, MÈRE DE JACQUES ET DE JOSErH — MARINI

820

frère de saint Joseph. Saint Épiphane, User. txxYili, 7, t. XLH, col. 708, donne le même renseignement. Marie Cléophas n’aurait donc été que la belle-sœur de Joseph, et par conséquent de Marie, mère de Jésus, bien que quelque autre parenté par consanguinité ait pu également exister entre elles deux. — Marie Cléophas n’est pas nommée parmi les saintes femmes qui accompagnaient le Sauveur dans ses courses apostoliques. Luc, vin, 1-3. Peut-être son mari vivait-il encore et ne pouvait-elle le quitter. Devenue plus libre, elle apparaît au Calvaire auprès de Marie, mère de Jésus. Joa., xix, 25. Elle reste là après la mort du Sauveur, Matth., xxvii, 56 ; Marc, xv, 40 ; elle assiste à la sépulture, Matth., xxvii, 61 ; Marc, XV, 47 ; elle se rend au sépulcre le lendemain du sabbat, Matth., xxviii, 1 ; Marc, xvi, 1, et, au retour, partage avec les autres saintes femmes la faveur de voir le Seigneur ressuscité. Matth., xxviii, 9 ; Luc, xxiv, 10. C’était donc une croyante et une sainte femme, qui sut se montrer digne de la parenté à laquelle elle avait l’honneur d’appartenir. Il n’est plus parlé d’elle en dehors des récits de la passion et de la résurrection.

H. Lesêtre.

6- MARIE, MÈRE DE JEAN MARC. — Quand saint Pierre fut délivré de sa prison par l’ange, il s’en alla à la maison de Marie, mère de Jean, surnommé Marc, dont une servante, nommée Rhodé, finit par lui ouvrir la porte. Act., XH, 12. Jean Marc était le cousin de Barnabe, Col., iv, 10, dont par conséquent Marie devait être la sœur ou la belle-sœur. De ce que Barnabe était originaire de Chypre, Act., iv, 36, il ne suit pas nécessairement que Marie l’ai été aussi. Elle était probablement veuve à l’époque où elle apparaît dans les Actes, puisque la maison qu’elle habite n’est désignée que par son nom à elle. Elle devait être avec les Apôtres dans les termes d’une assez grande intimité, pour que saint Pierre vînt ainsi directement chez elle au sortir de sa prison. Néanmoins la maison de Marie ne paraît pas avoir été à ce moment le rendez-VO _us habituel des disciples, puisque Jacques et les frères ne sont pas là. Act., xii, 17. Saint Pierre et saint Paul eurent grande amitié pour le fils de cette Marie. Voir Jean Marc, t. iii, col. 1166. — Un certain nombre d’auteurs ont pensé que la villa et le jardin de Gethsémani appartenaient à la mère de Jean Marc ; ils en concluent que le jeune homme qui fut pris au sortir du jardin et s’enluit en abandonnant le vêtement qui le couvrait n’était autre que Jean Marc. Marc, xiv, 51, 52. La supposition est plausible, mais non démontrée. Cf. Knabenbauer, Evang. sec. Marc, Paris, 1894, p. 393. D’autres, poussant plus loin les conjectures, croient que la maison dans laquelle se célébra la dernière Cène était la maison même de Marie, mère de Jean Marc. Voir Cénacle, t. ii, col. 400. Cette maison serait ensuite devenue le premier lieu de réunion des chrétiens de Jérusalem. Au VIe siècle, le moine Alexandre, t. xciii, col. 4092, suppose en conséquence que le jeune homme qui portait la cruche d’eau, Luc, xxii, 10, était Jean Marc Vers 530, Théodosius dit de l’église de Sion, mère de toutes les églises, que ce fut la maison de saint Marc éyangéliste. Cf. Tobler, Itiner. Terrée Sanctee, Genève, 1877, p. 65. Cette maison était connue. Un texte arabe la mentionne au nombre des endroits mémorables de Jérusalem, au moment de la prise de la ville par les Perses en 614. Cf. Bévue biblique, Paris, 1897, p. 461. Les identifications tentées au sujet de cette maison de Marie sont plus ou moins sujettes à caution. On pourrait y placer, à la rigueur, le lieu de la dernière Cène, que saint Marc, xiv, 15, appelle âv(6160v, et saint Luc, XXII, 12, àvâyatov, deux mots qui signifient « étage supérieur ». Mais si rien ne s’y oppose, rien non plus n’y oblige. Cet étage supérieur est-il le même local que le OTtepûov, « chambre haute, » Act., i, 13, dans laquelle se réunissent les disciples après l’Ascension ? Ces mots ont le même sens et saint Jérôme les traduit tous par cœnaculum, comme pour faire une

même salle du lieu de la dernière Cène et du lieu de réunion des disciples. Mais pourquoi saint Luc emploiet-il deux mots distincts pour désigner un même local ? Ne semble-t-il pas indiquer par là que l’àvct-yaiov de la Cène diffère du ÛTtepSov de la Pentecôte ? On ne peut affirmer que l’un ou l’autre ait fait partie de la maison de Marie, mère de Jean Marc, et l’on peut nier avec Une plus grande probabilité que les deux à la fois n’ont pas appartenu à la même maison. Quant à faire de la maison de Marie le lieu habituel des réunions liturgiques, le texte des Actes, xii, 4, 5, 12, 17, n’y autorise pas, puisque dans les jours mêmes de la Pàque, alors que toute l’Église prie sans relâche pour saint Pierre prisonnier, Jacques et les frères, c’est-à-dire les Apôtres, sont réunis ailleurs, bien que beaucoup se trouvent cette nuit-là dans la maison de Marie. Si Pierre, au sortir de la prison, se demande où il ira, < ?uv18° v, considérant, Act., XII, 12, et choisit la maison en question, ce n’est pas qu’elle soit nécessairement un lieu de réunions liturgiques, c’est tout simplement parce qu’elle était voisine de la prison. À partir du vu » siècle, la tradition confondit peu à peu dans le même emplacement la maison de Marie, mère de Jean Marc, le Cénacle, le lieu de la. descente du Saint-Esprit, celui de la dormition de la Sainte Vierge et celui de la première église établie par les Apôtres à Jérusalem. Voir col. 802-803 ; Lagrange, La dormition de la Sainte Vierge et la maison de Jean Marc, dans la Revue biblique, 1899, p. 589-600.

H. Lesêtre.

7. MARIE, chrétienne de Rome, à laquelle saint Paul envoie un salut, et qui paraît avoir tenu un rang distingué parmi les chrétiens de la capitale, car l’Apôtre, sur près de trente personnes qu’il fait saluer nommément, place Marie au quatrième rang et signale toute la peine qu’elle s’est donnée pour le bien de ses frères. Rom., xvi, 6.

H. Lesêtre.
    1. MARIMUTH##

MARIMUTH (hébreu : Merêmôf), nom, dans le texte hébreu, de trois Israélites, dont le premier est appelé dans la Vulgate tantôt Mérémoth, tantôt Mérimuth, tantôt Marimuth ; le nom du second est écrit Marimuth et celui du troisième Mérimuth.

1. MARIMUTH (Septante : Mepi|iûe, I Esd., viii, 33 ; ’Pajjwie, II Esd., iii, 3 ; Mepa[it16, II Esd., iii, 21), prêtre, fils d’Urie, descendant d’Accus, le chef de la septième classe sacerdotale instituée par David. II Esd., iii, 21. Il revint de la captivité à Jérusalem avec Esdras et, le quatrième jour, il pesa l’argent, For et les vases de la maison de Dieu. I Esd., viii, 33. Plus tard, lors de la reconstruction des murs de Jérusalem sous Néhémie, Marimuth travailla à leur réédification avec les autres descendants d’Accus, entre les fils d’Asnaa qui rebâtirent la porte des Poissons et Mosollam, fils de Barachias. II Esd., iii, 3-4. Il refit aussi la portion du mur comprise entre la porte de la maison du grand-prêtre Éliasib et l’extrémité de la même maison. II Esd., iii, 21. La Vulgate écrit son nom Mérémoth, I Esd., viii, 33 ; Marimuth, II Esd., iii, 3, et Mérimuth, II Esd., iii, 21.

2. MARIMUTH (Septante : Mapt|iû>0), fils de Bani, qui avait épousé une femme étrangère et qui la renvoya sur l’ordre d’Esdras. I Esd., x, 36.

    1. MARINI Marco##

MARINI Marco, hébraïsant italien, né à Brescia vers 1541, mort dans cette Ville en 1594. Il entra chei les chanoines du Saint-Sauveur et, s’étant fait connaître par ses écrits, fut appelé à Rome par Grégoire XIII qui lui offrit, mais en vain, plusieurs évêchés. Parmi ses ouvrages on remarque : Annotationes literales in Psalmos nova versione illustratos, 2 in-4°, 1748-1750, publié par Mingarelli avec une Vie de l’auteur. Marini avait fait paraître : Arca Noe t seu thésaurus lingute sanctse novus, 2 in-f>, 1593 ; Grammatica Xinguse sacrée, in-4° r

Baie, 1580.
B. Heurtebize.
    1. MARIUS Léonard##

MARIUS Léonard, théologien catholique, né à Goes, en Zélande. Docteur en théologie, il enseigna cette science, en 1618, à Cologne, où il dirigea en même temps le collège Batave, qui était alors en cette ville. Il mourut à Amsterdam en 1652. Outre des ouvrages composés pour la défense de la hiérarchie catholique, contre Marc-Antoine de Dominis, nous avons de lui : Commentarixis in Pentateuchum Mosis, in-f°, Cologne, 1621.

A. Régnier.

    1. MARLORAT Augustin##

MARLORAT Augustin, dit Pasquier, théologien protestant, né en Lorraine en 1506. D’abord moine augustin, il se laissa gagner, à Genève, par les idées des réformateurs. Nommé alors pasteur d’un petit village de Suisse, il y resta quelque temps, et vint ensuite à Rouen. Là il fut impliqué dans le procès de Jean Bosc, qui fut convaincu d’avoir été l’un des principaux instigateurs de la révolte des protestants en cette ville : condamné à mort en même temps que lui, il fut pendu le 30 octobre 1562. Marlorat a laissé un certain nombre de commentaires des livres bibliques : Expositio ecclesiastica Geneseos, in-f », Morges, 1584 ; Expositio in Jobum, Genève, 1585 ; Catena in Apocalypsin ; In CL Psalmos Davidis et aliorum SS. prophetarum explicatio ecclesiastica, seu bibliotheca expositionum in psalmos, ex probatis theologis collecta et in unum corpus non minus ingeniose quant laboriose concinnata ; quse instructissimse et paucis multa comprehendentis bibliothecee loco esse potest. Item Cantica sacra ex diversis Bibliorwm locis cum simili expositione, in-f>, Genève, 1585 ; Commentarius in Jesaiam, in-f°, Paris, 1564 ; Thésaurus Scripturse Sanctse, in-f°, Lausanne, 1575 ; Novi Testamenti catholica expositio ecclesiastica, i. e. ex universis probatis theologis excerpta a quodam V. D. ministro, diu multumque in theologia versato. Sive bibliotheca expositionum Novi Testamenti, in-f°, 1561, 1564, 1570 et 1585. A. Régnier.

    1. MARMA##

MARMA (hébreu : Mirmâh ; Septante : Mapnà), flls de Saharaïm et de Hodès, de la tribu de Benjamin, qui devint chef d’une famille importante. Il était né dans le pays de Moab. I Par., viii, 10.

    1. MARMITE##

MARMITE, vase de terre ou de métal dans lequel on fait cuire les aliments. Son nom ordinaire en hébreu est-w, str (Vulgate : olla), du verbe sir, « bouillir. » II (IV) Reg., iv, 38. Pour les autres noms, pour la description et l’emploi du mot dans l’Écriture, voir Chaudière, t. ii, col. 628.

    1. MAROTH##

MAROTH (hébreu : Mârôf, « amertumes » ), ville nommée par Michée, i, 12, dans un passage, ꝟ. 10-15, rempli de jeux de mots sur le nom des localités qu’il énumère. « Celle qui habite Maroth, dit-il, est dans l’angoisse pour son salut. » Les Septante ont traduit : y.aTO(xo-jffï| ôSivac, et la Vulgate : quse habitat in amaritudinibus. Le site de Maroth est inconnu. Cornélius a Lapide, Comment., Paris, t. xiv, 1860, p. 74, et autres, J. Knabenbauer, In prophetas minores, t. i, 1886, p. 407, supposent que Maroth peut être identique à Mareth, Jos., xv, 59, mais l’orthographe des deux noms est si différente en hébreu, nVm, Màrôt, et t-to, Ma’ârdf,

qu’on ne saurait les confondre. Tout ce que l’on peut dire, c’est que Maroth se trouvait dans le pays de Juda et dans le voisinage des Philistins, et peut-être prés de Lachis, qui est nommée à sa suite dans la prophétie de Michée.

MAROTTE Siméon. Voir Muis (de).

    1. MAROUTHA##

MAROUTHA, évêque jacobite de Tagrit et métropolitain d’Orient de 629 à 649, né à Sourzaq, village du Beith Nouhadré, dans l’empire perse, mort à Tagrit le 2 mai 649. D’après sa biographie résumée par Bar Hébrseus, Maroutha fut d’abord moine et prêtre au monastère de Nardas, il alla plus tard à Callinice au monastère de Mar Zaki où il passa vingt ans et étudia les saints. Livres. Il demeura enfin dans la montagne d’Édesse, puis au monastère de Mar Mataï où il établit des règles et des lois, et enfin à la cour du roi de Perse, à Séleucie-Ctésiphon. Les guerres entre Héraclius et Chosroès l’obligèrent à se retirer à’Aquoula ou Koufah, d’où le patriarche jacobite Athanase le nomma évêque de.Tagrit et maphrien (métropolitain) de douze diocèses d’Orient. Il construisit dans le désert de Mésopotamie le monastère de Mar Sergis pour les hommes, près d’une source nommée’Aingaga, et plus tard le couvent de Beith Ébré pour les femmes. Lorsque les Arabes subjuguèrent la Perse, il leur fit ouvrir la citadelle de Tagrit et ainsi, grâce à sa prudence, personne ne fut molesté. Il fut enseveli dans la citadelle. — Il écrivit quelques livres liturgiques, des hymnes, des prières rythmées pour le sacrifice de la messe et un commentaire sur les Évangiles qui est cité dans la catena du moine Sévère. Deux scolies de Maroutha sur Exode, xvi, 1, et Matth., xxvi, 6-14, sont imprimées dans les Monumenta syriaca de Mœsinger, Inspruck, 1878, t. ii, p. 32. — Voir Bar-Hébræus, Chroniconeccles., édit. Abbeloos etLainy, Louvain, 18721877, t. ii, col. 111, 119, 123, ; Rubens Duval, La littérature syriaque, Paris, 1899, p. 77, 374-375.

F. Nau.

    1. MARRACCI ou MARACCI Luigi##

MARRACCI ou MARACCI Luigi, orientaliste italien, né à Lucques en 1612, mort à Rome, le 5 févrierl700. Il appartenait à la congrégation des clercs réguliers de la Mère de Dieu, et y fut maître des novices, supérieur, procureur général et assistant. Fort versé dans la connaissance des langues orientales, il fut chargé d’enseigner l’arabe à la Sapience et à la Propagande. Il refusa tous les honneurs que voulut lui accorder Innocent XI. Il eut la part principale dans la publication de : Biblia-Sacra arabica Sacrx Congregationis de Propaganda fide jussu édita ad usum ecclesiarum orientalium r additise regione Bibliis vulgaribus latinis, 3 in-f°, Rome, 1671. On lui doit plusieurs autres publications, dont le Prodromus ad refutationem Alcorani, in-8°, Rome, 1691 ; in-f°, Padoue, 1698, et Y Alcorani textus universus, inf », Padoue, 1698, contenant le texte et lu traduction du Koran avec réfutation, sont particulièrement célèbres, à cause de la profonde connaissance que l’auteur avait de l’arabe, quoiqu’on puisse lui reprocher quelques fautes de critique. B. Heurtehize.

    1. MARSANA##

MARSANA (hébreu : Marsena’; Septante : Ma>ijtàpP ]), le sixième des sept grands de Perse à la cour d’Assuérus (Xerxès I er). Esth., i, 14. Divers noms perses, conservés par les écrivains de l’antiquité, se rapprochent de Marsana : Mardonius (Marduniya), qui commandait les Perses àMarathon ; Mardontès, Manisaros.VoirW. Pape, , Handwôrterbuch der Eigennamen, t. ii, p. 860, 854.

    1. MARTE ou MARTRE##

MARTE ou MARTRE, petit carnassier de la famille

p<i » j

222. — Marte.

des nrastilidés (fig. 222) analogue à la belette et au putois. Voir Belette, 1. 1, col. 1560. Comme cet animal, mustela.


martes, se rencontre assez communément en Palestine, il est probable qu’il a été rangé aussi sous le nom de hôUd et proscrit par le Lévitique, xi, 29.

MARTEAU, instrument de percussion, composé d’une bat le métal, Eccli., xxxviii. 30, voir 1. i, fig. 596, col. 1900 ; t. ii, fig. 678, 679, col. 2313 ; le marteau de l’ouvrier qui enfonce les clous ou les chevilles. Jer., x, 4. Voir t. ii,

[Image à insérer] 223. — Marteau assyrien en bronze. British Muséum. D’après une photographie.

masse plus ou moins pesante fixée à l’extrémité d’un manche (fig. 223, 224). On s’est servi et l’on se sert encore

[Image à insérer] 224. — Martiolus (petit marteau). D’après Baumeister, Denkmaler, p. 318.

de toutes sortes d’objets durs pour foire l’office de marteaux : de morceaux de bois résistant aux chocs, restés en usage sous forme de maillets ; de pierres taillées plus ou moins grossièrement et constituant soit des percuteurs, à l’aide desquels on façonnait les haches de pierre, cf. N. Joly, L’homme avant les métaux, Paris, 1888, p. 217-225, soit des marteaux plus perfectionnés (fig. 223) ; enfin de métaux, cuivre, bronze ou fer. Il y a plusieurs noms donnés au marteau en hébreu : 1° Maqqebéf et halmût, <rcp15pa, maliens, marteau ou maillet avec lequel Jàhel enfonça le clou dans la tête de Sisara. Jud., iv, 21 ; v, 26. Ces deux mots ne sont employés chacun qu’une seule fois, le premier dans un texte historique, le second dans un texte poétique. — 2° Maqqâbâh, o-çvpa, maliens (fig. 225), le marteau Ou le maillet du tailleur de pierres, III Reg., iv, 7, voir t. ii, fig. 344, 646, col. 967, 2206 ; le marteau du forgeron, qui aiguise la hache en la martelant, Is., xliv, 12, comme font nos moissonneurs pour leur faux, ou qui

[Image à insérer] 225. — Malleus (maillet). D’après Daremberg, Dict. des antiquités, t. iii, p. 825.

[Image à insérer] 226. — Marteau du sacrificateur et vase pour recevoir le sang ou la libation. D’après Clarac, Musée de sculpture, p. 220.

fig. 210, col. 600. De ce nom a pu venir celui des Machabées. Voir Judas Machabée, t. iii, col. 1790. Le malleus désignait aussi le gros maillet de bois dont les bouchers se servaient pour abattre les bœufs. Il était employé dans les sacrifices païens (fig. 226, 227). Le prêtre appelé popa assommait la victime, avant que le cultrarius l’égorgeàt. Cf. Ovide, Met., ii, 625 ; Suétone, Cal., 32. Les Juifs, au contraire, égorgeaient les victimes sans les abattre au préalable.

3° PaltîS, açipee, malleus, marteau servant à briser les rocs, Jer., xxiii, 29, à marteler et à polir les métaux, Is., xli, 7. — ¥KêlafÔt, Xa$suW)piov, ascia, Ps. lxxiv (lxxiii), 6, les kalapâti ou marteaux assyriens avec lesquels les Chaldéens ont brisé les sculp 227. — Marteau du sacrificateur. D’après Gerhard, Auserlesene vosenbilder, pi. 229. tures du Temple.

5° Le marteau de guerre a deux noms : mêfîs, pÔTteiXov, « massue, » jaculum, Prov., xxv, 18, et mappês, htamopizi&K, collidis. Jer., li, 20. Babylone a été aux mains de Dieu un mappês, pour briser les nations, et un pattîS, pour frapper toute la terre. Jer., xii, 7 ; L, 23.

6° Outre ces substantifs, l’hébreu emploie le verbe IdtaS, qui veut dire forger au marteau, comme

Tubalcaïn, iripupoxdiroi ; , malleator, Gen., iv, 22 ; et aiguiser des armes ou des outils en les martelant, xaXxeûevt, exacuere, I Reg., xiii, 20, imXëdetv, vibrare. Ps. vil, 14. Aiguiser les yeux contre quelqu’un, Job, xvi, 10, [JéX » )7tetpaT&v aÙToO ÉTc’lfioi, terribilibus oculis me intuitus est, c’est le percer du regard, lui témoigner de l’hostilité. Avec la civilisation grécoromaine s’introduisirent en Palestine différentes espèces de marteaux les maillets de bois, <r<pûpa, malleus, des batteurs d’or, Pline, H. N., xm, 26 ; xvi, 84, des maçons et des menuisiers, Plaute, Merc, ii, 3, 57, le maillet de fer ou de bois cerclé en fer des forgerons, Pline, H.. N., xxxiv, 20, 40 ; le <rçOptov, malleolus, diminutif du précédent, Celse, viii, 3 ; le marcus, gros marteau en fer des forgerons ; le marculus ou martulus, réduction du précédent, Martial, iii, 57, 6 ; Pline, H. N., vii, 56, 57 ; le martio lus,-marteau pour les petits ouvrages. Pétrone, Satyric, 51, etc. Cf. Rich, Dictionn. des antiq. romaines et grecques, trad. Chéruel, Paris, 1873, p. 387, 394. Tous ces outils devaient d’ailleurs exister équivalemment chez les Hébreux.

H. Lesêtre.
    1. MARTHE##

MARTHE (grec : MâpBa), sœur de Marie de Béthanie et de Lazare. — 1° Ce nom ne se lit nulle part dans l’Ancien Testament. Il vient probablement de l’araméen tnârâ’, « maître, » et signifie « maîtresse ». "Voir Électra, t. ii, col. 1652. Plutarque, Marins, 17, cite ce nom comme celui d’une prophétesse syrienne qui accompagnait le général Marius. Cf. Schegg, Evang. nach Luk., Munich, 1863, t. ii, p. 530.

2° Marthe est nommée pour la première fois à l’occasion de la réception de Notre-Seigneur et de ses disciples dans un bourg de Galilée, au cours de son dernier voyage dans ce pays. Elle se multiplie et se donne un grand mouvement, mpiesirâTo, satagebat, pour recevoir dignement ses hôtes. Elle agit en maîtresse de maison, habituée à commander et à surveiller, tandis que sa sœur Marie, longtemps absorbée par de tout autres occupations, ne songeait, depuis sa conversion, qu’à écouter les paroles du Sauveur. Aussi Marthe s’étonne-t-elle que sa sœur ne prenne pas une part plus active à la préparation du festin. Elle dit donc à Notre-Seigneur, sans doute avec plus d’enjouement et de simplicité que de mécontentement : « Seigneur, ne prenez-vous pas garde que ma sœur me laisse seule à servir ? Dites-lui donc de m’aider. » Marthe s’imagine que Marie fera plus d’honneur au divin Maître en lui préparant son repas qu’en l’écoutant. Notre-Seigneur répond sur un ton à la fois grave et affectueux : « Marthe, Marthe, tu te mets en peine et tu t’agites pour beaucoup de choses. Or, une seule est" nécessaire. Marie a pris pour elle la bonne part et elle ne lui sera pas ôtée. » Luc, x, 38-42. Le Sauveur ne blâme que ce qu’il y a d’excessif dans l’activité de Marthe ; cet excès empêche de songer au principal, qui est le soin de la vie spirituelle. Marie a choisi la bonne part, la part bonne par excellence ; celle que Marthe a prise pour elle n’est que d’nne bonté secondaire. Notre-Seigneur ne veut donc pas que Marie soit réduite à abandonner le nécessaire et l’excellent pour ce qui est simplement utile et bon. Cet épisode de Marthe et de Marie se lit à la fête de l’Assomption, parce que la "Vierge Marie a réuni en elle la perfection de la vie comtemplative et celle de la vie active. ^

3° Marthe apparaît de nouveau, avec son caractère particulier, dans le récit de la résurrection de Lazare. La première, elle va au-devant du Sauveur, quand il approche de Béthanie, alors que Marie reste à la maison plongée dans son chagrin. Marthe s’adresse à Notre-Seigneur et lui répond avec le plus grand à-propos sur la résurrection future et sur sa foi en la divinité de celui qui lui parle. Elle-même va ensuite avertir sa sœur. Elle intervient encore" au moment où Jésus ordonne l’ouverture du sépulcre. Joa., si, 20-40. Néanmoins, Marie parait avoir occupé l’attention publique plus que Marthe ; car

saint Jean, xi, 45, parlant du concours des Juifs à Béthanie, dit qu’ils étaient venus vers Marie. Marthe n’est pas nommée dans le grec ni dans les manuscrits de la "Vulgate, bien que le texte actuel la mentionne ici.

4° Au festin qui a lieu à Béthanie, la veille des Rameaux, Marthe préside au service, Joa., xii, 2, tandis que Marie entoure de ses soins pieux la personne même du Sauveur. Les deux sœurs apparaissent dans ce festin à peu près avec le même rôle que celui qu’elles ont rempli dans la maison de Galilée (voir col. 811). Le service de Marthe n’avait donc pas été condamné ni même blâmé ; le Sauveur n’en avait signalé que le caractère excessif et exclusif. Après cet épisode, il n’est plus question de Marthe dans l’Évangile. On est étonné de ne pas la voir figurer, comme sa sœur, dans les récits de la passion et de la résurrection. Mais son absence s’explique par ce fait que les princes des prêtres songeaient à faire périr Lazare. Joa., xii, 10, 11. Les deux sœurs ne pouvaient à la fois abandonner leur frère ; pendant que Marie représentait la famille amie auprès du Sauveur mourant, Marthe dut rester auprès de Lazare menacé de mort.

5° On n’a pas de documents anciens sur les dernières années de Marthe. Dans la seconde moitié du iv « siècle, à l’époque de la Peregrinatio Silviæ, i y avait à Béthanie deux églises, l’une à l’endroit de la rencontre de Jésus et de Marthe, l’autre sur le tombeau de Lazare. Saint Jérôme, Epist. cviii, Epitaph. Paulx, 12, t. xxii, col. 887, signale à Béthanie « le sépulcre de Lazare, la demeure de Marie et de Marthe », mais ne dit rien de la mort ni du tombeau des deux sœurs. Le Petit Martyrologe romain, du ix « siècle, et Usuard se contentent de mentionner, au 17 décembre, à Béthanie, le souvenir de Lazare et de Marthe, probablement à cause du vocable des deux églises dédiées dans ce bourg, l’une à saint Lazare, l’autre à sainte Marthe. En H87, on découvrit le tombeau de sainte Marthe à Tarascon et l’on bâtit au-dessus une église qui fut consacrée en 1197. On écrivit alors la légende qui faisait venir sainte Marthe de Palestine, avec son frère et sa sœur et beaucoup d’autres personnages célèbres depuis dans la Gaule ecclésiastique. Elle se serait établie à Tarascon, y aurait vaincu le monstre Tharascurus ou Tarasque, aurait ressuscité un jeune homme noyé à Avignon, et, sur une invitation de sa sœur Madeleine, serait morte sept jours après elle, le 29 juillet. D’un des sermons mis sous le nom de saint Ambroise, Serm. xlyi, de Salomon., iv, 14, t. xvii, col. 698, on conclut même que Marthe était Phémorroïsse de l’Évangile, guérie d’un flux de sang par le Sauveur. Clovis I er, roi des Francs, serait venu à son tombeau, à Tarascon, et y aurait obtenu une guérison. Cf. Jacques de Voragine, La légende dorée, trad. Roze, Paris, 1902, t. ii, p. 307-313 ; Faillon, Monuments inédits sur l’apostolat de sainte Marie-Madeleine, Paris, 1865, t. ii, p. 453. Deux chartes de 964 et 967 supposent à Tarascon une « terre de sainte Marthe », dépendant naturellement d’une église dédiée à la sainte. Cf. Bellet, Les origines des églises de France, Paris, 1898, p. 250-255 ; J. Bérenger, Les traditions provençales, Marseille, 1904, p. 166-174. Cependant, un manuscrit du martyrologe d’Adon, à l’usage des églises d’Arles et d’Avignon, et datant des premières années du xiie siècle, enregistre une fête de sainte Marthe, au 17 octobre, et une autre de Lazare et de Marthe, au 17 décembre, sans aucune mention du séjour à Tarascon. Dans un martyrologe d’Avignon, on lit au 29 juillet ces simples mots : « Ce jour, passage de la bienheureuse Marthe, sœur de Lazare, » insérés au xme siècle. À la même époque, on a inséré à la marge inférieure du martyrologe d’Adon, au 27 juillet : « Dans les Gaules, au bourg de Tarascon, sainte Marthe, hôtesse du Christ, etc. » Cf. G. Morin, Un martyrologe d’Arles, dans la Revue d’histoire et de littérature religieuses, Paris, 1898, p. 23, 24 ; Duchesne, Fastes épiscopaux de Vancienne Gaule, Paris, 1894, 1. 1, p. 325^29. H. Lesètbe.

    1. MARTIANAY Jean##

MARTIANAY Jean, savant bénédictin de la congrégation de Saint-Maur, né le 30 décembre 1647 à Saint-Sever-Cap, dans le diocèse d’Aire, mort à Paris à l’abbaye de Saint-Germain-des-Prés le 16 juin 1717. Il entra chez les bénédictins de La Daurade à Toulouse où il prononça ses vœux en 1668. Il étudia avec ardeur les langues orientales et l’Écriture Sainte dont il devint professeur dans plusieurs maisons de son ordre. Pendant qu’il enseignait à Bordeaux, il publia sur la chronologie biblique un livre qui attira l’attention de ses supérieurs et le fit appeler à Paris. Son œuvre principale est l’édition des Œuvres de saint Jérôme. Il l’annonça en 1690 dans son Divi Hieronymi Prodromus, in-4°, 1690, et la publia à Paris en cinq volumes in-f » de 1693 à 1706, Sancti Eusebii Hieronymi Stridonensis presbyteri, divina Bibliotheca antehac inedita, etc. Il la fît suivre d’une Vie de saint Jérôme tirée particulièrement de ses écrits, in-4°, Paris, 1706. On lui doit aussi : Défense du texte hébreu et de la chronologie de la Vulgate, contre le livre intitulé : L’antiquité des temps rétablie du P. Pezron, de l’ordre de Cîteaux, in-12, Paris, 1689 ; Continuation de la défense du texte hébreu et de la Vulgate, in-12, Paris, 1693 ; Relation de la dispute de l’auteur du livre de l’Antiquité des temps rétablie contre le défenseur de la Vulgate, in-12, Paris, 1707 (Martianay défend les chiffres du texte hébreu et la chronologie de la Vulgate contre le P. Pezron qui défendait la chronologie des Septante) ; Vulgata antiqua latina et itala versio Evangelii secundum Malthœum, e vetuslissimis eruta monumentis, in-A%, Paris, 1695 ; Remarques sur la version italique de l’Évangile de saint Matthieu qu’on a découverte dans de fort anciens manuscrits, in-12, Paris, 1695 ; Traité de la connaissance et de la vérité de l’Écriture Sainte, 4 in-12, Paris, 1694-1695 ; 1717 ; Continuation du premier Traité de l’Écriture, où l’on répond aux difficultés que l’on a faites contre ce même Traité, in-12, Paris, 1699 ; 1719 ; Suite des Entretiens ou Traités sur la ^vérité et la connaissance de la Sainte Écriture, in-12, Paris, 1703 ; Traité méthodique ou manière d’expliquer l’Écriture par le secours des trois syntaxes : la propre, la figurée et l’harmonique, in-12, Paris, 1704 (c’est une herméneutique dans laquelle l’auteur insiste sur la règle d’interpréter les Livres Saints d’après les Pères et les coneiles, et non d’après les principes des Juifs et des protestants ) ; Défense de la Bible de saint Jérôme contre la critique de M. [Richard] Simon, in-12, Paris, 1699 ; Eruditionis Hieronymianes Defensio adversus Johannem Clericum, in-8°, Paris, 1700 ; Harmonie analytique de plusieurs sens cachés et rapports inconnus de l’Ancien et du Nouveau Testament, avec une explication littérale de quelques Psaumes et le plan d’une nouvelle édition de la Bible latine (plan d’une sorte de Polyglotte qui ne fut pas mis à exécution), in-12, Paris, 1708 ; Essais de traduction ou Remarques sur les traductions françaises du Nouveau Testament, in-12, Paris, 1709 (2 éditions différentes la même année) ; Le Nouveau Testament de N.-S. J.-C, traduit en français sur la Vulgate avec des explications littérales, 3 in-12, Paris, 1712 ; Prodromus biblicus sive conspectus facilis ac simplex expositionis novse Sacrorum Bibliorum, ex ipsis divinarum Scripturarum sententiis parallelis penitus contexta, in-4°, Paris, 1714 ; Explication historique du Psaume Exurgat Deus, in-12, Paris, 1715 ; Méthode sacrée pour apprendre à expliquer l’Ecriture Sainte par l’Écriture -même, in-8°, Paris, 1716 ; Les trois Psautiers de saint Jérôme traduits en français, 1704 ; Psautier en trois colonnes selon la Vulgate, in-12, Bruxelles, 1716.. — Voir dom Tassin, Histoire littéraire de la congrégation de Saint-Maur, in-4°, Paris et Bruxelles, 1770, p. 382397 ; Journal des savants, 9 août 1717, p. 506-509 ; J. B. "Vanel, Nécrologe des religieux de la congrégation de Saint-Maur décédés à Saint-Germain-des-Prés, in-4°, Taris, 1896, p. 112-115. F. Vigouroox.

1. MARTIN (Jacques de), bénédictin, né à Fanjeaux, dans l’Aude, le Il mai 1684, mort à Paris, le 5 septembre 1751. Ses études terminées à Toulouse, il entra en 1709 dans la congrégation de Saint-Maur. Après avoir enseigné les humanités, il vint en 1727 à l’abbaye de Saint-Germain-des-Près, où il mourut. Très érudit, mais d’une imagination hardie, il a laissé plusieurs ouvrages, parmi lesquels nous n’avons à mentionner que le suivant : Explications de plusieurs textes difficiles de l’Écriture Sainte qui jusqu’à ce jour n’ont été ni bien entendus, ni bien expliqués par les commentateurs, avec des règles certaines pour l’intelligence du sens littéral de l’Ancien et du Nouveau Testament, 2 in-4°, Paris, 1730. L’auteur y donne de bonnes explications d’un certain nombre de passages obscurs, mais quelques gravures trop libres et des traits satiriques et mordants firent arrêter la vente de ce livre. Parmi d’autres bizarreries, l’auteur y affirme que l’étude des poètes profanes, et de Plaute en particulier, est un moyen très utile pour arriver à une bonne intelligence de l’Écriture Sainte. — Voir dom J. F. de Brézillac, Éloge de dom Martin, en tête du 2e volume de son Histoire des Gaules ; Ziegelbauer, Hist.’rei literariss Ord. S. Benedicti, t. iv, p. 60, 64, 105 ; [D. François, ] Biblioth. générale des écrivains de l’ordre de Saint-Benoît, t. ii, p. 304 ; Ch. de Lama, Biblioth. de la congrégation de

Saint-Maur (1882), p. 170.
B. Heurtebize.

2. MARTIN Paulin, orientaliste et critique biblique français, né à Lacam (Lot) le 20 juillet 1840, mort à Amélie-les-Bains (Pyrénées-Orientales) le 14 janvier 1890. Après avoir fait ses humanités au petit séminaire de Montfaucon (Lot), il étudia la théologie à Saint-Sulpice, où il fut élève de M. Le Hir. Étant trop jeune pour recevoir la prêtrise au terme de cette première série d’études théologiques, il alla les continuer au séminaire français, à Rome, y suivit les cours du collège romain, et fut ordonné prêtre en 1863. Au mois de février 1866, nommé chapelain de Saint-Louis-des-Français, il continua à travailler et prit les degrés de docteur en théologie et de licencié en droit canonique. Les langues orientales : hébreu, arménien, arabe, syriaque, furent l’objet principal de ses études. « Bientôt il obtint le renom mérité de syriacisaut distingué, et c’est dans cet ordre d’études qu’il publia les œuvres les plus achevées et les plus durables. » E. Mangenot, dans la Revue des sciences ecclésiastiques, décembre 1891, p. 541. De retour en France, l’abbé Martin fut d’abord vicaire pendant quatre ans à Saint-Nicolas-des-Champs à Paris (1868-1872) ; il devint après chapelain de Sainte-Geneviève par voie de concours, puis aumônier pendant quelques mois de l’école Monge (1876), premier vicaire de Saint-Marcel-de-la-Maison-Blanche (1877), et enfin (octobre 1878) professeur d’Écriture Sainte et de langues orientales à l’Institut catholique de Paris. Il occupa cette chaire jusqu’à sa mort. En 1890, des infirmités précoces l’avaient contraint d’aller chercher à Amélie-les-Bains le rétablissement d’une santé ruinée par l’excès de travail. Il y mourut dans sa cinquantième année.

On a de lui : Œuvres grammaticales d’Aboul’Faradj, dit Bar-Hébrseus, 2 in-8°, Paris, 1872 ; Grammatica, chrestomathia et glossarium lingum syriacse, in-8 8, Paris, 1873 ; Histoire de la ponctuation ou de la tnassore chez les Syriens, in-8°, Paris, 1875 ; Quatre manuscrits importants du Nouveau Testament, auxquels on peut en ajouter un cinquième, in-8°, Paris, 1886 ; Introduction à la critique générale de l’Ancien Testament : Dé l’origine du Pentateuque. Leçons professées à l’école de théologie de Paris en 1886-1889, 3_ in-4°, Paris, 1887-1889 ; L’Hexaméron de Jacques d’Édesse, in-8°, Paris, 1888 ; Saint Jb tienne Harding et les recenseurs de la Vulgate latine, Alain et Théodulfe, dans la Revue des sciences ecclésiastiques, 1887 ; La Vulgate

au xiw siècle d’après Roger Bacon, dans le Musêon, 1888 ; Introduction à la critique textuelle du Nouveau Testament, partie théorique, Leçons professées à l’école supérieure de théologie de Paris en 1883-1883, lithographie, in-4°, Paris (s. d.) ; Descriptixm technique des manuscrits grecs, relatifs au Nouveau Testament, conservés dans les bibliothèques de Paris, in-4°, Paris, lithographie (ce dernier ouvrage est un supplément du précédent) ; Introduction à la critique textuelle du Nouveau Testament, partie pratique, tome I er : Les plus anciens manuscrits du Nouveau Testament et Origène, leçons de 1883-1884, in-4°, Paris, 1884, lithographie ; t. n : La finale de saint Marc, leçons de 1883-1884, lithographie, in-4°, Paris, 1884 ; t. m : Les versets de saint Luc, xxii, 43-44, sur la sueur de sang, leçons de 1884rl885, lithographie, in-4°, Paris, 1885 ; t. IV : Les versets 3 et 4 du ch. v de S. Jean et la section de la femme adultère, leçons de 1885-1886, lithographie, in-4°, Paris, 1886 ; t. v : Le verset des trois témoins ; leçons de 1885-1886, lithographie, in-4°, Paris, 1886. Ces leçons lithographiées, écrites au courant de la plume, sans aucune retouche, sont diffuses, mais pleines d’érudition. L’abbé Martin publia aussi de 1887 à 1889, dans diverses revues, des articles sur I Joa., v, 7 : Le verset des trois témoins célestes et la critique biblique contemporaine (Revue des sciences ecclésiastiques, 1887) ; Les trois témoins célestes (La Controverse et Le Contemparain, 15 juillet 1888), réponse à M. Vacant ; Le verset des trois témoins célestes est-il authentique ; Un dernier mot {Revue des sciences ecclésiastiques, février, mars et mai 1889), réponses à MM. Maunoury et Rambouillet, etc. Voir E. Mangenot, M. l’abbé Paulin Martin, dans la Revue des sciences ecclésiastiques, décembre 1891, p. 541-551.

0. Reï.

MARTINET. Voir Hirondelle.

    1. MARTINI Antonio##

MARTINI Antonio, traducteur de la Bible en italien, né à Prato en Toscane le 20 avril 1720, mort à Florence, dont il fut archevêque, le 31 décembre 1809. Sur sa célèbre version des Saintes Écritures en langue italienne, voir t. iii, col. 1032.

    1. MARTYR##

MARTYR, mot grec, |iâf>TU ; , pluriel, quip-cupEç, qui signifie « témoin », celui qui atteste ce qu’il a vu ou entendu. Il est fréquemment employé, dans la traduction des Septante et dans le Nouveau Testament grec, avec sa signification générale et avec sa double acception particulière, judiciaire et historique. — 1. Le témoin affirme en jugement l’exactitude des choses qu’il dépose. JExod., xxiii, 1 ; Deut., xvii, 6 ; etc., Matth., xviii, 16 ; xxvi, 65 ; Marc, xiv, 63 ; Act., vi, 13 ; vii, 58 ; IICor., xiii, 1 ; I Tim., v, 19 ; Heb., x, 28. — 2. Au sens historique, le (lip-ruç affirme la vérité des choses qu’il rapporte, parce qu’il les a vues. Act., x, 41 ; I Tim., vi, 12. — 3. Ceux qui attestent par l’effusion de leur sang la véracité de leur témoignage en faveur de Jésus-Christ, comme saint Etienne, Act., un, 20, Antipas, Apoc, ii, 13, sont appelés « ses martyrs », d’une manière générale, nGtp-tupsç Ir, <xo5. Apoc, xvii, 6. C’est de là qu’est venue la signification particulière attribuée an mot martyr en latin, en français, et dans plusieurs langues modernes, « celui qui scelle son témoignage de sonsang. » Notre Vulgate n’a employé qu’une seule fois le mot « martyr » et c’est avec cette acception particulière que l’on retrouve ensuite dans les plus anciens écrivains ecclésiatiques : Vidi mulierem ebriam… de sanguine martyrum Jesu. Apoc, xvii, 6.

    1. MARTYRE DE SAINT BARTHÉLÉMY##

MARTYRE DE SAINT BARTHÉLÉMY, livre

apocryphe. Voir Actes apocryphes, VIII, t. i, col. 164.

    1. MARZILLA Pierre Vincent##

MARZILLA Pierre Vincent, religieux bénédictin d’unj noble famille de Saragosse, mort vers 1620. Il

enseigna la théologie à Compostelle, et parmi ses écrits on remarque : Paraphrasis intexta editioni Vulgatee in Pentateuchum, in-f°, Salamanque, 1600. — Voir Ziegelbauer, Historia rei literariæ O. S. B., t. iv, p. 25, 225 ; N. Antonio, Biblioth. Hispana nova, t. ii, p. 248.

B. Heurtebize.
    1. MASAL##

MASAL (hébreu : MiS’âl, « demande, prière [ ?], »

6-esenius, Thésaurus, Indices, p. 113 ; Septante : Maanâ),

ville lévitique de la tribu d’Aser. Les Massorètes l’ont

ponctué de deux manières différentes : httvin, MU’âl,

T ; *

dans Jos., xix, 26, et xxi, 30, et hvn, I Par., vi, 59 (Vulgate, 74). Les Septante l’ont rendu par Maaadc dans Jos., xix, 26 ; MtxaaâX, dans I Par., vi, 74 ; ils l’ont défiguré dans Jos., xxi, 30, sous la forme BacreXXâv (Alexandrinus ; Maa<râX). La Vulgate écrit son nom Masal, Jos., xxr, 30 ; I Par., vi, 74, et Messal, Jos., xix, 26. — 1° L’Écriture ne nomme cette localité que trois fois : une première fois dans l’énumération des villes qui échurent à la tribu d’Aser, Jos., xix, 26, et les deux autres fois dans l’énumération des villes qui furent données aux Lévites. Jos., xxi, 30 ; I Par., vi, 74. Masal fut attribuée aux Lévites de la famille de Gerson. — 2° Eusèbe écrit son nom Macrav et dit qu’elle était située près du mont Carmel, sur la mer Méditerranée. Onomast., édit. Larsow et Parthey, 1862, p. 278, 279. Ces données sont généralement admises comme exactes, mais l’identification précise de la localité est incertaine. D’après Van de Velde, Memoir to accompany the Map, p. 335, Masal aurait occupé le site du village ruiné appelé de nos jours Khirbet Miseliéh ou Misalli, non loin de la mer, à cinq ou six kilomètres au nord-est d’Athlit. Voir la carte d’AsER, t. i, vis-à-vis la col. 1085. On y voit « plusieurs enclos, que séparent des murs de clôture en pierres sèches provenant de maisons renversées ». V. Guérin, Samarie, t. ii, p. 283. Les explorateurs anglais du Palestine Exploration Fund placent à tort Masal dans l’ouadi Maisléh, au nord de Saint-Jean d’Acre. Armstrong, Wilson et Conder, Names and Places in the Old and New Testament, in-4°, Londres, 1889, p. 129. — Masal se trouvait sur la route d’Egypte en Syrie qui longeait le Méditerranée. Nous ne savons rien de son histoire. Il est cependant possible qu’elle soit nommée dans la liste des villes soumises à Thothmés III, sous la forme Misa’ara, qu’on peut lire Misa’ala. W. M. Mûller, Asien und Europa, nach altàgyptischer Benkmâler, 1893, p.l81.

    1. MASALOTH##

MASALOTH (Septante : Mat< ?a).w6), localité où campa l’armée syrienne conduite par Bacchide et Alcime contre Judas Machabée, I Mach., ix, 2. Il n’en est fait mention nulle part ailleurs et sa situation est indiquée dans ce passage par les mots « qui est en Arbelles ». On peut, avec Ed. Robinson, Biblical Researches in Palestine, 1856, t. ii, p. 398-399, voir dans ce nom les degrés ou terrasses, mbDn, mesiïlôf, qui conduisaient aux cavernes d’Arbèle en Galilée, non loin du lac de Tibériade. Voir Arbèle, t. i, col. 885. Tuch, Commentatio de Man aXw6 èv’ApSriXoiç, 1853, suppose qu’il faut lire M « <7cra8ri>8, hébreu : Mesadôt, « forts, forteresses, » au lieu de MawaXwO, et que ce mot désigne les cavernes mêmes d’Arbèle dont parle Josèphe, Bell, jud., i, XVI, 2, 4. Cf. Ant. jud., XII, xi, 1, où l’historien juif raconte que Bacchide attaqua et prit les Juifs qui s’étaient réfugiés dans les cavernes d’Arbèle, êv (rmjXai’oç. Plusieurs commentateurs, C. L. W. Grimm, Dos erste Buch der Maccabàer, 1855, p. 132, pensent que Josèphe a passé sous silence le mot MaioaXwO du texte ; il est plus probable qu’il l’a traduit par « dans les cavernes ». Quelques critiques ont supposé sans raison que Masaloth était une altération de Casaloth. Voir Casaloth, t. H, col. 326.

    1. MASCARELL Vincent##

MASCARELL Vincent, jésuite espagnol, né à Valence le 8 avril 1660, mort à Valladolid le 13 avril 1730.

831

MASCARELL — MASOBIA

832

Entré dans la Compagnie de Jésus le 4 avril 1682, il enseigna la théologie, fut recteur d’Avila et de Léon et enfin professeur d’Écriture sainte à Salamanque pendant quatorze ans. Il nous a laissé un travail fort important sous le titre de Sacrée dissertationes prsesertim chronologies in divinam ScW^turam, Valladolid, 1721-1724. Le tome i" est consacré aux temps écoulés depuis la création jusqu’à la fondation du temple de Salomon ; le h » aux années des rois de Juda et d’Israël ; le ni" à celles d’Esdras, de Judith et d’Esther ; le ive expose et explique les généalogies de Notre-Seigneur et de la sainte Vierge, d’après saint Matthieu et saint Luc, ainsi que plusieurs passages difficiles de l’Ancien et du Nouveau Testament. Évidemment les dissertations chronologiques se sentent de l’époque où elles ont paru et la science moderne pourrait y relever quelques erreurs.

P. Bliard.

M ASCH Andréas Gottlieb, érudit protestant allemand, né à Beseritz en Mecklembourg le 5 décembre 1724, mort à Neu-Strelitz le 26 octobre 1807. Il fut célèbre en Allemagne comme prédicateur. On lui doit la continuation de la Bibliotheca sacra de Jacques Lelong (col. 163). Publiée à Paris en 2 in-8°, Paris, 1702 et 1709, . et à Anvers avec des additions, par Ch. Boerner, 2 in-8°, 1709, Masch la compléta de 1778 à 1790 et la publia à Halle, 4 in-4° sous ce titre : Bibliotheca sacra post Cl. Cl. VV. Jacobi Lelong et C. F. Boemeri iteratas curas ordine disposita, emendaia, suppleta, continuata ab A. G. Masch. Elle fait connaître les éditions des textes originaux (part. 1, 1. 1), latines (part. II, t. m et iv) et des versions de la Bible, orientales et grecques (part. II, 1, t. h), latines (part. II, 2, t. in et iv), et versions des versions (c. iv, t. iv), publiées avant cette époque. — Voir Doring, Gelehrte Theologen Deutschlands der xviu** und XJ2° » Jahrhunderten, t. ii, p. 422 ; AUgemeine deutsche Biographie, t. xx, 1884, p. 550.

- MASÉPHA, ville de Juda. Voir Maspha3, col.’gSB-SSS.

    1. MASÉRÉENS##

MASÉRÉENS (hébreu : ham-mUrâ’î ; Septante : ’Hiiourapoù’ii ; ils ont conservé l’article au commence ment du nom ; Vulgate : Maserei), descendants de Caleb, de la tribu de Juda, formant la quatrième des quatre familles qui émigrèrent de Cariathiarim à une époque inconnue. I Par., H, 53. Elle paraît être allée s’établir dans une localité appelée Misrd 1, d’où son nom. Cette localité n’est d’ailleurs mentionnée expressément nulle part ; tout ce qu’on peut en dire, c’est qu’elle devait se trouver probablement dans le voisinage de Cariathiarim.

    1. MASÉRÉPHOTH##

MASÉRÉPHOTH (hébreu : Misrefôf maïm ; Septante : Ma<rpeçùG Matv ; Vulgate : aqux Maserephoth), localité de Phénicie, nommée deux fois dans l’Écriture. Jos., xi, 8 ; xiii, 6. L’étymologie de ce nom de lieu est diversement expliquée. D’après Kimchi, mUrefôf maïm signifie des « eaux chaudes », des eaux thermales, de la racine sâraf, « brûler, » Voir Unger, De thermis Sidonis, Leipzig, 1803. D’autres-pensent qu’il s’agit de verreries, qui avaient été établies près de ces eaux (cette localité était située dans la région où l’on dit que le verre fut inventé), ou de fonderies de métaux. Cornélius a Lapide, Comment., Paris, 1859, t. iii, p. 67 ; Masius, In Jos., dans Migne, Cursus completus Scripturse Sacrse, t. vin. 1838, col. 90 ; Gesenius, Thésaurus, p. 1341 ; Keil, Josua, 1863, p. 88. Le Targum a rendu mièrefot maïm par « fossés d’eaux » et divers commentateurs juifs y ont vu des salines, en supposant que ces fossés étaient préparés pour y faire évaporer l’eau de mer et y recueillir le sel. Cette explication est sans vraisemblance. — Josué, xi, 8, raconte que les Israélites, après avoir battu les Chananéens du nord de la Palestine près du lac Mérom, les poursuivirent jusqu’à Mièrefot Maïm. Ce nom reparait, xiii, 8, associé, comme la

première fois, à celui de Sidon, parce que ce lieu appartenait aux Sidoniens. Le site est incertain. Quelques commentateurs croient que Miirefôt est Sarepta, dont le nom dérivé de ]a même racine hébraïque, mais cette similitude accidentelle n’est pas une preuve et cette ville est située trop au nord. — D’après Thomson, The Land and the Booh, Central Palestine, Londres, 1883, p. 266, les eaux de Maséréphoth sont les sources appelées aujourd’hui’Aïn Mescherfl, à Khirbet el-Muscheirifêh, sur la côte de la Méditerranée, au sud de Rasen-Naqourah, l’Échelle des Tyriens, au pied du Djebel Muschakka, à l’extrémité septentrionale de la plaine de Saint-Jean-d’Acre.

    1. MASIA##

MASIA (hébreu : Ma’âsêydh, « œuvre de Jéhovah ; » Septante : Maao-îou), Benjamite, fils d’Éthéel et père de Colaïa. Un de ses descendants appelé Sellum habitait à Jérusalem du temps d’Esdras et de Néhémie. II Esd., xi, 7.

    1. MASIUS##

MASIUS, nom latinisé du commentateur belge André Mæs. Voir Mæs, col. 537.

    1. MASKIL##

MASKIL (Septante : enjveffi ? ; Vulgate : intellectus,

inlelligentia). Ce mot se trouve au titre de treize

Psaumes : Ps. xxii, xlii, xliv, xlv, lii, lui, liv, lv,

lxxiv, lxxviii, lxxxviii, lxxxix, cxi.ii. Le verbe bDir,

èdkal, signifie « connaître, comprendre », et haskïl, « enseigner, » d’où maskil, [poème] « didactique ». Voir

Ps. xxii, 8 ; xlvii, 8, et l’expression analogue ia¥ ?, Ps. lx,

1. Mais le rapprochement de la racine arabe ►*£, qui

est de la même famille que l’hébreu bsi » et possède les

même significations, donne une explication un peu dif ». <* >.

ferente : « poème, poésie, vers ; » jj ».*i, « connaissance,

sensation, doctrine, vers, poésie ; » j^Lio, « poète ; »

jAJù, « beau poème. » J. Parisot.

    1. MASMA##

MASMA (hébreu : Mtëmd’, « audition ; » Septante i Mau|jict), nom d’un Ismaélite et d’un Siméonite.

1. MASMA, le cinquième des douze fils d’Ismaël. Gen., xxv, 14 ; I Par., i, 30. Le pays habité par la tribu arabe qui porta ce nom n’est pas déterminé [avec certi-’tude. Certains commentateurs l’ont identifié avec les MamatjJLaveïç de Ptolémée, vi, 7, 21 (voir Keil, The Pentateuch, Edimbourg, 1866, 1. 1, p. 265), au nord-est de Médine ; d’autres ont proposé des rapprochements avec El-Mismîyéh, dans le Ledjah, au sud de Damas, ou avec Djebel Misma’, au sud-est de Kdf, à l’est de l’ouadi Sirhan, ou avec un autre Djebel Misma’, situé plus au sud, vers Teinta, où l’on a trouvé des inscriptions. J. A. Selbie, dans Hastings, Dictionary of the Bible, t. iii, 1900, p. 397 ; Ed. Glaser, Skizze der Gcschichte und Géographie Arabiens, t. ii, 1890, p. 440.

2. MASMA, fils de Mapsam et père d’Hamuel, de Zachur et de Séméi, de la tribu de Siméon. I Par., iv, 25-26. Dans la généalogie d’Ismaël, Gen., xxv, 13-14 ; I Par., i, 29-30, le quatrième et le cinquième de ses fils s’appellent en hébreu Mibsam (Mapsam) et MiSma, (Masma) comme ici le père et le fils.

    1. MASMANA##

MASMANA (hébreu : Mismannâh, « graisse ; » Septante : Maspiavâ), le quatrième des vaillants Gadites qui allèrent rejoindre David dans le désert de Juda, pendant la persécution de Saùl. I Par., xii, 10.

    1. MASOBIA##

MASOBIA (hébreu : ham-Mesôbâyâh, « le Mésobaïte ; » Septante : 6 Mso-aoëtà ; Sinaiticus : Meivaëtiâ), patrie de Jasiel, un des braves de David. I Par., XI, 47. Voir Jasiel 2, t. iii, col. 1139. Masobia est complètement

inconnue. Quelques-uns ont pensé que ce nom pouvait être une modification ou altération de Soba, petit royaume araméen du temps de David. Voir Soba.

    1. MASPHA##

MASPHA (hébreu : Mispéh, à la pause Mispâh, avec mouvement Mispâtâh, « lieu d’observation, » de safâh, a observer, guetter ; » Septante- : Macrça, Ma<r<j7)çei, Mà<T<ni ?â6 ; Vulgate : Maspha et Masphath ordinairement ; une fois Masphe, une fois Mesphe et une fois Masepha), nom d’un monument ou monceau de pierres, de plusieurs hauteurs, territoires ou villes-. En hébreu, le nom est quelquefois sans l’article, le plus souvent avec lui, ham-Mispéh ; il est parfois aussi traduit par mamk et <rxoT17J dans la version grecque, par spécula dans la version latine et dans les autres versions par des noms analogues ayant la signification du nom hébreu.

1. MASPHA est un des noms donnés par Jacob au monceau de pierres ou monument, encore appelé Galaad, et élevé par lui avant de se séparer de Laban son ieau-père en souvenir de leur alliance et de leurs engagements. Gen., xxxi, 49.

1° Origine et signification du nom de Maspha. — L’origine de ce monument et les motifs de son appellation sont ainsi expliqués par l’historien sacré : Laban propose à Jacob une alliance : « Viens [lui dit-il] et faisons une alliance pour qu’elle soit un témoignage entre moi et toi. C’est pourquoi Jacob, continue le récit, prit une pierre et l’érigea en monument (massêbâh, grec : ot^Xï], latin : in titulum). Et Jacob dit à ses frères : Apportez des pierres. Et ceux-ci en ayant rassemblé firent un grand tas et mangèrent dessus. Laban l’appela le monceau du témoignage (yegar-sâhâdûtâ’) et Jacob le nomma Gal’êd. Et Laban dit : Ce monceau (gai) est témoin (’êd) entre moi et toi aujourd’hui. Pour cela il fut appelé Gal’êd (ou Galaad) et ham-Mispâh (nssan, « le

lieu d’observation » ), parce que Laban avait dit : « Que le Seigneur observe (^s », yesêf) entre moi et toi, quand -nous nous serons éloignés l’un de l’autre… » Et Laban dit encore à Jacob : « Voici ce monceau (gai) voici ce monument (ham-massêbah) que j’ai dressé entre moi et toi, témoin sera ce monceau, témoin sera ce monument que je ne le franchirai pas pour aller vers toi et que toi tu ne franchiras pas ce tas ou ce monument, pour Tenir vers moi dans des intentions mauvaises. » Gen., xxxi, 43-52. — Les Septante ont traduit l’expression ham-Mispâh par r ôp^cri ; , « la vision ; » la Vulgate l’a complètement négligée ; les Targums d’Onkelos et de Sifré le rendent par Sekûfd’, « vue. » L’historien Josèphe transcrit le nom de Maspha par Macrçâ-ni, « ce qui veut dire en langue hébraïque xaToitTeu<5|j.Evov (conspicuum), » ajoute-t-il. Ant. jud., VI, H, 1. Selon Gesenius, Thésaurus, p. 1179, il faudrait lire au commencement du verset 49 : « et il appela le cippe Mispâh, nsïp ïiassm, » comme a traduit justement Saadia,

et la pierre fut appelée « l’observatoire ». — Le nom de Maspha employé d’abord simultanément avec celui de Galaad paraît être demeuré dans la suite plus particulièrement attaché au cippe lui-même et à la région immédiate où il se trouvait, tandis que le nom de Galaad devint celui de tout le pays et même de toute la contrée transjordanique. Voir Galaad 6, t. iii, col. 47-48. / 2° Nature, position et histoire du monument. — Le monument élevé par Jacob paratt avoir consisté en une pierre plus considérable autour de laquelle un grand nombre d’autres moins volumineuses furent accumulées, sans doute en forme de cercle ou d’enceinte. Il devait être identique de forme et de disposition à ces monuments de forme grossière élevés par les peuples primitifs et connus sous le nom de dolmens, si nombreux encore dans l’ancien pays de Galaad. La plupart d’entre eux sillonnés de petites rigoles aboutissant à des cavités

CICT. DE LA BIBLE.

en forme de coupe, paraissent avoir servi d’autel. Josèphe témoigne, Ant. jud., 1, xix, 2, que celui de Jacob en eut la forme : rrr^).7]v àve6^<rav xaxà Bo>[aoO tr^pLa. La Bible elle-même semble insinuer que Jacob le fit servir d’autel, en disant qu’après l’avoir élevé « ils mangèrent là sur le tas » et en ajoutant qu’ils jurèrent devant le monument et qu’  « ensuite Jacob immola des victimes sur la montagne et invita ses frères à manger ». Gen., xxxi, 46, 53, 54. — Le monument ainsi élevé par Jacob se trouvait, d’après le récit de ses origines, à l’entrée des monts de Galaad, du côté de l’est, avant Mahanaïm et au nord du Jaboc que le patriarche devait franchir plus tard pour se rendre à Sichem et il faut le chercher en Galaad, dans le voisinage de la ville du même nom qui doit le lui avoir emprunté. Voir Maspha 2. — C’est là que Jephté appelé par ses compatriotes pour marcher contre les Ammonites qui avaient envahi le pays de Galaad et l’opprimaient, fut investi du titre de prince et c’est en face, sans doute, du monument de Jacob, « devant le Seigneur à Maspha, » qu’il fit répéter aux chefs de Galaad leurs promesses, leur demandant, selon toute probabilité, de les ratifier par un serment. Jud., xi, il. Peut-être son vœu fut-il formulé et accompli au même endroit. — Le monument de Jacob, on le voit par la conduite de Jephté, était devenu un objet de vénération, ou un sanctuaire en Israël, et c’est à lui, on n’en peut douter, que fait encore allusion le prophète Osée, au temps des rois de lui ; ., Ozias, Achaz et Êzéchias et du roi d’Israël Jéroboan. II, quand il s’écrie : « Écoutez-moi, prêtres et soyez attentifs, maison d’Israël et maison du roi ; voici votre jugement : vous avez été un filet à Maspha et un piège sur le Thabor. » Ose., v, 1 (hébreu). Si le prophète eût entendu parler de Maspha de Benjamin, elle aussi un lieu de prière, se fût-il adressé aux Israélites et à la population au milieu de laquelle est Thabor ? — Le culte des faux dieux avait alors remplacé à Maspha le culte du vrai Dieu. — Les Septante ont traduit le nom de Maspha par (jxoroâ et la Vulgate par speculatio.

L. Heidet.

2. MASPHA, région située au pied de l’Hermon. Elle est surnommée « terre de Maspha », ’éréz ham-Mispâh, Jos., xi, 3, et « plaine » ou « vallée de Maspha », biq’af Mispéh. Jos., xi, 8. Les Septante, Codex Vaticanus, par erreur sans doute des copistes, ont Macro-ujiâ au j). 3 et Ma<r<Tù>x au, t. 8, tandis que VAlexandrinus porte Maa(teçiO et Macrmiçà. — Jabin, roi d’Asor, fit entrer dans la coalition formée par lui contre Josué et les Israélites, « les Hévéens qui habitaient au pied de l’Hermon dans la terre de Maspha. » Les alliés réunis vinrent camper près du lac Mérom. Josué tomba sur eux à l’improviste, les défit et poursuivit les débris de leur armée « jusqu’à Sidon la grande, jusqu’à Masréphoth-Maïm et jusqu’à la plaine de Maspha, à l’orient », où il acheva l’extermination de leur armée. Jos., xi, 1-8. — La contrée de Maspha recevait probablement son nom d’une ville du même nom, inconnue maintenant. Selon quelques auteurs, ce serait le village actuel de Métullah, habité autrefois par des Métoualis, occupé présentement par une colonie juive, et situé entre le Merdj-’Ayoûn et la région en partie de plaine, qui se développe jusqu’au Djébel-Scheik, ou l’Hermon à Test. Voir la carte du Jourdain, t. iii, col. 1726. Le pays de Maspha serait ainsi le Merdj-’Ayoûn, petite plaine fertile, de quatre à cinq kilomètres de longueur et de deux environ de largeur, s’étendant au nord de Métullah, ou bien la région plate au sud-ouest de l’Hermon, depuis Métullah et Hébel el-Qémah jusqu’aux approches de Baniâs. Cette dernière plaine où se réunissent les affluents qui forment le Jourdain, est réellement au pied de la montagne ou « sous » l’Hermon ; l’autre en est séparée par la vallée du nahar-flasbdni et les montagnes qui la bordent à l’ouest. D’autres ont proposé d’identifier la vallée (béq’af) de Maspha avec la grande vallée du nahar IV. - 27 835

MASPHA DE L’HERMON — MASPHA DE JUDA

836

Litany, qui se développe à l’est de PHermon et est appelée el-Béq’ah. Armstrong, Gonder et Wilson, Names and Places in the Old Testament, p. 127. Jos. Schwarz a cru reconnaître Maspha dans le Djebel Heis, appelé Heis Sa’qa’ra', où se trouve un tell-Dje~ba', à quatre heures au nord de Quneitrah. D’après l’auteur, Djêba' qui a une signification analogue à Maspha, serait une traduction du nom ancien. Tebuoth ha-Arez, nouv. édit., Jérusalem, 1900, p. 74. À trente kilomètres au nord nord-est de Quneitrah et à dix kilomètres à l’est d’un khân du même nom, on rencontre sous une suite de mamelons appelés teloul Sa’ar, un village du nom de Sa’ar Djéba C’est là, selon toute apparence, l’endroit où Schwarz voit la ville de Maspha. Au nord de ces collines et au sud-est de l’Hermon, commence la grande plaine traversée par la route venant du pont appelé djéser benât-Yaqôb ; elle s'étend jusqu'à Damas et est connue aujourd’hui sous le nom d’Ouad' el 'Adjem, s la vallée des Perses ; » ce serait là, dans sa partie méridionale au moins, la plaine ou vallée de Maspha. La même opinion paraît partagée par Riess qui indique cette vallée au sud-est du mont Hermon. Bibel-Atlas, 1887, p. 20. Bien que le récit de Josué soit susceptible d'être interprété diversement, l’expression « à l’Orient », rattachée à la plaine de Maspha, semble préciser sa situation par rapport au lac de Mérom près duquel se livra le combat et non par rapport à Sidon ou à Masréphoth et l’opinion de Schwarz et de Riess semble ainsi la plus fondée. — Lors de l’irruption des Héthéens, sous le règne d’Aménophis IV, au xve siècle avant l'ère chrétienne et un siècle avant l’Exode, toute la région située au sud-est de l’Hermon fut envahie par eux. Parmi les villes détruites, entre Udumu (identifiée avec Daméh au sud de Damas), Aduri (Édréi, aujourd’hui ed-Dera'), Araru (Aro’er, 'Ar’ar), d’une part. etMugdalim (peut-être Medjdel e&Sémés) et Khini (peut-être Hineb), toutes deux au sud-est de l’Hermon, se trouvait une ville dont la tablette cunéiforme qui mentionne le fait a gardé seulement les premières lettres Mets. Selon Conder, la ville désignée devait êtce Maspha, transcrite Meis[pa]. The Tell Amama Tablets, ii, The Hittite invasion of Damascus, 2e édit., Londres, 1894, p. 25. Cf. C. Bezold, The Tell et Amarna Tablets in the British Muséum, 1892, p. 61. Le docte explorateur a cru reconnaître dans cette Meispa, Mizpa de Galaad, qu’il identifie en outre avec Ramoth-Mizpa dont le grand village actuel de Ramtah, situé à dix kilomètres vers le sud-ouest d’ed-Dera 1 rappelle le nom. La situation donnée à Meispa dans la lettre cunéiforme l’indique plutôt entre cette localité, l’ancienne Édréi, et l’Hermon, là où paraît la placer aussi la Bible. Sur une autre des tablettes de Tellvmarna, Bezold, loc. cit., 78, et Conder, ç. 24, on lit encore le nom de Gubbu, localité où les Égyptiens, vers l'époque de l’invasion héthéenne, tenaient une garnison et vendaient des chars de guerre. C’est peut-être la Gaba 1 ou Djeba' dont nous avons parlé et qui devait appartenir à la « terre de Maspha », sans être identique à la ville de ce nom. L. Heidet.

3. MASPHA (hébreu : ham-Mispéh, avec l’article ; Septante : Maaçi ; Vulgate : Masepha. Voir 'Maspha, col. 833), ville de la tribu de Juda. — 1° Situation. — Elle est citée parmi les villes de la Séphélâh (in campeslribus), dans le second groupe, entre Déléan et Jechtel. Jos.. xv, 38. Ces deux dernières villes, appelées en hébreu Dil’dn et Yâqtêl, sont peut-être les villages actuels de Radna' et Qetna', situés entre Beit-Djibrin et Tell-Sdfiéh, dont la transformation linguistique peut très facilement s’expliquer. Parmi les autres villes du groupe dans lequel se trouve Maspha, on remarque Lachis (Umm Lâqis ou Tell-el-Hésy), Églon ÇEdjlân), Lehéman (Kh. Léhem), Kaama (peut-être Deir Ndaman) ; dans le premier groupe de la Séphélâh, sont nommés Esthaol ÇÉSoûa),

Soréa (Sara'), Zanoé (Zânùa'), Jérimoth (Yarmouk), Adullam ('Aid-el-mté), Socho (ëoueikeh), Azéca (probablement Tell-Zakarià) ; dans le troisième groupe sont Éther (el-Ater), Nesib (Beit-Nesib), Marésa (Maras) ; le quatrième groupe comprend Accaron ÇAqér), Azot ÇEsdûd), Gaza (Ghzzéh), et ses alentours. Le terrain où il faut chercher Maspha est ainsi circonscrit entré le tell-Zakaria et Youad’es-Senf, sur les bords duquel se trouvent Soueiékh-Yarmouk et 'Aidel-Mié, à l’est ; Youâdi-Serar près duquel sont 'ESoua', Sora', au nord ; les grands villages de la plaine appartenant aux territoires, de 'Aqer, 'Esdoud et Gaza, comme Yazour, Qastiniéh et Bereir, à l’ouest ; enfin le territoire de Beit-Djibrin au sud, auquel appartient Mar’as, 'Ater et Nesîb. Eusèbe et saint Jérôme désignent le même territoire en. disant : « Il y a maintenant un autre Maspha dans le territoire d'Éleuthréropolis, au nord, …en allant à Élia. » La lacune se trouvant dans les manuscrits permet de supposer que ces auteurs ne plaçaient pas Maspha sur le chemin même d'Éleuthéropolis à Élia, mais l’indiquèrent à une certaine distance, à droite ou à gauche. Cf. Onomasticon, édit. Larsow et Parthey, Berlin, 1862, , p. 282, 283 ; De situ et nominibus locorum hebraicorum, t. xxiii, col. 910.

2° Identification et description. — Les histoires des Croisades citent fréquemment une forteresse située dans la même région, élevée, en 1138, par le roi de Jérusalem et connue sous les noms i’Alba Spécula, qui équivaut à celui de Maspha la blanche. Guillaume de Syrie, en. racontant ses origines, détermine son emplacement et en décrit le site. « Voyant les excellents résultats de la fondation de Bersabée (Beit-Djibrin) et d’Ibelin (Yabnah) les Francs, dit cet historien, élevèrent une troisième forteresse. Il y avait avant en cette partie de la Judée où les montagnes s’abaissent et où commence la plaine, près des frontières de la Palestine et celles de la tribu de Siméon, à huit milles (huit lieues) d’Ascalon, un site qui, par rapport aux montagnes, est une simple colline, mais qui, par rapport à la plaine, mérite d'être appelé une montagne imposante. L’endroit est appelé en outre Tell-es-Saphi, ce qui en notre langue veut dire « mont » ou « colline éclatante [de blancheur] ». Les sages furent d’avis d’y établir une forteresse. Le roi, les princes, le patriarche, les prélats et toute la bourgeoisie s’y rassemblèrent vers le commencement du printemps pour prêter leur concours aux maçons habiles que l’on avait appelés et aux ouvriers. On établit de solides fondements et l’on éleva au-dessus, avec de belles pierres de taille, un château avec quatre tours d’une grande élévation, d’où l’on pouvait voir et surveiller la ville ennemie (Ascalon). Son nom en langue vulgaire est Blanche-Garde et en latin Alba Spécula. Historia transmarina, 1. XV, C. XXV, t. CCI, col. 636-637. Ce récit paraît être l’indication la plus sûre sur le site de cette ville de la Séphélâh. La plupart des palestinologues modernes s’accordent d’ailleurs à identifier Maspha de Juda avec le mêmeendroit. Son nom est écrit Tell es-Sâfi, dans la grande carte anglaise, Map of Western Palestine, Londres, 1880, n » xvii ; mais les habitants prononcent plus, ordinairement Tell-Sâfiéh ou Tell es-Sàfiéh. C’est un mamelon de forme conique, surélevé de 226 mètres audessus du niveau de la mer Méditerranée, dominant toutes les collines des alentours et la plaine commençant à sa base, et ressemblant par lui-même à un massif donjon dressé par la nature pour surveiller la région et pour commander au pays. Cette forme et cette situation extraordinairement remarquables ne durent pas plus, échapper à l’attention des Hébreux qu'à celle des Francs. Si ceux-ci avaient à se tenir constamment en garda contre l’hostilité et les surprises des musulmans d’Ascalon, les philistins du moyen âgé, les Israélites avaient à observer les vrais Philistins bien plus haineux, toujours prêts à marcher contre le peuple de Dieu, à envahir son

pays : il était bien plus nécessaire de mettre des sentinelles à ses frontières et l’on ne pouvait trouver pour cela un site plus favorable que Sâfiéh.

3° Identité probable de Maspha et de Sephata. — La masse élevée et dénudée du teiJest d’un calcaire crétacé, se faisant remarquer au loin par son éclatante blancheur. De là plusieurs d’entre les modernes ont cru, comme l’historien du xii « siècle, reconnaître, dans le nom arabe de la colline, une expression signifiant sa nature, et l’ont estimé une traduction du nom local biblique de Libana ou Libna exprimant également « la blancheur » et ont identifié cette dernière ville avec Sâfiéh. C’est une illusion. Libana appartient au troisième groupe des villes de la Séphélâh, et ne peut être cherché dans le territoire où Sâfiéh se trouve, mais plus au sud. La carte mosaïque de Madaba l’atteste aussi : Sâfiéh est antérieur à l’occupation de la contrée par les Arabes, ou si l’on aime mieux est une simple modification d’un nom plus ancien. Au sud de Nicopolis (Emmaûs), au nord d’une ville importante dont la suscription a disparu, mais qui ne peut être différente d’Éleuthéropolis, et immédiatement à l’ouest d’une localité appelée Be6 Zaxap » près de laquelle est une église marquée xb toS àf (ou Zaxapfou, est placé un village ou une ville dont la représentation a presque entièrement disparu ; dans une restauration, mais dont le nom Eaçiflâ demeure. Elle occupe la position où il faudrait placer Sâfiéh, situé à vingt kilomètres environ au sud de’Amoâs, la Nicopolis des Romains et des Byzantins, à douze kilomètres au nord de Beit-Djibrîn, l’Éleuthéropolis des mêmes à neuf kilomètres à l’ouest de TellrZakaria et du village bâti à ses pieds Kéfr’-Zakaria, certainement le Beth-Zachar.de la carte où, au v « siècle, furent trouvés les restes du prophète Zacharie et en l’honneur de qui on éleva une église. Sâfiéh a remplacé Saphitha chez les populations arabes comme Médiéhn pris la place du Moditha de la même carte. D’autre part, le nom de Saphitha est trop semblable au Sephata de la Bible pour ne pas le reconnaître comme identique et comme désignant la même localité. C’est elle qui a dû donner son nom à la vallée où le roi Asa battit les Éthiopiens et leur roi Zara. II Par., xiv, 9-10. Cette vallée était dans le voisinage de Marésa et au nord, selon la traduction des Septante, comme Saphitha l’est d’Éleuthéropolis, comme Sâfiéh de Beit-Djibrîn et de Mar’oJS, Sephata (hébreu : Sefâtdh) de la même racine. Sâfdh est encore identique de signification à Maspha. On ne peut guère supposer, dira-t-on, l’emploi simultané des deux noms. Dans le même temps et dans le même milieu, c’est incontestable ; mais n’est-il pas permis de voir dans Sephata une modification introduite dans l’usage entre le temps de Josué et d’Asa ? Cette transformation n’était-elle pas d’autant plus nécessaire pour écarter toute confusion que le nom de la Maspha de la tribu de Benjamin, voisine de Juda, depuis la grande assemblée du peuple sous Phinées, ou depuis Samuel devait être dans toutes les bouches ? Les savants objecteront encore le nom de Sephata des monuments égyptiens. Il se lit sous

la forme w w’j||. 1.. Sidiputa ou Sidphoth, avec Odullam et d’autres villes, paraissant être de la partie sud-ouest du district de Juda, dans le Voyage d’un Égyptien, au xcv* siècle avant notre ère, traduit par F. Chabas, Chalon-sur-Saône et Paris, p. 199, 313. C’est

le même nom sans doute qui est écrit J, J^. ], Safta, sur les listes géographiques de Thothmès III (n. 116) et indiqué à l’entrée de la seconde route suivie quelquefois par les Égyptiens pour gagner Mageddo et le nord de la Syrie. Cf. Max Mûller, Asien und Europa, Leipzig, 1893, p. 158, et Mageddo, col. 553. C’est probablement encore la même ville que (Sésac) nomme

J. ÎW -A& J-> Sapatol ou Satpatar, , et recense parmi les villes de Juda conquises par lui. Chabas, ioc.

cit., p. 199. Cette Sephata, Siphta ou ÇUlphoth des monuments égyptiens semble bien identique à la Sephata biblique, dont l’identité avec le Sâfiéh actuel est elle-même d’une très grande probabilité. Mais s’il en est ainsi, le nom de Sephata est certainement antérieur à l’exode et à Josué, et est-il encore possible, dans ce cas, de l’identifier avec Maspha ? Nous le pensons. Le nom de Maspha pourrait avoir été le nom usité chez les Chananéens et les Hébreux, alors que dès le principe les Égyptiens avaient adopté pour la même ville le nom Sephata. L’usage de noms de formes diverses pour désigner une même ville est certainement employé simultanément chez des peuples différents. Cependant quand les Égyptiens eurent occupé, sous le régne de Roboam, la ville appelée Maspha par les Juifs, le nom de Sephata, employé par les maîtres de la ville, devait devenir bientôt le nom universellement accepté et le nom de Maspha devait disparaître. — Dans cette hypothèse nous supposons certaine l’identité de la ville nommée par les documents égyptiens, bien qu’elle ne soit pas encore incontestablement établie. Nous l’admettons néanmoins comme très plausible. Maspha d’ailleurs, qui se lit une seule fois dans la Bible, Jos., xrx, 29, pourrait être une variante de Sephata introduite dans l’Écriture seulement par les copistes. Ces hypothèses semblent acceptées ou supposées par de nombreux savants qui, malgré ces raisons, n’ont point cessé de considérer Tell-Sâfiéh comme identique à Maspha. Voir Victor Guérin, Description de la Palestine, Judée, t. ii, p. 92 ; F. de Saulcy, Dictionnaire topographique abrégé de la Terre Sainte, Paris, 1871, p. 220 ; Rich. v. Riess, Biblische Géographie, Fribourg-en-Brisgau, 1872, p. 64 ; Id., Bibel-Atlas, ibid., 1880, p. 20 ; Survey of Western Palestine, Memolrs, t. ii, p. 440 ; Buhl, Géographie des Alten Palâstina, Fribourg et Leipzig, 1896, p. 196.

4° Fouilles exécutées à Tell es-Sâfiéh. — En 1899, la « société anglaise d’exploration de la Palestine » a fait exécuter des fouilles au Tell-Sâfieh, par les soins du D’Bliss. La société semble avoir voulu se rendre compte si l’on ne trouverait pas en cet endroit des arguments pouvant justifier de son identité avec Geth des Philistins dont la situation n’a pu être jusqu’ici fixée définitivement. Malgré l’exiguïté du champ laissé aux explorateurs pour pratiquer leurs recherches, à cause de la présence du village musulman et de son cimetière occupant presque tout le sommet de la colline, le D r Bliss a pu recueillir un grand nombre de débris antiques et a fait plusieurs constatations importantes. Les fouilles ont confirmé le récit de Guillaume de Tyr et attesté l’existence de plusieurs localités successives ou plutôt superposées par le passage des civilisations diverses ayant occupé le tell, depuis les Francs en remontant jusqu’aux Chananéens et aux Amorrhéens, en passant par les Byzan.tins, les Romains, les Grecs, les Juifs, les Phéniciens et les Égyptiens. Rien cependant n’est venu appuyer la présomption de l’identité avec Geth de Sâfiéh ou infirmer son identification avec Sephata ou Maspha. Voir Palestine Exploration Fund, Quarterly Statement, 1899, p. 188-199, 317-333 ; 1900, p. 16-29, 77 ; Note de Clermont-Ganneau, ibid., 1899, p. 354 ; et dans la Revue d’archéologie orientale, t. vii, p. 170 ; Revue biblique, 1899, p. 607, 608 ; 1900, p. 291 ; 1902, p. 112-114.

L. Heidet.

4. MASPHA, ville de la tribu de Benjamin. Son nom est transcrit Codex Vaticanus : Mnaa-rnii ; Alexandrinus : Motaçi, Jos., xviii, 26 ; Vulgate : Mesphe ; Maaa^i, " Jud., xx, 2, 3 ; der n xlvii et xlviii (xl et xli) ; I Mach., in, 46, 47 ; Majcniçiie, Jud., xxi, 1, 5, 8 ; I Reg., vu ; IV Reg., xxv, 23 ; Ma<jçâ, II Par., xvi, 6 ; II Esd., iii, 7, 15. Le nom est traduit mamâ, IJI Reg., xv, 22, récit parallèle à II Par., xvi, 6. La Vulgate transcrit Masphath I Reg., vii, et Jer., xl et xli ; partout ailleurs elle écrit constamment Maspha, sauf Jos., xviii, 26. Maspha de 83’J

MASPHA DE BENJAMIN

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Benjamin est la plus illustre de toutes les villes de ce nom et aussi celle dont la situation est le plus débattue.

I. Situation et identification. — 1° D’après Eusèbe et saint Jérôme. — La Bible ne fournit point de renseignements catégoriques. Eusèbe et saint Jérôme semblent ignorer son site et nomment seulement « Maspha, Mao-çct et Masfa de Benjamin », sans ajouter aucune indication. Onomastic, édit. Larsow et Parthey, Berlin, 1862, p. 282, 283 ; De situ et nom. loc. heb., t. xxiii, col. 911. Au nom « , Massepha de la tribu de Juda », ils ajoutent : « c près de laquelle habitait Jephté, près de Cariathiarim où reposa jadis l’arche d’alliance, et où Samuel jugea le peuple et dont Jérémie fait mention. » Onom., p. 280, "289 ; t. xxiii, col. 911. Les deux auteurs confondent à la fois et à tort Maspha de Galaad résidence de Jephté (voir Maspha 2) et Maspha de Benjamin où ont eu lieu les derniers faits cités, avec Maspha de Juda (voir Maspha 4), « t celle-ci avec la Gabaa près de Cariathiarim où séjourna l’arche sainte. Cf. I Reg., vii, 1 ; II Reg., vi, 3, 4. Le motif de cette dernière confusion est, semblé-t-il, dans la brièveté des récits historiques de la Bible. Elle mentionne l’arche à son retour du pays des Philistins établie à Gabaa de Cariathiarim, puis Samuel convoquant le peuple « à Maspha devant le Seigneur » et immolant là des sacrifices ; longtemps après, David trouva encore l’arche à Gabaa, d’où il la retira pour la transporter à Jérusalem. Eusèbe paraît avoir conclu de ce récit, comme quinze siècles plus tard d’autres le concluront pour tous les lieux où l’on voit passer l’arche sainte, que .Maspha et Gabaa sont un seul et même endroit. L’illustre écrivain ecclésiastique semble avoir oublié que l’arche se transportait en divers lieux pour être rapportée à sa place ordinaire, et son traducteur a négligé de le corriger sur ce point. La Maspha où Samuel jugea le peuple ne peut pas être Maspha de Juda située dans la Séfélah sur la frontière des Philistins, n : aucune des vautres situées en Galaad aux extrémités de la terre d’Israël ; c’est Maspha, lieu de prières en Israël dès les jours anciens, où les Machabées viendront encore prier, I Mach., iii, 46, et qui est située dans la montagne où Juda avait établi son camp, cf. I Mach., iv, 5, 18, 19, en face ou en avant de Jérusalem, I Mach., iii, 46, au nord de la "ville sainte, III Reg., xv, 22, sur le chemin, ou non loin, semble-t-il, qui conduisait de Samarie, Sichem et Silo, à la maison de Dieu ou au Temple, cf. Jer., xli, 6, c’est-à-dire Maspha de Benjamin à laquelle seule conviennent « es diverses indications.

2° D’après les Francs. — Maspha n’est pas marquée sur la carte mosaïque de Madaba, mais le nom de Masphat se trouve sur un plan de Jérusalem du XIIe siècle. Ce lieu est désigné par une église accostée de deux tours, placée à la gauche, ou à l’ouest, du Mons Gaudii (Néby .Samuel) et au nord-ouest de Jérusalem. Le chemin qui y conduit est opposé au chemin de Bethléhem et désigné par l’inscription : vicus ad civitatem Masphat. Voir Zeitschrift des Deutschen Palàstina Vereins, t. xv, 1891, plan 1. J. Ziegler indique, également « Mispéh, à la montagne de Cariat-Jarim, près de Siloh » (Néby-Samuel). Palæstina, Strasbourg, 1532, ꝟ. 39. L’endroit désigné ne semble pas différent de l’actuel Qoubeibeh, où se trouvent les restes d’une église construite par les Croisés. Qoubeibeh est un tout petit village arabe, situé à 4 kilomètres et demi à l’occident de Néby-Samuel, à l’extrémité de la même montagne, à moins de six kilomètres au nord-nord-est de Qariat el-’Anab, la Cariathiarim de la Bible. Comme Eusèbe et saint Jérôme, les Francs du royaume de Jérusalem paraissent avoir identifié la Gabaa de Cariathiarim et même cette localité avec Maspha. Le dominicain Burchard, en 1283, indique en effet Cariathiarim entre Jérusalem et Lachis, sur la route de Lydda, à 4 lieues et demie de Jérusalem. « Lachis, ville des Gabaonites, est, selon lui, à peu près à l’occident (pêne ad occidentem) de Cariathiarim. »

Descriptio Terfse Sanctæ, 2e édit., Laurent, Leipzig, 1873, p. 77. La localité dont parle l’auteur de cette description ne peut être que Qoubeibeh, située à 12 kilomètres et demi au nord-ouest de Jérusalem (distance équivalente à celle déterminée par lui, dont les lieues valent environ 3 kilomètres), sur une ancienne voie allant de la ville sainte à Lydda par Beit-Likia et Gïmzou. Beit-Likia, située elle-même à 8 kilomètres à l’ouest de Qoubeibeh, inclinant un peu au nord, est certainement la a Lachis des Gabaonites » dont parle le moine du xiie siècle. On peut conjecturer de ces documents que Cariathiarim pour les Croisés est le village même de Qoubeibeh, et son église est Maspha près de Cariathiarim. Cette Maspha-Cariathiarim des Croisés est-elle la Maspha-Gabaa des Pères du ive siècle ? Les Francs du moyen âge paraissent du moins l’avoir cru. Avaient-ils des motifs pour cela ? Ils ne nous les font pas connaître, mais il faut observer que la Bible inscrit Maspha de Benjamin, Jos., xviii, 25, 26, entre Béroth et Caphara, et Qoubeibeh est située entre el-Biréh et el-Gtb d’une part, deux localités identifiées avec Béroth, et Kafira, certainement la Caphara biblique, d’autre part, distante de 3 kilomètres seulement à l’ouest de Qoubeibeh. Il n’est aucunement impossible qu’Eusèbe et saint Jérôme aient fait allusion à la même localité, en nommant « Maspha près de Cariathiarim », sans pour cela y annexer celle-ci. Dans ce cas, toutefois, ce n’est pas à la tribu de Juda, dont la limite ne semble pas pouvoir remonter si au nord, qu’il fallait rattacher la Maspha « où Samuel jugea le peuple et dont parle Jérémie », mais à la tribu de Benjamin. Quoi qu’il en soit, l’église de Masphat de la carte du XIIe siècle publiée par Rôhricht, figure sans doute l’église médiévale de Qoubeibeh dont il a été parlé ; c’est la même église à laquelle doit faire allusion Pierre Diacre, écrivain du [XIIIe siècle, s’il parle d’une œuvre contemporaine, « élevée à l’endroit appelé Cariathiarim où résida l’arche du Seigneur. » De locis sanctis, t. clxxiii, col. 1123. Dans l’église des Croisés de Qoubeibeh se voient enclavés dans la nef septentrionale, un pavement ancien et les dernières assises d’une construction antérieure, de 18 mètres de longueur et de 8 à 9 de largeur ; c’était sans doute l’emplacement tenu par les fondateurs de l’église pour l’aire sacrée « où avait reposé l’arche sainte » ou pour les restes de la maison d’Abinadab qui l’avait abritée. Cf. I Reg., vii, 1 et II Reg., VI, 3-4. Depuis le xvie siècle, il est vrai, quelques pèlerins ignorant les documents ont cru reconnaître dans l’église de Croisés a la maison de Cléophas transformée en église », dont parlent saint Jérôme et les anciens ; et dans Qoubeibeh l’Emmaûs de l’évangile ; mais bien que l’église ait été relevée naguère et consacrée sous ce vocable, c’est une erreur. Eusèbe, saint Jérôme et tous les anciens n’ont pas connu d’autre Emmaùs que celui appelé de leur temps Nicopolis, aujourd’hui’Amoâs ; s’ils ont jamais désigné (ce que nous n’osons pas formellement affirmer) le site de Qoubeibeh, c’est pour y montrer « Maspha près de Cariathiarim, où fut jadis l’arche du Seigneur, où Samuel jugea le peuple et dont fait mention Jérémie ». Quant aux Croisés, ils ont localisé Emmaùs à 60 stades de Jérusalem, à Qariath el-’Anab, et Qoubeibeh, selon toute apparence, fut pour eux la Masphat de Cariathiarim « où résida l’arche duSeigneur » et l’église y a été élevée pour honorer cet emplacement. Cf. t. i, EmmaCs 2, col. 1758-1762.

4° D’après Surius et quelques autres. — Un siècle après Ziegler, le récollet Bernardin Surius, résident du Saint-Sépulcre de 1644-1647, assigne une situation différente à Maspha : « Au sortir de la sainte Cité, dit cetauteur, je pris la route de Nazareth… Nous arrivâmes sur le soir à la ville de Masphath, située dix milles d’Italie de Hiérusalem, bastie sur une colline fort fertile ; elle estoit jadis belle et grande comme témoignent ses ruines antiques : en y entrant on passe au long de 8M

MASPHA DE BENJAMIN

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la mosquée des Turcs, sous laquelle sourd une fontaine riche d’eau fraische, grand soûlas pour les pèlerins… Cette place est à présent nommée des Turcs Elbir. » Le pieux pèlerin ou voyage de Jérusalem, 1. III, c. ii, Bruxelles, 1666, p. 547-648. La localité ainsi désignée est l’actuelle el-Biréh, située à 14 kilomètres au nord de Jérusalem, sur la route de la ville sainte à Naplouse, à 3 kilomètres en deçà de Beitin (Béthel) et où l’on voit deux grandes piscines antiques. Surius ne dit pas sur quoi est fondée sa localisation ; mais les identifications personnelles et savantes étaient trop rares en son temps, pour ne pas y voir l’expression d’une ancienne tradition. Bien que n’en ayant pas alors de preuve positive, j’avais cru pouvoir, en 1894, en formuler cependant la conjecture : le nom de Machmas, présenté dans la description de Burchard (1283) et après lui dans une multitude d’autres, comme le nom antique et biblique i’el-Birêh, m’avait paru ou l'écho faussé d’une [vieille tradition ou une lecture erronée d’un copiste. Cette conjecture me paraît aujourd’hui un fait presque certain. Parmi les copies de la carte de la Terre Sainte de Marin Sanuto (1306) il en est une conservée à la bibliothèque de Florence et publiée par Rôhricht, dans la Revue de la Société allemande de Palestine, t. xxi, Leipzig, 1898, carte 6, où on lit, entre Jérusalem et Letana (pour Lebana) : Masphath vel Bira. D’autres copies, il est vrai, ont Magmas Maginas et Machmas. Rôhricht se demande, ibid., p. 105, s’il ne faudrait pas lire Magedo. Je ne le pense pas, car Sanut lui-mêpie, dans son texte et sur ses cartes, indique Mageddo à Sububa, au côté occidental de la plaine d’Esdrelon. Maginas, qui ne répond à aucun nom biblique ou historique, est une erreur évidente. Machmas dont le nom est constamment demeuré attaché à un village situé à 7 kilomètres et demi à l’est-sud-est d’el-Birêh n’a pas pu être confondu avec cette dernière localité. Le nom de Maspha paraît donc le seul qu’ont pu nommer la tradition et les anciens cartographes comme le nom autique de Bira ou el-Bîréh. Il suffit du reste de voir le nom de Masphath écrit avec les caractères en usage au xiiie et au XIVe siècle pour comprendre combien il était facile à un scribe peu au courant de la géographie biblique, de prendre ce nom pour un autre. On peut se demander en outre si l’auteur du plan de Jérusalem cité plus haut, où l'église de Masphat est représentée à l’ouest de Mons Gaudii ou Saint-Samuel, n’aurait pas eu l’intention de désigner lui aussi el-Biréh. Ces plans et ces cartes non seulement n’ont pas la prétention d’une stricte précision, mais souvent ils indiquent les' localités dans des situations plus ou moins fausses, là où une place reste libre, pourvu qu’elle ne soit_ pas trop éloignée de la place réelle que devraient occuper ces localités. Cette supposition est d’autant plus plausible pour Masphat et sa route, qu’ils se trouvent symétriquement en face de Bethléhem et de sa route, lesquels sont dans la réalité au sud de Jérusalem comme el-Biréh et le chemin y conduisant sont au nord. Quoi qu’il en soit, l’affirmation de Surius peut être défendue encore par des raisons non sans valeur. El-Biréh, t. i, fig. 493, col. 1623, situé en face de Jérusalem, au point le plus élevé de la région après Néby-Samuel, domine tout le pays et a pujrès bien porter le nom de Maspha ; il se trouve sur la route de Samarie, Sichem et Silo à Jérusalem où le récit de Jérémie, xii, 6, semble placer Maspha ; il est au nord de Rama (er-Râm) et non loin de Béthel, comme semblent indiquer Maspha, III Reg., XV, 22 ; II Par., xvi, 7, et Jud., xix-xxi ; enfin de tous les endroits choisis dans l’ancien territoire de Benjamin pour y localiser Maspha, el-Biréh est le seul se trouvant dans des conditions hydrographiques permettant la tenue des immenses réunions mentionnées dans l’histoire de Maspha. Voir L. Heidet, Maspha et les villes de Benjamin, Gabaa, Gabaon et Béroth, dans la Revue biblique, t. iii, 1894,

p. 321-356, 450 ; t. iv, 1895, p. 97 ; Revue d’Orient, 2e année, 1898, p. 295-300 ; A. M. Luncz, Jérusalem, revue hébraïque trimestrielle, t. vi, 1902, p. 53-56 ; La Palestine, guide historique et pratique, Paris, 1904, p. 317-321. Quelques-uns, pour confirmer cette opinion, ont fait remarquer qu’une source jaillissant à moins d’un kilomètre, à l’ouest-nord-ouest d’el-Biréh, porte le nom de 'Aïn-Misbah, ce nom, qui, suivant eux, ne serait pas différent de celui de « fontaine de Mispah », c’est-à-dire « de Maspha », confirmerait la tradition dont nous avons parlé. — La grande difficulté opposée à l’assertion de Surius, c’est le nom à'el-Biréh, qui suivant un grand nombre, ne serait pas différent de Béroth. Si cette Identification était établie d’une manière péremptoire, il faudrait nécessairement rejeter l’assertion de Surius, considérer l’indication de la carte de Marin Sanut comme une erreur incontestable et chercher Maspha ailleurs, dans une situation répondant toutefois aux données bibliques, comme l’ont fait l’abbé Raboisson et le lieutenant-colonel Conder. Pour eux, indéniables sont les données bibliques indiquant Maspha au nord de Rama, non loin de la frontière d'Éphraïm, sur la route de Sichem à Jérusalem, et ces conditions ils les trouvent précisément réalisées par le tell en-Nasbeh, encore appelé simplement Téll-Nasbéh. Cette colline, dont le sommet est couvert de ruines, se ramifie, au sud, 'à la montagne A’el-Biréh dont elle est distante de 2 kilomètres seulement, et commande le chemin de Jérusalem à Naplouse qui passe, à sa base, par un étroit défilé. L’abbé Raboisson a vu descendre, en mars 1897, le lendemain d’un jour de pluies torrentielles, ce qu’il aurait pu voir alors partout ailleurs, des ruisseaux nombreux tombant en cascade. En réalité, au pied du tell, au sud-est, est un puits étroit et profond, au fond duquel sourd un mince filet d’eau, appelé par les uns 'aïn 'Atâra, et par les autres 'aïn Djedy, la « source du chevreau », qui fréquemment tarit en été. Plus au sud se voient les restes d’une ancienne piscine de peu d'étendue. Le principal argument avancé en faveur du tell est fondé sur le nom de Nasbéh, simple modification, d’après ces auteurs, du nom de Maspha. Le P. Hugues Vincent trouve l’homophonie parfaite et absolument concluante dans la question. Raboisson, Les Mizpéh, in-8°, Paris, 1897 ; Conder, dans Palestine Exploration Fund, Quarteriy Statement, 1898, p. 169, 251 ; H. Vincent, dans la Revue biblique, 1898 r p. 630 ; 1899, p. 315-316 ; 1901, p. 151 ; 1902, p. 458. Pour les paysans de la contrée, Nasbeh comme Misbah, dont l’homophonie est cependant plus parfaite et plus concluante, sont des noms purement arabes, d’origine récente, dont la similitude avec Maspha est purement fortuite. Aïn Misbah, la « fontaine où l’on se baigne », de sabah, « nager, » vulgairement « se baigner », est ainsi désignée d’un petit bassin circulaire où sont recueillies les eaux de la source. Tell en-Nasbéh, « la colline de la Borne, s ainsi nommé d’une stèle ou d’un monceau de grandes pierres établi là pour marquer la limite du territoire d’el-Bîréh, était encore appelé, vers 1850, 'Atâra' ; une petite ruine, d’origine relativement moderne, que l’on voit au sud d& la colline, a conservé, ce nom dans celui de khirbet' Atâra', ainsi que la source. D’ailleurs la langue des paysans judéens, différente de celle des massorètes, n’a jamais eu de propension à la transformation de s en P et en B. Toutefois, s’il fallait renoncer à localiser Maspha à el-Bîréh et si Tell en-Nasbéh n'était pas une des. anciennes 'Ataroth, c’est à ce lieu qu’il faudrait tout d’abord rapporter les indications bibliques énumérées à propos de l’assertion de Surius.

4° Opinions diverses des modernes. — Les explorateurs du xix » siècle ont identifié Maspha de Benjamin avec plusieurs autres localités, sans s’accorder dans le choix. Pour le rabbin Schwarz (1833-1865), Maspha est identique à Rama ou Ramalhaïm-Sophim, ville de Sa

muel, identique elle-même au moderne Néby-Samuîl. Le nom du prophète attaché à cet endroit et son ombeau qu’on y garde sont, prétend cet auteur, l’attestation de l’identité de Néby-Samuîl et de Rama ; et les assemblées nombreuses tenues à Maspha indiquent que celle-ci n'était pas différente de Rama, la résidence du prophète. Le nom de Maspha est d’ailleurs le synonyme de Ramâ-Sophim, « la hauteur de ceux qui font la garde, s et nul endroit ne peut plus justement revendiquer ce titre que Néby-Samuîl, le sommet le plus élevé des alentours de Jérusalem, d’où le regard embrasse tout le pays. Tebuoth ha-Aréz, nouvelle édit., Jérusalem, 1C00, p. 152 et 492. Robinson, pour des raisons

infirmés par les documents positifs de l’histoire. — On doit apprécier de la même manière une autre identification quelquefois proposée : celle de Tell el-Fûl. Voir t. iii, fig. 2, col. 7. Cette colline est située à droite sur le chemin de Jérusalem à el-Biréh et à Naplouse, à 5 kilomètres de distance au nord de Jérusalem et à 3 au sud d’er-Ràm (Rama) ; elle domine toutes les collines des alentours et avait à son sommet une tour dont les ruines accusent l’importance. Tell el-Fûl, a-t-on prétendu encore, est identique à Nob où résidait l’arche sainte jusqu'à l’avènement de David, et par conséquent à Maspha, et d’après le prophète Isaïe, x, 32, il faut chercher Nob à Tell el-Fûl. Cf. Survey of Western Palestine,

228. — NébySamutt. D’après une photographie de M. L. Heidct.

analogues, propose le mêmeendroit. Biblical Researches, Boston, 1841, t. H, p. 139-149. L’autorité du docte Américain a rallié à cette opinion l’adhésion d’un grand nombre de géographes. Cf. Gratz, Schauplatz der heiligen Schriften, Ratisbonne, nouv. édit., p. 350 ; Van de Velde, Map ofHoly Land, Gotha, 1865 ; H. Kiepert, Nette Handkarte von Palàstina, Berlin, 1876 ; Bourquemont, S. J., Maspha de Benjamin, dans les Études religieuses, avril 1864, p. 35 ; F. de Saulcy, Dictionnaire topographique abrégé de la Terre Sainte, Paris, 1871, p. 220 ; Armstrông, Names and Places in the Old Testament, Londres, 1887, p. 127 ; Survey of Western Palestine, Memoirs, t. iii, p. 144 ; Riess, BïbéLAltlas, Fribourg-enBrisgau, 1887, p. 20 ; Buhl, Géographie des Alten Palàstina, Fribourg et Leipzig, 1896, p. 167-168. La première raison sur laquelle est fondée cette identification, l’identité de Ramathaïm et de Maspha, est très contestable et presque généralement rejetée. Voir Ramatiia. et Rahathaïm-Sophim. La seule raison réelle est le site de Néby-Samull, auquel convient admirablement le nom de Maspha. Mais les arguments de cette nature sont souvent plus spécieux que solides et fréquemment

Memoirs, t. iii, p. 149, Conder, Primer of Bible Gedgraphy, Londres, p. 90 ; Armstrông, Names and Places in the Old Testament, Londres, 1887, p. 127-128. Quel que soit le site de Nob, l’identité de ce lieu avec Maspha n’est guère soutenable (voir Nob) et l’emplacement de cette ville ne peut tirer à conséquence pour celui de Maspha. Tell el-Fûl est d’ailleurs plus souvent identifié avec Gabaa. Voir Gabaa, t. iii, p. 6-10.

Victor Guérin a identifié Maspha de Benjamin avec le village actuel de Sa’afàf (fig. 229). « Ce village, dit-il, est situé sur un plateau élevé d’où l’on domine parfaitement la coupole et les minarets de Jérusalem. Sa population toute musulmane est de deux cents habitants environ. Les maisons y sont pour la plupart assez anciennes et voûtées. On y voit les restes d’une église du moyen âge avec voûtes et fenêtres ogivales. Quelques belles pierres, de toute apparence antiques, avaient été employées concurremment avec d’autres matériaux de moindre appareil, dans la construction de cette petite église. Près de là gisent ' les débris d’un bâtiment désigné par les habitants sous le nom de Deir el-Mahrouq, « le couvent incendié. » Dans le voisinage de ce point « 45

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est up puits appelé bir ed-Deir et dans le voisinage de ce puits est un birket long de douze pas sur six de large. Bien que creusé dans le roc, il avait été revêtu intérieurement d’un enduit assez épais dont une partie existe encore. L’opinion la plus probable est que le village de Cha’afath a remplacé et rappelle par son nom la célèbre et antique ville de Maspha de Benjamin, que d’autres voyageurs, mais à tort, selon moi, ont identifiée avec Néby-Samuil. Maspha, en hébreu, signifie « un lieu d’où l’on voit, un observatoire élevé », en grec mcomâ. Il dérive de la racine nsat, « observer, faire sentinelle. » Remarquons que le nom arabe de (sa’faf), kjb » _£o, dérive pareillement de la racine ^lio (SàfJ qui veut dire t voir »

r

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avaient la même signification ; mais Cha’afath. seul est la Maspha de la Bible. Judée, t. i, p. 395-402. L’auteur s’est efforcé d’établir ailleurs que ni Néby-Samuît, ni Tell el-Fûl ne pouvaient être Maspha. Judée, t. i, p. 362384, et Samarie, t. i, p. 188-197. — L’identification préposée par V. Guérin a été longtemps acceptée par un grand nombre de palestinologues. Voir Riess, Biblische Géographie, , in-f°, Fribourg-en-Brisgau, 1872, p. 64 ; Dalfi, Viaggio biblico in Oriente, in-8°, Turin, 1875, t. iv, p. 6-9 ; G. Gatt, Mispa in Stamme Benjamin, dans la revue Die heilige Land, Cologne, 1879, p. 119-126, 154-160, 184-194. — Stanley a cru identique à Maspha le Scopus de Josèphe, identique lui-même, selon F. de

229. — Sa’afat. D’après une photographie de M. L. Heidet.

<et que WJlj ».^) (ia’fd’t) signifie « sommet, lieu d’où l’on domine au loin ». Il y a donc entre les deux appellations hébraïques et arabes un rapport frappant et incontestable. .. Le lieu de la rencontre du conquérant macédonien (Alexandre) et du grand-prêtre Yaddus est appelé par Josèphe Saçâ, nom qui a une singulière ressemblance avec la dénomination actuelle Cha’afath et paraît être lui-même une corruption de la forme antique Mitspha, en grec Mauçâ, d’où, par le retranchement du commencement, Saçi. Gela est si vrai que Josèphe interprète ce dernier mot par le terme grec ctxotcti, <a Spe « cula, observatoire. » Or, dans les Septante, le noin de Mitspah est quelquefois rendu par celui de o-iorcti, identique avec oxoirrj (par exemple, 1Il Reg., XV, 22). Les trois noms de Mitspah ou Maspha, Safa et Cha’afath <expriment donc la même idée et sont dérivés de la même racine. » Cependant, suivant l’illustre explorateur, il ne résulte pas de là que le plateau de Cha’afat soit le lieu de la rencontre d’Alexandre et du grand-prêtre des Juifs, ni le Sxorcdç ou Scopus dont parle l’historien juif et où plus tard Cestius Gallus et Titus assirent leur camp. Les deux endroits étaient voisins, leurs noms

Saulcy, à Clia’fat. Stanley, Sinaï and Palestine, in-8°, Londres, 1871, p. 226 ; de Saulcy, Voyage autour de la. Mer Morte et dans les terres bibliques, in-8°, Paris, 1883, t. î, p. 112-115.

Les contradicteurs plus récents de cette identification ne nient pas la similitude de son et de signification entre Maspha et Cha’afat, ils ne contestent pas non plus que plusieurs des indications bibliques ne puissent s’appliquer au site de cette localité ; ils font seulement observer, entre autres choses, que le récit de III Reg., xv, 22, ne permet guère de chercher Maspha au sud de Rama et que la tenue de l’assemblée dont il est parlé I Mach., iii, 46, à moins de 4 kilomètres de Jérusalem, dont la citadelle était alors aux mains des ennemis puissants et acharnés des Juifs fidèles, n’est guère vraisemblable ni même possible. Quant aux rapports d’analogie et de consonance dans les noms, ils n’impliquent pas nécessairement une relation de dérivation et la communauté d’origine n’entraîne pas l’identité numérique et individuelle. — Nonobstant ces difficultés, lo plus grand nombre des palestinologues continuent à défendre soit l’identification de Schwarz et de Robinsoo 847

MASPHA DE BENJAMIN

avec Néby-Samuîl, soit celle de Victor Guérin avec Cha’afat et à les considérer comme les plus probables. II. Histoire. — Maspha fut assignée par Josué à la tribu de Benjamin. Jos., xviii, 26. Ce fut l’endroit où s’assembla sous le grand-prêtre Phinées tout le peuple d’Israël, pour juger l’affaire de Gabaa, où la femme du lévite avait péri victime des odieuses brutalités des habitants. Quatre cent mille hommes, d’après le texte sacré, étaient présents. Les Benjamites furent sommés d’avoir à livrer les coupables, dont on voulait tirer un châtiment exemplaire. Toute la tribu refusa. La guerre lut déclarée et il fut décidé dans la même assemblée que l’on exterminerait ceux qui refuseraient leur concours. A Maspha aussi lesIsraélites s’engagèrent par serment à ne pas donner leurs filles en mariage aux Benjamites. Jud., xx, 1, 3 ; xxi, 5, 8. Ce dernier fait, qui ne dut avoir lieu qu’à la fin de la guerre, indique que le camp avait dû demeurer à Maspha tout le temps que -durèrent les négociations et la lutte. — Après la défaite des Israélites à Aphec et la mort du grand-prêtre Héli, Samuel convoqua une assemblée générale du peuple à Maspha, pour prier le Seigneur en faveur d’Israël. Le peuple puisa de l’eau pour la répandre devant Dieu, jeûna un jour et confessa ses infidélités. Samuel commença dès lors à exercer sa judicature. Les Philistins, apprenant la réunion de Maspha, se levèrent contre les Israélites. Ceux-ci effrayés conjurèrent Samuel de supplier le Seigneur de les délivrer de la main des Philistins. Samuel offrit en holocauste un jeune agneau. Le sacrifice n’était pas achevé et déjà les Philistins engageaient l’action avec l’armée d’Israël. « Mais le Seigneur tonna avec un grand éclat ce jour-là contre les Philistins et les épouvanta, et ils furent taillés en pièces. » Les Israélites demeurés à Maspha s’élancèrent de la ville à la poursuite de l’ennemi et en achevèrent la défaite en les poursuivant jusque sous Bethcar. En souvenir de la victoire, Samuel érigea une stèle entre Maspha et Sen. .. I Reg., vii, 5-12. Les Israélites, après la victoire de Maspha, rentrèrent en possession de leurs anciennes frontières et Samuel choisit cette localité pour l’une des trois où chaque année il venait juger Israël, x, 13, 16. — La dernière assemblée plénière tenue par Samuel le fut aussi à Maspha. C’était pour procéder à l’élection d’un roi, comme le peuple l’avait demandé. Le sort désigna Saùl. I Reg., x, 17-25. — Deux cent cinq ans environ après cette élection, Baasa, roi d’Israël, s’était emparé de Rama de Benjamin, située à 10 kilomètres seulement au nord de Jérusalem, la capitale de Juda, et l’avait fortifiée pour empêcher qui que ce soit de passer d’Israël en Juda et de Juda en Israël. Le roi de Juda Asa, ne se trouvant pas en mesure de repousser son voisin, sollicita l’intervention des Syriens de Damas. Le roi de cette ville, Bénadad, fit attaquer au nord le royaume d’Israël par ses généraux. Pour défendre sa frontière, Baasa dut porter ses forces de ce côté et fut ainsi contraint de vider Rama et le territoire de Juda envahi. Asa attendait cette diversion pour reprendre sa terre, il appela tout son peuple à son-aide, prit les matériaux réunis par Baasa à Rama, et à dessein de prévenir de nouveaux empiétements de la part de son voisin, il alla fortifier, à 3 kilomètres à l’est de Rama, Gabaa de Benjamin, qui commande le passage de Machmas, et Maspha, sans doute située au nord de Rama et qui pouvait garder la grande route qui venait d’Israël’en Juda. III Reg., xv, 17-22 ; II Par., xvi, 1-6. — Après la destruction de Jérusalem et dû royaume de Juda par les Chaldéens, vers 588 av. J.-C, le Juif Godolias fut établi, par le roi de Babylone, gouverneur du pays ; Maspha fut choisie pour être le siège de son administration. Le prophète Jérémie, laissé libre, vint s’établir près de Godolias et un grand nombre, de Juifs qui s’étaient enfuis dans les contrées des alentours revinrent les joindre. Le peuple aurait pu se reconstituer autour de Maspha,

si la jalousie méchante de Baalis, roi des Ammonites ; n’était venue faire avorter ce mouvement de restauration. L’Ammonite avait soudoyé Ismahel, fils de Nathanias, pour assassiner Godolias. Celui-ci averti ne voulut pas croire à une pareille trahison. Ismahel, qui était du sang royal de Juda, étant venu à Maspha avec un cortège de dix hommes et plusieurs grands de l’ancienne cour, fut invité à un festin. Pendant le repas, il se jeta avec ses complices sur Godolias et le tua. Il massacra ensuite tous les Juifs, les Chaldéens et les guerriers qui étaient réunis à Maspha autour de Godolias. Le lendemain de ce forfait, un groupe de quatre-vingts hommes partis de Sichem, Silo et Samarie et se rendant à la maison de Dieu où ils allaient offrir des dons, arrivaient à Maspha. Ils ignoraient ce qui s’était passé la veille. Ismahel sortit de la ville à leur rencontre et, feignant de s’affliger avec eux, il les invita à venir chez Godolias. Lors-’qu’ils furent arrivés au milieu de la ville, Ismahel et ses satellites les massacrèrent, épargnant seulement dix d’entre ces hommes, qui promettaient de mettre à leur disposition des trésors et des provisions [cachées. Les cadavres furent jetés dans la piscine creusée par le roi Asa, quand il fortifia la ville contre Baasa. Les débris du peuple, les filles de la maison royale et tout le mondedemeuré à Maspha et confié aux soins de Godolias par Nabuzardan, chef de l’armée babylonienne, furent réduits captifs par Ismahel qui se proposait de les livrer aux Ammonites. Johanan, fils de Carée, apprenant ces indignités, prit avec lui tous les hommes qu’il avait à sa disposition et avec les officiers de l’armée marcha contre Ismahel. Il le rencontra près des grandes eaux de Gabaon. Ismahel, avec huit de ses hommes seulement qui purent s’échapper, s’enfuit au pays d’Ammon, et Johanan ramena toute la foule qui avait été arrachéeà Maspha. Cependant, redoutant la colère des Chaldéens, et malgré les objurgations de Jérémie, Johanan, avec tout le peuple qu’il avait ramené à Maspha, prit la route de l’Egypte et entraîna le prophète à sa suite. Jer., xuxlii. — Maspha repeuplée, après le retour des Juifs de Babylone, contribua pour une part importante à la restauration des murs de Jérusalem entreprise par Néhémie. Jason le Méronatithe de Maspha, avec Melchias de Gabaon, construisit, près de la porte Ancienne, « letrône du gouverneur d’au delà l’Euphrate, » c’est-à-dire « le tribunal du gouverneur ï. II Esd., iii, 7. La porte de la Fontaine fut réédifiée par Sellum, fds de Cholhoza, chef du district de Maspha. Il l’acheva, la couvrit, , en établit les battants, les serrures et les verrous ; le’même bâtit [à côté] le mur de la piscine de Siloé près du jardin du roi, jusqu’aux degrés descendant de la cité de David, lbid., 15. Azer, fils de Josué, prince de Maspha, contruisit la seconde muraille près de la montée de l’arsenal, à l’angle, lbid., 19. — Mathâthias étant mort, son fils Judas Machabée prit le commandement de la petite armée qui devait combattre pour arracher la Judée et son peuple à la tyrannie des Gréco-Syriens infidèles. Avant d’entrer en campagne, il voulut se préparer à la guerre et y disposer les siens par un acte : solennel de religion. La ville sainte étant au pouvoir de l’ennemi, Judas, pour son dessein, choisit Maspha, . « parce qu’elle fut anciennement un lieu de prière en Israël. » Là, en face de Jérusalem et de son temple profané, Juda et ses guerriers consacrèrent un jour au jeûne, puis revêtus du cilice, la tête couverte de cendre, les habits déchirés, tenant en leurs mains les livres de^ la Loi et exposant devant eux les vêtements sacerdotaux, les prémices et les dîmes, présentant les Nazaréens : dont le temps était achevé, ils élevèrent la voix et imo-quèrent le ciel : « Que pouvons-nous faire, s’écrièrent-ils, de ces hommes, où devons-nous les conduire ?’Votre sanctuaire est foule aux pieds et souillé ; vos prêtres sont dans le deuil et dans l’abjection et les. nations se sont réunies contre nous pour achever notre.

perte : vous connaissez leur dessein. Comment pourrons-nous nous maintenir devant eux, si vous ne nous assistez, ô notre Dieu ? » Les trompettes retentirent alors avec éclat. Juda organisa sa petite armée, distribua les grades et les offices, remplit encore le précepte de la loi ordonnant d’inviter à se retirer ceux qui venaient de bâtir une maison neuve, de prendre une épouse, de planter des vignes, ou qui étaient trop peureux, et il leva le camp, pour se transporter avec ses hommes de Maspha au sud d’Emmaûs où il dressa son camp, attendant l’heure du combat (vers 168 av. J.-C). I Mach., iii, 46-57. Il n’est plus fait mention dès lors de Maspha ni dans la Bible, ni dans l’histoire. L. Heidet.

5. MASPHA, ville appelée « Maspha de Galaad », à cause de sa situation dans cette région. Son nom est transcrit Mao-uriipâ par les Septante. Jud., XI, Il et 34, et traduit ailleurs par le nom commun <rxomô. La Vulgate garde partout le nom propre de Maspha. Plusieurs fois le nom de Maspha semble plutôt désigner une contrée qu’une ville. Ainsi, Jud., xi, 29, Maspha de Galaad paraît assimilé au pays de Galaad et au territoire de Manassé que parcourut Jephté pour y lever des hommes afin de marcher contre les Ammonites ; c’est du pays aussi que la ville de Ramoth semble être appelée Ramoth de Maspha (Rdmaf hamMispéh). Jos., xiii, 26. Il est difficile de dire si le territoire a été ainsi appelé directement à cause du monument élevé par Jacob et avant l’établissement de la ville ou seulement après et à cause de celle-ci ; l’existence n’en est pas moins certaine et parait attestée, Jud., xi, 34, quand il est dit que Jephté retourna à Maspha, dans sa maison. Dans la Vulgate Maspha, écrit Masphé, est séparé de Ramoth et ainsi présenté comme une ville distincte ; c’est une erreur.

1° Situation et identification. — La position de Maspha est indiquée seulement d’une manière générale en Galaad, mais son nom dit assez qu’elle 1& doit à la proximité du monument dressé par Jacob. Il résulte de là qu’elle ne dut commencer à se former qu’après le passage de Jacob, et ses premiers habitants durent être attirés par la présence du sanctuaire. Cependant, d’après certains critiques, Maspha fut appelée ainsi à cause de sa situation. Des exégètes regardent comme identiques Maspha de Galaad et Ramoth-Maspha ou Ramath de Galaad et identifient Ramoth avec le Sait actuel, ils attribuent par conséquent le même site à Maspha, qu’ils placent ainsi au sud du Nahar-Zerqâ. l’ancien Jaboc. Cf. Jos. Schwarz, Tebuoth lia-Arez, nouvelle édit., Jérusalem, 1900, p. 269-270 ; Rich. von Riess, Biblische Géographie, Fribourg-en-Brisgau, 1872, p. 64, 79, et Bibel-Allas, ibid, , 1882, p. 20.

La Bible indiquant le monument dé Jacob au nord du fleuve Jaboc et avant Mahanaïm empêche d’attribuer une autre situation à Maspha. S’il fallait localiser Ramoth au sud’du Zergâ, il faudrait conclure que Maspha et Ramath sont deux villes distinctes. La plupart des exégètes soutiennent d’ailleurs avec raison cette distinction. Voir Ramoth-Maspha et Ramoth en Galaad. — Soûf est la localité qui depuis longtemps a le plus souvent été proposée pour être identifiée avec Maspha. C’est un grand village bâti sur une colline rocheuse s’avançant en promontoire des hautes njDn> tagnes du’Adjloûn, au-dessus de la vallée de Djéras". Il est à cinq kilomètres au nord-est de la ville de ce nom, à six kilomètres vers l’est de’Adjloûn et à vingt-cinq kilomètres au sud à’eUlJioson. La population du village est d’environ huit cents habitants dont un tiers sont chrétiens, parmi lesquels quelques-uns catholiques. Une fontaine abondante jaillit sous le village, à l’est, pour former le cours du Nahar-Djéras. Les collines des alentours étaient naguère ombragées par des bois de grands chênes et d’autres essences ; depuis quelques années des plantations de vigne et de figuiers prennent

leur place. Soûf ou Sûf peut paraître un nom dérivé de Maspha, par l’élimination du préfixe M et de la voyelle finale ; il semble procéder, du reste, de la même racine et peut avoir une signification analogue. Le nom de Se6eî|C ou Sévée, donné par Josèphe, Ant. jud., V, vii, 12, au lieu de Maspha à la patrie de Jephté, n’est pas de nature à infirmer cette identification. La situation du village au nord du Zergâ l’ancien Jaboc, presque au commencement, du côté de l’est, des montagnes de Galaad, au sud-est de Mahnéh identifiée avec Mahanaïm, n’est pas en dehors des données de la Bible.

Longtemps les palestinologues ont admis cette indentification comme probable, surtout à défaut d’une autre plus certaine. Cf. Armstrong, Conder et Wilson, Names and Places in the Old Testament, Londres, 1887, ’p. 127 ; Conder, Heth and Moab, Londres, 1889, p. 181 ; Oliphant, Land of Galaad, in-8°, Edimbourg et Londres, 1880, p. 209-218 ; Buhl, Géographie des Allen Palâstina, Fribourg et Leipzig, 1896, p. 261-262. — Cependant Selah Merill, laissant Soûf, a placé Maspha au Qala’t er-Babad, immense château, en grande partie conservé, à deux kilomètres à l’ouest du village de’Adjloûn et à cinq vers le sud-est de Mahnéh. Dressé au sommet d’une colline de mille mètres d’altitude au-dessus de la mer Méditerranée, dominant la large et profonde vallée de’Adjloûn et d’où le regard embrasse non seulement l’ancien pays de Galaad dans presque toute son étendue, mais se porte encore au delà de la vallée du Jourdan sur la Judée, la Samarie et la Galilée, nulle forteresse, nul endroit ne justifierait mieux le nom de Maspha. Seulement le Rabad est un édifice tout entier de la fin du xiie siècle, où l’on ne retrouve aucune trace d’antiquité, trop au cœur des montagnes de Galaad pour répondre au récit de la Bible. Aussi cette opinion a-t-elle recueilli peu d’adhérents. S. Merrill, East of Jordan, p. 365-374 ; cf. Buhl, Géographie, loc. cit., p. 262 ; — Le D r Gotl. Schumacher travaillant, en 1896, au levé de la carte du sud de’Adjloûn, a cru reconnaître le nom de Maspha dans celui de Misîbta qui lui était désigné par le mudîr de "Adjloûn comme celui d’une ruine antique et considérable se trouvant entre Soûf et Djéras. Mittheilungenund Nachrichten des deutschen Palàtina Vereins, 1899, p. 1-2. Wellhausen y vit le nom de massêbah, mais non celui de Maspha ibid. p. 41. L’année suivante, le D r Schumacher abandonnait la première identification, parce que le lieu lui paraissait trop en contre-bas pour avoir pu mériter le nom de Mispéh ; il lui préférait le Djebel Menârah ou « le mont Minaret », situé directement au sud de Djéras, non loin de Misibfad dont le nom est l’analogue de Mispéh. De son sommet, élevé de plus de mille mètres au-dessus de la mer Méditerranée, le regard embrasse un panorama beaucoup plus étendu que du haut du Qal’at er-Kabad. À l’ouest et au nord-ouest s’aperçoivent les hauteurs de Djebel Nablûs et des monts de Safed ; à l’est au delà des collines les hauts plateaux du Haurân et du Jfamâd, les pointes coniques du Djebel ed-Druz, et au sud l’œil peut suivre le cours sinueux de la Zerqâ tout entière et au delà contemple toute la partie septentrionale des monts de la Belqâ. Ibid., p. 66. En poursuivant ses travaux pour l’achèvement de la carte du sud de’Adjloûn, M. Schumacher a rencontré au nord-est de Djéras, dans une région encore en partie boisée, un Tell-Masfah qui domine toutes les hauteurs des alentours. On y voit des dolmens et plusieurs autels antiques taillés dans le rocher. Les habitants du pays considèrent le tell comme un ma’bed, « sanctuaire » ou « lieu de culte ». Des Bédouins m’ont indiqué l’endroit à quatre ou cinq heures au sud d’el-Hoson du’Adjloûn, mais je n’ai pu le visiter. Le nom de Masfah, absolument identique au nom de la célèbre localité biblique, dans la région même où nous amène le récit sacré, ne permet pas de douter qu’il ne se soit maintenu à la même place dès les temps les plus reculés.

2° Histoire. — Maspha, au temps les plus recalés, à cause sans doute de ses souvenirs et peut-être aussi à cause de son importance, semble avoir été en quelque sorte la capitale du pays de Galaad et le lieu des grandes réunions du peuple de la Transjordane. Quand les Ammonites envahirent la contrée occupée par les Israélites, le peuple de Galaad vint camper à Maspha, et c’est là que les chefs se réunirent pour délibérer sur ce qu’il y avait à faire. Jud., x, 17. Ayant appelé Jephté pour lui proposer de se mettre à la tête de l’armée, c’est à Maspha qu’il posa ses conditions et reçut la promesse d’être établi le chef du peuple. Jud., xi, 11. Dès ce moment le nouveau juge d’Israël paraît s’être fixé à Maspha. Il entre en pourparlers avec le roi des Ammonites pour lui faire évacuer le pays. Celui-ci s’y étant refusé, Jephté, rempli de l’esprit de Dieu, parcourt la contrée pour lever une armée. Maspha paraît avoir été le lieu de ralliement, car c’est de là que Jephté se mit en marche pour aller attaquer les Ammonites. Jud., xi, 29. Après sa victoire complète sur l’ennemi, Jephté reprit le chemin de Maspha où était sa demeure. Jud., xi, 34. On sait comment la fille de Jephté ignorant le vœu imprudent de son père sortit de la ville avec ses compagnes, pour aller à sa rencontre, et changea en un jour de deuil un jour de triomphe. Jud, , xi, 34-40. « Jephté le Galaadite jugea Israël six ans, mourut et fut enseveli en sa ville de Galaad, » ajoute son historien. Jud., xil, 7. En disant sa ville, il semble désigner la même localité où Jephté avait sa maison, bien que le texte l’appelle Galaad. Il faut probablement lire, il mourut en sa ville en Galaad. La préposition a, be, « en, » a pu facilement disparaître par la négligence d’un copiste. Au temps du roi d’Israël Jéroboam II (824-783 ou 783-743), .Maspha, devenue un centre d’idolâtrie et de crimes, est menacée par le prophète Osée des vengeances du Seigneur. Ose., v, 1 (hébreu) ; vi, 8. Cf. Maspha 1, col. 833 ; Galaad 5, t. iii, col. 47. Maspha a été ruinée et son nom s’est conservé seulement dans quelques familles d’Arabes bédouins. Maspha semble avoir appartenu à la tribu, de Gad, comme l’indiquent Eusèbe et saint Jérôme, Onomastic, édit. Larsow et Parthey, Berlin, 1862, p. 283, 285. En en faisant une ville lévitique, ils paraissent la confondre avec Ramoth de Galaad.

L. Heidet.

6. MASPHA, ville de Moab où David persécuté par Saùl conduisit ses parents pour les mettre à l’abri des colères du roi. I Reg., xxii, 3-4 : « Et David partit delà (Odollam), dit le récit sacré, pour Maspha qui est en Moab, et il dit au roi de Moab : Que mon père et ma mère, je vous prie, demeurent avec vous, jusqu’à ce que je sache ce que Dieu fera à mon égard. Et il les laissa auprès du roi de Moab et ils demeurèrent avec lui, tout le temps qu’il demeura dans la forteresse. » Certains exégètes ont trouvé ces dernières paroles équivoques et ont cru pouvoir traduire ; ils demeurèrent avec David tout le temps qu’il demeura dans la forteresse d’Odollam. Cf. Vigouroux, La Sainte Bible polyglotte, t. ii, p. 405, note 4. L’interprétation qui paraît indiquée par la phrase elle-même et le contexte est la suivante : Et il les laissa auprès du roi de Moab, tout le temps que David dut demeurer dans la forteresse, c’est-à-dire à Odollam ou dans un lieu d’un accès difficile pour échapper à Saûl. C’est l’interprétation la plus généralement adoptée. — Quelle que soit d’ailleurs la signification de la fin du passage, la ville où David mena ses parents, d’après ses paroles, paraît être celle même où résidait le roi de Moab, probablement sa capitale. De là plusieurs interprètes ont cru que Maspha et Moab n’étaient pas différentes de Kir Moab, aujourd’hui le Kérak, la plus forte des villes de l’ancien pays de Moab, à l’est de la mer Morte et située sur une montagne élevée d’où le regard embrasse tout le pays, la mer Morte dans presque toute. son étendue et jusqu’aux montagnes de Juda. Voir Km

Moab, t. iii, col. 1895-1907. Maspha serait ici l’équivalent de qîr ou de Kérak, « forteresse, donjon. » Cf. Gesenius, Thésaurus, p. 1179 ; J. Schwarz, Tebouoth ha-Arez, nouv. édit., Jérusalem, 1900, p. 254. L’hypothèse n’est pas invraisemblable, mais peut s’appliquer, de la même manière à toute autre ville importante où le roi Moab aurait eu sa résidence, comme Rabboth-Moab, Ar ou Ar-Moab, aujourd’hui Habba ou quelque autre. Cf. Ar, Ar-Moab, t. i, col. 814-817. Des critiques modernes attribuent le nom de Maspha de Moab à une erreur du copiste : il faudrait lire selon eux Misrephoth de Maon, T. K. Cheyne, Encyclopecdia biblica, Londres, art. Hareth, t. ii, 1901, col. 1963, mais cette hypothèse est tout à fait gratuite. L. Heidet.

7. MASPHA, lieu élevé du désert de Juda d’où Josaphat, avec son armée, vit toute couverte de leurs cadavres la région où s’étaient entre-égorgés ses ennemis, les Ammonites, les Moabites et les Iduméens. II Par., xx, 24. Le texte hébreu a : ham-Mispéh le-midbar, le maspha ou « l’observatoire du désert » ; les Septante ont traduit l’expression par le nom commun 7| mcomâ et la Vulgate de même par Spécula. Lès autres versions font de même. Il ne semble pas d’ailleurs qu’il ait existé une, ville de ce nom dans le désert ; il pourrait s’y rencontrer cependant une tour, ou une maison de garde. L’endroit se trouvait au sud ou au sud-est du désert de Thecué d’où venait le roi Josaphat et à l’ouest de la mer Morle, mais il n’a pu être jusqu’ici déterminé d’une manière précise. Voir Josapha.t, t. iii, col. 1649.

L. Heidet.

    1. MASPHATH##

MASPHATH, orthographe, dans la Vulgate, du nom de lieu qu’elle écrit ailleurs Maspha, Masphe ou même Masepha et Mesphe. Voir ces divers noms. La forme Masphath se trouve dans le premier livre des Rois et dans Jérémie et désigne toujours Maspha de Benjamin. I Reg., vii, 5, 6, 7, 11, 12, 16 ; Jer., xl, 6, 8, 10, 12, 13, 15 ; xli, 1, 3, 6, 10, 14, 16. Dans I Sam. (I Reg.), vii, 5, 6 et 7, le texte hébreu porte ham-Mïspdtdh, avec le hé locatif, ce qui a amené le traducteur à écrire Masphath, et il a eonservé cette orthographe pour l’uniformité, aux ꝟ. 11, 12, 16 du même chapitre, quoique le texte original ait dans ces passages hani-Mispch. Il a fait de même, pour les mêmes raisons, dans Jérémie, où on lit en hébreu, xl, 6, 8, 10, 12, 13 ; xli, 1, kam-Mispâfâh, et XL, 15 ; xli, 3, 6, 10, 14, 16, ham-Mispéh.

    1. MASPHE##

MASPHE, orthographe, dans la Vulgate, du nom de lieu écrit ailleurs ordinairement Maspha. Dans Josué, xi, 8, campus Masphe est le territoire appelé terra Maspha au ji. 3 du même chapitre. Voir Maspha 2, col. 834. — Jos., xiii, 26, la ville nommée Masphe est Maspha de Galaad. Voir Maspha 5, col. 849.

M ASRÉCA (hébreu : Maèrêqah ; Septante : Mas<r£y.xà, MoKiExxà), ville inconnue, située probablement en Idumée. Elle est nommée dans la liste des rois d’Idumée, où nous lisons qu’Adad, fils de Badad, étant mort, Semla de Masréca régna à sa place. Gen., xxxvi, 36 ; I Par., i, 47. Eusèbe et saint Jérôme, Onomast., 1862, p. 280, 281, disent que c’est une ville d’Idumée, dans la Gébalène, c’est-à-dire dans [la partie septentrionale de l’Idumée. On peut interpréter le nom de Masréca par « vignobles ».

    1. MASSA##

MASSA (hébreu : Maisa’, « élévation » ), nom d’un fils d’Ismaël, et, d’après divers interprètes, d’un pays.

1. MASSA (Septante : Mocaor, ), le septième des fils d’Ismaël. Gen., xxv, 14 ; I Par., i, 30. On a rapproché son nom de celui de la tribu arabe des Mauavof, Ptolémée, v, 19, 2, qui habitaient le désert d’Arabie, du côté de la Babylonie, et des Masmi, Pline, H. N., vi, 30, tribu nomade de la Mésopotamie, et l’on admet aujourd’hui que cette tribu est celle qui est mentionnée dans les inscriptions cunéiformes. Voir Arabie, t. i, col. 863. Les Ma-as-’a-ai sont énumérés dans une liste de peuples apportant leur tribut à Théglathphalasar II, roi de Ninive, immédiatement avant les gens de Théma et de Saba. Western Asiatic Inscriptions, t. iii, pi. 10, col. 7, lig. 38 ; E. Schrader, Keilinschriften und Geschichtforschung, 1878, p. 262 ; Frd. Delitzsch, Wo lag das Parodies, p. 301. On retrouve aussi leur nom sous la forme MaS-’a— ai, dans une tablette du temps du roi Assurbanipal. Western Asiatic Inscriptions, t. iv, pi. 56, 1. Il y est raconté qu’un certain Akamaru, fils d’Ammêtâ, de la tribu des MaS-’a-ai, a fait une razzia chez les Nebaioth et qu’il en a tué tous les hommes, excepté un seul qui est allé porter au roi la nouvelle. Frd. Delitzsch, Paradies, p. 302 ; G. Smith, History of Assurbanipal, p. 296-298 ; A. Smith, Keilschrifttexte Asurbanipal ? *. H, p. 36-38. ia tribu de Massa a donc très probablement habité l’Ara ! bie septentrionale. Ed. Glaser, Skizze der Geschichte und Géographie Arabiens, t. ii, 1890, p. 441, identifie Massa avec Messa et Mes. Voir Mes et Messa.

2. MASSA, nom du pays dont Lamuel aurait été roi, d’après un certain nombre d’exégètes modernes. Prov., xxxi, 1. Voir Lamuel, col. 62. Les Septante, Prov., xxiv, 69, ont traduit le mot massa’par —/pr]|iaTia1j.ôç, « réponse divine, oracle, » et la Vulgate par vitio. Hitzig, dans Zeller, Theologische Jahrbûcher, 1844, p. 269-305, crut reconnaître des noms propres là où les "versions anciennes avaient vu des noms communs et au lieu de traduire : « Paroles de Lamuel, roi. Vision, » il traduisit : « Paroles de Lamuel, roi de Massa. » Son opinion a trouvé beaucoup d’adhérents. Voir Kaulen, Lamuel, dans Wetzer et Welte, Kirchenlexikon, 2e édit., t. vii, 1891, col. 1372. D’après cette explication, Lamuel était un roi de la tribu arabe de Massa, dont il est parlé dans Massa 1, ou d’un autre pays inconnu, mais ou ne peut rien affirmer avec certitude. Voir Cr. H. Toy, Commentary on the Proverbs, in-8°, Edimbourg, 1899, p. 538-539. Plusieurs commentateurs croient qu’Agur, l’auteur des Proverbes, xxx, 1-33, était également de Massa. Voir Agur, t. i, col. 288.

MASSAH (hébreu : Massdh, traduit dans les Septante par rUtpaa[iA ; , Ilsfpa, et dans la Vulgate par Tentatio), nom donné à une localité sise à Raphidim, où les Israélites « tentèrent (nassôf, mirent à l’épreuve) Jéhovah, en disant : Jéhovah est-il au milieu de nous ou n’y est-il pas ? » Elle fut aussi appelée Meribah qurgium), « à cause de la querelle ou révolte (rib) des enfants d’Israël qui s’en étaient pris à Dieu et avaient murmuré contre lui, parce qu’ils souffraient du manque d’eau. » Exod., xvii, 7. Cet événement est rappelé dans Deut, , VI, 16 ; ix, 22 ; xxxiii, 8 ; Ps. xcv, 8 (texte hébreu). Cf. aussi Heb., iii, 8, qui cite le Psaume. Massdh se lit dans tous ces passages ; Meribâh, en parallélisme avec Massdh, seulement dans Deut., xxxiii, 8, et Ps. xcv, 8. La Vulgate traduit toujours le premier nom par Tentatio, tandis que le second, omis dans Exod., xvii, 7, est rendu par Contradictio, Deut., xxxiii, 8, et par Irritatio, Ps. xciv, 8, (Exacerbatio dans Heb., iii, 8). Sur un autre Meribâfc ou Mê Meribâh, voir Eaux de contradiction, t. ri, col. 1523.

Le récit de l’Exode suppose que les Hébreux s’attendaient à trouver des sources à Raphidim. Quand on y fut arrivé, l’eau sur laquelle on avait compté manqua. Les Israélites, qui pendant les trois jours précédents n’en avaient eu que la quantité nécessaire pour étancher leur soif, éclatèrent en murmures. Exod., xvii, 2-4. Dieu ordonna alors à Moïse de frapper le rocher d’Horeb et il en jaillit de l’eau en abondance. Ifôrêb signifie sécheresse, lieu aride et sans eau ». Jud., vi, 37, etc.

Les savants anglais de VOrdnance Survey qui’ont exploré le Sinaï en 1868 distinguent le lieu de ce nom, dont il est question dans ce récit, du mont Horeb où Moïse avait eu la vision du buisson ardent. Quant au rocher dont parle l’Exode, les voyageurs au Sinaï se sont préoccupés de bonne heure de le retrouver. Les moines grecs du couvent de Samte-Catherine croient le posséder dans leur voisinage et ils le montrent aux pèlerins qui l’ont souvent décrit. Mais cette identification est inadmissible, parce que ce rocher se trouve dans l’ouadi el-Ledja, et que l’événement raconté dans les Livres Saints se passa dans l’ouadi Feiran (Pharan), comme l’atteste une tradition antique que nous rencontrons dans Eusèbe et dans saint Jérôme, au IVe siècle, Onomastic, édit. Larsow et Parthey, 1862, p. 310, 311, et comme il résulte du texte même de l’Exode où nous lisons, xvii, 1, que le miracle eut lieu à Raphidim. Or, Raphidim était dans le désert de Pharan. Voir Raphidim. Une tradition locale identifie Massah avec une des fontaines de l’ouadi Feiran. « Une des légendes les plus plausibles et les plus intéressantes relatives à l’Exode, dit M. H. S. Palmer, Sinai, in-16, Londres (1878), p. 7879, est celle qui se rattache à un lieu de l’ouadi Feiran appelé Hésy el-Khattalin, ou la Source cachée des écrivains. C’est, d’après les Bédouins, l’endroit où Moïse frappa le rocher pour donner de l’eau à son peuple souffrant de la soif. Il faut remarquer ici que les Bédouins désignent souvent Moïse sous le nom d’écrivain du livre de la Loi. La coutume ancienne, qui date, croyons-nous, de temps immémorial et qui consiste en ce que chaque passant dépose une petite pierre, dans les lieux célèbres par quelque légende, pour marquer qu’il n’oublie ni le lieu ni la tradition qui y est attachée, cette coutume est encore observée par les Bédouins quand ils passent à Hésy el-Kkattatin. Toutes les pierres et les rochers du voisinage qui s’y prêtent sont couverts de monceaux de petits cailloux ainsi déposés. » Les Arabes prétendent imiter ainsi l’exemple des Israélites. Voir aussi Ed. H. Palmer, The Désert of the Exodus, 1871, t. i, p. 159. Si l’identification n’est pas pour cela certaine, elle ne manque pas néanmoins de quelque probabilité.

F. VlGODRODX.

MASSÊBAH, nom hébreu (massêbâh) d’un cippe, stèle ou pierre dressée, de nâsab, « être droit, debout. » Il se dit spécialement d’un cippe idolâtrique. Voir Idole, i, 16°, t. iii, col. 819.

MASSL Franz Xaver, prêtre catholique allemand, né le 8 décembre 1800 à Straubing, mort le 3 mars 1852 à Passau. Il étudia la théologie à Ratisbonne, où il fut ordonné prêtre en 1825. Après avoir rempli des fonctions ecclésiastiques dans diverses paroisses, il devint en 1846 curé de Passau. On a de lui, outre de nombreux volumes de sermons, une Erklârung der heiligen Schriften Neuen Testaments nach den beràhmten und bewâhrten âltern und neuen Schriftauslegem, 3 in-8°, Sraubing, 1831-1850. Les cinq premiers volumes ont eu trois éditions. Massl a pris pour base de son commentaire, qui est surtout pratique et pieux, Le Maistre de Sacy. Voir Reusch, dans Allgemeine Deutsche Biographie, t. xx, 1884, p. 568.

MASSORE, ensemble de travaux des docteurs juifs, portant sur la lettre même du texte hébreu de la Bible.

Le mot massore, massôrâh, vient probablement de màsâr, « transmettre oralement ; » il signifie alors « tradition ». Quelques-uns le tirent de’âsdr, « lier, » d’où le mot màsorét, employé par Ézéchiel, xx, 37, avec le sens de « lien ». D’après cette étymologie, la massore serait le lien qui fixe l’immutabilité du texte. Cf. Bâcher, dans The Jewish Quarterly Review, t. iii, 1891, p. 785— ^ 790. Le premier sens est plus généralement accepté. Le mot massôrâh, ou masôrâh, n’en est pas moins de formation hybride, de sorte que c’est surtout à l’usage qu’il, convient d’en demander l’origine et le sens. Cf. Schûrer, Geschichte des jûdischen Volkes im ZeitJ. C, Leipzig, t. ii, 1898, p. 328.

I. Les massorètes.

1° Leur époque.

Au xii 6 siècle, Abenesra divisait en cinq classes les docteurs juifs qui, jusqu’à son temps, avaient travaillé sur la Bible. Il distinguait successivement : 1° les docteurs de la grande Synagogue et les scribes, jusqu’à l’an 70 ; 2° les docteurs de la Mischna ; 3° les docteurs de la Gémara ou commentaire de la Mischna ; 4° les docteurs de la massore ; 5° enfin les grammairiens. Cf. P. Morin, Exercitationes biblicse, ii, 12, 7, Paris, 1669, p. 411. Les docteurs juifs commencèrent en effet par s’occuper de la Bible au point de vue de la doctrine et de l’histoire. C’est seulement quand ils eurent fini de consigner par écrit les traditions et les explications des anciens à ce sujet, qu’ils passèrent à un autre ordre d’études. Le Talmud étant terminé vers le milieu du Ve siècle, les massorètes se mirent à l’œuvre et achevèrent leur tâche vers le début du vme siècle. Toutefois ces limites comportent une assez grande latitude ; car il est certain que l’œuvre des massorètes englobe des travaux dus aux docteurs qui les avaient précédés, et qu’à son tour elle fut remaniée et peut-être complétée par les docteurs de la période grammaticale.

2° Leurs écoles.

La tradition attribue la massore aux docteurs des écoles de Tibériade. Bien que contestée par quelques-uns, cette indication traditionnelle est communément acceptée. Après l’achèvement du Talmud et à l’époque de la plus grande prospérité des écoles de Babylone, celles de Palestine et très particulièrement celles de Tibériade consacrèrent tous leurs efforts à la conservation littérale des textes sacrés. Ce sont ces dernières qui exécutèrent la presque totalité du travail massorétique, sans pourtant que les noms des auteurs successifs aient été conservés. Ils ne sont connus que sous le nom général de ba’àlê masorâh ou massoréf, « maîtres de la massore. »

3° Leur langue.

A l’époque massorétique, deux langues étaient en usage dans les écoles palestiniennes. La première était le néo-hébreu, provenant de l’hébreu biblique, enrichi de mots nouveaux, de dérivés des anciens radicaux, de conjugaisons plus nombreuses et d’une syntaxe plus complexe, pour permettre à la langue sacrée de se plier à l’expression d’idées abstraites et didactiques et de donner satisfaction aux exigences intellectuelles d’écoles en contact avec le monde grec. L’autre langue était l’araméen, se divisant en trois dialectes : le judéen ou chaldéen de la Bible, qui se retrouve dans les Targums d’Onkélos et de Jonathan ; le galiléen, en usage dans les parties araméennes du Talmud de Jérusalem, et le babylonien, en usage dans les parties araméennes du Talmud de Babylone. Le dialecte galiléen est le seul des trois qui soit habituellement employé dans la massore. Cf. Dalman, Gràmmatik des jùdUch-palâstinischen Aramâisch, Leipzig, 1894, p. 33-40. Le néo-hébreu sert à la rédaction d’un certain nombre de notes, spécialement de celles qui se rapportent au nombre des lettres, etc. ; l’araméen sert à énumérer les keri et les chetib, etc. Dans certaines notes, les deux langues sont mélangées ; dans d’autres, les abréviations sont telles qu’on ne peut discerner en quelle langue elles sont écrites. Il est probable que le mélange du néo-hébreu et de l’araméen dans les mêmes notes accuse des révisions ou des additions postérieures à la rédaction primitive. Cf. Hyvernat, Petite introduction à Tétude de la Massore, dans la Revue biblique, Paris, 1903, p. 532539.

II. Les sources de la massore.

Comme son nom l’indique, la massore est avant tout traditionnelle. Les massorètes s’appliquent particulièrement à fixer les observations littérales que les docteurs se sont transmises oralement dans la suite des temps. Voilà pourquoi cer tains rabbins ont fait remonter la massore jusqu’à Esdras, ce qui ne peut être vrai que dans un sens très restreint. Il est indubitable qu’avant l’introduction des signes diacritiques dans les textes hébraïques, les docteurs devaient faire connaître à leurs disciples les principes qui réglaient la lecture de ces textes. Cet enseignement oral doit même remonter jusqu’aux plus anciens temps de l’histoire des Hébreux. Mais il ne constituait pas la massore, il en préparait seulement les éléments. Cet enseignement se développa peu à peu. Il ne prit d’extension sérieuse que quand, sous l’influence pharisaïque, on commença à attacher une importance, trop souvent excessive, à la lettre même du texte sacré. Des signes particuliers furent introduits dans la transcription des textes. La « petite corne », xepaîa, apex, dont parle Notre-Seigneur à propos de la Loi, Matth., v, 18 ; Luc, xvi, 17, ne désigne probablement que le jambage recourbé de certaines lettres, et non un signe diacritique. Mais dès l’époque de la Mischna, quelques signes existaient déjà. Il n’en est fait pourtant que de très rares mentions. Pesachim, ix, 2, sur Num., ix, 10, et Sota, v, 5, sur Job, xiii, 15. Sur Gen., xix, 35, saint Jérôme, Qumst. hebraic. in Gen., t. xxiii, col. 966, dit que les Juifg mettent un point au-dessus pour marquer que la chose est incroyable. La massore indique en effet un point sur la vav du mot ûbequmâh, « et elle se leva. » Le Talmud mentionne les points placés au-dessus de quinze mots, pour rappeler certaines explications mystérieuses qui se transmettaient oralement, la forme majuscule donnée à certaines lettres, et la forme minuscule donnée à d’autres, ainsi que plusieurs autres détails qu’on retrouve dans l’œuvre des massorètes. Ces derniers, en beaucoup de cas, n’ont donc fait que reproduire des indications fournies par une tradition antérieure, remontant à une époque plus ou moins lointaine. Il faut en dire autant du keri et da chethîb, qui n’est que la constatation de leçons adoptées par les anciens docteurs. Enfin la notation des voyelles, qui constitue la partie la plus importante de leur œuvre, reposait naturellement sur la prononciation traditionnelle de l’hébreu, comme on peut s’en rendre compte en comparant leur texte à points-voyelles avec la reproduction de ce texte en lettres grecques, qui se trouve dans les Hexaples d’Origène, et çà et là dans les transcriptions des Pères. Ce qu’on doit aux massorètes, c’est donc surtout la consignation par. écrit de remarques qui avaient été faites antérieurement sur la lettre du texte sacré, et auxquelles ils ont dû parfois ajouter les leurs.

III. L’œuvre massorétique.

1° Sa disposition graphique.

Avant l’invention de l’imprimerie, les annotations massorétiques ne pouvaient pas trouver place en marge des, manuscrits bibliques. Elles étaient consignées sur des feuillets détachés, qui s’enrichissaient continuellement d’additions et finirent bientôt par réclamer plus de place que le texte lui-même. Plus tard, pour faciliter la diffusion de l’œuvre massorétique, les rabbins en écrivirent les remarques les plus importantes sur les feuillets mêmes des Bibles manuscrites. Ces annotations occupaient les marges du texte et l’espace laissé libre en haut et en bas du feuillet. Mais de cette disposition résultait une très grande confusion. On peut voir, dans la Revue biblique, 1902, p. 551, la reproduction d’un feuillet massorétique tiré d’un manuscrit du IXe siècle, qui est conservé au British Muséum. La première Bible massorétique fut imprimée à Venise par Bomberg, avec la collaboration du juif Jacob Ben Chayim, sous le titre de Biblia magna Rabbinica, 1525. Ce qu’on y a conservé de la compilation massorétique a été disposé dan » un ordre adopté depuis dans les publications postérieures. On distingue en conséquence la massore en deux parties, l’une textuelle et l’autise finale. Cette dernière est disposée par ordre alphabétique à la fin de chaque livre. Elle se compose de remarques qui, à raison de leur étendue, n’auraient pu trouver place dans les marges du texte. La

.massore textuelle se divise elle-même en petite et en grande. La petite massore est écrite dans les marges intérieures des colonnes du texte, à droite et à la hauteur « lu mot qu’elle vise. Ce mot est généralement indiqué par un petit cercle placé au-dessus de lui ; si la remarque se rapporte à deux mots, le petit cercle est entre ces deux mots. La grande massore est disposée en haut de la page, « n bas, et dans la marge latérale, si celle-ci est restée libre. Chaque note de la grande massore est séparée par <leux points. La grande massore contient ce que n’aurait pu dire la petite. Cette dernière est représentée par des abréviations dont il faut avoir la clef. En voici quelques « xemples : "j pour n>S, terme araméen correspondant à l’hébreu lo’yês, « n’étant plus » ailleurs, ou ânxt tel * (livov ; on pour l’hébreu fyâsêr, o défectif ; » "jo pou r mâle’, « c plein ; » a, ; , i, etc., lettres marquant le nombr de fois, deux, trois, quatre, etc., que le mot se trouvé dans la Bible ; ptD, s signe, » indiquant que les mots visés sont l’objet d’une note de la grande massore. etc. Le texte biblique apparaît ainsi entouré de toutes parts par celui de la massore. C’est probablement ce qui a suggéré l’idée de regarder celle-ci comme le « lien » qui enserre le texte, et même de l’appeler siydg lat-(ôrdh’  « haie autour de la Loi, » bien que la mâsorét désignée ainsi par R. Akiba, Aboth, iii, 13, soit la tradition halachite, voir Midrasch, et non celle des massorètes.

2° Notes sur les versets. — Le verset ou pàsûq, du chaldéen pesaq, « couper, » est déjà mentionné dans la Mischna. Les massorètes en marquèrent la fin par deux points : appelés, sof pàsûq, « fin du verset. » La division du texte par chapitres leur est postérieure. Voir Chapitres de la Bible, t. ii, col. 559. Mais longtemps avant eux le texte du Pentateuque avait été partagé en 154 sections, pour les lectures du sabbat pendant trois ans. Consacrant un usage différent, qui tendait déjà à prévaloir de leur temps, ils ramenèrent le nombre des sections à 54, de manière que le Pentateuque pût être lu en une année. Cf. Scbûrer, Gesckichte desjiidischen Volkes im Zeît. J. C, Leipzig, t. ii, 1898, p. 455, note 101. Chaque section ou pdrâsdh est ouverte, pefwfyâk, ou fermée, setûmâh, suivant que, pour commencer, elle laisse inachevée ou ouverte la dernière ligne de la section précédente, ou bien n’en est séparée que par un petit espace sur la même ligne. La section est elle-même subdivisée en un plus ou moins grand nombre de sections plus courtes. Les massorètes notèrent le commencement des sections ouvertes par sas, et celui des sections fermées par ddd ; les lettres s ou D marquèrent les subdivisions. Quand on ajouta à la lecture de la Loi celle des prophètes, la section prophétique fut nommée haftdrdh, de fâtdr, « congédier, » parce qu’après cette lecture on congédiait l’assemblée. Les massorètes indiquèrent ces sections prophétiques, non dans le texte même, comme pour la Loi, mais au-dessous du texte. Ces diverses indications sont reproduites dans nos Bibles hébraïques ; celles qui concernent les prophètes sont rejetées à la fin. — Les massorètes comptèrent les versets de chaque livre et inscrivirent le total à la fin du livre en lettres numérales et au moyen d’un mot dont les lettres reproduisaient le total indiqué. Ils notèrent le verset qui tient le milieu de chaque livre, Gen., xxvii, 40 ; Exod., xxii^ 28 ; Lev., xv, 7 ; Num., xvii, 5 ; Deut., xvii, 10, etc/Le total des versets est de 23206. Un verset, Jer., xxi, 7, a 42 mots et 160 lettres ; trois versets ont chacun 80 lettres ; 28 versets ou seulement 25 ont une première moitié dont le sens demeure imparfait ; dans quatre versets, Gen., xviii, 5 ; xxiv, 55 ; Num., xii, 14 ; Ps. xxxvi, 7, il y a un vav qui a été ajouté par la faute des scribes et dont il ne faut pas tenir compte ; la Loi n’a que deux versets commençant par la lettre D. Gen., xxxii, 14 ; Num., xxix, 33, etc. Dans nos Bibles imprimées, le dernier verset d’Isaïe, des Lamentations, de Malachie et

de l’Écclésiaste, est suivi de la répétition au moins par-, tielle du verset précédent. C’est une attention des massorètes en faveur du lecteur. Comme ce dernier verset exprime une idée désagréable, ils reproduisent le verset précédent, qui est de nature à laisser meilleure impression.

3° Notes sur les mots. — Les massorètes indiquent les cas où les mots sont écrits sous forme pleine ou sous forme défective, c’est-à-dire avec le T et le > quiescents et le n paragogique, ou sans les quiescentes x, i, », et sans n final. Ils comptent combien de fois tel mot se -lit au commencement, au milieu ou à la fin d’un verset, combien de fois il se lit dans toute la Bible. Ils signalent 15 mots surmontés de points, parce que ces mots sont censés cacher des mystères. Les plus importantes remarques concernant les mots sont celles qui sont indiquées avec les formules qerî, « ce qui doit être lu, 9 et hefîb, « ce qui est écrit. » Voir Keri, t. iii, col. 1889. Il y a treize passages où il reste un vide dans le texte, avec la note : « Est lii, mais n’est pas écrit ; » d’autres qui ont la note : « Est écrit, mais n’est pas lu ; » quelques-uns où le keri indique qu’on doit, soit séparer un mot en deux, soit en réunir deux en un. En dix endroits, un mot jugé obscène par les massorètes doit être remplacé par un autre. Enfin le kéri porte fréquemment sur des additions, des suppressions ou des changements de lettres. La distinction du kéri et du chéthib est inconnue à Josèphe, à Philon et à saint Jérôme. Les anciennes versions ne la connaissent pas non plus ; elles reproduisent le texte que leurs auteurs ont eu sous les yeux, et qui se trouve conforme tantôt au keri et tantôt au chéthib. D’autres part, les Juifs orientaux n’ont pas les mêmes kéri et les mêmes chéthib que les Juifs occidentaux. Ce sont donc les massorètes qui ont noté ces variantes, dont beaucoup sont sans importance. Il n’est pas à croire qu’ils les aient introduites arbitrairement, sinon pour les mots qu’ils ont jugés obscènes. Plusieurs de ces variantes sont déjà signalées dans le Talmud. Les massorètes ont dû comparer les manuscrits qu’ils avaient en main et marquer les variantes qui leur paraissaient justifiées. Ils ont été bien inspirés en laissant en marge ces variantes. Ordinairement, ils mettent sur le chéthib les voyelles qui conviennent au kéri, afin que le lecteur soit plus sûrement averti.

4° Notes sur les lettres. — Certaines lettres prennent une forme majuscule, qui est conservée dans nos Bibles imprimées. La première lettre de la Genèse est un grand 3 = 2, pour rappeler que l’œuvre de la création comprend deux choses, le ciel et la terre. Le mot hifgallâh, « sera rasé, » Lev., xiii, 33, porte un grand 1 = 3, pour marquer que trois sortes d’hommes doivent être rasés : les nazaréens, les impurs et les lévites. Le nom d’Adam, I Par., i, 1, est écrit avec un grand « = 1, pour signifier qu’Adam est le premier homme, etc. Il y a trente-trois passages où une lettre est plus petite que les autres, en signe de mépris ou de diminution. Des lettres sont suspendues au-dessus des autres, le 2 de menaSséh, Jud., xviii, 13, le 7 de resâ’îm, Job, xxxviii, 13, 15, et de mîyyâ’ar, Ps. lxxx, 14. Un 2 est renversé dans neuf endroits : Num., x, 35 ; xi, 1 ; Ps. cvii, 23-28, etc., pour marquer que les ennemis d’Israël doivent être -renversés de même. Deux lettres pouvant s’écrire différemment, suivant qu’elles sont dans le corps du mot ou à la fin, et d, ; et ], les massorètes indiquent les cas où la forme de ces lettres est irrégulière. Ils ont compté combien de fois chaque lettre occupe le commencement, le milieu ou la fin d’un mot, combien de fois elle se trouve dans chaque livre et dans toute la Bible, le total des lettres qui composent le Livre sacré, etc. Mais ces calculs aboutirent à des résultats divergents, selon les manuscrits. Au mot fira, gâhôn, Lev., xi, 42, le i est majuscule, parce que c’est la lettre qui tient le milieu parmi toutes celles du Pentateuque. Le 7 du mot C59

MASSORE

MASTELYN

860

miyyâ’ar, Ps. lxxx, 14, est suspendu, parce que c’est la lettre qui tient le milieu parmi toutes celles des Psaumes. — On trouve un résumé de tous ces remarques massorétiques à la fin des Bibles hébraïques. Voir spécialement dans celle de Van der Hooght et Hahn, Leipzig, 1867.

5° Les points-voyelles. — Voir Hébraïque (Langue), t. iii, col. 504-508.

6° Les accents. — Ils ont existé de bonne heure, pour faire distinguer par l’intonation de la voix des mots qui se vocalisaient de même, mais qui avaient des sens différents. Saint Jérôme, Qu&st. hebraic, in Gen., H, 23, t. xxiii, col. 942, dit que c’est au moyen de l’accent qu’on peut distinguer’issâh, « femme, s de îssd’, « il prend. » Les massorètes ont ingénieusement complété et combiné le système des accents, pour marquer la syllabe tonique, unir ou disjoindre les mots, ponctuer les phrases et même servir de notation musicale pour la lecture correcte des textes sacrés dans les réunions des synagogues. En vingt-huit passages, les massorètes interrompent un verset par un petit cercle appelé pisqâ’, « pause, » pour indiquer un changement de ton dans la lecture. Cf. Num., xxv, 19 ; Dent., ii, 8 ; Jos., iv, 1 ; vm, 24’; Jud., ii, 1 ; I Reg., xiv, 36 ; xvi, 2, 12 ; xvii, 37 ; xxi, 10 ; xxiii, 11 ; Il Reg., v, 19 ; vi, 20 ; vii, 4 ; xii, 13 ; xvii, 14 ; xviii, 2 ; xxi, 1, 6 ; xxtv, 10, 11, 23 ; III Reg., xiii, 20, etc.

IV. Valeur de la massore. — Les massorètes ont rendu de réels et importants services à la critique textuelle de la Bible, en fixant nettement l’état du texte à leur époque et en le protégeant contre les corruptions ultérieures. Grâce à eux, nous possédons la Bible, hébraïque en l’état où elle se trouvait au v siècle après J.-C, et même bien antérieurement, puisque les massorètes s’appuient surtout sur les travaux des docteurs qui les avaient précédés. Le scrupule qui les a empêchés de corriger quoi que ce soit dans le texte lui-même et leur a inspiré de mettre en marge leurs annotations constitue une garantie de plus en faveur de la valeur objective de leur œuvre. Ils ont encore eu le mérite de fixer la prononciation de l’hébreu, et d’en faciliter l’intelligence, par leur ponctuation. Il est assez probable que la prononciation réglée par leurs points-voyelles et leurs accents diffère de celle des anciens Hébreux. Elle n’en a pas moins sa très grande utilité. Il n’est pas indifférent de remarquer que la secte des Caraïtes, qui rejette en bloc toutes les traditions rabbiniques, voir Caraïtes, t. ii, col. 243, adopte cependant les points-voyelles et la prononciation massorétique de l’hébreu. Ce fait tendrait à prouver l’ancienneté de la vocalisation fixée par les massorètes. La peine que se sont donnée ces derniers pour noter les irrégularités verbales, les variantes et tout ce qui intéresse la lettre du texte, n’a pas été non plus sans résultat, puisqu’elle a servi à mieux expliquer le texte lui-même. Quand la massore sera mieux connue et mieux étudiée dans le détail, elle fournira sans nul doute des ressources plus précieuses encore pour l’intelligence des textes sacrés. À ces divers titres, les massorètes méritent reconnaissance. Il importe peu dès lors qu’une partie de leurs efforts aient été consacrés à des puérilités et à des préoccupations plus ou moins étranges. La notation de lettres soi-disant mystérieuses sent déjà la kabbale. Voir Kabbale, t. iii, col. 1881. Le remplacement de mots qu’ils regardent comme obscènes serait une impertinence envers les auteurs sacrés, si le changement des temps n’imposait parfois au langage certaines modifications. Quant au compte et à la forme des lettres, aux lettres médianes, et à ces mille détails d’ordre tout conventionnel, ce sont choses inutiles, dans la plupart des cas. Un respect exagéré pour la lettre de la Bible a pu inspirer ces recherches, mais ne leur a communiqué aucune utilité pratique. — Sur la Massore, voir EUas-Lévita, ifassoret

kani-Massoret, ou « Clef de la Massore » ; cf. t. ii, col. 1669 ; Chr. D. Ginsburg a publié The Massoret-ha~ Massoreth of Elias Levita, Londres, 1867 (texte hébreu avec traduction anglaise) ; J. Buxlorf, Tiberias sive commentarius Masorethicus quo primum explicatur quid Masora sit, tum historia Masoretharum ex Hebrseorum annalibus excutitur… secundo clavis Masorse traditur, Bâle, 1700, publié d’abord à la fin du rv « vol. de la Biblia maxima Rabbinica, Bâle, 1620 ; Cappel^ Critica sacra, iii, 15 ; v, 12, Paris, 1650, p. 170-372 ; . Morin, Exercitationes biblicse, ii, 12, Paris 1669, p. 383 ;  : Walton, Biblia polyglotta, Londres, 1654, dont les Prolegomena, rv, traitent de la massore, dans le Sacrse Scripturee Cursus completùs de Migne, Paris, 1839, t. i ; col. 265-290, et ensuite de la kabbale, col. 290-296° ; , Richard Simon, Histoire critique du Vieux Testament, Rotterdam, 1685, p. 131-159 ; A. Gilly, Précis d’introduction à l’Écriture Sainte, 3 in-12, Nimes, 1867, t. i, p.148-150 ; Cornely, lntroductio in utriusque Testamenti libros sacros, 4 in-8°, Paris, 1885, t. i, p. 258-262 ; Harris, The rise and development of the Massorah, dans-The Jewish Quarterly Review, i, 1889, p. 128-142, 223257 ; Blau, Masoretische Untersuchungen, Strasbourg, 1891, et Massoretic studies, dans The Jewish Quart. Review, viii, 1896, p. 343-359 ; ix, 1897, p. 122-144, 471490 ; Ginsburg, The Massorah compiled front manuscripts, Londres, 1880-1885, et Introduction lo the massoretico-critical édition of the Hebrew Bible, Londres, 1897 ; Hyvernat, Petite introduction à l’étude de la Massore, dans la Revue biblique, 1902, p. 551-563 ; 1903, .

p. 529-549.
H. Lesêtre.
    1. MASSORÈTE##

MASSORÈTE, nom donné aux savants juifs qui ont compilé la Massore. Voir Massore, I, col. 855.

    1. MASSUE##

MASSUE, morceau de bois qui va en grossissant à, l’une de ses extrémités, et dont on se sert pour frapper, , assommer, briser, enfoncer, etc. La massue s’appelle en hébreu tôtafy, le tartahu assyrien, que les versions, rendent par crçûpa, nialleus, « marteau. » Pour l’hippopotame, « le fôfâh n’est qu’un brin de paille. » Job, xli, . 20. Contre un tel animal, on lève plutôt une massue qu’un marteau. La massue est le çôizaloy des Grecs, lliad., Hl r 559, Odys., ix, 319 ; Sophocle, Trachin., 512, etc., et la clava des Latins. Cicéron, Verr., ii, 4, 43 ; De senect., 16/ Silius Italicus, viii, 524, etc. La xopvvri était la massuede guerre, lliad., vii, 141 ; Hérodote, i, 59. Les Assyriens, qui suivaient l’armée de Xerxés portaient des massues, de bois hérissées de nœuds de fer. Hérodote, viï, 63. Il est possible que leurs devanciers aient déjà connu cettearme et que, par conséquent, les Hébreux l’aient vue aux mains de leurs ennemis. — Les Septante ont traduit par pdirâ).ov l’hébreu nié fît, Prov., xxv, 18, qui désigne le marteau de guerre et peut s’entendre parfaitement d’une sorte de massue armée de fer. Le Sêbét ou bâton était aussi employé comme arme et devait prendre alors une forme approchant de celle de la massue. Voir Bâton, t. i, col. 1513. Cf. Is., x, 24 ; xiv, 5 ;

xxviii, 27.
H. Lesêtre.
    1. MASTELYN Marc##

MASTELYN Marc, commentateur belge, chanoine régulier, né à Bruxelles vers 1599, mort aux Sept-Fons le 23 décembre 1652. Il embrassa la vie religieuse à Groenendæl près de Bruxelles et suivit à Louvain les cours de théologie, qu’il fut eusuite chargé de professer dans son monastère ainsi que la philosophie. Il fut prieur du monastère de Sept-Fontaines. Il compléta et publia un travail sur les Psaumes commencé par Jean de Bercht, un de ses confrères : Elucidatorium in Psalmos Davidicos, in-4°, Anvers, 1634. — Voir Pagnot, Mémoires pour servir à l’hist. littéraire des Pays-Bas, t. IX, p. 360 ; A. Goeværts, dans Biographie nationale de Belgique, t. xa., 1891, ç. 6-Vi. t&. Hsxiïsîsws..

861

MAT — MATHAN

862

NIAT (hébreu : hibêl, de hébél, « cordage, b tôrén ; Septante : 1<jtôç ; Vulgate : malus), pièce de bois dressée sur un navire pour supporter la voilure. — Dans les Proverbes, xxiii, 34, seul passage où se lise le mot hibêl, l’ivrogne est comparé à l’homme couché sur le sommet

montagne. Le prophète annonce à Israël qu’en punition de ses infidélités, il en sera réduit à fuir même devant des ennemis peu nombreux, jusqu’à ce qu’il reste isolé comme un mât au sommet de la montagne et un étendard sur la colline. Voir Étendard, t. ii, col. 2000. Ce

230. — Mât d’un navire de guerre philistin. Tomheau de Bamsès III à Médinet-Habou. D’après Champollion, Monuments de l’Egypte, pi. 220.

d’un mât. Il est terriblement ballotté quand la mer est tant soit peu agitée, à cause de l’amplitude que la hauteur du mât donne aux moindres mouvements du navire. Sur un navire de guerre philistin (fig. 230), on voit des combat 23t. — Mâts d’ornement à banderoles en Egypte. D’après Maspero, Archéologie égyptienne, 1887, fig. 7p", p. 71.

tants qui chancellent au haut des mâts, un entre autres qui tombe d’une espèce de hune construite au sommet du mât principal. — Isaïe, xxxiii, 23, compare l’Assyrie à un navire désemparé, dans lequel les cordages ne serrent plus le pied du mât pour tendre les voiles. Ézéchiel, xxvii, 5, décrit aussi la cité de Tyr sous la figure d’un vaisseau dont le mât a été fait avec un cèdre du Liban. Voir Navire. — Dans un autre passage d’Isaîe, xxx, 17, le mât, fôrén, est un signal dressé sur le haut d’une

mât n’est pas un mât de navire, mais une haute pièce de bois dressée sur un lieu élevé pour y servir de signal. Israël, châtié par Dieu, restera au milieu des peuples comme le témoignage visible de la justice divine qui punit les rebelles. En Egypte, sur la façade des temples, on employait des mâts analogues, formés de poutresentées l’une dans l’autre et consolidés par des agrafes, pour soutenir des banderoles décoratives (fig. 231). Cf. Maspero, L’archéologie égyptienne, Paris, 1887, p. 70.

H. Lesêtre.
    1. MATHAN##

MATHAN (hébreu : Matfân, « don » ), nom d’un prêtre de Baal et de deux Israélites. C’est une abréviation de Mathanias. Voir Mathanias.

1. MATHAN (Septante : Ma8âv, MaTÔâv), prêtre de Baal qui desservait le temple de ce dieu à Jérusalem sous le règne d’Athalie. Il est possible qu’il fût phénicien et non d’origine juive, le nom de Mathan était, usité en Phénicie et à Carthage. Gesenius, Thésaurus, p. 929. Athalie l’avait sans doute amené avec elle dans la capitale de la Judée. Il fut tué après la reine, devant l’autel même de Baal, lorsque Joas eut été proclamé roi par le grand-prêtre Joïada. IVReg., xii, 18 ; II Par., xxiii, 17.

2. MATHAN (Septante : NiSocv), père de Saphatias, contemporain de Jérémie. Jér., xxxviii, 1 ; Voir Saphatias, fils de Mathan.

3. MATHAN (Ma-rdôv), fils d’Éléazar, père de Jacob et grand-père de saint Joseph, époux de la Sainte Vierge, dans la généalogie de saint Matthieu, i, 15. La place correspondante dans la généalogie de saint Luc, iii, 29, est occupée par Mathat, ce qui a fait croire à un certain nombre de commentateurs que Mathan et Mathat sont un seul et même personnage, mais on ne saurait l’établir. D’après Nicéphore, H. E., II, iii, t. cxlv, col. 760, Mathan aurait été prêtre, ce qui est en contradiction avec la généalogie évangélique, et père d’Anne, qui devint la mère de la Sainte Vierge. 863

MATHANAÏ — MATHATIAS

-864

    1. MATHANAÏ##

MATHANAÏ (hébreu : Mafnaï), nom de trois Israélites qui vécurent après la captivité. Leur nom hébreu est probablement une contraction de Mathanias. Voir Mathanias.

1. MATHAMAI (Septante : Metôavia ; Sinaiticus : MaOaviâ), un des fils d’Hasom qui avait épousé une femme étrangère et qui la renvoya du temps d’Esdras.

I Esd., x, 33.

2. MATHANAÏ (Septante : Marfavai), un des fils de Bani qui s’était marié avec une étrangère et qui la répudia après le retour de la captivité. I Esd., x, 37.

3. MATHANAÏ (Septante : HoctSavaf), prêtre, descendant de Joïarib, qui vivait du temps du grand-prêtre Joacim, fils de Josué. II Esd., xii, 19.

    1. MATHANIA##

MATHANIA, MATHANIAS (hébreu : Mattanyâhû, et, par abréviation : Mattanyâh, « don de Yah ou Jéhovah » ), nom de onze Israélites. La Vulgate l’a rendu tantôt par Mathanîa, tantôt par Mathanias, une fois par Mathaniaû. I Par., xxv, 4. Les noms de Mathan et de Mathanaï ne sont probablement qu’une contraction de Mathanias.

1. MATHANIAS (hébreu : Mattanyâh ; Septante : B « T6av{a ;  ; Alexandrinus : Ms09aviaç), nom que portait le roi de Juda Sédécias avant qu’il fût élevé sur le trône. IV Reg., xxiv, 17. Voir Sédécias.

2. MATHANIAS (hébreu : Mattanyâh ; Septante : MatÔavJaç), lévite, fils de Micha, descendant d’Asaph, qui vivait après la captivité à Jérusalem. I Par., ix, 15.

II habitait Jérusalem et était le chef des lévites chargés de prier et de louer Dieu dans le Temple, II Esd., xi, 17, par le chant des hymnes, c’est-à-dire chef des chantres. II Esd., xii, 8. Il est sans doute aussi le même qui était chargé, avec quelques autres, de la garde des portes du saint lieu, II Esd., xii, 25, car c’était une des fonctions que remplissaient les chantres. I Par., xv, 18, 21.

3. MATHANIAS (hébreu : Mattanyâhû ; Septante : MatOavïa ; ), lévite, un des quatorze fils d’Heman, qui vivait du temps de David. Il fut le chef de la neuvième classe de musiciens, comprenant ses fils et ses frères, composée de douze personnes. I Par., xxv, 4, 16. Au ꝟ. 4, la Vulgate écrit son nom Mathaniaû.

4. MATHANIAS (hébreu : Mattanyâh ; Septante : Ma-rflctvfa ; ), lévite, de la famille d’Asaph, ancêtre de Jahaziel, fils de Zacharie, qui prédit au roi Josaphat la victoire sur les Moabites. II Par., xx, 14.

5. MATHANIAS (hébreu : Mattanyâhû ; Septante : Maxôavi’aç), lévite de la famille d’Asaph, qui prit part à la purification du Temple de Jérusalem sous le règne d’Êzéchias. II Par., xxix, 13.

6. MATHANIAS (hébreu : Mattanyâh ; Septante : Maxôavîa), un des fils d’Élam qui avait épousé une femme étrangère et qui la renvoya du temps d’Esdras. I Esd., x, 26. Voir Élam 4, t. ii, col. 1630.

7. MATHANIAS (hébreu : Mattanyâh ; Septante : Moctfaverf), un des fils de Zéthua qui avait épousé une femme étrangère et qui fut obligé par Esdras à la répudier. II Esd., x, 27.

8. MATHANIAS (hébreu : Mattanyâh ; Septante : Matôavia), un des fils de Phahath-Moab, qui vivait du temps d’Esdras. II dut renvoyer une femme étrangère avec laquelle il s’était marié. I Esd., x, 30.

9. MATHANIAS (hébreu : Mattanyâh ; Septante : Matôavt’a), un des nombreux fils de Bani qui avaient épousé des femmes étrangères et qui furent forcés par Esdras à les renvoyer. I Esd., x, 37. Voir Bani 1, t. i, col. 1429.

10. MATHANIAS (hébreu : Matanyâh ; Septante : MotTÛavtaç), père de Zaccur et ancêtre de Hanàn gardien des greniers sous Néhémie. Il Esd., xiii, 13.

11. MATHANIAS (hébreu : Mattanyâh ; Septante MaxÔa’jLa), prêtre, fils de Michaïa, ancêtre de Zacharie qui vivait du temps de Néhémie et jouait de la trompette. II Esd., xiii, 34 (hébreu, 35). D’après plusieurs interprètes, ce Mathanias, qui avait pour père Michaïa et comptait un Asaph parmi ses aïeux, n’est pas différent de Mathanias 2, lévite descendant d’Asaph et fils de Micha. Micha peut s’écrire en effet Michaïa et, malgré la différence d’orthographe, Micha et Michaïa peuvent être la même personne. Mais le texte sacré fait du fils de Micha un lévite et du fils de Michaïa un prêtre. Cette différence notable suffit pour distinguer Mathanias le prêtre du Mathanias lévite.

    1. MATHANIAU##

MATHANIAU, orthographe, dans la Vulgate, du nom de Mathanias, fils d’Héman. I Par., xxv, 4. Voir Mathanias 3.

    1. MATHANITE##

MATHANITE (hébreu : ham-Mitnî ; Septante : & MaxBom), surnom patronymique ou ethnique de Josaphat, un des vaillants soldats de David. I Par., xi, 43. Voir Josaphat 5, t. iii, col. 1650. Ce surnom pouvait désigner la famille ou plus probablement la patrie de Josaphat, mais on ne trouve rien dans l’Ancien Testament qui puisse nous éclairer à ce sujet.

    1. MATHAT##

MATHAT (MaxElât), nom de deux personnages qui figurent dans la généalogie de Notre-Seigneur en saint Luc, iii, 23 (grec, 24), 29.

1. MATHAT, fils de Lévi et père d’Héli qui fut le père de saint Joseph, époux de la Sainte Vierge. Luc, iii, 23 (grec, 24). Voir Généalogie 2, t. iii, col. 166.

2. MATHAT, fils de Lévi et père de Jorim, ancêtre de Nôtre-Seigneur qui vivait avant la captivité de Babylone. Luc, iii, 29.

    1. MATHATHA##

MATHATHA (hébreu : Mattaftâh ; Septante : Max6a61), nom de deux Israélites. C’est probablement une abréviation de Mathathias. Voir Mathathias.

1. MATHATHA, un des fils d’Hasom qui vivait da temps d’Esdras et avait pris une femme étrangère qu’il dut renvoyer. I Esd., x, 33.

2. MATHATHA, un des ancêtres de Notre-Seigneur dans la généalogie de saint Luc, W, 31. Il était fils de Nathan et petit-fils de David.

    1. MATHATHIAS##

MATHATHIAS, nom de dix personnages. Il est écrit avec quelques légères variantes en hébreu et dans le grec de l’Ancien et du Nouveau Testament. La Vulgate a uniformément Mathathias. Il signifie « don de Yah ou Jéhovah », et correspond au grec, ©Eo’Swpoç, ®eo8<ipr|Toç, 0eo8(5mo ; , ©e680xo< ; . Voir aussi Mathan, Mathanaï, Mathanias, Mathat, Mathatha, Matthieu, Matthias.

1. MATHATHIAS (hébreu : Mattitydh ; Septante : M « T6a8faç), lévite, fils atné de Sellum, descendant de Coré, qui vivait à Jérusalem et était chargé de la préparation des gâteaux qu’on faisait frire dans la poêle pour les offrandes religieuses. I Par., rx, 31.

2. MATHATHIAS (hébreu : Mattityâhû ; Septante : Ma-c6aO ; <x, MaTÔaOîote I Sinaiticus : MeTraOt’oc), lévite qui vivait du temps de David et fut un des musiciens placés sous la direction d’Asaph. Il jouait devant l’arche du kinnôr (be-kinnôrôt’al haS-semînîf). I Par., xv, 18, 21 ; xvi, 5. Dans ce dernier passage, le texte hébreu écrit son nom Mattityâh et le grec, MarraOîaç. S’il est le même, comme on ne peut guère en douter, que le Mathathias (hébreu : Mattityâhû ; Septante : MarOaOiaç ; Alexandrinm : MaTtaôta ; ), nommé I Par., xxv, 3, il était le sixième fils d’Edithan, l’un des trois chefs de chœur de David, et avait été d’abord sous sa direction ; lorsqu’on distribua les musiciens en classes qu’on tira au sort, il fut à la tête de la quatorzième division, composée de ses fils et de ses frères et comprenant douze personnes. I Par., xxv, 21.

3. MATHATHIAS (hébreu : Maftityâk ; Septante ; MaTSavt’aç), un des fils de Nébo qui avait épousé une femme étrangère et la répudia du temps d’Esdras. I Esd., x, 43.

4. MATHATHIAS (hébreu : Mattityâh ; Septante : M « t9a9t’ac), le premier des six personnages qui se tinrent à la droite d’Esdras pendant que celui-ci fit au peuple la lecture de la Loi. Mathathias était peut-être un prêtre ou du moins un homme notable. II Esd., viii, 4.

5. MATHATHIAS (grec : Mavcætaç), prêtre de la famille de Joarib (voir Joïarjb 1, t. iii, col. 1596), père des cinq frères Machabées qui affranchirent les Juifs du joug des Séleucides. Il descendait d’Asmon ou Hasmon, par Simon, son grand-père, et Jean, son père. I Mach., il, 2-5 ; xiv, 29. Voir col. 480. C’était un prêtre plein de zèle pour l’observation de la Loi. Il était déjà avancé en âge lorsque Antiochus IV Épiphane, roi de^ Syrie (175-164 avant J.-C), le premier des persécuteurs de la religion, voulut imposer de force aux Juifs les pratiques polythéistes des Hellènes. Voir t. i, col. 697. Mathathias, accablé de douleur, s’était retiré de Jérusalem et réfugié avec ses fils à Modin. Voir Modin. La persécution alla l’y chercher. Des envoyés d’Antiochus s’y rendirent afin de forcer les habitants à sacrifier aux faux dieux. Ils pressèrent le vieillard d’obéir aux ordres du roi, en lui faisant les plus magnifiques promesses. « Quand toutes les nations obéiraient au roi Antiochus, répondit-il, … moi et mes fils et mes frères, nous obéirons à la loi de nos pères… Nous n’écouterons pas les paroles du roi Antiochus, et nous ne sacrifierons pas en transgressant les commandements de notre Loi. » I Mach., ii, 19-22. Et comme un Juif infidèle s’apprêtait à sacrifier aux idoles, Mathathias, saisi de douleur, se précipita sur lui et le tua sur l’autel. Il frappa en même temps l’envoyé d’Antiochus et détruisit l’autel idolâtrique. Ce fut là le commencement de la guerre sainte. « Que quiconque a le zèle de la Loi, me suive ! » s’écria l’héroïque vieillard, et lui et ses fils s’enfuirent sur les montagnes, I Mach., ii, 27-28. Les Juifs fidèles, les Assidéens (t. i, col. 1131) les y rejoignirent en grand nombre et ainsi se forma une petite armée, à qui le saint vieillard inspira son ardeur. Ils allèrent tous ainsi détruire les autels païens et circoncirë^ïës enfants incirconcis d’Israël. Après avoir ainsi enflammé les cœiïrs, sentant sa fin approcher, Mathathias exhorta ses fils à donner leur vie pour rester fidèles à la Loi et il désigna son fils Judas comme général de l’armée sainte. Le mouvement qu’il avait inauguré ne devait plus s’arrêter jusqu’au complet triomphe. Il mourut en 167 et fut enseveli à Modin, pleuré par tous les Juifs fidèles. I Mach., Il, 70. Ses cinq fils furent dignes d’un tel père : fidèles à ses recommandations, ils versèrent tous leur sang pour la cause sacrée de la religion et de la patrie. Voir Machabées, col. 479. F. Vigouroux.


6. MATHATHIAS (grec : MaT8a6sat « ), fils d’Absalom, IMach., xi, 70, et frère de Jonathas. I Mach., xiii, 11. Voir Jonathas, 4, t. iii, col. 1624. Lorsque Jonathas Mæhabée livra bataille à l’armée syrienne de Démétrius, dans la plaine d’Azor(voir AsorI, 1, 3°, 1. 1, col. 1107), ses troupes s’enfuirent d’abord et la bataille eût été perdue si Mathathias et Juda, fils de Calphi, deux de ses principaux officiers, n’avaient tenu bon avec lui. Leur résistance donna aux fuyards le temps de reprendre courage et de se rallier à leur chef, qui remporta une victoire éclatante. I Mach., xi, 67-74.

7. MATHATHIAS (grec : MarSaOîa ; ), fils de Simon Machabée. Ptolémée, fils d’Abobi, gendre de Simon, et l’un de ses officiers, fit périr traîtreusement Mathathias, avec le grand-prêtre Simon lui-même et son autre fils Judas, dans la forteresse de Doch (t. ii, col. 1454), où il venait de leur donner un grand festin. I Mach., xvi, 11-17.

8. MATHATHIAS (grec : MaTOaOfct ; ), nom d’un des trois ambassadeurs que Nicanor, général du roi dé Syrie Démétrius I er, envoya à Judas Machabée pour traiter de la paix, qui fut en effet conclue. II Mach., xiv, 19. La Vulgate a abrégé le nom de cet ambassadeur en Matthias.

9. MATHATHIAS (grec : MarSaSta ; ), fils d’Amos et père de Joseph le père de Janné, dans la généalogie de Notre-Seigneur en saint Luc, iii, 25.

10. MATHATHIAS (grec : Max8a6[’aç), fils de Séméi et père de Mahath, dans la généalogie de Notre-Seigneur en saint Luc, iii, 26.

MATHIAS. Voir Matthias.

    1. MATHIAS##

MATHIAS (Jacques de), luthérien danois, docteur en théologie, mort en 1586 a publié : Grammatica, Rhetorica, Dialectasacra, seu de tropis Sacrx Scriphirœ vel Introductio ad Scripturam, ia-¥, Copenhague, 1589 ; Prselectiones in Ecclesiasten et Joelen, in-4°, Bâle, 1589 ; Prselectiones in Hoseam, in-4°, Bâle, 1590. — Voir Walch, Bibliotheca theol., t. ii, p. 498 ; t. iv, p. 568,

573.
B. Heurtebize.
    1. MATHISIUS##

MATHISIUS, MATTHYS, Gérard, théologien catholique, né dans le duché de Gueldres vers 1523, mort à Cologne le 10 avril 1572 ou plus probablement le Il avril 1574. Il fit ses études à Cologne et professa dans cette ville où, en 1545, il fut chargé d’enseigner le grec. Quelques années plus tard, en 1552, il devenait doyen de la faculté des Arts et, le 12 novembre 1557, il était nommé régent du collège Montanum, charge qu’il exerça jusqu’à sa mort. Il avait été en outre recteur de l’Université du 20 décembre 1562 au 24 mars 1564 et fut chanoine de la collégiale des Saints-Apôtres, puis de la cathédrale de Cologne. Parmi ses écrits, on remarque : In Epistolam B. Pauli ad Romanos commentaria nunc recens conscripta ac édita, in-12, Cologne, 1562.

— Voir Valère André, Biblioth. Belgica, p. 279 ; Pagnot, Mémoires pour servir à l’hist. littéraire des Pays-Bas,

t. viii, p. 302.
B. Heurtebize.
    1. MATHUSAEL##

MATHUSAEL (hébreu : Mefûsd’êl ; Septante : MaOoudâXa), patriarche antédiluvien, le quatrième descendant de Caïn, fils de Maviaël et père de Lamech. Gen., iv, 18. Son nom a une forme archaïque ; le premier élément, nietû, ne se retrouve que dans un autre nom propre de la même époque, celui de Mathusalem. D’après Gesenius, Thésaurus, p. 830, il se décompose en wid, forme

construite de hd, « homme, s en tf, abréviation de ~itfî »

T Y *

IV. - 28

867

MATHUSAEL — MATSOR

indiquant le génitif, et S », « Dieu : » « homme de Dieu. » F. Mùhlau et W. Volck, Gesenius’Handwôrterbuch, 8e édit., 1878, préfèrent dériver sâ’êl de sâ l al, « homme de prière » ou « de demande ».

    1. MATHUSALA##

MATHUSALA, MATHUSALÉ, MATHUSALEM

(hébreu : MetûHêlah, « homme du trait, du dard » [ ?] ; Septante : Ma90-jci>, « ), fils d’Hénoch et père de Lamech, le huitième des patriarches antédiluviens de la branche de Seth. Son père Hénoch l’engendra à 65 ans ; il eut lui-même son fils Lamech à 187 ans ; après quoi il vécut encore 782 ans et mourut, après avoir engendré des fils et des filles, à l’âge de 969 ans : c’est la vie la plus longue dont il soit parlé dans l’Écriture, d’où l’expression proverbiale : « vieux comme Mathusalem. » Gen., v, 21-27. A’oir Longévité, col. 355. — Des critiques modernes prétendent que Mathusala et Mathusaël dont le nom se ressemble et qui ont l’un et l’autre un fils appelé Lamech sont une seule et même personne, mais les noms de Mathusala et de Mathusaël ne sont pas identiques et les deux Lamech sont différents. Voir Lamech 2, col. 42.

    1. MATIN##

MATIN (hébreu : bôqér ; Septante : Ttpuf, npwsa ; Vulgate : marie, dîluculo), partie de la journée qui en comprend les premières heures, et spécialement le temps qui succède immédiatement à l’aurore. A’oir Aurore, 1. 1, col. 1265. Ce qui appartient au matin s’appelle dans les versions : £w91v<S< ; , irptotviSç, matutinus. — 1° Dans le récit de la création, il est répété plusieurs fois que « il y eut soir, il y eut matin, ce fut un jour ». Gen., i, 5, 8, 13, 19, 23, 31. Les Hébreux comptaient les jours d’un coucher de soleil à un autre, sans doute parce qu’ayant des mois lunaires, dont ils déterminaient le commencement par une méthode tout empirique, ils trouvaient naturel que le jour commençât comme le mois, le soir, à l’apparition de la lune. Mais cette manière de limiter le jour n’était pas générale ; les Égyptiens et les Babyloniens le faisaient commencer au matin. Dans le texte de la Genèse, les mots « soir » et « matin » doivent donc être considérés comme les limites d’une durée déterminée : il y eut soir, après la journée écoulée, il y eut matin, après la nuit écoulée, et ce fut un jour. Dans Daniel, viii, 14, 26, au contraire, l’expression « soir matin », désigne un jour tout entier, comme le vu^TiiiEpov des Grecs, II Cor., xi, 25, compté à la manière des Hébreux. Le prophète se sert sans doute de cette expression composée parce que, dans ce passage, il est question du sacrifice perpétuel, et que les mots’éréb, « soir, » bôqér, « matin, » rappellent le sacrifice qui se faisait à ces deux moments de la journée. Cf. Rosenmûller, Daniel, Leipzig, 1832, p. 267 ; Fabre d’Envieu, Le livre duprophète Daniel, Paris, 1891, t. H, 2° part., p. 817. Il est à remarquer cependant que, quand il s’agissait de manger l’agneau pascal, la manne, les victimes des sacrifices, Exod., ii, 10 ; xvi, 19 ; Lev., vii, 15, la journée s’étendait « jusqu’au matin », parce que ces actes se faisaient plus communément le jour que la nuit, et qu’il fallait laisser une certaine latitude pour les terminer. — 2° Le matin était consacré par l’offrande de sacrifices dans le Temple, chaque jour, Exod., xxix, 38, 39 ; Num., xxviii, 4, et spécialement pendant les fêtes de la Pâque, Num., xxviii, 23, et durant les grandes solennités. Voir Sacrifices. C’est aussi le matin que l’on offrait l’encens, que l’on préparait les lampes du sanctuaire, Exod., xxx, 7, que l’on mettait du bois sur l’autel des holocaustes, Lev., vi, 5, etc. Le matin était considéré comme le temps propice pour la prière. Ps. v, 4, 5 ; lxxxviii (lxxxvii), 14 ; cxlih (cxui), 8 ; exix (cxvin), 148 ; Is., xxvi, 9 ; Eccli., xxxix, 6 ; Sap., xvi, 28, etc. Chaque matin, - les Juifs récitaient le schéma, prière composée de trois passages de la Bible : Deut : , vi, 4-9 ; xi, 13-21 ; Num., xv, 3741. Cette prière devait se

dire dès le lever du jour, dès qu’on pouvait distinguer entre le bleu et le blanc. Berachoth, I, 1, 2. — 3° On n’avait pas coutume de manger ni de boire dès le matin, ou du moins on ne le faisait que très légèrement. La matinée appartenait au travail et à l’accomplissement des différents devoirs d’état. C’était, pour le prince, l’heure de rendre la justice. Jer., xxi, 12. Aussi des princes mangeant le matin, et consacrant ainsi à de grossières jouissances les moments les plus précieux" de la journée, faisaient le malheur de leur pays. Eccle., x, 16. Boire et s’enivrer le matin était une marque de décadence morale. Is., v, 11. Les Juifs ne prenaient rien avant l’heure de la prière publique, qui était la troisième heure ou neuf heures du matin. Berachoth, ꝟ. 28, 2. C’est pourquoi quand, à la Pentecôte, on accuse les disciples d’être ivres, saint Pierre se contente, pour les défendre, de dire qu’on n’est encore qu’à la troisième heure. Act., ii, 15. — 4° Ce fut le matin, dès la pointe du jour, que Notre-Seigneur fut jugé officiellement et condamné par le sanhédrin, Matth., xxvii, 1 ; Marc, xv, 1, et que, deux jours après, il ressuscita. Marc, xvi, 2, 9 ; Luc, xxiv, l ; Joa., xx, 1. — 5° L’étoile du matin est la planète Vénus, la plus brillante de toutes et qui est surtout remarquable lorsqu’elle précède le lever du soleil. Eccli., l, 6 ; Apoc, ii, 28 ; xxii, 16. La nuée du matin est, en Orient, une nuée qui disparaît vite à la chaleur des rayons solaires. Ose., vi, 4 ; xiii, 3 ; Am., iv, 13. Sur la pluie du matin, Joël., ii, 23, qui est dans l’hébreu la pluie « de la première saison », voir Pluie. — 6° L’expression « du matin au soir » marque tantôt la continuité d’une action qui se prolonge toute une journée, Exod., xviir, 13, 14 ; Ps. cxxx (cxxix), 6 ;

I Mach., ix, 13 ; x, 80 ; Act., xxviii, 23, etc., tantôt, au contraire, la rapidité de ce qui ne dure qu’un jour. Job, iv, 20 ; Is., xxxviii, 12 ; Eccli., xviii, 26, etc. Le mot hiSkîrn, « se lever matin, » très souvent employé dans l’Ancien Testament, marque, suivant les cas, l’empressement avec lequel on fait une chose, dès le point du jour, la considérant comme la première à mériter l’attention, Gen., xix, 27 ; xxi, 14 ; Exod., viii, 20 ; Num., xiv, 40 ; Deut., xvi, 7 ; Jos., vii, 16 ; II Reg., xv, 2 ; Job, xxiv, 14 ; Prov., i, 28 ; viii, 17 ; Jer., vii, 25, etc., ou la diligence particulière qu’on apporte à exécuter un acte important. HPar., xxxvi, 15 ; Jer., vii, 13 ; Soph., iii, 7, etc. Pendant les jours qui précédèrent sa mort, le. Sauveur enseignait dans le Temple, et le peuple s’empressait dès le matin, wpôptÇev, manicabat, pour venir l’écouter. Luc, xxi, 38. Le verbe ôp8pîÇe[v correspond à l’hébreu hïSkîm, se lever matin, s’empresser. Quant au verbe manicare, qui vient de mane, « matin, » il n’existe pas dans le latin classique et étonnait saint Augustin, qui le trouvait dans une ancienne traduction de Jud., IX, 32, et lui préférait maturare. Quœst. in Heptat., vii, 46, t. xxxiv, col. 808. Il se lit dans saint Pierre Chrysologue, Serm., 82, t. lii, col. 431, et ensuite assez souvent dans le latin du moyen âge. H. Les être.

    1. MATRED##

MATRED (hébreu : Matrêd, « poussant en avant[ ?], » Septante : Matpa’ft), MaTpâS), fille de Mézaab et mère de Méétabel, laquelle devint la femme d’Adar ou Adad, roi d’Édom. Gen., xxxvi, 39 ; I Par., i, 50. Voir Adad 2, 1. 1, col. 165.

    1. MATSOR##

MATSOR (hébreu : Mâfôr), nom de l’Egypte, d’après un grand nombre de commentateurs modernes, dans IV Reg., Xix, 24 ; Is., xix, 6 ; xxxvii, 25 ; Mich., vii, 12. Les anciennes versions ont pris à tort ilâçôr pour un nom commun dans ces passages et lui ont donné le sens de « forteresse, fortification » (Septante itepioxti ; Vulgate : [civitas] munita), signification qu’a, en effet, ce mot, Ps. xxxi (xxx), 22 (in civitate munita) ; lx (lix),

II ; Hab., -11, 1 ; H Par., viii, 5, ou bien elles l’ont traduit d’une façon plus ou moins analogue. Ainsi la VulMATSOR — MATTHANA

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gâte, au lieu de i canaux d’Egypte s, traduit agute clausse, IV Reg., xjx, 24, c’est-à-dire « eaux gardées, défendues » ; rivi aggerum, Is., xix, 6 ; xxxvil, 25, pour « ruisseaux d’Egypte garnis de remblais, de retranchements » " ; civitates munîtes, Mich., vii, 12, « villes fortifiées » pour « villes d’Egypte ». On peut admettre d’ailleurs que le nom propre de Màsôr vient de ce que la route d’Asie en Egypte était défendue par des forteresses (égyptien : mtr, msr). Cf. Diodore de Sicile, i, 31 : ’H Aî-pjitroc TOtvTer^ôdev <pv<rixûc îu^iipMTai. Les anciens Égyptiens n’ont jamais désigné leur pays par ce nom, mais les Assyriens l’appelaient aussi Musur, Musru, Misr (Misri, généralement dans les lettres de Tell el-Amarna). Les consonnes du nom de Mâsôr sont les mêmes que celles de Misravm, ce qui a fait penser à quelques-uns que Màsôr est la forme simple de Misraïm, mais ce point est douteux.

    1. MATTHÂI##

MATTHÂI (Christian Friedrich von), philologue allemand, né à Grôst (Thuringe) le 4 mars 1744, mort à Moscou le 14 (26) septembre 1811. Après avoir reçu sa première éducation à l’école de Sainte-Croix (Kreuzschule ) à Dresde, il étudia depuis 1763 à l’université de Leipzig et devint en 1772, à Moscou, professeur extraordinaire de littérature ancienne. Dans un voyage en Saxe, une maladie mit obstacle à son retour en Russie. En 1785 on lui conféra, dans sa patrie, la place de recteur à la Landesschule de Misnie et en 1789, le titre de professeur de langue grecque à l’université de Wittenberg. Nommé en 1805 conseiller aulique de Russie, il retourna à Moscou, où il reprit ses fonctions de professeur de littérature classique. — Au xviii » siècle les trésors littéraires des bibliothèques de Russie étaient encore peu connus et peu exploités : Matthâi en tira grand profit pour ses nombreuses publications, dont il enrichit tant la littérature grecque profane que la littérature sacrée du Nouveau Testament. Ses œuvres principales relatives à la science biblique sont : 1° BîxTopoç 7rpE<rëuTÉpoij’AvTtox « ’  «  « x « l ètXXwv tivûv if fuv 7taTép<t>v c^riYTjcrie et ; to xaxà Mripxov âftov EÙafYÉXtov ; ex codicibus Mosquensibus in-8°, edidit, Moscou, 1775. — 2° Sanctorum Apostolorum septem Epistolse catholicæ ; ad codiçes manuscript. Mosquenses primum a se examinâtes recensuit et inedita scholia grmea adjecit, versionem latinam vulgatam codici diligentissime scripto conformavit, in-8°, Riga, 1782. — 3° Actus Apostolorum, grsece et latine ; textum ad codices manuscript. Mosquenses… recensuit, etc. (comme le précédent), in-8°, Riga, 1782. — 4° D. Pauli Epistolee ad Romanos, ad Titum et ad Philemonem, grsece et latine ; varias lecliones ex codicibus manuscript. Mosquens. numquam antea examinatis, scholia grseca, maximam partem inedila, et animadversiones criticas adjecit, in-8°, Riga, 1782. — 5° D. Pauli Epistolse ad Hebrssos et ad Colossenses, grmee et latine ; varias lecliones, etc. (comme le précédent), in-8°, Riga, 1784. — 6° D. Pauli Epistolse I" et II* ad Corinthios, grsece et latine ; varias lectiones, etc., in-8°, Riga, 1787. — 7° D. Pauli Epistolœ ad Galatas, adEphesios et ad Philippenses, grsece et latine ; varias lectiones, etc., in-8°, ’Riga, 1789. — SfD. Pauli Epistolse ad Thessalonicenses et ad Timotheum, grsece et latine ; varias lectiones, etc., et animadvefàiones criticas adjecit, ac denuo recensuit ; cum notitia codicum reliquorum omnium, codicum speciminibus et appendice, in-8°, Riga, 1785.— 9° Johannis Apocalypsis, grsece et latine ; ex codicibus numquam antea examinatis edidit et animadversiones criticas adjecit, in-8°, Riga, 1786. — 10° Evangelium secundum Joannem, grsece et latine ; ex codicibus, etc. (comme le précédent), in-8°, Riga, 1786. — 11° Evangelium secundum Lucam, grsece et latine, etc., in-8°, Riga, 1786. — 12° Evangelium secundum Marcum, grsece et latine, etc., in-8°, .Riga, 1787. — 13° Evangelium secundum Matthseum,

grsece et latine, etc., cumaliquot codicum speciminibus et indice codicum omnium, qui in quattuor Evangeliis primo sunt adhibiti, in-8°, Riga, 1788. — 14° Tredecim Epistolarum Pauli codex grsecus cum versione latina vetere vulgo antehieronymiana, olim Bœmerianus, nûne bibliolhecx electoralis Dresdensis, summa fide et diligentia transcriptus et editus ; cum tabulis sere expressis ; accessit ex eodem codice fragmentum Marci M, in-4°, Misnie, 1791. — 15° Euthymii Zigabeni Commentarius in quattuor Evangelia, grsece et latine.

— Textum grsecum numquam editum ad fidem duorum codic. membranaceorum bibliothecarum SS. Synodi Mosquensis auctoris œtate scriptorum diligenter recensuit et repetita versione latina Joannis Hentenii suisque adjectis animadversionibus edidit, 3 in-8°, Leipzig, 1792. — 16° Animadversiones ad Origenis Hexapla, ex, codice B SS. Synodi Mosquensis Num. xxxi in-folio excerptse. Dans le Repertorium fur biblische und morgenlàndische Litteratur, IV. Theil, Leipzig, 1779. — 17° Varise lectiones ad LXX, lectiones Aquilse, Symmachi, Theodotionis et editionis quintse et sextx ad Canticum canticorum, dans le même ouvrage, XVI. Theil, Leipzig, 1785. — 18° Ueber die sogenannten Recensionen, welche Bengel, Semler und Griesbach in dem griechischen Text des Neuen Testamentes wollen entdeckt haben, in-8°, Ronneberg et Zwickau, 1804. Matthâi considérait les manuscrits qu’il éditait comme le texte primitif du Nouveau Testament. Il y avait, en effet, une concordance presque complète dans ces documents. Quant aux différences peu considérables, Matthâi les attribuait aux essais de correction d’Origène, de saint Jean Chrysostome et d’autres Pères et commentateurs. C’était une erreur ; car les documents dont il se servait, d’ailleurs très importants, provenaient pour la plupart du mont Athos et ne contenaient que le texte byzantin. L’erreur fut relevée par Griesbach, Eichhorn, Semler et autres. Les éditions de Matthâi n’en conservent pas moins une valeur durable à cause des matériaux qu il y a réunis. — Voir Meusel, Dos gelehrte Teutschland, Lemgo, 1797, t. v, p. 68-72 ; Allgemeine deutsche Biographie, t. xx, p. 606 ; O. von Gebhardt, dans Herzog, Realencyclopâdie, 3e édit., t. ii, p. 757 ; A. Julicher, Einleitung in das Neue Test., Ie et 2e édit., Leipzig, 1894, p. 397 ; F. S. Freukle, Einleitung in das Neue Test., Fribourg, 1897, p. 456 ; Hermann Freiherr von Soden ; Die Schriften des Neuen Test., t. i, part, i, Berlin, 1902, p, 5. E. Michels.

    1. MATTHANA##

MATTHANA (hébreu : Matfânâh, « don ; » Septante : MavOavoiEfv), cinquante-troisième station des Israélites se rendant d’Egypte en Palestine. Elle est mentionnée seulement dans les Nombres, xxi, 18-19, entre Béer (le Puits) et Nahaliel. Voir Béer 2, t. i, col. 1548. Eusèbe et saint Jérôme, Onomast., édit. Larsow et Parthey, 1862, p. 274, 275, disent que Matthana s’appelait de leur temps Maschana et était situé sur l’Arnon, à douze milles (dix-huit kilomètres) à l’est de Médaba. Que Matthanah ait été à l’est de Médaba et à douze milles de cette ville, c’est assez difficile à admettre, parce qu’il en résulterait que les Israélites, pour se rendre dans la Terre Promise, auraient fait à l’est un long détour qu’on aurait de la peine à expliquer. Aussi Hengstenberg, Die Geschichte Bileani’s, in-8°, Berlin, 1842, p. 240, note, croit-il qu’il faut lire « au sud ». Voir aussi Keil, Pentateuch, t. iii, 1867, p. 147. Quoi qu’il en soit, le site précis de Matthanah est inconnu. Tout ce que l’on peut dire, c’est que cette localité était sur la route de l’Arnon aux plateaux de Moab, au nord de l’Arnon et à l’orient de la mer Morte. Le campement de Matthana n’est pas mentionné dans le catalogue de Num., xxxiii, 45. Des critiques modernes pensent qu’il ne doit pas y figurer, en effet, parce que Matfânâh est un nom commun, qui a été pris à tort pour un nom propre, et que les mots ;

ilim-midbdr Maftdndh, doivent être considérés comme formant la finale du chant du Puits (voir ce chant, Béeh 2, t. i, col. 1548), et signifient : « (Puits, ) don du désert. » Voir G. B. Gray, À critical and exegetical commentant on the Numbers, in-12, Edimbourg, 1903, p. 290. Cette interprétation est en contradiction avec les versions anciennes. Le Targum d’Onkélos et la version arabe font seuls exception. Wallon, Polyglott., t. r, p. 638-639 ; t. iv, p. 280-281.

MATTHI^ Christian, théologien danois protestant, né vers 1584 à Meldorp dads le Holstein, mort à Utrecht le 20 ou 21 janvier 1655. Après [avoir exercé diverses fonctions, il fut nommé professeur de théologie à Altdorf d’où il revint en 1622 à Meldorp comme surintendant des églises de la province. Il obtint, en outre, une chaire à l’université de Sora. En 1639, il vint en Hollande et habita successivement les villes de Leyde, La Haye et Utrecht. On remarque parmi ses ouvrages : Hethodica Sacrée Scripturse loca vindicandi ratio, in triade locoruni, videlicet Zach., xii, iO de Messise divinitate et officio ; Johan., xx, 28 de Thomse apostoli fide et confessione ; I Johan., ii, i, 2, de Christo advocato et propitiatore noslro, in-4°, Nuremberg, 1618 ; Historia patriarcharum in qua illorum ortus, progressas atque egressus methodo nova et artifwiosa describuntur, in-4, Lubeck, 1642 ; Analyste logica in Matthseum evangelistani, in-4°, Amsterdam, 1652 ; CommentariusinPsalmos pxiiitentiales, in-4°, Hambourg, 1692 ; Antilogiee Biblicæ sive conciliationes dictorum sacrorum Bibliorum, in-4°, Hambourg, 170Ô. — Voir Paquot, Mémoires pour servir à l’hist. littéraire des Pays-Bas, t. xr, p. 28 ; Walch, Biblioth. theologica, t. iii, p. 88 ; t. iv, p. 635,

837.
B. Heurtebize.
    1. MATTHIAS##

MATTHIAS, nom d’un ambassadeur syrien et d’un apôtre.

1. MATTHIAS, ambassadeur de Nicanor. H Mach., xiv, 19. Son nom est écrit en grec Mathathias. Voir Mathathias 8, col. 866.

2. MATTHIAS (grec : Ma69£a ?), apôtre qui fut substitué à Judas Iscariote. — Le nom de Matthias paraît contracté du nom hébreu Mattanyâh, qui signifie « don de Jéhovah », et qui revient plusieurs fois dans l’Ancien Testament. IV Beg., xxiv, 17 ; I Par., ix, 15 ; II Par., xx, 14 ; I Esd., x, 26, 27, 30, 37 ; II Esd., xi, 17, 22 ; xii, 8, 25, 35 ; xiii, 13. Matthias était un des soixante-douze disciples. Eusèbe, H. E., i, 12, t. xx, col. 117. Quand saint Pierre proposa de remplacer Judas, après l’ascension de Notre-Seigneur, il demanda que l’élu fût un de ces hommes qui n’avaient cessé d’accompagner les Apôtres durant la vie publique du Seigneur Jésus, depuis le baptême de Jean-Baptiste jusqu’à l’ascension, et qui pût être avec eux le témoin de sa résurrection. Il fallait, en effet, qu’il fût capable de remplir parfaitement la mission dont l’infidèle s’était rendu indigne. Deux disciples furent mis en avant comme répondant exactement aux conditions exigées, Joseph Barsabas, surnommé le Juste, et Matthias. Rien ne permet de porter un jugement sur la valeur relative des deux personnages, malgré le surnom de Juste attribué au premier, et la seconde place assignée à Matthias dans le récit. Les Apôtres auraient pu choisir eux-mêmes entre les deux candidats. Ils préférèrent s’adresser directement à Dieu, afin qu’il désignât lui-même son élu au moyen du sort. De cette manière, l’appel du remplaçant de Judas serait aussi directement divin que celui des onze autres membres du collège apostolique. Le sort désigna Matthias, qui aussitôt fut mis au nombre des Apôtres. Act., i, 21-26. — On n’a que de vagues renseignements sur le ministère ultérieurde saint Matthias. Héracléon, au rapport de

Clément d’Alexandrie, Strom., nr, 9, t. Tin, col. 1281, prétend qu’il mourut de mort naturelle, ainsi que saint Philippe, saint Matthieu et saint Thomas. Nicéphore, H. E., ii, 40, t. cxlv, col. 862, paraît plus digne de foi, quand il dit que saint Matthias prêcha l’Évangile en Ethiopie et y subit le martyre. D’après une autre tradition, il aurait prêché la foi en Judée et y aurait été lapidé par les Juifs. Acta sanctorum, 21 februarii t. iii,

1668, p. 444445.
H. Lesêtre.

3. MATTHIAS (ÉVANGILE APOCRYPHE DE). Voir

Évangiles apocryphes, ii, 4°, t. ii, col. 2117.

    1. MATTHIEU##

MATTHIEU (SAINT), apôtre et évangéliste^fig. 232). I. Nom. — 1° Orthographe. — Le nom de saint Matthieuest écrit en grec de deux façons. Dans les plus anciens manuscrits onciaux ii, B, D, on lit Ma96aîoç, et cette forme a été adoptée par Lachmann, Tischendorf, Trégelles, Westcott et Hort, etc. Dans les onciaux plus ré 232. — Saint Matthieu.

D’après Cahier, Caractéristiques des saints, t. i, p. 395.

cents C, E, K, L, etc., et dans les cursifs, on trouveMat8aïoç r lecture qui a été conservée par Griesbach et en général dans les éditions du texte reçu. Cette diversité d’orthographe suppose une origine différente du nom. Schiniedel, Grammatik des neutestamentlichen Sprachidioms, 8 S édit., Gœttingue, 1894, et Blass, Grammatik des neutestamentlichen Griechisch, Gœttingue, 1896, § 3, n. 1, préfèrent la forme MatGaïo ; . Suivant ce dernier, la leçon MaBBaïoç serait le résultat de l’assimilation du t de MatOaîo ; avec le 0, par le même principe que Bà-nyot est devenu Bixx ^’-A-tOsî’A691ç, Earcipw Ea<p<p(i. Curtius, Grundzûge der griechischen Etymologie, p. 418, croit que Ma88aîo ; était l’orthographe primitive, mais que, conformément à la règle générale de l’adoucissement dans la prononciation grecque, les deux aspirées 06 étant trop dures, on a changé la première en une sourde t. S’il en est ainsi, la forme MatOato ; serait conforme à la prononciation et la forme primitive Ma66ato ; conforme à l’étymologie. La leçon Ma69aîoç est la transcription grecque d’une forme héoraïque ou arainéenne. Gelle-ci

serait » BD, >no, n « ED ou ixiin. Ces formes diverses auraient --.- T.- -T été transcrites en grec avec la finale « to ; , conformément

à de nombreux exemples analogues qu’on trouve dans l’Ancien Testament. >fid a en sa faveur les noms hébreux

en >- transcrits en ato ; comme MapSo^aïo ; , Eaëëaftaaç, Bnjêa : oç, etc. » nn ressemblerait aux noms de peuples terminés en > et devenus, par exemple, ’IouSaîo ; , Xavavaïo ; , etc. n’ïin semble moins probable, car les noms en n » ont ordinairement une transcription grecque en « a, ta ;  ; ainsi rwnn est devenu Ma-rOavîaç. La forme ara T : —

xiiéenne >> « ii, qu’on trouve dans le Talmud, traité Sanhédrin, 43, Laible-Dalmann, Jésus Christus im Talmud, p. 15*, serait analogue à indt, Zotx> ; aîoç. Cf. Dalmann,

Die Worte Jesu, Leipzig, 1898, t. i, p. 40-41.

2° Étymologie. — Quelle qu’ait été la lecture du nom de Matthieu, on en a proposé diverses étymologies. Gesenius, Thésaurus, Leipzig, 1839, t. ii, p. 929, et Fûrst, Hebr.-chald. Handwôrterbuch, 3e édit., Leipzig, 1876, t. i, p. 806, pensent que » fio, qui est une abréviation

de >nBD, a le même sens que n’nmiD, MccTToeNaç, contracté parfois en Ma-rôia ; , et signifie « don de Jéhovah ». On aboutit à la même signification en rapprochant >fid de » 3no et de h>jbd. Les critiques, qui comparent tnn aux autres noms propres de même terminaison et de signification passive, le traduisent par « donné, gratifié ». Cf. S. Jérôme, Liber de nominibus hebraicis, t. xxiii, col. 842. Ewald, Hitzig, Noldeke, etc., font dériver >rra de >pqn et traduisent « le fidèle ». Ils supposent que le N initial est tombé sous l’influence de la langue araméenne. Enfin Grimm, dans les Theolog. Studien und Kriliken, 1870, p. 723-729 ; Lexicon grwco-latinum in libros N. T., 1879, a fait venir ce nom de d>îid, pluriel du singulier inusité nn, de telle sorte qu’il signifierait a. le viril ». >no seraitalorsunadjectifsemblableà >jn, ’Ayyocïoç, venant de iii, « fête. » Voir t. i, col. 266.

II. Son identité avec Lévi. — La première fois que saint Matthieu est nommé dans l’Évangile, Matth., ix, 9, c’est au sujet de sa vocation. Or dans les passages parallèles de saint Marc, ii, 14, et de saint Luc, v, 27, il est appelé Lévi. Cette différence de nom a donné occasion au problème, depuis longtemps discuté, de la distinction des personnages nommés Matthieu et Lévi ou de leur identité. Au rapport de Clément d’Alexandrie, Strom., iv, 9, t. viii, col. 1281, le valentinien Héracléon distinguait Matthieu de Lévi et les citait tous deux au nombre de ceux qui n’avaient pas confessé Jésus-Christ devant les tribunaux. Clément, en reproduisant les paroles d’Héracléon, approuve seulement la distinction faite par cet hérétique entre ceux qui ont confessé la foi par la pratique de toute leur vie et ceux qui l’ont confessée devant les juges. Il ne porte pas de jugement sur les exemples donnés par Héracléon. D’ailleurs, dans une note sur les Constitutions apostoliques, 1. VIII, c. xxii, t. i, col. 1118, Cotelier pense qu’Héracléon a écrit Aeuiç pour Aeët ou AeSëatoç. Origène, Cont. Celsum, i, 62, t xi, col. 773, distingue le publicain Matthieu d’un autre publicain nommé Asërj ?, qui a suivi Jésus, mais n’a pas été apôtre, sinon suivant certains exemplairesdeJ’Évangile de Marc. Par ces derniers mots, Origène faisait allusion sans doute aux manuscrits du second Évangile qui, comme le Codex Bezm, D, les manuscrits a, b, c, d, e, ff, i> q, r de l’ancienne Vulgate avaient, iii, 18, Lebbée, au lieu de Thaddée. Wordsworth et White, Novum Testamentum D. N. J. C, Oxford, 1891, 1. 1, fasc. 2, p. 201. Origène confondait donc Lévi avec Lebbée. Presque tous les mêmes manuscrits avec les cursifs grecs, 13, 69, 124, et le manuscrit G de la Vulgate (Sangermanensis) du IXe siècle, avaient, Marc, ii, 14, au lieu de Lévi, fils d’Alphée, Jacques, fils d’Alphée. Wordsworth

et White, op. cit., p. 201. Saint Chrysostome, In Matth., hom. xxxii, n. 3, t. lvii, col. 381, croyait que Jacques, fils d’Alphée, comme Matthieu, avait été, lui aussi, publicain. Cette opinion aurait été aussi adoptée par Photius, dans Possin, Catena Patrum grsecorum, Marc, ii, 14, et exprimée dans une des deux listes d’apôtres publiées par Cotelier, Constit. apost., II, lxiii, t. i, col. 755. Certains manuscrits grecs de Théodoret, In Num., q. xvi, t. lxxx, col. 368, présentent la leçon ©aSêaîoç 6 xai Aeêt, tandis que d’autres disent ©otSSatoç o xa Asééaîo ; . Cf. Acta sanctorum, septembris t. VI, p. 200. On ne peut pas citer comme représentant la pensée d’Origène, la préface de son commentaire sur l’ÉpItre aux Romains, t. xiv, col. 836, car elle est de Rufim qui a traduit en latin ce commentaire. Quoi qu’il en soit de la confusion de Lévi avec Lebbée et conséquemment de sa distinction d’avec Matthieu par Origène, il semble’difficile de ne pas admettre l’identité de Lévi et de Matthieu. En effet, les trois récits évangéliques de la vocation du publicain se ressemblent pour le fond et pour le style et ne diffèrent qu’au sujet du nom, Matthieu ou* Lévi. En outre, ils sont placés dans le même ensemble de l’histoire de Jésus. Ils sont précédés tous trois du même miracle, la guérison du paralytique de Capharnaùm et suivis du repas offert par le publicain à Jésus et à’ses disciples avec les mêmes circonstances du blâme des pharisiens et de la réponse du Maître. Ils rapportent donc évidemment le même fait. Les différents noms du héros ne s’opposent pas à l’identité de la personne, car plusieurs autres personnages évangéliques ont porté deux noms, non seulement un nom hébreu et un nom grec ou latin, mais même deux noms hébreux, par exemple Joseph et Barsabas, voir t. i, col. 1470, Joseph et Barnabas, ibid., col. 1461, et même trois, comme Jude, Lebbée et Thaddée, voir col.143 et t. iii, col. 1802. L’analogie avec Simon, surnommé Céphas, Joseph, surnommé Barnabas, permet de conclure que Lévi était le nom juif du publicain, et Matthieu le surnom qu’il reçut comme chrétien. L’auteur du premier Évangile le laisse entendre, en disant Ma66 « îov ztàv.zo-i, IX, 9. Cette façon de parler signifie : « l’homme connu sous le nom de… » Cf. Matth., i, 16 ; x, 2 ; xxvii, 17, 22 ; Eph., H, 11. Elle indique ici que le publicain était connu dans l’Église sous le nom de Matthieu au moment où écrivait l’auteur qui l’employait. Donc plus probablement il se nommait Lévi à l’époque de sa vocation, Marc, ii, 14 ; Luc, v, 27, 29 ; plus tard, il fut appelé Matthieu et ce dernier nom fut transporté par le premier évangéliste dans le récit de sa vocation. Eusèbe, Demonst. evang., ni, 5, t. xxil, col. 216 ; saint Jérôme, In Matth., ix, 9, t. xxvi, col. 55, 56 ; saint Chrysostome, In Matth., hom. xxx, n. 1, t. lvii, col. 361-362, y ont reconnu un acte d’humilité de la part du premier évangéliste. Tandis que par respect pour sa personne saint Marc et saint Luc citent son ancien nom de Lévi, lui-même ne craint pas d’avouer sa première profession et de se nommer, Matthieu le publicain.

Resch, Aussercanonische Paralleltext zu den Evangelien, dans Texte und Unters., Leipzig, 1896, t. x, fasc. 4, p. 69, a cherché à identifier saint Matthieu avec Nathanæl. Celui-ci, en effet, semble avoir été appelé par Jésus à l’apostolat, Joa., i, 45-51. Or, son nom ne se trouve expressément dans aucune des listes apostoliques. Cependant, si Nathanæl a été apôtre, son nom> doit être l’un des douze, et précisément Nathanæl, m Dieu a donné, » a le même sens étymologique que Matthieu, « don de Jéhovah. » Nathanæl est donc la ? même personne que Matthieu. Cette identification est inadmissible, car la vocation de Nathanæl n’a rien de commun avec celle de Matthieu. Aussi Nathanæl étant un apôtre, vaut-il mieux l’identifier, comme on le fait plus généralement, avec saint Barthélémy. Voir t. i, . col. 1470-1472. 875 MATTHIEU (SAINT) — MATTHIEU (ÉVANGILE DE SAINT)

876

III. Matthieu dans les Évangiles. — 1° Lévi, Juif d’origine comme son nom l’indique, était fils d’Alphée. Marc., ii, 14. L’Évangile de Pierre, xiv, 60, dit aussi que Lévi était fils d’Alphée : Aeueiç i toO’AXçatfov. E. Preuschen, Antilegomena, Giessen, 1901, p. 18. Celte filiation a été l’occasion de la confusion, signalée plus haut, de Lévi avec Jacques, fils d’Alphée. Mais les deux apôtres ne sont pas parents, et il n’y a pas identité, mais simple homonymie pour leurs pères. Voir t. i, col. 418. Du reste, si Matthieu et Jacques avaient été frères, ils auraient, vraisemblablement, été réunis dans les listes des apôtres comme cela a lieu pour les deux couples de frères, Simon et André, Jacques et Jean, fils de Zébédée. Voir t. i, col. 783. Tatien, au témoignage d’Ischodad, auteur syrien du IXe siècle, aurait rapproché Matthieu le publicain de Jacques Lebbée, fils d’Alphée. Cf. Goussen, Studia biblica, t. i, p. 66. Lévi était teXûvïjç, « publicain, » Luc, v, 27, non pas sans doute un employé romain, ni même un fermier des impôts, >N31,

mais un simple péager, D31a, au service d’Hérode^ ou

du fermier des impôts de la ville ou de la contrée. Lévy, Neuhebr. Wôrterbuch, Leipzig, 1883, t. iii, p. 114. Voir Publicain. Il était assis à son bureau de douanier à Capharnaûm même, qui était peut-être aussi le lieu de sa naissance, lorsque Jésus, passant par là, le vit et l’appela à le suivre. Cette vocation n’était pas encore la vocation à l’apostolat, mais le simple appel à la suite de Jésus comme compagnon habituel et disciple permanent. Lévi, dont le caractère paraît en cette occurrence ferme et décidé, se levant et abandonnant tout, ajoute saint Luc, v, 28, suivit Jésus. Matth., rx, 9 ; Marc, ii, 14 ; Luc, v, 27, 28.

2° Immédiatement après son appel, Matthieu offre à Jésus, chez lui, un repas auquel il invite les péagers de Capharnaûm, et les pharisiens s’indignent de voir Jésus manger avec les publicains. Matth., ix, 10, 11 ; Marc, ii, 15, 16 ; Luc, v, 29, 30. Ce dernier évangéliste dit expressément que Lévi fit un grand repas dans sa propre demeure. Le récit de Marc a aussi nécessairement ce sens, car en disant que les publicains mangeaient avec Jésus, le narrateur laisse bien entendre que le pronom etÙToO se rapporte à Matthieu et non à Jésus. Il n’y a pas de raison de mettre le premier Évangile en contradiction avec les deux autres, et de prétendre que Jésus lui-même faisait un banquet dans sa propre demeure. Matthieu jouissait donc d’une certaine aisance, puisqu’il célébrait par une fête son adieu à son emploi et son entrée dans la suite de Jésus. Matthieu n’est plus nommé dans l’Évangile que dans les listes des douze Apôtres. Or, tandis que lui-même, par modestie sans doute, ne se donne que le huitième rang, Matth., x, 3, avec la qualification de publicain, saint Marc, iii, 18, et saint Luc, vi, 15, le placent au septième sans épithète. Voir t. i, col. 783, 784. Disciple et apôtre, il accompagna Jésus au cours de sa vie publique et de sa passion et fut ainsi le témoin oculaire et auriculaire des faits et des discours de son Maitré, qu’il devait plus tard consigner par écrit. Voir t. i, col. 784, 785. Il vit le Seigneur ressuscité apparaître aux onze réunis, et il assista à son ascension.

IV. Matthieu après la mort de Jésus. — 1° Matthieu n’est pas même nommé dans les autres écrits du Nouveau Testament, sinon au livre des Actes, i, 13, dans la liste des apôtres, où il figure au huitième rang. Il prit donc part à l’élection de Matthias comme il avait reçu le Saint-Esprit à la Pentecôte, et il demeura avec les autres apôtres à Jérusalem jusqu’au moment de leur dispersion pour aller prêcher partout l’Évangile. Belser, Einlèitung in dos N. T., Fribourg-en-Brisgau, 1901, p. 25, 34, fixe cette dispersion à l’an 42. Cf. Harnack, Die Chronologie, Leipzig, 1897, 1. 1, p. 243 sq. Clément d’Alexandrie, Psédag., ii, 1, t. toi, col. 405, nous apprend

que saint Matthieu menait une vie austère, s’abstenait de viandes et ne mangeait que des fruits, des baies et des légumes. Mais Zahn pense que, pour ce détail, Clément a confondu Matthieu avec Matthias (confusion qui s’est produite souvent, et sans dessein préconçu, dans l’antiquité ) et qu’il l’a emprunté à l’Évangile ou aux Traditions de Matthias, qu’il cite plusieurs fois, Geschichte des Neutestamentlichen Kanons, Erlangen et Leipzig, 1892, . t. ii, p. 751-761 ; cf. Preuschen, Antilegomena, p. 12-13. Eusèbe, en effet, H. E., iii, 29, t. xx, col. 277, nous apprend que Matthias enseignait qu’il ne fallait pas manger de viande. Clément ajoute au même endroit que saint Matthieu a prêché l’Évangile aux Juifs pendant quinze ans et qu’ensuite il est allé convertir les païens. Saint Irénée, Cont. hxr., 1. III, c i, n. 1, t. vii, col. 844 r atteste aussi, au moins indirectement, la prédication de saint Matthieu en Palestine ; cf. Eusèbe, H. E., v, 8, t. xx, col. 449 ; il suppose une prédication orale de saint Matthieu aux Hébreux, quand il affirme qu’il leur a laissé encore, %oà, par écrit un Évangile dans leur langue maternelle. Eusèbe, H. E., iii, 24, col. 265, affirme expressément cet apostolat chez les Hébreux.

2° La plus grande incertitude règne au sujet des régions que saint Matthieu a évangélisées après son départ de la Palestine, et les écrivains ecclésiastiques sont là-dessys en complet désaccord. Rufin, H. E., i, 9, t. xxi, col. 478 ; saint Eucher, Inst. ad Salon., i, 2, t. L, col. 809 ; saint Grégoire le Grand, In I Reg., iv, 13, t. lxxix, col. 243 ; l’historien Socrate, H. E., i, 19, t. Lxvii, col. 125, disent qu’il alla en Ethiopie, et c’est la tradition adoptée parle bréviaire romain. Saint Paulin de Noie, Poema, xix, t. lxi, col. 514, assure qu’il a converti les Parthes. Saint Isidore de Séville, De ortu et abilu Patrum, 76, t. lxxxiii, col. 153, le fait venir en Macédoine et mourir chez les Parthes. Siméon Métaphraste, Vita S. Matth., iv, 5, t. cxv, col. 817, rapporte qu’il a évangélisé les Parthes et les Éthiopiens. Nicéphore Calliste, H. E., ii, 41, t. CXLV, col. 865, dit qu’il a prêché l’Évangile auxviithropophages. Ce dernier renseignement ne proviendrait-il pas de la confusion souvent faite entre saint Matthieu et saint Matthias et ne serait-il pas tiré des Actes grecs de saint André et de saint Matthias dans la cité des Anthropophages, qui existent en syriaque sous le nom de saint Matthieu et de saint André ? Les mêmes incertitudes régnent sur le temps, le lieu et la mort du premier évangéliste. Tandis que le gnostique Héracléon, dont le témoignage rapporté par Clément d’Alexandrie a été cité plus haut, range saint Matthieu au nombre des témoins de la foi qui n’ont pas subi le genre de la mort violente pour Jésus-Christ, les autres écrivains anciens qui parlent de son trépas le font martyr dans les lieux divers que, selon eux, il aurait évangélisés. Les détails sur son martyre contenus dans ses Actes apocryphes, voir t. i, col. 163-164, ne sont pas dignes de foi. L’Eglise latine célèbre sa fête le 21 septembre, et l’Église grecque le 16 novembre. Ses reliques auraient été découvertes, à Salerne, en 1080, par saint Alphane. Voir Acta sanctoi’um, septembris t. vi, p. 211-216. Sur les légendes qui le concernent, voir Lipsius, Dia apocryphen Apos~ telgeschichten und Apostellegenden, Brunswick, t. ii, p. 109-141 ; Bonnet, Acta Apostolorum apocvypha, Leipzig, 1898, t. ii, p. 217-262. On a mis sous le nom de saint Matthieu un Liber de ortu beatse Mariæ et infantia Salvaloris, dont le texte latin est une adaptation du grec publiée au v siècle. C. Tischendorf, Evangelia apoci’ypha, p. 51-112. Généralement on représente l’évangéliste saint Matthieu sous le symbole de l’homme ailé, et l’iconographie chrétienne lui met la lance à la maincommeattribut caractéristique. Cf. À ctasanctorum, septembris t. vi, p. 194-227. E. Mangenot.

2. MATTHIEU (ÉVANGILE DE SAINT). — I. AUTHEN-TICITÉ. — L’authenticité du premier Évangile n’a été con

' testée, dans l’antiquité, que par Fauste le manichéen qui, au témoignage de saint Augustin, Cont. Faustum manich., xvii, 1-4, t. xlii, col. 339-342, prétendait que saint Matthieu n'était pas l’auteur de cet Évangile, car il ne pouvait parler de lui-même à la troisième personne. Les anabaptistes soutinrent plus tard que le juif Matthieu, qui a écrit en hébreu, n’a pas rédigé le premier Évangile qui est écrit en grec. Sixte de Sienne, Bibliotheca sacra, 1. VII, hær. ii, Naples, 1742, p. 980. Beaucoup de critiques modernes depuis Schleiermacher n’accordent plus à saint Matthieu que la composition d’une collection de discours de NotreSeigneur qui est entrée dans l'Évangile grec dit de saint Matthieu et a été utilisée par saint Marc et saint Luc. Voir t. H, col. 2096-2097. Ils s’appuient sur une affirmation de Papias que nous allons citer et interpréter et sur d’autres arguments qui seront discutés dans la suite de cet article. La tradition ecclésiastique n’a jamais hésité à attribuer à saint Matthieu le premier Évangile canonique qui a été primitivement rédigé en araméen et dont nous ne possédons plus qu’une traduction grecque. Réservant pour plus tard la question de la langue originale de cet Évangile, nous prouverons d’abord que le texte grec a toujours été regardé dans l'Église comme l'œuvre de saint Matthieu.

1° Existence et connaissance de l'Évangile grec de saint Matthieu à la fin du I er siècle et au commencement du n°. — Les Pères apostoliques les plus anciens connaissent cet Évangile. Si la première épttre de saint Clément de Rome aux Corinthiens ne contient que de simples allusions au texte grec de saint Matthieu, la Didaché a des citations textuelles. Voir t. ii, col. 20632064. Ainsi, Didaché, i, 2-6, Matth., xxii, 37-39 ; vii, 12 ; v, 44, 46, 47 ; vi, 39, 48, 41, 40, 26 ; Didaché, ii, 2, 3, Matth., xix, 18 ; v, 33 ; Didaché, iii, 7, Matth., v, 5 ; Didaché, v, Matth., xv, 19 ; Didaché, vi, 1, Matth., xxiv, 4 ; Didaché, vii, 1, 3, Matth., xxvtn, 19 ; Didaché, viii, 1, 2, Matth., vi, 16, 5, 9-13 ; Didaché, ix, 5, Matth., vii, 6 ; Didaché, x, 5, 6, Matth., xxiv, 31 ; xxi, 9, 15 ; Didaché, xi, 7, Matth., xti, 31 ; Didaché, xii, 1, Matth., xxi, 9 ; Didaché, xiii, 1, Matth., x, 10 ; Didaché, xv, 3, 4, Matth., v, 22-26 ; xviii, 15-17 (comme citation expresse de l'Évangile) ; Didaché, xvi, 1, 4-7, Matth., xxv, 13 ; xxiv, 24, 10 ; x, 22 ; xxiv, 13, 30, 31 ; xxvi, 64. Funk, Patres apostolici, 2e édit., Tubingue, 1901, t. i, p. 2-36. Nous avons déjà signalé, t. ii, col. 2084, les emprunts et les allusions faits à l'Évangile de saint Matthieu par l'épttre de Barnabe et nous avons dit qu’une de ces citations est donnée comme scripturaire. Saint Ignace d’Antioche et saint Polycarpe connaissent aussi le premier Évangile. Voir t, ii, col. 2065. Mais de tous les témoignages des Pères apostoliques le plus précieux, parce qu’il est précis et affirme le premier que Matthieu est l’auteur d’un Évangile, est celui de Papias, évéque d’Hiérapolis et disciple de saint Jean. Eusèbe, H. E., va, 39, t. xx, col. 300, nous l’a conservé. Il est court et clair ; mais les critiques l’ont obscurci par les interprétations les plus diverses. Citons-le d’abord dans sa teneur originale : MxiOno ; y.ïv ovv âêpatSi SiccXIxtm t » Xéytot tfvveypâ^aTo (ou uvveTàÇaTo), T|pu.iriveu(re 8' aùtà w ; rjv Suvatôs (ou 7]8ûvaro, tjv Suvoctov) jfxaaro ; . Papias disait donc de saint Matthieu qu’il avait écrit en Tièbreu x « "kéyia, que chacun interprétait de son mieux. Quelques critiques pensent, les uns sans aucune hésitation, les autres avec vraisemblance seulement, que Papias avait appris ce renseignement, comme celui qui se rapporte à l'Évangile de saint Marc, du prêtre Jean. Ils le concluent du rapprochement des deux données dans Eusèbe. Mais l’historien de l'Église ne le dit pas explicitement et cite seulement les paroles de Papias sur Matthieu ; ce pourrait donc fort bien n'être que le dire de Papias. Eusèbe, son traducteur syriaque et tous ceux qui ont cité le texte de Papias ont entendu de l'Évangile même

de saint Matthieu les A<5yta que l'évêqué d’Hiérapolis assure avoir été rédigés en hébreu par saint Matthieu. Schleiermacher, dans les Theologische Studien und Kritiken, 1832, p. 735-768, prétendit le premier que par l’expression ; ta Xôyia, Papias ne désignait pas l'Évangile de saint Matthieu, mais bien un livre différent, qui était écrit en hébreu et qui ne contenait que des discours de Notre-Seigneur, Xdytoc xupiaxct. Saint Matthieu aurait donc composé seulement une collection ou un recueil des discours de Jésus, qui est devenu pour de nombreux critiques une des deux sources écrites des synoptiques. Voir t. H, col. 2096-2097. Cette conclusion ressortirait non seulement du sens précis du mot Xôyta, qui désigne spécifiquement des paroles, des sentences, des discours, mais encore du contraste établi, dit-on, par Papias entre l'œuvre de Matthieu qui ne comprenait en hébreu que des discours de Jésus, et l'Évangile de saint Marc qui rapportait, lui, toi ïraô toû XpiuroO $ Xe^ôévta tj tpcr/ôivta, les paroles et les actes du Christ. Il n’est pas certain que Papias, dont l’ouvrage est perdu, établissait un contraste entre le contenu des deux premiers Évangiles, et encore moins qu’Eusèbe, en juxtaposant les deux renseignements de l'évêqué d’Hiérapolis, ait voulu déterminer la différence du contenu des écrits de saint Matthieu et de saint Marc. D’ailleurs, quels que soient les sens divers du mot Xdyiov, Papias désignait par les Xoyia xuptaxâ de Matthieu autre chose qu’un recueil de discours du Seigneur. Deux observations suffisent à le montrer. Papias ne dit-il pas d’abord de l'Évangile de Marc, qui rapportait les paroles et les actes du Christ, qu’il reproduisait la prédication de Pierre et non oTjvtaÇiv twv xupiocxûv X<Sywv ? En outre, son propre écrit était intitulé : Aoyîtov xupcaxûv cÇKiyTJiTK ; . Or nous savons par les fragments qui nous en restent que Papias n’expliquait pas seulement des paroles et des sentences du Seigneur, mais qu’il racontait encore des faits de sa vie. L’expression : ri Xôyia pourrait donc fort bien signifier autre chose qu’un recueil de discours et représenter le contenu d’un récit pareil à celui de l'Évangile actuel de saint Matthieu. Mais il ne faut pas le serrer de trop près et y chercher une indication précise du contenu de l'écrit de Matthieu. Papias désigne celui-ci d’un terme général, suffisamment clair pour ses lecteurs, car son intention, semble-t-il, n’est pas d’indiquer la nature précise du contenu. Il veut plutôt signaler que l'Évangile de saint Matthieu a été primitivement rédigé en hébreu. C’est sur la langue originale de cet écrit qu’il met l’accent ; la mention formelle des interprétations orales et multiples des premiers temps le montre bien. Papias parle vraisemblablement, en effet, des traductions grecques que chacun faisait comme il pouvait dans les assemblées liturgiques sous forme de targum oral, tant qu’il n’y eut pas de version de l'Évangile hébreu. Enfin, l’aoriste T|P|JHÎvev<TS semble viser une époque passée et permet de conclure que Papias connaissait déjà une version grecque écrite de l'Évangile de saint Matthieu. Voir t. ii, col. 2066. Cf. Funk, Patres apostolici, Tubingue, 1901, t. i, p. 359-360. Les Pères apostoliques à la fin du I er siècle et au commencement du H" connaissaient donc le texte grec du premier Évangile canonique, et Papias savait que cet écrit avait été primitivement rédigé en hébreu par saint Matthieu.

2° Connaissance et diffusion de l'Évangile grec de saint Matthieu au cours du ip siècle. — Cet Evangile se répand par tout le monde chrétien et se trouve aux mains des catholiques et des hérétiques eux-mêmeSi — 1. Chez les catholiques. — Le Pasteur d’Hermas, composé à Rome vers 140, cite plusieurs passages de saint Matthieu. Signalons seulement les citations certaines : Matth., xix, 17, Sim., v, 1, 5 ; 3, 2, 5 ; Matth., xjii, 38, Sim., v, 5, 2 ; Matth., xxviii, 18, Sim., v, 6, 4 ; 7, 3 ; Matth., xvi, 27 ; xxi, 22, Sim., iii, 3, 6 ; Matth., x, 39, Sim., îx, 26, 3. Funk, Patres apostolici, t. i, p, 531,

534, 538, 54Ô, 642, 548, 622. La m Clementis, qui est du même temps, cite assez souvent saint Matthieu. Voir t. ii, col. 2067. Saint Justin connaît des Mémoires des Apôtres et fait de nombreux emprunts au premier Évangile, lbid., col. 2068. Cet Évangile était un des quatre qui entraient dans la trame du Aià xtaaiçutv de Tatien. Athénagore, Légat, pro christ., 11, 12, 32, t. vi, col. 912, 913, 964. cite des paroles de Notre-Seigneur qu’on ne retrouve sous cette forme que dans saint Matthieu. Saint Théophile d’Antioche fait de même. Ad Autol., m, 13, 14, t. vi, col. 1140. D’ailleurs saint Jérôme a eu en mains un commentaire de cet apologiste sur l’Évangile de saint Matthieu. In Matth., prol., t. xxvi, col. 20 ; Epist., cxxi, ad Algasiam, 6, t. xxii, col. 1020. Voir t. ii, col. 2072. — 2. Chez les hérétiques. — À Alexandrie vers l’an 120, Basilide avait écrit une sorte de commentaire sur l’Évangile. Or un passage, rapporté par Clément d’Alexandrie, Strom., iii, 1, t. viii, col. 1100, est l’explication de Matth., xix, 10-12. Voir t. ii, col. 2064. Marcion connaissait le premier Évangile, qu’il rejetait. Valentin acceptait les quatre Évangiles ; son disciple Marc citait l’Evangile de saint Matthieu. Les ébionites se servaient uniquement de cet Évangile. Les ophites, les séthiens et le docète CarpOcrate s’en inspiraient et le citaient. Voir t. ii, col. 2070. Le Protévangile de Jacques, qui est de la fin du IIe siècle, emprunte à saint Matthieu des récits de l’enfance de Jésus. Voir t. ii, col. 2115. Tous ces témoignagnes visent exclusivement l’Évangile grec de saint Matthieu, et comme ils proviennent de toutes les parties du monde chrétien, ils prouvent que ce texte grec était répandu partout au il » siècle.

3° Affirmations explicites et constantes que saint Matthieu est l’auleur du premier Évangile. — Dès la fin du IIe siècle, les Pères et les écrivains ecclésiastiques tout en se servant exclusivement du texte grec du premier Évangile, savent et affirment expressément que saint Matthieu en est l’auteur, quoiqu’il ait primitivement écrit en hébreu. Ainsi saint Irénée, qui parle de l’original hébreu, Cont. hser., iii, 1, t. vii, col. 844, ne cite que le texte grec, et il prouve par la tradition ecclésiastique et l’aveu des hérétiques eux-mêmes que ce texte grec est un des quatre Évangiles canoniques, reçus dans toute l’Église. Voir t. ii, col. 2071-2072. En Afrique Tertullien expose les mêmes principes que l’évêque de Lyon. Il appelle saint Matthieu fidelissimus Evangelii commentator, De came Christi, c. xxii, t. H, col. 789. Le fragment de Muratori, d’origine romaine, bien que ne mentionnant dans la partie conservée que les deux derniers Évangiles, connaissait les premiers et les noms de leurs auteurs. Nous pouvons le conclure du nombre des Évangiles canoniques qu’il indique et des notices qu’il fournit sur saint Luc et saint Jean. Clément d’Alexandrie, qui n’admet non plus que quatre Évangiles canoniques, assure que saint Matthieu est l’auteur du premier, qu’ailleurs il cite en grec. Eusèbe, H. E., vi, 14, t. xx, col. 552. Origène est on ne peut plus catégorique : ’ûç lv itapaSô<7£i jjlixOwv Ttep’i tûv ttaaâpiav eùaYY&Xt’cov, a xal |A^va àvavTcp^n]Tâ É<mv èv ty] ExxXeffîi toû ©eoù - ôti itpûTov |iÈv ylfp<xitza.i tô xatà tov îeots T£>.(ivr)v, ûorepov Sï àîtoVroXov’ïiriffoû XptitoO MaTOaîov. Eusèbe, H. E., mi, 25, ibid., col. 581. Eusèbe lui-même, H. E., iii, 24, col. 265, dit expressément : MeaSocîoç p.èv icapaSoù ; tô xoct* ciùtov eùaYYÉ^’ov. Saint Cyrille de Jérusalem, Catech. , xiv, 15, t. xxxiii, col. 884, dit aussi : MatOaîo ; ô Ypâi^as tô eùafY^’0V - Saint jipiphane, User, xxx, 3, t. xli, col. 409, affirme de saint Matthieu que èv tîj xatv ?i Sia6^xi) ixair^ata rrjv toû EÙaYYEXi’ou èxŒaiv te xa ; ^^puY|ia. Saint Jérôme déclare à plusieurs reprises que saint Matthieu est l’auteur du premier ivangile, De viris illust., 3, t. xxiii, col. 613 ; Comment, in Matth., prol., t. xxvi, col. 18. Cf. S. Chrysostome, In Matth. Honi. i, 3, t. lvii, col. 17. Tous les autres Pères sont du même

avis ; il est inutile de rapporter leurs témoignages, car personne ne nie que telle ait été la tradition unanime de l’Église catholique.

4° Réponse aux objections des critiques modernes. — Néanmoins certains critiques du xixe siècle ont osé soutenir, à l’encontre de la constante et unanime tradition de l’Église, que le texte grec du premier Évangile n’est pas de la main de l’apôtre saint Matthieu. Il faut examiner les raisons qui leur paraissent suffisantes pour contredire l’antiquité. Nous considérerons plus loin la question de la langue originale du premier Évangile. — 1° L’Évangile grec, attribué par la tradition à saint Matthieu, ne peut pas être de cet apôlre, bien que le récit de la vocation du publicain Matthieu, ix, 9-13, soit favorable à l’opinion traditionnelle, parce que l’auteur ne paraît pas avoir été témoin des faits qu’il raconte. Dans son récit, il ne trahit nulle part sa personnalité ; il ne se met pas en scène ; on ne lit pas un seul « je » ni un seul « nous » ; la narration est impersonnelle au même degré que si elle avait été rédigée par un disciple postérieur qui ne connaissait que par ouï-dire les actes et les paroles de Jésus. — Les anciens écrivains ecclésiastiques et les commentateurs avaient remarqué que, dans tout son Évangile aussi bien que dans le récit de sa vocation, saint Matthieu efface le plus possible sa personnalité ; ce n’est pas sa personne qu’il met en relief mais bien celle de Jésus. Son souci de disparaître n’a empêché aucun Père de reconnaître son œuvre dans le premier Évangile. On a cependant constaté que le publicain manifestait sa compétence spéciale au sujet des impôts. Seul de tous les Évangélistes, il emploie les termes techniques : th Stâpaxii », xvii, 24 (23) ; téXy) t xfjvaov, xvii, 25(24) ; <rcarîipa, xvii, 27(26) ; tô v6|jua-[jia to0 xrjvaou, XXII, 19. — 2° Les récits du premier Évangile sont rédigés avec trop d’art pour provenir d’un apôtre ; ils ne racontent pas certains faits importants et ils ne présentent jamais ces détails précis et circonstanciés qu’y aurait introduits un témoin oculaire. — Saint Matthieu, écrivant dans un but dogmatique (voir plus loin), ne s’est pas proposé de rapporter en détail tous les faits dont il avait été témoin. Il a choisi ceux qui allaient à son but et comme il ne rédige pas une biographie de Jésus, il ne relate que ce qui répond à son dessein et dans la mesure dans laquelle cela y répond. — 3° Jûlicher, Einleitung in das N. T., 3e et 4e édit., Tubfngue et Leipzig, 1901, p. 240, remarque avec raison qu’un apôtre pouvait fort bien insérer dans un Évangile des récits qui paraissent aux critiques modernes fortement légendaires, et même une histoire de l’enfance de Jésus s’il l’avait apprise d’autres personnes. Par conséquent, l’histoire de l’enfance et les miracles que les critiques déclarent mythiques ou légendaires, le fussent-ils, ne seraient pas un argument suffisant pour enlever à l’apôtre saint Matthieu la composition du premier Évangile. — Appuyés sur l’unanime tradition de l’Église nous maintenons donc à saint Matthieu l’attribution qu’on lui a toujours faite de l’Évangile grec qui porte son nom, quoique cet Évangile, nous allons le voir, ne soit qu’une traduction de l’original araméen.

II. Langue originale. — 1° Données patristiques. — La plupart des écrivains ecclésiastiques, cités plus haut, qui attribuent expressément le premier Évangile à saint Matthieu, ajoutent que l’apôtre a écrit cet Évangile en hébreu, lëpaiSi BiaXéxTw, dit Papias. « Chacun, continuet-il, l’interprétait comme il pouvait. » Ce premier témoignage d’un Père apostolique a une valeur inattaquable. Ce n’est pas un renseignement littéraire venu on ne sait d’où. Papias décrit une situation qui a existé un certain temps dans les chrétientés de sa patrie et qui a produit dans la vie ecclésiastique ; une gêne réelle, dontle souvenir était gardé. Durant la jeunesse de Papias, les Églises d’Asie avaient donc un Évangile hébreu, qui était conçu comme l’œuvre de saint Matthieu, qui n’existait qu’eu

hébreu et qu’on était obligé d’interpréter souvent en grec comme on pouvait, parce qu’on n’en avait pas encore fait une traduction grecque. C’est inutilement que plusieurs critiques ont tenté de diminuer l’autorité du témoignage de Papias. Ils ont remarqué qu’au rapport d’Eusèbe, H. E., iii, 39, t. xx, col. 300, l’évêque d’Hiérapolis. était un petit esprit, cçôSpa toi ajiucpô ; <Sv tôv voCv, et ils ont gratuitement supposé qu’un Ébionite lui aura présenté comme l’œuvre de saint Matthieu l’Évangile apocryphe des Hébreux. Mais si Eusèbe appelle Papias un « petit esprit », c’est uniquement au sujet du millénarisme dont il était imbu. En dehors de cette circonstance, Eusèbe rapporte avec confiance les paroles et les renseignements de Papias, qu’il regarde comme dérivant des traditions primitives. Par conséquent le témoignage du vieil évêque sur l’original hébreu de saint Matthieu a autant de valeur que les autres qu’Eusèbe nous a conservés sur l’Évangile de saint Marc et sur l’apôtre Jean. C’était une tradition qui s’était répandue dans les Églises d’Asie, à l’époque où vivaient encore les disciples immédiats de Jésus et les premiers chrétiens de langue hébraïque. Longtemps même l’Évangile de saint Matthieu y avait été conservé dans sa teneur originale, et chacun le traduisait en grec de son mieux. D’ailleurs, il n’existait alors aucun autre livre hébreu, dont la tradition ecclésiastique ait parlé et qui ait été traduit en grec. Le recueil de discours de Jésus, que les critiques modernes découvrent dans les lôiia. de Papias, n’a jamais existé. Sa supposition n’est qu’un moyen récemment inventé pour résoudre la question synoptique. Voir t. ii, col. 2097. Mais l’ancien état de choses que signale Papias avait cessé lorsqu’il écrivait. Nous l’avons déjà dit, sa manière de s’exprimer permet de conclure qu’une traduction grecque de l’Évangile hébreu de saint Matthieu existait de son temps dans les Églises d’Asie. Chacun savait alors qu’elle représentait l’écrit original de l’apôtre. Cf. Zahn, Èinleitung in da$ N. T., 2e édit., Leipzig, 1900, t. ii, p. 259-260.

Du reste, Papias n’est que le premier chaînon d’une longue tradition patristique. Les partisans modernes de l’originalité du texte grec de saint Matthieu ont prétendu, il est vrai, que les Pères de l’Église avaient répété simplement le renseignement fourni par Papias. Leur témoignage n’ayant pas de valeur propre et indépendante, la tradition ecclésiastique de la rédaction du premier Évangile en hébreu n’avait que l’appui fragile de la parole de l’évêque d’Hiérapolis. De tous les Pères qui parlent de l’original hébreu de saint Matthieu, saint Irénée et Eusèbe de Césarée ont seuls connu l’ouvrage de Papias. On n’en trouve aucune trace dans les écrits d’Origène, et cependant cet écrivain, admet, aussi bien qu’Irénée avant lui et qu’Eusèbe après lui, que l’Évangile de saint Matthieu a été primitivement rédigé en hébreu. D’ailleurs, l’Église d’Alexandrie connaissait ce fait par une autre voie que par l’ouvrage de Papias. On racontait, « n effet, que saint Pantène, prêtre et catéchiste de cette Église, était allé avant 180 dans l’Inde, c’est-à-dire vraisemblablement dans l’Arabie Heureuse qui était alors couramment nommée l’Inde, et qu’il y avait trouvé un Évangile écrit dans l’idiome et en caractères hébraïques ; les chrétiens du pays le regardaient comme l’Évangile de saint Matthieu et comme un exemplaire écrit de la main même de saint Barthélémy, leur apôtre. Eusèbe, H. E., v, 10, t. xx, col. 456 ; S. Jérôme, De viris, 36, t. xxiii, col. 651. Quel que soit le fondement de cette donnée, il est clair qu’elle est indépendante du témoignage de Papias. Pantène l’ayant apprise la rapporta à Alexandrie. Voir t.i, col. 1471-1472.

Quant à l’Évangile des Hébreux, c’est par pure hypothèse qu’on a prétendu qu’il aurait donné occasion à la tradition patristique d’un original hébreu de saint Matthieu. Montré par quelque judéo-chrétien de Syrie ou -de Palestine à Papias, il aurait été involontairement con fondu par lui avec l’Évangile de saint Matthieu, et Papias aurait par son erreur inconsciente été le point de départ d’une fausse tradition. Cette hypothèse sans fondement est peu vraisemblable. On ignore quels rapports l’Évangile des Hébreux avait avec celui de saint Matthieu. Clément d’Alexandrie, Origène et Eusèbe, qui l’ont connu, ne signalent pas qu’il était apparenté avec saint Matthieu. Saint Jérôme et saint Épiphane ont cru, il est vrai, que c’était l’Évangile hébreu de cet apôtre. Les critiques sont à son sujet dans le plus complet désaccord. Voir t. iii, col. 552-553. Cf. P. Batiffol, Six leçons sur les Évangiles, 2e édit., Paris, 1897, p. 34-38 ; dom L. Sanders, Études sur saint Jérôme, Bruxelles, Paris, 1903, p. 284295. Il est aujourd’hui difficile de décider s’il n’était qu’une édition, altérée par les Ébionites, de l’Évangile hébreu de saint Matthieu. On peut légitimement penser que l’opinion de sa parenté avec cet Évangile s’est fondée sur l’ancienne tradition que saint Matthieu avait composé son récit évangélique en hébreu pour les Hébreux. Comme les ébionites étaient des judéo-chrétiens de la Palestine, on en a conclu qu’ils avaient dû garder, mais en l’altérant, l’Évangile rédigé primitivement pour leurs ancêtres.^

2° L’Évangile primitif de saint Matthieu était-il hébreu ou araméen" ? — P. Schegg, Evangelium nach Matthâus, Munich, 1856, t. i, p. 13-15, a soutenu qu’un Évangile qui a été écrit en Judée et pour les Juifs et dont le fond est en rapports si étroits avec l’Ancien Testament n’avait pu être rédigé que dans la langue de l’Ancien Testament, par conséquent en hébreu, mais dans un hébreu présentant déjà les formes spéciales de la langue de la Mischna. Franz Delitzsch, qui d’abord admettait que saint Matthieu avait écrit en araméen, Neue Untersuchungen uber Entstehung und Anlage der hanon. Evang., 1853, t. i, p. 7, 45, 49, 50, a prétendu plus tard qu’il s’était servi de la langue hébraïque. The Hebrew N. T., Leipzig, 1883, p. 30. A. Resch, Aussercanonische Paralleltexte zu den Evangelien, dans Texte und Untersuch., Leipzig, 1893, t. x, fasc. i, p. 83-108, a supposé aussi à la base des synoptiques un Évangile primitif hébreu. Voir t. ii, col. 2097-2098. Mais la majo-. rite des critiques reconnaît que le premier Évangile de saint Matthieu, ou au moins le recueil de discours intitulé Aoyta xupiaxâ, était composé dans l’idiome parlé en Palestine du temps de Notre-Seigneur, c’est-à-dire en araméen. Cet idiome est appelé, dans le Nouveau Testament, iêpaU ScaXéxToc, voir t. iii, col. 515 ; et c’est lui que Papias et les autres Pères désignent par le nom d’hébreu quand ils affirment que saint Matthieu a rédigé son Évangile en hébreu. Cf. A. Meyer, Jesu Muttersprache, Leipzig, 1896 ; G. Dalman, Die Worte Jesu, Leipzig, 1898, t. i, p. 34-57. Il est resté, d’ailleurs, dans le texte grec de saint Matthieu, quelques mots araméens, tels que paicà, v, 22 ; fia|juovâ{, vi, 24’; tlxravva, xxi, 9 ; xop6av5{, xxvii, 6, qui ne sont pas expliqués et qui ont été conservés du texte primitif. A. Brun, L’Évangile araméen de l’apôtre Matthieu, Montauban, 1901.

3° La version grecque de l’Évangile araméen de saint Matthieu. — Le texte original du premier Évangile est perdu depuis longtemps. On suppose que destiné à l’Église chrétienne de Palestine, il a dispan avec elle ou qu’il s’est conservé, plus ou moins altéré, chez les sectes hérétiques des Ébionites et des Nazaréens sous le nom d’Évangile selon les Hébreux. Cette dernière hypothèse s’appuie en particulier sur les témoignages de saint Jérôme et de saint Épiphane ; mais il n’est pas démontré que l’Évangile selon les Hébreux était le texte aramaïque de saint Matthieu, et il est même peu vraisemblable que ce texte ait encore existé au IV siècle, fût-ce sous une forme altérée. Sa disparition rapide s’explique par l’impossibilité de son emploi dans les Églises chrétiennes hellénistes et par l’existence d’une version grecque dès la plus haute, antiquité.

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    1. MATTHIEU##

MATTHIEU (ÉVANGILE DE SAINT)

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Aussi loin que nous puissions remonter, en effet, nous constatons la connaissance et l’emploi de cette version grecque. Les plus anciennes citations du premier Évangile par les Pères. sont grecques et se rapportent au texte grec de saint Matthieu, et Papias nous laisse entendre qu’au moment où il écrivait les Églises d’Asie avaient déjà une version grecque de l’Évangile de saint Matthieu. Les Pères postérieurs à Papias ont cité le texte grec seul comme l’œuvre de l’apôtre, et les plus anciennes versions, sauf peut-être la version syriaque découverte et publiée par Cureton, ont été faites sur le texte grec. L’auteur de cette traduction grecque est inconnu. Eusèbe, Qusest. ad Marinum, ii, t. xxii, col. 941, et saint Jérôme, De vir. ill., 3, t. xxiii, col. 613, ignorent son nom ou n’ont point sur lui de renseignement certain. C’est par pure conjecture que certains noms ont été plus tard proposés. Plusieurs manuscrits grecs minuscules, avec Théophylacte, In Matlh., prol., t. cxxiii, col. 145, désignent saint Jean ; on a mis en avant saint Barthélémy, parce que Panténe avait trouvé en Arabie un manuscrit de saint Matthieu écrit par cet apôtre de l’Ethiopie ; la Synopsis Scripturse Sacrée, attribuée à saint Athanase, t. xxviii, col. 432, a pensé à Jacques le Mineur, frère du Seigneur.

Nonobstant le témoignage constant et unanime de l’antiquité, beaucoup de critiques modernes estiment que le texte grec de saint Matthieu est, non pas une traduction de l’araméen, mais l’original lui-même. C’est aujourd’hui l’opinion dominante. Sur quels arguments s’appuie-t-elle ? Hug, Einleitung in die Schriften des N. T., 4e édit., 1847, t. ii, p. 30 sq., s’est efforcé de démontrer à grand renfort d’érudition qu’au 1 er siècle de notre ère la langue grecque était d’un usage universel en Palestine, et que presque tous les Juifs pouvaient la comprendre, la lire et la parler. Or l’Évangile de saint Matthieu, destiné aux chrétiens de la Palestine, était naturellement rédigé en grec, dans cette langue qui était à la portée, non seulement des destinataires immédiats de son récit, mais encore de tous les chrétiens qui parlaient grec. Mais la thèse de Hug n’est pas démontrée et, quelle qu’ait été l’introduction de l’hellénisme dans le monde palestinien, voir t. iii, col. 575-579, il est avéré que la langue grecque n’était ni connue ni parlée par la masse du peuple sous lesHérodes, voir t. iii, col. 314-315 ; cf. E. Schûrer, Geschichte des jûdischen Vclkes im Zeitalter Jesu Christi, 3e édit., Leipzig, 1898, t. ii, p. 63-66, et que les Juifs de Palestine se distinguaient de leurs coreligionnaires de la dispersion, parlant grec, en les nommant hellénistes et en se réservant le titre d’hébreux. Voir t. iii, col. 582. Cf. R. Simon, Histoire critique du texte du N. T., Rotterdam, 1689, p. 47-71.

Aussi les critiques n’insistent-ils plus sur cette considération et préfèrent-ils étudier les caractères propres du texte grec pour y reconnaître ceux d’un ouvrage original et non pas d’une traduction^ Ils font valoir : 1° la langue et le style du premier Évangile. Le grec de saint Matthieu est coulant, clair, moins chargé d’hébraïsmes que celui de saint Marc. On y remarque l’emploi du génitif absolu et la subordination régulière des membres de phrase par l’opposition de ji.lv et de 61. Le style est partout le même, et les mêmes mots : xàtt, xxt ISoû,-f) ^cktiXeîx tûv oûpavûv, etc., sont constamment répétés. Il y a enfin des jeux de mots grecs, tels que paxtoyoxsîv et jioXuXoyîa, VI, 7 ; àçaviÇovui et ôrc&iç çavtoir ! , vi, 16 ; xaxoù ; xaxâç aTtoXêffEt, XXI, 41 ; xôi^oviai xal ô^ovTai, xxiv, 30, etc. Toutes ces observations ne se concilient pas aisément avec le travail d’un traducteur et révèlent une œuvre originale. — Si le style du texte grec actuel est coulant, clair et présente les formes propres de la phrase grecque, c’est simplement parce que le traducteur inconnu savait bien cette langue et ne s’est pas borné à rendre littéralement l’original

araméen. D’ailleurs, ce style simple, uniforme et peu soigné, s’adapte aisément à une traduction. Les aramaîsmes n’y manquent pas. On nous concède qu’ils trahissent un écrivain grec d’origine juive. Peut-être, s’ils existaient seuls, ne dépasseraient-ils pas cette conclusion. Mais, la tradition ecclésiastique nous apprenant l’existence d’un original araméen, ils la confirment suffisamment, loin de la contredire. Enfin, les jeux de mots sont rares et exceptionnels, et chacun sait qu’ils peuvent se produire par hasard ou intentionnellement dans une traduction. La version latine a très bien rendu : xaxoùç xaxâiç àitoXé<ret, xxi, 41, par malos maie perdet. On pourrait encore y signaler des assonances particulières, telles que orationes orantes, xxiii, 14 ; excolantes culicem, xxiii, 24 ; molentes in mola, xxiv, 41 ; cum venerit, invenerit, xxiv, 46, qui n’ont pas d’équivalentes dans le texte grec, sans qu’il en résulte logiquement que le texte latin représente l’original de saint Matthieu. — 2° Les citations de l’Ancien Testament en saint Matthieu sont faites, tantôt d’après le texte hébreu, par exemple, xxvir, 9, tantôt d’après les Septante, par exemple, xxi, 16, tantôt enfin d’une manière un peu divergente de ces deux textes ou en les citant successivement comme xiii, 35. Cette diversité de recours aux livres de l’ancienne alliance et la manière dont plusieurs citations sont interprétées indiquent assurément un écrivain au courant de la littérature hébraïque ; elles ne supposent pas nécessairement un auteur écrivant en hébreu ou en araméen. — Cette diversité, constatée déjà par saint Jérôme, dans les citations bibliques du premier Évangile, ne prouve ni pour ni contre la langue originale, employée par saint Matthieu. On a, en effet, calculé le nombre de ces citations, qui est de quarante-cinq environ, et on a remarqué qu’elles se répartissent en deux groupes : le plus grand nombre se rencontre dans les discours mêmes de Jésus ; onze seulement ont été employées par l’évangéliste lui-même pour rapprocher un fait de la vie du Sauveur d’une prophétie messianique. Or les unes et les autres suivent le texte hébreu et le texte grec de l’Ancien Testament tour à tour. On ne peut donc tirer de ce fait aucune conclusion certaine pour ou contre la langue originale du premier Évangile, car un écrivain araméen pouvait employer la version des Septante, connue de son temps en Palestine, comme un helléniste recourir à l’original hébreu. Cf. Anger, Ratio qua loci V. T. in Evangelio Matthxi laudantur, 1861 j Massebiau, Examen des citations de l’A. T. dans l’Evangile selon saint Matthieu, 1885. — Pour expliquer L’apparente originalité du texte grec, il n’est pas nécessaire de supposer, avec Bengel et quelques autres critiques, que saint Matthieu, après avoir écrit d’abord son Évangile en hébreu, l’aurait publié plus tard en grec. L’historien juif Josèphe, il est vrai, a composé sa Guerre juive dans sa langue paternelle, puis il l’a traduite en grec pour les Romains. Mais un procédé semblable est moins naturel de la part d’un apôtre, et il est plus vraisemblable que la traduction grecque du premier Évangile est d’une autre main que celle de saint Matthieu.

III. Plan et analyse. — Bien que les indications chronologiques soient nombreuses dans le récit de saint Matthieu, les critiques admettent généralement aujourd’hui que, sauf pour l’enfance et la passion de Jésus, le premier évangéliste n’a pas suivi l’ordre chronologique des événements. Dans le ministère public, il groupe les faits et les discours par ordre d’affinité et les dispose de façon à atteindre plus directement le but spécial qu’il se proposait. Les données chronologiques, sont vagues et générales, et le narrateur relie ses récits par la répétition continue de « alors », tixi, « en ces jours-là, - » etc. Le_groupement des actes et des paroles de Jésus, quoique systématique, n’est pas aussi logique et aussi serré que le désireraient les lecteurs occidentaux.

Aussi les critiques ne sont pas encore parvenus à trouver et à proposer une division satisfaisante ; beaucoup des plans élaborés exposent les idées de ceux qui les ont construits plutôt que celles de l’évangéliste. La marche générale est cependant simple et claire ; elle répond à celle de l’histoire et comprend trois périodes, plus ou moins longues et plus ou moins développées dans la narration de la vie de Jésus : 1° son enfance et sa vie cachée ; 2° son ministère public ; 3° sa vie souffrante et glorieuse ou sa passion et sa résurrection. Seules les subdivisions de la seconde période ont été diversement comprises et présentées.

1° La première partie, i, 1-n, 23, sert comme d’introduction à la vie de Jésus. Pour l’enfance et la vie cachée, saint Matthieu suit une tradition différente de celle de saint Luc. Voir Luc 2, col. 391. Son récit commence par une généalogie, descendant d’Abraham à Jésus et partagée en trois séries égales de générations, ], 1-17. Voir t. iii, col. 166-168. Il raconte ensuite la naissance virginale du fils d’Abraham et de David, i, 18-n, 1, la venue des mages à Bethléhem, ii, 2-12, la fuite en Egypte, ii, 13-15, le massacre des innocents, n, 16-18, et le retour à Nazareth, ii, 19-23. Pour l’agencement des faits de l’enfance de Jésus par la combinaison des deux récits de saint Matthieu et de saint Luc, voir t. iii, col. 1441-1445.

2° La deuxième partie, iii, 1-xxv, 46, qui concerne le ministère public de Jésus, se subdivise naturellement en trois sections. — l re section, la préparation et les préliminaires du ministère public, iii, 1-rv, 11. Elle comprend trois faits : 1° la prédication de Jean-Baptiste, m, 1-12 ; 2° le baptême de Jésus par son précurseur, iii, 13-17 ; 3° la tentation du Sauveur au désert, iv, 1-11. — 2e section, la prédication de Jésus en Galilée, iv, 12-xviii, 35. Cette prédication comprend trois groupes de récits, qui en marquent les diverses phases et les progrès : l « r groupe, les débuts de ce ministère, iv, 12-vn, 29. Jésus se met à prêcher la pénitence et la venue du royaume des cieux en Galilée, iv, 12-17, et y choisit ses premiers disciples, iv, 18-22. Il parcourt tout le pays et attire à lui les foules en guérissant les malades, iv, 2325. Devant la multitude accourue sur ses pas, il parle sur la montagne. Le grand discours, rapporté par saint Matthieu, v, 1-vn, 29, comprenant des éléments qui se retrouvent ailleurs et dans des situations différentes en saint Marc et en saint Luc, ne semble pas avoir été tenu par Jésus d’un seul trait dans sa teneur actuelle. C’est une sorte de discours programme sur la justice que saint Matthieu a placé au début du ministère en Galilée pour inaugurer la prédication évangélique. Conformément à sa méthode de grouper les faits et les enseignements analogues, saint Matthieu a inséré dans la trame d’un discours réel et primitif de Jésus des instructions étrangères et en a fait une œuvre composite, assez bien organisée et tendant à son but. Cette conclusion ne résulte pas seulement de l’analyse du discours lui-même, qui révèle des additions à un thème premier, elle se fonde encore sur la finale historique du sermon sur la montagne : « Et il arriva que, quand Jésus eut achevé ces discours… » Le pluriel, toùç idfouç toutou ; , indique vraisemblablement la pluralité des enseignements réunis et groupés dans le grand discours précédent. Cf. A. Robinson, The study of tlie/Gospels, Londres, 1902, p. 73-85 ; A. Loisy, Le discours sur la montagne, Paris, 1904, p. 1-5. Voir t. iii, ’col. 1449. — 2° groupe, la partie centrale de la prédication en Galilée, viii, 1-xin, 52. Les faits y sont réunis systématiquement en deux recueils symétriques, qui ont pour thème une prophétie messianique, Matth., viii, 17 ; xii, 17-21, et se terminent par un grand discours. Le premier recueil comprend une série d’actes par lesquels le Messie montre sa souveraineté, viii, 1-x, 42. On y distingue onze faits : les guérisons du lépreux, viii,

1-4 ; du serviteur du centurion, viii, 5-13 ; de la bellemère de saint Pierre, viii, 14-17 ; les observations faites à deux disciples, viii, 18-22 ; l’apaisement de la tempête, vin, 23-27 ; la délivrance de deux démoniaques, viii, 28-34 ; la guérison d’un paralytique, ix, 1-8 ; la vocation du publicain Matthieu et les paroles prononcées dans sa maison, ix, 9-17 ; la guérison d’une femme malade d’une perte de sang et la résurrection de la fille de Jaîre, ix, 18-26 ; la guérison de deux aveugles, ix, 27-31 ; celle d’un possédé muet, ix, 32-34 ; tous ces miracles attestaient la bonté et la puissance de Jésus, ix, 35. Sa compassion pour les foules sans pasteur l’amène à choisir des apôtres, ix, 36-x, 4, à qui il trace, dans un assez long discours, les devoirs et les résultats de leur mission, x, 5-42. Le second recueil contient surtout des paroles ou sentences dans lesquels le Messie manifeste sa sagesse, xi, 1-xm, 52. Nous y trouvons d’abord une série d’enseignements divers, provoqués par des faits particuliers : le témoignage sur la personne et l’œuvre de Jean-Baptiste à l’occasion de l’ambassade quo le précurseur prisonnier envoie à Jésus, xi, 1-19 ; les malédictions adressées aux villes incrédules de la Galilée et l’appel consolant aux âmes de bonne volonté, xi, 2030 ; deux épisodes sabbatiques : celui des apôtres qui froissent des épis et celui de la guérison de l’homme dont la main était desséchée, xir, 1-14 ; la douceur du Messie prédite par Isaïe, xii, 15-21 ; la réfutation du blasphème des pharisiens qui accusent Jésus de chasser les démons au nom de Béelzébub, xii, 22-37 ; la réprobation des scribes incrédules qui réclament un signe, xii, 38-45 ; à l’occasion de la venue de sa mère et de ses frères, Jésus révèle quelle sera sa famille spirituelle, xii, 46-50. Le recueil se termine par la manifestation de la nature et des progrès du royaume des cieux en sept paraboles de la semence, de l’ivraie, du grain de sénevé, du levain, du trésor, de la perle et du filet, xir, 1-52. Vraisemblablement ces paraboles n’ont pas été prononcées en même temps ; la con texture du discours, entrecoupé d’explications et d’interrogations, le laisse deviner. C’est l’évangéliste qui les a réunies au moment de sa prédication où Jésus a inauguré ce genre particulierd’enseignement qui est à la portée des âmes de bonne volonté, mais qui reste inintelligible pour les adversaires du royaume. — 3e groupe, les dernières excursions en Galilée, xiii, 53-xviii, 35. Visite à Nazareth, xiii, 53-58 ; sentiment d’Hérode tétrarque de Galilée au sujet de Jésus et meurtre de Jean-Baptiste, xiv, 1-12 ; Jésus se retire dans le désert et y multiplie les pains, xiv, 1321 ; il marche sur les eaux, apaise la tempête sur le lac et fait de nombreuses guérisons à Génésareth, xiv, 2236 ; des scribes et des pharisiens de Jérusalem discutent sur les purifications extérieures et Jésus instruit ses apôtres à ce sujet, xv, 1-20 ; Jésus, étant allé au pays de Tyr et de Sidon, y guérit la fille d’une femme chananéenne, xv, 21-28 ; revenu sur les bords du lac de Génésareth, il multiplie une seconde fois les pains, xv, 2939 ; il discute avec les pharisiens et les sadducéens et met ses disciples en garde contre le mauvais levain des pharisiens, XVI, 1-12 ; à Césarée de Philippe, il annonce à Pierre, qui avait reconnu sa divinité, ses prérogatives futures et il prédit aux siens sa mort et sa résurrection, xvi, 13-23 ; il leur recommande l’abnégation, xvi, 24-28 ; il est transfiguré, xvii, 1-13 ; guérison d’un lunatique, xvii, 14-20 ; nouvelle prédiction de la passion et de la résurrection, xvii, 21-22 ; à Capharnaùm, Jésus paie le didragme, xvii, 23-26. Cette série de faits aboutit à un grand discours, xviii, 1-35. Le Sauveur y donne aux disciples une leçon d’humilité, leur signale la gravité du scandale, prononce la parabole de la brebis perdue, traité de la correction fraternelle, et pour répondre à une question de saint Pierre sur le pardon des injures, propose la parabole du serviteur qui doit à son maître. Les parties de ce discours ne 887

    1. MATTHIEU##

MATTHIEU (ÉVANGILE DE SAINT)

s’enchaînent pas logiquement ; plusieurs se retrouvent en saint Marc et en saint Luc au même moment, mais dans des occasions différentes. Le discours est donc probablement formé, comme les précédents, de morceaux divers, dont le caractère collectif serait encore indiqué par la formule plurielle de la transition, xix, 1. — 3° section, Jésus quitte la Galilée et se dirige par la Pérée vers Jérusalem, xix, 1-xx, 34. Le début de cette section est nettement marqué dans l’Évangile. Abandonnant définitivement le pays de Galilée qu’il avait évangélisé jusqu’ici, Jésus passe le Jourdain ; il guérit des malades, discute avec les pharisiens sur l’indissolubilité du mariage et recommande à ses disciples la virginité, xix, 1-12 ; il bénit les petits enfants, xix, 1315 ; il s’entretient avec un jeune homme riche et expose à ses disciples les dangers des richesses et les avantages du renoncement, xix, 16-30 ; il prononce la parabole des ouvriers envoyés à la vigne, xx, 1-16 ; il annonce en secret aux seuls apôtres sa passion et sa résurrection, xx, 17-19 ; il répondà la demande indiscrète de la mère de Jacques et de Jean, xx, 20-28, et enfin il guérit deux aveugles à Jéricho, xx, 29-34.

3° La troisième partie, xxi, 1-xxviii, 20, raconte la passion et la résurrection plusieurs fois prédites. On peut la subdiviser en (rois sections. — 1™ section, xxi, 1-xxv, 46. Elle renferme une série de faits détachés, qui se produisent dans les premiers jours de la dernière semaine : l’entrée triomphale de Jésus à Jérusalem et l’expulsion des vendeurs du temple, xxi, 1-17 ; la malédiction du figuier stérile, xxi, 18-22 ; l’interrogation faite à Jésus par les membres du sanhédrin, xxi, 23-27 ; la parabole des deux fils, xxr, 28-32 ; celle des vignerons, xxi, 33-46 ; celle des noces du fils du roi, xxii, 1-14 ; Jésus réfute les pharisiens et les hérodiens, qui le questionnent au sujet de l’impôt, xxii, 15-22 ; puis les sadducéens à propos de la résurrection, xxii, 23-33 ; les pharisiens reprennent l’offensive et un docteur interroge Jésus sur le premier des commandements, xxii, 34-40 ; le Sauveur réduit tous les pharisiens au silence sur le Messie, fils de David, xxii, 41-46. S’adressant ensuite à la foule et à ses disciples, il blâme sévèrement les scribes et les pharisiens et les maudit, xxiii, 1-39. Sortant du temple et interrogé par ses disciples, il leur fait, au sommet du mont des Oliviers, un grand discours sur ce qui arrivera entre sa mort et sa seconde venue, sur la ruine de Jérusalem et sur la fin du monde, xxiv, 1-41 ; il y ajoute des conseils de vigilance, xxiv, 42-51, qui sont suivis de la parabole des dix vierges, xxv, 1-13, de celle des talents, xxv, 14-30, et de la description du jugement dernier, xxv, 31-46. Ce discours semble encore formé de morceaux différents, groupés par l’évangéliste, comme l’insinue de nouveau le pluriel : « tous ces discours, » xxvi, 1. — 2e section, la passion, xxvi, 1-xxvii, 66. Jésus annonce aux disciples qu’il sera crucifié deux jours plus tard, xxvi, 1, 2 ; les sanhédrites trament sa mort, xxvi, 3-5 ; à Béthanie, une femme pécheresse oint Jésus, xxvi, 6-13 ; Judas trahit son maître, xxvi, 14-16 ; préparatifs de la Pàque et la dernière cène, xxvi, 17-29 ; prédiction du reniement de Pierre, xxvi, 30-35 ; l’agonie à Gethsémani, xxvi, 3646 ; Jésus est arrêté et conduit devant le sanhédrin, xxvi, 47-68 ; triple reniement de Pierre, xxvi, 69-75 ; Jésus conduit à Pilate, xxvii, 1-2 ; désespoir de Judas, xxvii, 3-10 ; comparution de Jésus devant Pilate, xxvii, 11-26 ; livré aux soldats, Jésus est mené au Calvaire et y est crucifié, xxvii, 27-44 ; circonstances de sa mort, xxvii, 45-56 ; sa sépulture et une garde est placée au tombeau, xxvii, 57-66. — 3e section, la résurrection, xxviii, 1-20. Jésus ressuscité apparaît aux femmes qui venaient visiter son tombeau, xxviii, 1-10 ; les prêtres juifs répandent le faux bruit que les disciples, après avoir soudoyé les gardes, ont enlevé de’nuit le corps de leur Maître, xxviii, 11-15 ; Jésus apparaît aux onze en Galilée et les

envoie prêcher et baptiser dans le monde entier, xxviii, 16-20.

IV. Date. — Les critiques sur ce point sont en désaccord parce que les témoignages des Pères ne sont pas convergents et qu’on tire des conclusions différentes des critères internes. — 1° Données patrisliques. — Le sentiment général des anciens est que l’Évangile de saint Matthieu à été composé le premier des quatre récits évangéliques. S. Irénée, Cont. hœ>, iii, 1, t. vii, col. 844 ; Clément d’Alexandrie, cité par Eusèbe, H. E., w, 14, t. xx, col. 552 ; Origène, In Matth., tom. i, t. xiii, col. 829, qui invoque la tradition antérieure ; Eusèbe, H. E., iii, 24, t. xx, col. 265 ; S. Épiphane, flser. u> 5, t. xii, col. 393 ; S. Jérôme, De vir. M., 3, t. xxiii, col. 613 ; S. Augustin, De consens. Evangelist., i, 2, t. xxxiv, col. 1043 ; S. Jean Chrysostome, In Matth. Hom. iv, 1, t. lvii, col. 39. De cette première donnée l’on pourrait déduire approximativement la date du premier Évangile par comparaison avec celle du second. Voir Marc 2, col. 737. Quelques-uns de ces Pères, Eusèbe, loc. cit., ajoutent que saint Matthieu a rédigé son Évangile avant de quitter la Palestine pour aller convertir les païens. Or des critiques d’écoles et de tendances différentes fixent cette daté à l’an 42. Voir col. 875. Mais saint Irénée, Cont. hœr., iii, 1, t. vii, col. 844-845, tout en plaçant l’Évangile de saint Matthieu en tête des quatre Évangiles canoniques, semble reculer la date de sa composition à l’époque où saint Pierre et saint Paul se trouvaient ensemble à Rome : ’O (xév &t Maxfiato ; Iv toî ; ’Eëpaîoiç tÎ). tfit’a fiiaXévtxw aùrâv xeà fpaqwiv Hr^îyv.VJ EicffytV.ov, toO IJÉTpou xai to0 IlavXou Iv’Pw|ji ?) £ÙaYYsXt ! |o|Jilv(i>v y.at 6e|ieX[oûv™v triv’ExxXr)fffav. Il semble reporter aussi la rédaction du second Évangile après la mort de ces deux Apôtres. Voir Marc, col. 737. Or saint Pierre et saint Paul n’ont pu se trouver ensemble à Rome qu’après l’an 61. La composition du premier Évangile serait donc postérieure à cette dernière date. Par suite, il s’est produit parmi les critiques qui tiennent compte de la tradition deux courants d’opinion. Les uns se rangent à l’autorité, selon eux décisive, du témoignage de saint Irénée, qui est bien fondé et n’a jamais été expressément contredit, et ils reculent la composition de saint Matthieu à l’époque du commun séjour de saint Pierre et de saint Paul à Rome, entre 61 et 67. Les autres suivent la majorité des Pères et s’efforcent de concilier avec leur sentiment le témoignage divergent de saint Irénée. Quelques-uns ont pensé que saint Irénée indiquait la date de la version grecque du texte araméen de saint Matthieu. Mais cette interprétation est contraire aux paroles de l’évêque de Lyon qui dit expressément que saint Matthieu a rédigé son récit évangélique dans l’idiome des Hébreux. Quelques autres ont fait remarquer avec plus de vraisemblance que le génitif absolu, toù nèrpou xàl toû IlaûXou èv "P<i|j17) EÙayYsXiÇoiJiivcûV xai ÔejjieXioijvtwv de la phrase d’Irénée ne signifiait pas la simultanéité des travaux du premier évangéliste et des deux apôtres Pierre et Paul, mais seulement la différence des lieux (Palestine et Rome) et de la nature (écrit et prédication orale) de leurs travaux. D’ailleurs le texte de l’évêque de Lyon nous est parvenu incomplet et en mauvais état. La première phrase, qui n’est conservée qu’en latin, est inachevée et ne présente pas un sens clair. La phrase grecque concernant saint Matthieu, la suit immédiatement et contient un xaî qui ne répond rien de ce qui précède. Il y aurait donc un membre de phrase à suppléer. Le P. Cornely propose :-cà ûit’aÙToO xipvff<r<i|ieva ifoatyz xa’i… Ces mots établiraient un contraste entre le premier évangéliste qui a rédigé par écrit sa prédication et les deux suivants qui ont écrit d’après saint Pierre et d’après saint Paul. Quoi qu’il en soit, il semble qu’on ne puisse pas tirer d’un texte obscur et imparfait une conclusion ferme et certaine. Cf. A. Camerlynck, Saint Irénée et le canon du N. T., Louvain, 1896, p. 27-31. — MATTHIEU (ÉVANGILE DE SAINT)

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2° Critères internes. — Sans parler des tendances ébionites et judaïsantes, que Baur avait cru remarquer dans le premier Évangile et qui lui faisaient retarder la composition de cet écrit jusqu’aux années 130-134, sous le règne d’Adrien, Jùlicher, Einleitung in das N. T., 3e et 4e édit., Tubingue et Leipzig, 1901, p. 241-243, fixe la date du premier Évangile aux environs de l’an 100. Dans la parabole des noces royales, la vengeance du roi qui envoie son armée pour tuer les invités qui avaient exterminé ses serviteurs et pour brûler leur ville, xxii, 7, suppose réalisée la ruine de Jérusalem par les Romains et nous reporte à une date postérieure à 70. Le retard du maître et de l'époux, xxiv, 48 ; xxv, 5, suppose aussi une longue attente de la parousie, et l’expression : « jusqu’aujourd’hui, » xxvii, 8 ; xxviii, 15, un intervalle considérable écoulé entre le récit et les faits racontés. L'évangélisation du monde païen, xxviii, 18-20 ; cf. x, 23 ; l’annonce des persécutions des apôtres de la part des puissances terrestres, x, 17-19 ; le souci de ne donner aux Romains aucune occasion de scandale, xvii, 26 ; le rôle prêté à Pilate et à sa femme durant la passion, xxvii, 11-24, 58, nous reportent au règne de Domitien, durant lequel la communauté chrétienne avait intérêt à montrer son impartialité politique. D’autre part, la prédication apostolique par le monde entier et la formule trinitaire du baptême, xxviii, 19, ne conviennent guère au I er siècle. Enfin la tendance de saint Matthieu est franchement catholique ; l'Église, pour 1 ui, est une société fortement organisée, xvi, 18, 19 ; xviii, 15-18, qui dispense les biens célestes et qui exige la.pratique des œuvres en vue de la récompense, xxv, 31-46. Le catholicisme ainsi constitué nous éloigne de la tradition primitive et nous reporte à une époque déjà tardive. On voit aisément le caractère tendancieux de ces arguments, qui placent dans la réalité de l’histoire ce que l'évangéliste raconte comme prédiction de Jésus et conditions futures de l'Église fondée par Jésus-Christ. Une telle manière de raisonner est aussi défectueuse que celle de Baur et de l'école de Tubingue. — D’autres critiques, avec B. Weiss et A. Harnack, fixent la date de l'Évangile de saint Matthieu aux années 70-75, qui suivent immédiatement la ruine de Jérusalem. Ils s’appuient sur la parabole des noces déjà citée et disent que le passage, xxii, 7, manifeste l’incendie de Jérusalem comme un fait accompli. Ils s’appuient surtout sur la proximité maintenue entre cette catastrophe et la seconde venue de Jésus. La transition : eùûlwi ; 8è |i£-rà tyjv GXt^iv t<5v rinspâv èxetvuv avec la description des signes précurseurs de la parousie, xxiv, 29, rattache le récit à l'époque qui suit immédiatement la catastrophe, alors qu’on n’avait pas encore eu le temps de se convaincre que les deux faits n’auraient pas lieu consécutivement. Mais précisément cette circonstance produit chez d’autres critiques l’impression que ce récit a été rédigé avant la destruction de Jérusalem. Un écrivain postérieur aurait, selon eux, plus expressément marqué l’intervalle qui devait exister entre les deux événements. Quelle que soit d’ailleurs l’interprétation qu’on en donne, les deux passages invoqués ne suffisent pas à prouver la composition du premier Évangile après l’an 70. — Tous les critiques modérés pensent que saint Matthieu a écrit avant 70. Ils apprécient différemment les témoignages patristiquçs et les critères internes et ils s'écartent les uns des^ autres dans la fixation d’une 'date, approximative. Ms r Batiffol, Six leçons sur les Évangiles, 2e édit., Paris, 1897, p. 51, se rallie à saint Irénée et place la composition du premier Évangile dans la période 65-70. Zahn, Einleitung in das N. T., 2= édit., Leipzig, 1900, t. ii, p. 163, suit la même voie et indique les années 61-66. Godet, Introduction au N. T., Paris et Neuchâtel, 1898, t. ii, p. 245249, aboutit à la conclusion que le premier Évangile date de 60 à 66. A. Schsefer, Einleitung in dos N. T., PaderLorn, 1898, p. 199, s’arrête aux années 50 où 51. Le P. Cornely, Introductio specialis in singulos N. T. libros

Paris, 1886, p. 76-80, accorde un plus grand intervalle, entre 40 et 50. J. Belser, Einleitung in das N. T., Fribourg-en-Brisgau, 1901, p. 30-32, se rallie catégoriquement à l’ancienne opinion et adopte la date de 41-42. Voir t. H, col. 2062.

V. Lieu de la composition. — Tous les Pères qui ont parlé de la composition du premier Évangile par saint Matthieu, de la date et du but de sa composition, ont affirmé que saint Matthieu l’avait rédigé en hébreu pour les Hébreux et avant de quitter la Palestine pour aller évangéliser d’autres contrées. Il en résulte donc que le premier Évangile a été rédigé en Palestine. La plupart das critiques modernes acceptent les données de la tradition et pensent que c’est à Jérusalem même que l’apôtre a écrit. Quelques critiques ont voulu conclure des mots irépav toû 'IopSàvou, xix, 1, que l’auteur plaçait la Judée de l’autre côté du Jourdain et que par conséquent l'Évangile de saint Matthieu avait été rédigé sur la rive orientale de ce fleuve, à l'époque où les chrétiens avaient déjà quitté Jérusalem et s'étaient réfugiés à Pella, c’està-dire vers 66. Mais cette conclusion est peu vraisemblable. En effet, le point de départ du voyage de Jésus est la Galilée et son terme les confins de la Judée en passant au delà du Jourdain. On conçoit difficilement qu’un Juif, écrivant à l’est du Jourdain, ait désigné de cette façon la Judée elle-même, qui se trouvait pour lui à l’ouest du fleuve, puisque c'était le langage reçu chez ses compatriotes de désigner par cette expression la rive orientale du Jourdain. Saint Matthieu a donc employé le langage ordinaire et dit, comme on l’entend généralement, que Jésus était allé de la Galilée en Pérée. Pour interpréter autrement son récit, il faudrait prendre népav toû 'IopSàvou comme une apposition à ec ;-rà Bpta TYjc 'IouSaiaç. Cf. Zahn, Einleitung in das iV._ T., t. ii, p. 297, 308. Msr Batiffol, Six leçons sur les Évangiles, p. 49-50, admettant que Matthieu, « juif de race, helléniste de culture et d esprit, a écrit son Évangile pour des chrétiens d’un pareil esprit, » et remarquant dans cet Évangile des paroles sévères contre les scribes, conclut : « Aussi n’est-ce point à Jérusalem que nous imaginerions que l'Évangile selon saint Matthieu a été rédigé, et volontiers penserions-nous qu’il a pu être rédigé en Syrie, par exemple à Antioche. » La détermination du but et des destinataires du premier Évangile que nous allons faire, d’après la tradition, nous montrera s’il y a des motifs suffisants de ne pas tenir compte de cette tradition au sujet du lieu de la rédaction du récit et d’imaginer quelque hypothèse contraire.

VI.IDestinataires. —1° Données patristiques. — Aussi haut que nous puissions remonter dans la tradition ecclésiastique, nous constatons que l'Évangile de saint Matthieu est présenté comme destiné aux Juifs. Saint Irénée, qui, le premier des Pères, parle du but et de la destination de cet écrit, affirme catégoriquement : Tb xotTCt Mat8aîov syayyÉ/.tov itpôç 'louSxiovq éfpâfri, Fragm., xxix, t. vii, col. 1244. Les paroles qui suivent sont, il est vrai, interprétées par quelques critiques dans un sens apologétique ; selon l'évêque de Lyon, diton, saint Matthieu se proposait de prouver aux Juifs non encore chrétiens que Jésus était le Messie, fils de David, qu’ils attendaient. Voir plus loin. Mais on peut penser que par ce nom de « Juifs » aussi bien que par celui d' « Hébreux », Cont. hier., iii, 1, ibid., ool. 814, saint Irénée désignait les judéo-chrétiens de Palestine, comme l’ont fait les autres écrivains ecclésiastiques. Origène, en effet, ne laisse là-dessus place à aucun doute. Il a appris par la tradition que saint Matthieu a destiné son Évangile toï ; àizo 'IouSaVojjiou m<mvoa.aiv, Eusèbe, H. E., vi, 25, t. xx, col. 581 ; In Matth., tom. i, t. xill, col. 829 ; toï ; 'ESpafoi ; … toïç ex irepiTO|iîi ; matcûo-uitiv. In Joa., tom. VI, 17, t. xiv, col. 256 ; cf. ibid., prsef., 6, col. 29. Eusèbe, H. E., iii, 24, t. xx, col. 265, présente comme résultat de ses recherches et comme

le résumé de la tradition antérieure cette donnée : MatBaïoc (ièv fàp npATepov 'Eêpafoiç XYipvijaç, ûç ï ; [ie).Xev if' izipovi Uval jcaTpfij) Tf^tirrr) ypaçîj nxpaSoùc tô xat' « ùtov tyocnviov to Xeîîtov tyj aùroO itapou<rîa toutoi ; > a ?' 5v laréXXeTo, 81à tîjç YpaçTjç ot71û7cX^poù. Saint Jérôme fait écho à Eusèbe : Matthxus primttm in Juâsea propter eos qui ex circumcisione crediderunt Evangelium Christi composuit. De vir. ill., 3, t. xxiii, col. 613. Ob eorum vel maxime causant, qui in Jesum crediderant ex Judmis, et nequaquam legis umbram, succedente Evangelii veritale, servabant. In Matth., prol., t. xxvi, col. 18. Saint Jean Chrysostome, In Mallh. Rom. i, 3, t. lvii, col. 17, répète les mêmes renseignements, et saint Grégoire de Nazianze, Carm., 1, 12, t. xxxvii, col. 474, dit d’un mot que saint Matthieu a écrit pour les Hébreux les miracles du Christ. Cf. Cosmas Indicopleustes, Topogr. christ., 1. V, t. lxxxviii, Co1. 286. Tous les commentateurs catholiques et beaucoup de protestants ont accepté le témoignage de la tradition ecclésiastique et l’ont confirmé par des arguments tirés du premier Évangile lui-même.

2° Critères internes. — Du contenu de ce livre, en effet, on peut conclure qu’il était destiné à des lecteurs d’origine juive, habitant la Palestine et déjà convertis à l'Évangile. Si l’auteur avait écrit pour des païens et non pour des Juifs, il procéderait autrement, il insisterait sur d’autres points et il ne montrerait pas par la réalisation des prophéties de l’Ancien Testament que Jésus est le Messie attendu des Juifs et le fils de David. D’ailleurs, il ne juge pas nécessaire d’expliquer à ses lecteurs des usages juifs dont saint Marc et saint Luc parlent différemment à leurs lecteurs d’origine païenne. Ainsi il mentionne sans explication les ablutions judaïques, xv, 1, 2 ; cf. Marc., vii, 3, 4 ; le jour des azymes, xxvi, 17 ; cf. Marc, xiv, 12 ; Luc, xxii, 7 ; il parle du lieu saint, xxiv, 15 ; de la sainte cité, IV, 5 ; .xxvii, 53. Il met les gentils sur la même ligne que les publicains, xviii, 17. D’autre part, comme il rappelle les paroles les plus dures que Jésus ait prononcées contre les scribes et les pharisiens hypocrites, xxm, 1-4, 15-31, il ne peut guère s’adresser aux Juifs non convertis. Enfin, il envisage ses lecteurs comme des croyants ; il leur parle du royaume de Dieu et de l'Église comme à des initiés qui le comprendront. En résumé donc, il s’adresse à des judéo-chrétiens, et puisqu’il écrivait en araméen, à des judéo-chrétiens qui comprenaient cette langue, par conséquent non à des hellénistes qui parlaient grec, mais bien aux Juifs convertis de la Palestine. Si quelques mots hébreux, comme EiipwxYoOn])., i, 23 ; r<AYo(là, xxvii, 33 ;-fiXel, ^Xei, Xep.a <raSax 9av£f) XXVH, 46, sont traduits ; si Haceldama n’est pas nommé sinon dans sa traduction grecque : ifpoî aïu-a-roç, xxvii, 8, on peut penser que ces explications sont dues au traducteur grec du texte araméen. Il en serait de même du nom grec Hhpoi, employé au lieu de l’araméen Céphas pour désigner saint Pierre.

VIL But. — 1° Tous les exégètes sont d’accord pour reconnaître, au moins d’une façon générale, que le premier évangéliste a voulu principalement démontrer que Jésus était le Messie, fils de David, attendu des Juifs. Ils s’appuient à la fois sur le témoignage des Pères et sur le caractère général de l'Évangile de saint Matthieu. Saint Irénée ne se borne pas à dire que saint Matthieu a écrit pour les Juifs ; il ajoute dans quel but : Outoc (les Juifs) Yctp èitef>û(iouv irivo açiîpa éx axépu.atoi ; AaëtS Xpiurov à hi MatOaïoc xa£ ïti u.îaXov (npoSpo-ripav ifu>i tt)V TûtaOtyjv èrc16v[Aiav nayxoîoyç eaTieuSe 7tXir)poçoptav « apé*/eiv aùxoîî, wç eîVi in. (nrepiiaToç Aaé : 8 o Xpturôi ; " Stb xal àito tï|Ç y ev é<t£(i)ç cxùtoO îJpÇaTo. Fragm., xxix, t. vii, col. 1244. Saint Chrysostome, In Matth. Hom. ii, 3, t. lvii, col. 17, répète la même chose : Aià 8t) tovto i lUv Mat8atoç, are 'E6pac’oi « Tpâçuv, ojJèv îrtiov éït, tyi<k

SeïÇat, ^ on àirô 'A.ëpaàjt xat AatAS fjv… ovièv fâp ofowç àvlitaue tov 'IovSaîov, wç to u.a6eïv aùtov ôti toû 'Aêpaàu. xal toO AauiB sxyovoî iqv o Xpiffrôç. Théophylacte, Enarrat. in Ev. Matth., præf., t. cxxiii, col. 145, et Eufhymius, Comment, in Matth., t. cxxix, col. 113, reproduisent la même pensée que saint Chrysostome, dont ils dépendent. Le caractère du premier Évangile répond bien au but de son auteur. Ce n’est pas, en effet, une biographie complète de Jésus. On y trouve, il est vrai, une esquisse de la vie du Sauveur et un sommaire de sa prédication. Mais les faits et les discours y sont groupés en vue d’une thèse à démontrer. L’auteur veut manifestement prouver que Jésus, dont il raconte l’histoire et dont il expose les renseignements, est le Messie promis au peuple juif, qu’il faut croire à sa parole et adhérer à sa doctrine. C’est pourquoi non seulement il débute, ainsi que le remarquait saint Irénée, par la généalogie davidique du Christ, mais surtout il dispose son récit de manière à faire ressortir dans la vie et la prédication de Jésus la réalisation continuelle de prophéties messianiques. De là, son souci constant de citer l’Ancien Testament et de montrer dans les événements l’accomplissement des oracles divins, en amenant les citations par des formules expressives, i, 22 ; ii, 15, 17, 23 ; iv, 14 ; xxvii, 9, etc. De la encore sa préoccupation de signaler en Jésus toutes les prérogatives de roi, de législateur, de thaumaturge, de prophète et de souverain prêtre, que les écrivains de l’ancienne alliance ont attribuées au Messie.

2° Tout en restant d’accord au sujet du but principal du premier Évangile, les exégètes modernes ont suivi des voies un peu divergentes, lorsqu’ils ont tenté de déterminer avec plus de précision la fin que se proposait saint Matthieu. Quelques-uns ont pensé que l’apôtre, en prouvant que Jésus était le Messie attendu, avait un but directement apologétique et polémique. Il s’adressait à ses coreligionnaires demeurés juifs et non encore convertis au christianisme en vue de les convaincre de la nature messianique de Jésus et en même temps de répondre aux calomnies que le sanhédrin avait répandues dans le public sur le compte du Sauveur, dont les disciples auraient enlevé le corps du tombeau pour faire croire à sa résurrection. Aberle, Einleitwig in dos N. T., Fribourg-en-Brisgau, 1877, p ; 20-32, a spécialement insisté sur cette considération qui, prise isolément, paraît exagérée et se concilie difficilement avec les reproches sévères que le premier Évangile reproduit fréquemment contre les Juifs. Aussi la plupart des critiques ont-ils, avec raison, atténué les vues propres d’Aberle, et sans nier toute fin apologétique et polémique contre les Juifs incrédules, ils ont mis l’accent sur le but dogmatique du récit de saint Matthieu. Tout en prouvant, en faveur des Juifs convertis, que Jésus de Nazareth était réellement le Messie prédit et attendu, cet écrit d’instruction dogmatique avait une pointe offensive contre les Juifs demeurés incrédules. Saint Matthieu, en effet, en établissant principalement que Jésus avait réalisé les prophéties messianiques et fondé sur terre le royaume messianique prédit, mais un royaume spirituel et non pas temporel comme les Juifs l’espéraient, voulait en outre expliquer que néanmoins il n’y avait pas lieu de s'étonner si les chefs de la nation juive et la plus grande partie du peuple n’avaient pas reconnu en Jésus le Messie et l’avaient, au contraire, persécuté et mis à mort. Pour cela, tout en décrivant le véritable Messie et son œuvre, il raconte dans tout le cours de son récit la longue opposition des scribes et des pharisiens contre le Sauveur. C’est donc par aveuglement volontaire et coupable qu’ils n’ont pas reconnu en Jésus le Messie qu’ils attendaient. De la sorte, le but du livre n'était pas exclusivement didactique ; saint Matthieu visait à convaincre les Juifs incrédules de leur erreur et à les en tirer, s’il était

possible, par la constatation de la réalisation des prophéties messianiques. « Son livre a un cachet plus juif que les trois autres. On dirait que l’auteur y adresse au peuple infidèle la sommation dernière de s’incliner devant le Messie méconnu, et comme l’ultimatum terrible qui précède l’heure de la ruine définitive. » Ms r Le Camus, La vie de N.-S. Jésus-Christ, 6e édit., Paris, 1901, t. i, p. 27.

Le caractère particulier de la rédaction primitive de l’Évangile de saint Matthieu n’a pas-empêché cet Évangile, traduit en grec, d’être utile à des lecteurs grecs, soit aux Juifs hellénistes qui y trouvaient la confirmation de leur foi, s’ils étaient déjà convertis au christianisme, ou des motifs de se convertir, s’ils étaient demeurés juifs de croyance, soit même aux païens convertis qui y rencontraient l’exposé, fait sans doute à un point de vue particulier, mais identique de fond ; de la catéchèse qu’ils avaient entendue de la bouche des autres apôtres.

VIII. Style de l’Évangile gbec. — Le texte araméen de saint Matthieu étant perdu, on ne peut rien dire des caractères de son style. Quant au texte grec, il présente une telle liberté d’allures, une si parfaite unité et des particularités, déjà signalées, qu’au jugement de la majorité des critiques, il n’est pas simplement l’œuvre d’un traducteur, mais bien un original grec. Pour concilier les témoignages des Pères en faveur d’un original araméen et les arguments philologiques des critiques en faveur d’un original grec, on peut admettre, comme nous l’avons déjà dit, que la traduction, existant déjà au temps de Papias, a été faite assez librement pour être mise à la portée des lecteurs grecs, tout en reproduisant fidèlement le fond de l’écrit araméen primitif. Quant aux qualités du style de cette version grecque, on peut dire que, comparativement aux deux autres synoptiques, l’Évangile de saint Matthieu tient le milieu entre la phrase simple, souvent lourde et prolixe de saint Marc, et l’élégance presque classique des parties propres à saint Luc. Il nous faut signaler en outre en saint Matthieu un certain nombre de mots caractéristiques et quelques tournures grammaticales. Appartiennent à son vocabulaire spécial les expressions souvent répétées : paaiXesa TtSv oùpavûv, trente-sept fois employée ; 7taTY|p ô l7tovpâvio ; ou i êv toïç oùpavotç, qu’on rencontre vingt fois ; <xuvré>eta toû aiâvo ; , cinq fois reproduit ; ’IspodôXutia, partout usité, sauf xxiii, 37, où on lit’Iepou(ra)iri[jL ; ulbç AautS, sept fois répété. Des locutions, rarement employées par saint Marc et saint Luc, sont fréquentes en saint Matthieu : àvaytopeîv, dix fois ; (jaS)7)TEijEtv, trois fois ; <ru(iëoûXtov Xaiiëâvetv, cinq fois ; èiCTiâleiv, deux fois ; ti<po ; , six fois ; oipiSpa, sept fois et toujours avec des verbes. Comme tournures spéciales nous citerons : 7tpo<rewetv, onze fois avec le datif de la personne ; prfitit ; , êppsÔTfj, dix-huit fois ; sys’P 60 " 5 " ành ; t<Ste servant quatre-vingt-dix fois de transition. Ces particularités de style se rencontrent uniformément dans tout le premier Évangile et sont ainsi un indice de l’unité de l’auteur. Elles rendent aussi peu vraisemblable l’utilisation par l’évangéliste de sources différentes, au moins de sources grecques. Quant à la question des sources écrites du premier Évangile, voir t. ii, col. 2093-2098.

IX. Bibliographie. — i. wtroquction. — Patrizi, De Evangelm, ’l. l, c. i, Fribourg-en-Brisgau, 1853, p.l32 ; Danko, Historia revelationis divines N. T., Vienne, 1867, p. 263-273 ; H. de Valroger, Introduction historique et critique aux livres du N. T., Paris, 1861, t. ii, p. 21-47 ; Aberle, Einleitung in das N. T., édit. Schanz, Fribonrg-en-Brisgau, 1877, p. 20-40 ; KauV’n, Einleitung in die heiligen Schrift A. und N. T., 2e édit., Fribonrgen-Brisgau, 1887, p. 384-402 ; Fouard, Saint Pierre et les premières années du christianisme, Paris, 1886, p. 290303, 531-535 ; Reuss, Die Geschichte der heiligen Schrift

N.T., 6e édit., Brunswick, 1887, p. 187-196 ; R. Cornely, Introductio specialis in singulos N. T. libros, Paris, 1886, p. 15-80 ; Trochon et Lesêtre, Introduction à l’étude de l’écriture Sainte, Paris, 1890, t. III, p. 4474 ; H. J. Holtzmann, Einleitung in das N. T., 3e édit., Fribourg-en-Brisgau, 1892, p. 375-382 ; Trenkle, Einleitung in das N. T., Fribourg-en-Brisgau, 1897, p. 96-106 ; A. Schsefer, Einleitung in das N. T., Paderborn, 1898, p. 188-212 ; P. Batiffol, Six leçons sur les Évangiles, 2e édit., Paris, 1897, p. 46-51 ; Godet, Introduction au N. T., Paris et Neuchâtel, 1898, t. ii, p. 137-324 ; Jûlicher, Einleitung in das N. T., 3e et 4e édit., Tubingue et Leipzig, 1901, p. 236-249 ; Zahn, Einleitungin das N. T., 2e édit., Leipzig, 1900, t. ii, p. 252-334 ; J. Belser, Einleitung in das N. T., Fribourg-en-Brisgau, 1901, p. 24-55. n. commentateurs. — 1° Pères. — Le commentaire de Théophile d’Antioche, dont parle saint Jérôme, De viris, 25, t. xxiii, col. 643 ; Epist., cxxi, 6, t. xxii, col. 1020 ; Comment, in Mattn., prol., t. xxvi, col. 15, est perdu. Celui qui a été publié sous son nom par M. de la Bigne, Bibliotheca SS. Patrum, Paris, 1575, t. v, p. 169-192, par Otto, Corpus apolog., 1861, t. viii, p. 278-326, et par Zahn, Forschungen zur Geschichte des Neutestamentl. Kanons, 1883, t. ii, p. 29-85, n’est pas de lui ; c’est une compilation, de la fin du v" siècle environ, faite probablement dans le sud de la Gaule par un Latin. Cf. Zahn, op. cit., 1884, t. iii, p. 198-277 ; Harnack, dans les Texte und Untersuchungen, 1883, t. i, fasc. 4, p. 97-176 ; Pitra, Analecta sacra, 1884, t. ii, p. 624634, 649-650 ; Hauck, dans Zeitschrift fur kirchl. Wissenchaft und kirchl. Leben, 1884, t. v, p. 561-568 ; Sanday, dans les Studia biblica, Oxford, 1885, p. 89-101 ; Bornemann, dans Zeitschrift fur Kirchengeschichte, 1888-1889, t. x, p. 169-252. Origène, au témoignage de saint Jérôme, Comment, in Matth., prol., t. xxvi, col. 15, avait composé sur l’Évangile de saint Matthieu des scholies, vingt-cinq homélies et un commentaire en 25 tomes. Ce commentaire, composé à Césarée après 244, Eusèbe, H. E., vi, 36, t. xx, col. 597, nous est parvenu en partie : les tomes x-xvii, qui expliquent Matth., xiii, 36xxii, 33, existent en grec, t. xiii, col. 886-1600 ; la suite, Matth., xvi, 13-xxvii, 63, a été conservée dans une traduction latine, ibid., col. 1599-1800. De petits fragments recueillis de divers côtés sont reproduits, ibid., col. 829-834. Saint Chrysostome a prononcé 90 homélies sur saint Matthieu, t. lvii, lviii. Des fragments des commentaires de saint Cyrille d’Alexandrie se trouvent, t. lxxii, col. 365-474. Cramer, Catena grsecorum Patrum in N. T., Oxford, 1844, t. i, p. 1-257, a publié des extraits d’autres commentaires grecs de saint Matthieu. D’autres chaînes sur saint Matthieu ont été publiées par Possin, Toulouse, 1646, et par Cordier, Toulouse, 1647. Voir t. ii, col. 484. Sur des manuscrits de la chaîne de Nicétas d’Héraclée, voir Faulhaber, Die Katenenhandschriften der spanischen Bibliotheken, dans la Biblische Zeitschrift, Fribourg-en-Brisgau, 1903, t. i, p. 367-398. — Dans l’Eglise latine, saint Hilaire de Poitiers, Com. in Evang. Matthmi, t. ix, col. 917-1078 ; saint Jérôme, Com. in Evang. Matthsei, t. xxvi, col. 15-218 ; saint Augustin, De sermone Domini in monte l. 11, t. xxxiv, col. 1229-1308 ; Qusest. Evang. I. 11, t. xxxv, col. 1321-1332 (le Liber queestionum XVII in Matth., t. xxxv, col. 1365-1376, qui lui est attribué, est très probablement apocryphe). L’Opus imperfecluni in Matthseum, longtemps attribué à saint Chrysostome et publié dans ses Œuvres, t. lvi, col. 611-946, est d’un écrivain latin, qui vivait à la fin du vr> siècle ou au commencement du vne et qui était un peu infecté d’arianisme. Cf. Le pseudo-Chrysostome sur Matthieu, dans la Revue augustinienne, 15 octobre 1903, p. 289313. Dom Morin, Anecdota Maredsolana, Maredsous, 1903, t. iii, p. 135-145, a réédité les Expositionculæ in Evangelium de saint Matthieu.

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    1. MATTHIEU##

MATTHIEU (ÉVANGILE DE SAINT) — MAUNOURY

2° Moyen âge. — Chez les Grecs, Théophylacte, Enarrat. in Ev. Matthsei, t. cxxiii, col. 139-488 ; Euthymius, Comment, in Matth., t. cxxix, col. 107-765 ; chez les Latins, Bède, In Matthsei Evang. expositio, t. xcii, col. 9-132 ; Raban Maur, Comment, in Matth., t. cvii, col. 727-1156 ; PaschaseRadbert, Expositio inMatthœum, t. cxx, col. 31-994 ; S. Bruno d’Asti, Comment, in Matth., t. CLXV, col. 63-314 ; Druthmar, Brevis expositio in Matth. Evangelistam, t. cvi, col. 1261-1504 ; Rupertde Deutz, In Matth.. de gloria et honore filii hominis, t. clxviii, col. 1307-1634 ; S. Anselme de Laon, Enarratio in Matth., t. clxii, col. 1227-1500 ; Albert le Grand, In Matthseum, dans Opéra, , Paris, 1893, 1894, t. xx, xxi, p. 1-336 ; S. Thomas, In Matthseum evangelistam, expositio, dans Opéra, Paris, 1876, t. xix, p. 226268 ; Catena aurea in Matth. Evang., ibid-, t. xvi, p. 8-498.

3° Temps modernes. — 1. Catholiques. — Nommons seulement les commentaires qui embrassent la Bible entière ou les quatre Évangiles, d’Erasme, de Denys le Chartreux, de Maldonat, de Jansénius, de Corneille de la Pierre, de Calmet, etc. A. Tostat a composé un commentaire long et diffus, surtout théologique, dans ses Opéra, 13 in-f°, Cologne, 1613, t. ix-xii. Les principaux commentaires de saint Matthieu publiés au XIXe siècle sont : Gratz, Kritisch-historicher Commentar ûber dos Evangelium des Matthàus, Tubingue, 1821 ; P. Schegg, Evangelium nach Matthàus ùbersetu und erklârt, 3 in-S », Munich, 1856-1858 ; 2e édit., 1863 ; Arnoldi, Commentai’zum Evangelium des hl. Matthàus, Trêves, 1856 ; Bisping, Erklârung des Evangeliums nach Matlhâus, Munster, 1864 ; Mac-Evilly, Exposition of the Gospels, Dublin, 1876 ; Van Steenkiste, Commentarius in Evangelium secundum Matthseum, 4 in-8°, Bruges, _ 1876 ; 3e édit., 1880-1882 ; 4e édit., 1903 ; Fillion, Evangile selon S. Matthieu, Paris, 1878 ; Schanz, Commentât ûber das Evangelium des heiligen Matthàus, Fribourg-en-Brisgau, 1879 ; Liagre, Commentarius in libros historicos N. T., Tournai, 1883, t. i, p. 1-531 ; Knabenbauer, Commentarius in Evangelium secundum Matthseum, 2 in-8°, Paris, 1892, 1893 ; Ceulemans, Comment, in Ev. sec. Matthseum, Malines, 1899 ; Van Ongeval, In Matthseum, Gand, 1900 ; Rose, Évangile selon saint Matthieu, Paris, 1904 ; Gutjahr, Das heilige Evangelium nach Matthàus, Graz, 1904.

2. Protestants. — En outre des anciens commentaires de Théodore deBèzeelde Grotius, nommons : Olearius, Observationes sacrse in Evangelium Matthsei, Leipzig, 1713 ; Elsner, Commentarius critico-philologicus in Evangelium Matthsei, 1769 ; Kuinoel, Comment, in libros historicos N. T., Leipzig, 1807, 1. 1, Evangelium Matthsei ; Fritzsche, Quatuor Evangelia, Leipzig, 1826, 1. 1, Evangelium Matthsei ; Olshausen, Biblischer Commentar ûber sàmmlliche Schriften des N. T., Koenisberg, 1830, t. i ; Meyer, Kritisch-exegetisches Handbuch ûber das Evangelium des Matthàus, Gœttingue, 1832 ; 2e édit., 1844 ; 6e édit., 1876 ; 8e édit., par Weiss, 1890 ; 9e édit., 1899 ; de Wette, Kurze Erklârung des Evangeliums Matthài, Leipzig, 1836 ; 4e édit., 1857 ; Baumgarten-Grusius, Commentât ûber das Evangelium des Matthàus, Iéna, 1844 ; Bleek, Synoptische Erklârung der drei ersten Evangelien, édit. Holtzmann, Leipzig, 1862 ; Lange, Theologisch-homilet. Bibelwerk, 4e édit., Bielefeld, 1878 ; 5e édit., par Zôckler ; Abbott, The N. T. with notes and comments, Londres, 1875, t. i, Matthew ; H. Lutteroth, Essai d’interprétation de quelques parties de l’Évangile selon S. Matthieu, Paris, 1860, 18641867, 1876 ; B. Weiss, Das Matthâusevangelium und seine Lucasparallelen, Halle, 1876 ; 2e édit., 1902 ; Keil, Commentar ûber das’Evangelium des Matthàus, Leipzig, 1877 ; Nôsgen, Evangelium Matth., Mark. u. Luk., 2e édit., Munich, 1896 ; Zahn, Das Evangelium

des Matthàus, Leipzig, 1903 ; J. Wellhausen, Das Evangelium Matthsei, Berlin, 1904.

E. Mangenot.

    1. MATTINA Léon##

MATTINA Léon, religieux bénédictin de la congrégation du Mont-Cassin, né à Naples, mort à Padoue le Il février 1678. Il avait fait profession de la règle de saint Benoit à l’abbaye de la Cava le 30 novembre 1648 et fut chargé d’enseigner l’Ecriture Sainte à l’Université de Padoue. On a de lui : In libros Regum XLV dissertationes, in-4°, Padoue, 1675. — Voir Ziegelbauner, Hist. rei literarise ord. S. Benedicti, t. iv, p. 29 ; dom François, Bibl. générale des écrivains de l’ordre de

Saint-Benoit, t..n, p. 223.
B. Heurtebize.
    1. MAUDUIT Michel##

MAUDUIT Michel, théologien catholique français, né en 1644 à Vire, en Normandie, mort à Paris le 18 janvier 1709. Entré jeune dans la congrégation de l’Oratoire, il y enseigna, pendant un certain temps, les humanités avec un grand succès. Dans une seconde période de sa vie, il se livra à la prédication. Enfin il s’adonna tout entier à l’étude de l’Écriture Sainte et à la composition de divers ouvrages, dont plusieurs sont des commentaires de différentes parties de la Bible : ils sont pleins d’érudition et montrent une grande connaissance du latin et du grec. Ce sont : Analyse des Épîtres de saint Paul et des Épîtres canoniques, avec des dissertations sur les endroits difficiles, 2 in-12, Paris, 1691, 1693 et 1702 ; Analyse de l’Évangile selon l’ordre historique de la concorde, par ***, 3 in-12, Paris, 1694 ; 4 in-12, Paris, 1703, et Rouen, 1710. Cet important ouvrage a eu dans la suite de nombreuses éditions ; nous ne citerons que celles de Malines, 9 in-12, 1821, et de Paris, 4 in-8°, 1843-1844 ; Analyse des Actes des Apôtres, 2 in-12, Paris, 1697. — Une Analyse de l’Apocalypse, terminée avant la mort de l’auteur, est demeurée manuscrite. Voir le Mercure de France, mai 1709 ; Moréri, Dictionnaire historique, à l’article Mauduit ; Ingold, Essai de bibliographie ora~ torienne, Paris, 1880-1882, p. 107. A. Régnier.

    1. MAUMAM##

MAUMAM (hébreu : Mehûmdn ; Septante : ’Ajiâv), le premier des sept eunuques du roi Assuérus. Esth., i, 10. On a rapproché- ce nom du perse Mehhum-van, « appartenant au grand Hum. » D’après M. Oppert, Commentaire du livre d’Esther, 1864, p. 20, c’est le perse Vahurnana, en persan.Ba/mia », ’< magnanime. »

    1. MAUNOURY Auguste François##

MAUNOURY Auguste François, helléniste et exégète français, né le 30 octobre 1811, près de Domfront (Orne), dans une paroisse appelée Champsecret, mort à Séez, le 17 novembre 1898. il fit au petit séminaire de Séez de très bonnes études, à la fin desquelles ses maîtres lui dirent qu’il devait être professeur à son tour. Son cours de théologie achevé, il fut chargé de la quatrième. Bientôt, on lui confia la seconde ; et en 1852, déjà auteur renommé, il montait dans la chaire de rhétorique qu’il occupa vingt-deux ans. Vers 1866, M. l’abbé Maunoury avait essayé sa plume aux commentaires de l’Écriture Sainte, et publié quelques explications de l’Évangile, dans la Semaine catholique du diocèse de Séez. Ayant cessé d’enseigner en 1875, il se livra entièrement aux études d’exégèse. Il s’attacha à saint Paul. Les difficultés mêmes que présente le texte de l’Apôtre étaient un attrait pour le vieil helléniste. Il était depuis un an chanoine de la cathédrale, quand il commença à publier ses travaux sur les Épîtres. Il fit paraître, en 1878, le Commentaire sur l’jipitre de saint Paul aux Romains (il dit dans la préface « qu’un peu de grec éloigne de la Vulgate, que beaucoup de grec y ramène » ) ; en 1879, Commentaire sur les deux Épîtres de saint Paul aux Corinthiens ; en 1880, Commentaire sur les Épîtres de saint Paul aux Galates, aux Êphésiens, aux Philippiens, aux Colossiens et aux Thessaloniciens ; en 1882, . 897

MAUNOURY — MAURER

Commentaire sur les Épîtres de saint Paul à Timothée à Tite, à Philémon, aux Hébreux ; en 1888, Commentaire sur les Epîtres catholiques de saint Jacques, saint Pierre, saint Jean et saint Jude. Chacun de ces volumes est in-8° et publié à Paris. C’est à saint Jean Chrysostome et à Théodoret que Maunoury demande le plus souvent ses explications. Sa doctrine exacte, profonde, pieuse, est fixée en des expressions d’une clarté et d’une concision caractéristique où se marque la personnalité de l’auteur. Connu jusque-là comme helléniste, Maunoury se révélait théologien, et montrait comment la grammaire peut servir la science sacrée. Ces travaux reçurent un excellent accueil. On peut encore signaler des articles publiés dans des revues : Examen du texte de saint Paul : in quo omnes peccaverunl, dans la Revue des Sciences ecclésiastiques, mai et juin 1877, p. 442-458, 519-538, articles insérés plus tard, en 1879, à la suite de son Commentaire de l’Épitre aux Romains. Ces deux articles eurent un contradicteur dans M. A. Leboucher, professeur de théologie au grand séminaire de Séez, qui publia sur la question deux fascicules : Élude critique sur le texte de saint Paul : in qvt> omnes peccaverunt, in-8°, Bar-le-Duc, 1877 et 1878. Plus tard, Maunoury voulut répondre aux articles de Paulin Martin contre l’authenticité du verset des trois témoins, I Joa., v, 7, dans un article intitulé : Le verset des trois témoins célestes : réponse à M. l’abbé Martin, dans la même revue, avril 1889, p. 289-297.

— L’auteur couronna son œuvre en 1894 par le Commentarius in Psalmos, 2 in-8°, Paris. Dans ce dernier ouvrage, le commentaire, écrit en un latin simple et élégant, suit la Vulgate et les Septante, sans demander au texte hébreu autre chose que des éclaircissements aux endroits les plus difficiles. — Entouré de la vénération de tous ses anciens élèves, Maunoury s’éteignit au petit séminaire de Séez, où il avait passé plus de soixante-dix ans. V. Prunier.

MAUR (RABAN), Magnentius Hrabanus Maurus, écrivain ecclésiastique, né à Mayence, d’où son prénom de Magnentius, en 776, mort à Winfeld sur Rhin le 4 février 856. Il fut élevé à l’abbaye de Fulde où il devint moine bénédictin et où il reçut le diaconat en 801. Peu après il fut envoyé à Tours où il suivit les leçons d’Alcuin. Ce fut Alcuin qui lui donna le surnom de Maurus, en souvenir du disciple de saint Benoît de ce nom. De retour à Fulde, il devint l’âme de l’école de l’abbaye et donna un grand éclat à son enseignement. Il fut ordonné prêtre en 814 et devint abbé en 822, dignité qu’il garda jusqu’en 842, époque où il donna sa démission. Le 26 juin 847, il fut sacré archevêque de Mayence. Pendant son pontificat, il tint trois conciles provinciaux. Sa vie fut très remplie et il fut un des hommes les plus remarquables de son temps. Il commença à écrire à l’âge de trente ans et continua pendant environ 41 ans. L’abondance de ses œuvres témoigne de son activité infatigable. Quoiqu’elles soient surtout une compilation, elles n’en rendirent pas moins de grands services, surtout dans les écoles. Ses œuvres complètes n’ont pas encore été publiées. G. Colvener en a édité la majeure partie, 6 in-f », Cologne, 1627. Migne a reproduit cette édition, avec des additions diverses, dans sa Patrologie latine, t. cvii-cxh, col. 1851 -1852.Nous n’avons à mentionner ici que les écrits exégétiques de Raban Maur, mais ils constituent de beaucoup la partie principale de son œuvre. Les voici avec les dates qui leur sont attribuées dans l’édition de Migne : 1° Commentariorum in Genesim libri quatuor, en 819 (t. CVH, col. 459-670) ; 2° Commentariorum in Matthmum libri oclo, en 822-826 (entre 814 et 822, d’après d’autres) (t. cvii, col. 727-1156) ; 3° Commentariorum in Exodum libri quatuor, en 834 (t. cviii, col. 9-246) ; 4° Expositionum in Leviticum libri septem, en 834 (t. cviii,

DICT. DE LA. BIBLE.

col. 245-586) ; 5° Enarrationum in lïbrum Numérorum libri quatuor, en 834 (t. cvjii, col. 587-858) ; 6° Enarrationis super Deuteronomium libri quatuor, en 834 (t. cviii, col. 857-998) ; 7° In lïbrum Josue libri très, en 834 (t. cviii, col. 999-1108) ; 8° Cammentaria in librum Judicum et Ruth, en 834 (t. cviii, col. 11071224) ; 9° Commentaria in libros quatuor Regum, en 834 (t. cix, col. 9-280) ; 10° Commentaria in libres II Paralipomenon, en 834 (t. cix, col. 279-540) ; 11° Expositio in librum Judith, en 834 (t. cix, col. 539592) ; 12° Expositio in librum Esther, en 836 (t. cix, col. 655-670) ; 13° Commentariorum in librum Sapientiœ libri ires, en 840 (t. cix, col. 671-762) ; 14° Commentariorum in librum Ecclesiasticum librideeem, en 840 (t. cix, col. 763-1126) ; 15° Commentaria in libros Machabeeorum, vers 840 (t. cix, col. 1125-1256) ; 16° Commentariorum in Ezechielem libri viginti, en 842 (t. ex, col. 495-1084) ; 17° Exposilio in Proverbia Salomonis (t. exi, col. 679-792) ; 18° Expositionis super Jerennam prophetam libri viginti (t. exi, col. 793-1272) ; 19° Enarrationum in Epistolas Beati Pauli libri triginta (viginti noveni) (t. exi, col. 1273-1616, et t. cxii, col. 9-834) ; 20° Allegorise in universam Sacram Scripturam (t. cxii, col. 849-1088), sorte de dictionnaire dans lequel un bon nombre de mots de l’Écriture sont expliqués d’une manière allégorique ; 21° Commentaria in Cantica quse ad viatutinas Laudes dicuntur (t. cxii, col. 1088-1166). Le commentaire d’Isaïe date de l’époque où Raban Maur était abbé de Fulde ; celui de Jérémie fut achevé pendant son épiscopat ; il fut suivi de celui d’Ézéchiel et de Daniel. C’est à la même époque qu’il commenta saint Paul et saint Jean. Son travail s’étendit à tout l’Ancien et à tout le Nouveau Testament (t. cvii, col. 103), mais les commentaires sur Daniel et sur saint Jean n’ont pas été publiés, non plus que ses commentaires sur Esdras, Néhémie, Tobie, Job, les Psaumes, les Proverbes, l’Ecclésiaste, le Cantique des ^antiques, Isaïe, les douze petits prophètes, saint Luc, saint Marc, ies Actes des Apôtres, les Épîtres canoniques et l’Apocalypse. Sa vie a été écrite par un de ses disciples appelé Rodolphe ; elle est en tête de ses œuvres, t. cvii, col. 41106. Voir aussi Dahl, Leben und Schriften des Rabanus Maurus, Fulde, 1828 ; Histoire littéraire de la, France, t. v, 1711, p. 151-203 ; Kunstmann, Hrabanus Magnentius Maurus, Mayence, 1841 ; Nik. Bach, Hrabanus Maurus der Schbpfer des deutschen Schulwesens, dans Zimmermann, Zeitschrift fur Alterthumswissenschaft, t. ii, 1835, p. 636 ; Th. Spengler, Leben des heiligen Rhabanus Maurus, in-8°, Ratisbonne, 1856 ; Kôhler, Hrabanus Maurus. Ein Beitrag zur Geschichte der Pâdagogik im Mittlalter, Chemnitz, 1870 ; Dietrich Tùrnau, Rabanus Maurus, Munich, 1900.

    1. MAURER Franz Valentin Dominik##

MAURER Franz Valentin Dominik, exégéte protestant allemand, né à Rothweil (Wurtemberg) le 14 février 1795, mort à Birlingen (Wurtemberg) le 13 janvier 1874. Il était né catholique. Après ses études au lycée de sa ville natale, il étudia la théologie à l’université de Tubingue et fut ordonné prêtre à Rottenburg en 1820. L’année suivante il apostasia pour devenir protestant. De 1826a 1833 il fut professeur à l’école Saint-Thomas, Thomasschule, de Leipzig. Il vécut plus tard tantôt à Stuttgart, tantôt à Cannstadt, et de 1843 à 1863 il exerça les fonctions de pasteur en plusieurs localités du Wurtemberg. Il prit sa retraite en 1867. — Les travaux de Maurer sont, pour la plupart, consacrés à l’exégèse. On a de lui : Commentar ûber dos Buch Josua, 2 in-8°, Stuttgart, 1831 ; Commentarius criticus in Vêtus Testamentum, 4 in-8°, Leipzig, 1832-1848 (le t. iv fut édité par Auguste Heiligstedt), ouvrage destiné aux étudiants en théologie, mais très superficiel ; Observationes in Hoseam, publiées dans les Scholia in Vêtus Testante », tum de Rosenmùller, 2e partie, 3e édit., Leipzig, 1824.

IV. - 29

Outre ces œuvres exégétiques, Maurer publia : Praktischer Cursus ûber die Formenlehre der hebràischen Sprache, in-8°, Leipzig, 1837 ; Kurzgefasstes hebrâisches und chaldâisches Wôrterbuch, in-8°, Stuttgart, 1851 (d’après Gesenius et Wurzelwôrlerbuch d’Ernest Meyer). — Voir Siegfried, dans Allgemeine deutsc/ic Biographie, Leipzig, 1884, t. xx, p. 699. E. Michels.

MAUVE. Quelques auteurs regardent la mauve sauvage, Malva sylveslris, comme le Malluah ou plante dont se nourrissaient les pauvres indigènes d’après Job, xxx, 4. Mais il n’y a pas de raison fondée dans cette identification : on ne cueille pas d’ailleurs la mauve sur les buissons. La Malluah n’est pas non plus la corrète potagère, appelée « . mauve du Juif », t. ii, col. 1026 ; mais c’est l’arrocheou Atriplex halimus, t. i, col. 1032.

E. Levesque. MAVIAËL. (hébreu : Mehûyâ'èl et Mehîyd'êl ; Septante : Ma) e), êt|X), le troisième descendant de Caïn, fils d’Irad et père de Mathusaël. Gen., iv, 18. L’orthographe de ce nom en hébreu diffère, dans les divers manuscrits. On peut l’expliquer hypothétiquement comme signifiant [ o ; frappé par Dieu ». Gesenius, Thésaurus, Additam., p. 97.

1. MAYER Georg Cari, théologien catholique allemand, né à Aschbach (Bavière) 1811, mort à Bamberg le 22 juillet 1868. Ordonné prêtre en 1837, il devint, l’année suivante, vicaire à la cathédrale de Bamberg ; cinq ans plus tard il devint professeur au lycée et, en 1862, chanoine à la cathédrale de la même ville. En théologie dogmatique Mayer était adhérent d’Antoine Gùnther, dont il propagea et défendit les erreurs par de nombreux écrits. Après avoir été combattus et réfutés longtemps par d’autres théologiens, ses ouvrages furent censurés en 1857 et 1868. Mayer se soumit avec son maître à la sentence de l'Église. — Il a publié plusieurs œuvres exégétiques : CoUhnentar ûber die Briefe des Apostels Johannes, in-8°, Vienne, 1851 ; Die Echtheit des Evangeliums nach Johannes, in-8°, Schaffhouse, 1854 ; Die patriarchalischen Verheissungenunddie messianischen Psalmen, in-8°, Nordlingue, 1859 ; Die messianischen Prophezien, 2 in-8°, Vienne, 1860-1865. Le tome premier traite des prophéties d’Isaïe, le second de celles de Jérémie et d'Ézéchiel. Cependant les œuvres exégétiques de Mayer ne sont guère importantes ; cette dernière surtout contient quantité d’opinions étranges et même bizarres, telle, par exemple, celle de la gloire future des juifs, etc. — Voir Allgemeine deutsche Biographie, Leipzig, 1885, t. xxi, p. 94-95 ; Hurler, S. J., Nomenclator literanus Iheol. cathol., Insbruck, 1895, t. i, éo. 1030-1031 ; Literarischer Handweiser, 1865, p. 302 ; 1868, p. 40-1. E. Michels.

2. MAVER Jean Frédéric, théologien luthérien, né à Leipzig le 6 décembre 1605, mort à Slettin le 30 mars 1712. Il enseigna la théologie, fut pourvu d’importants bénéfices et devint surintendant général des églises de Poméranie. Très versé dans les lettres latine, grecque et hébraïque, il prit une part active à toutes les discussions de doctrine qui divisaient les protestants. Parmi ses très nombreux écrits nous ne citerons que les suivants : De pesnitentia bestiarum Ninivitica, in-4°, Leipzig, 1673 ; Admirabile Jacobi cum duabus sororibus conjugium, in-4°, Leipzig, 1674 ; De arbore scientix boni et mali, in-4°, Wittenberg, 1685 ; XJtrum Moses Jïgyplium juste interfecerit, in-4°, Wittenberg, 1685 ; Elias corvorum conviclor, in-4°, Wittenberg, 1685 ; Reformatio Josise régis ab idolo in Templo facta, 11 Reg. xxiii, 6-7, in-4°, Wittenberg, 1685 ; Tempus Christi jusliliæ nostræ, Dan., ix, 24, in-4°, Wittenberg, 1685 ; De vulpeculis Sinsonis, iu-4°, Wittenberg, 1686 ; De lapidatione Stephani, Act., vii, 59, in-4°, Hambourg, 1690 ; Ulrum autographa biblica hodie exsien t, in-4°,

Hambourg, 1692 ; De tiudio biblico recte instituendo, in-4°, Hambourg, 1694 ; Historia versionis germanicse Bibliorum D. Martini Lulheri. Accedit manlissa de translalionibus Bibliorum germanicis ante Lutherum sive editis, sive inedilis et de notis veterum Biblicis dissertationes, in-4°, Hambourg, 1701 : une première édition avait été publiée en 1693 ; Exegesis in Psalmum I etnuna cum annexis usibus elenchticis, in-4°, Greifswald, 1702 ; De miraculis quse Christo tribuuntur ante miraculum in nuptiis Canse in Galilsea, in-4°, Greifs-. wald, 1703 ; De prmceptoribus Christi, in-4°, Greifswald, 1704 ; De sacrificio matutino et vespertino, Ex., xxix, 39, in-4°, Greifswald, 1704 ; De benedictione sacerdolali, Num., xvi, 22, in-4°, Greifswald, 1705 ; Jobus liberossuos sanctificans, in-4°, Greifswald, 1705 ; De Agno occiso ab origine mundi, Apoc, xiii, 8, in-4°, Greifswald, 1706 ; De Anti-Scripturariis recentioribas, in-4°, Greifswald, 1707 ; Dissertatio historico-ecclesiastica de Patriarchis Hebrseorum, in-4°, Greifswald, 1707 ; De templo Judxorum tertio, in-4°, Greifswald, 1707 ; Paulus Suecorum apostolus dissertationibus academicis in epistolam ad Galatas reprœsentatus, in-4°, Greifswald, 1709 ; Bibliotheca Biblica sive Diisertationum de notitia auctorum pontificiorum, reformatorum et lutheranorum, immo et Judseorum qui in Sacram Scripturam commentarioruni scripserunt, in academia Gryphiswaldenti émissarum decas, in-4°, Francfort, 1709 ; cet ouvrage fut continué par Ch. Arndt, in-4°, Rostock, 1713. — Voir Tholuck, Geistder Luther. Theol. Wittenbergs, p. 234 ; Le Long, Biblioth. sacra, p. 854 ; Walch, Biblioth. theol.,

t. iv, p. 79, 373, 699, 1059, 1076.
B. Heurtebize.
    1. MAYERHOFF Ernest Théodore##

MAYERHOFF Ernest Théodore, théologien luthérien allemand, né à Neuruppin le 5 décembre 1806, mor à Berlin en décembre 1837. On a de lui, entre autres écrits, Die petrinischen Schriflen, Hambourg, 1835 ; Der Brief an die Colosser, œuvre posthume, publiée par L. Mayerhoff, Hambourg, 1838.

    1. MAZZALOTH##

MAZZALOTH (hébreu : Mazzâlôt ; Septante : MaÇouptiG ; Vulgate : duodecim signa), nom hébreu des signes du zodiaque, d’après la plupart des commentateurs. IV Reg., xxiii, 5. Voir Astronomie, t. i, col. 1196. C’est l’assyrien mazzalta. H. Gunkel, Schôpfung und Chaos, 1891, p. 140.

    1. MAZZAROTH##

MAZZAROTH (hébreu : Mazzârôl ; Septante ; MaÇouptiO ; Vulgate : Lucifer), mot hébreu qui so lil seulement dans Job, xxxviii, 32. On croit généralement que Mazzaroth est le même terme que Mazzâlôt. On l’a traduit autrefois de diverses manières : Vulgate : Lucifer ou Vénus comme étoile du matin ; Peschito : la grande Ourse, etc. On s’accorde communément aujourd’hui à y reconnaître les signes du zodiaque. Voir Astronomie, t. i, col. 1196.

    1. MAZZOCHI##

MAZZOCHI (Alexis Symmaque Mazzocolo dit), antiquaire italien, né à Santa-Maria près de Capoue le 22 octobre 1684, mort à Naples le 12 septembre 1771. D’une famille pauvre, il fit ses études aux séminaires de Capoue et de Naples. Ordonné prêtre, il fut chargé d’enseigner le grec et l’hébreu. En 1732, il fut nommé chanoine de Capoue, mais l’archevêque Spinelli le rappela à Naples et en fit son théologal. H enseigna alors la théologie et l’Ecriture Sainte et devint supérieur du grand séminaire refusant un archevêché que lui offrit le roi de Naples. Parmi ses nombreux travaux, nous n’avons à mentionner que le suivant : Spicilegium Biblicum, 3 in-4°, Naples, 1763-1778. — Voir Lé Beau, Éloge de Mazzochi, dans les Mémoires de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, t. xxxviii ; Picot, Mémoires pour servir à l’hist. eccles. du xviip siècle, t. iv (1855),

p. 471.
B. Heurtebize.

901

MAZZOTH — MÉDABA

902

    1. MAZZOTH##

MAZZOTH (hébreu : Masôt ; Septante : t « ô^uu-a ; Vulgate : azyma), mot hébreu qui signifie « (pains) azymes, sans levain » et qui sert à désigner la fête de la Pâque. Cette fête est appelée hag ham-niasôt, Exod., xxiii, 15 ; II Par., viii, 13 ; xxx, 13, 21, et simplement masôp, Exod., xii, 17. Voir Paque.

MÊ’AH, nota d’une tour de Jérusalem (Vulgate : Centum, Emath). Il Esd., iii, 1 ; xii, 38 (39). Voir Émath 4, t. ii, col. 1723.

MÉCHANT. Voir Impie, t. iii, col. 845.

    1. MÈCHE##

MÈCHE (hébreu : pistdh ; Septante : Xc’vov ; Vulgate : linwnx), substance filamenteuse qui trempe dans l’huile des lampes et dont on allume l’extrémité qui émerge.

1° Les anciens employaient diverses substances pour les mèches de leurs lampes : les feuilles de certaines plantes, comme la molène, p.ô[Aoç, ou l’une de ses variétés, 6puaXXîç, Pollux, vi, 103 ; x, 115 ; Pline, H. N., XXV, x, 4 ; le liii, Pausanias, I, xxvi, 6 ; l’étoupe. PJine, H. N., XIX, 1, 3 ; le papyrus, Pline, H. N., XXVIII, xi, 47 ; le ricin, Pline, ff. N., XXIII, iv, 41, etc. Pour donner plus d’éclat à la lumière on ajoutait du soufre aux mèches, Pline, H. N., XXXV, xv, 50, ou du sel à l’huile, Hérodote, ii, 62 ; Pline, H. N., XIII, i, 2 ; XV, m, 4. Cf. Daremberg et Saglio, Dict. des ant. grecques et romaines, t. iii, p. 1332. — Les Hébreux se servaient surtout de lin pour les mèches des lampes, d’où le nom de pisfâh, « liii, » donné à la mèche. Voir Lin, col. 258. Quand les vêtements de lin que portaient les prêtres étaient hors de service, on en faisait des mèches pour les lampes du sanctuaire et de ses parvis. Gem. Schabbath, 21, 1 ; 79, 2. Cf. Reland, Ântiquitates sacrss, Utrecht, 1741, p. 95. La combustion de ces mèches n’était jamais bien complète ; aussi fallait-il les moucher de temps en temps, voir Mouchettes, et les débarrasser ainsi de résidus provenant soit de leur mauvaise composition, soit de l’épuration imparfaite de l’huile.

2° Isaïe, xliii, 17, représente les ennemis d’Israël comme poursuivis par le Seigneur, anéantis et « éteints comme une mèche ». Le Seigneur n’a pas eu plus de peine à les faire disparaître qu’on en a pour souffler une mèche de lampe. Dans sa prophétie sur le Messie, Isaïe, xlii, 3, dit qu’il « n’éteindra pas le lin fumant », c’est-à-dire qu’il ne détruira en aucune âme la dernière ressource qui reste, si faible soit-elle, pour que cette âme revienne à la lumière et au salut. Notre-Seigneur s’appliqua cet oracle, Matthieu, xii, 20, et montra par tous ses actes qu’il était venu pour le réaliser.

H. Lesêtre.
    1. MÉCHÉRATHITE##

MÉCHÉRATHITE (hébreu : ham-Mekêràti ; Septante : ô Msx<">pa8p( : Alexandrinus : à Mixoupotôi), surnom d’Hépher, un des vaillants soldats de David. IPar., xi, 36. Si la leçon Méchérathite était certaine, il en résulterait que Hépher était originaire d’une localité inconnue, appelée Méchérah, mais il est probable que Méchérathite est une corruption de Machatîte ou Maachatite (voir Maacha 10, col. 466), car dans le passage parallèle II Beg., xxiii, 34, au lieu et place de « Hépher, le Méchérathite », nous lisons : « Aasbaï, fils du Maachatite. »

    1. MÉCHITHAR##

MÉCHITHAR, commentateur arménien catholique, né à Sébaste en Arménie l’an 1676 et mort à Venise en 1749. Il fut le fondateur et le premier abbé général de la congrégation qui porte son nom et à laquelle il donna la règle de saint Benoît. Cet ordre monastique fut approuvé par Clément XI en 1712. Le couvent des Méchitharistes de Venise a été pour la nation arménienne, pendant les deux derniers siècles, comme un foyer de science religieuse et d’études orientales. — Parmi les ouvrages relatifs à la Bible, publiés par Méchithar, nous citerons 1° une édition, très rare aujourd’hui, du texte de la Bible

JJ « j « i » jiî-ii#5-u », 2° « -^>^ pu/mlruA’j, illustrée de gravures, in-f°, Venise, 1733-1735 ; 2° un Commentaire de l’Évangile de saint Matthieu (Hpt-^nt-pf/uu (J>u>ii>0£^ uit-binuipuShpb} d’une doctrine pure et élevée, in-4°, Venise, 1737 ; 3° un Commentaire de l’Ecclésiaste [jpt^at.p^i : ’b ^n^n^njpi » ), ouvrage fort estimé, in-f°, Venise, 1736.

J. Miskgian.

    1. MÉCHITHARISTES##

MÉCHITHARISTES (TRAVAUX DES) SUR

LES SAINTES ÉCRITURES. Voir Avédikian Gabriel, Kôver-Akontz, Pacradoimi Arsène, Tchamtchian Michel et Zohrab Jean. J. Miskgian.

    1. MECHMAS##

MECHMAS (hébreu : MikmaS ; Septante : M « xiiâç), orthographe, dans la Vulgate, II Esd., xi, 31, du nom delà ville qu’elle appelle ordinairement Machinas. Voir Machmas, col. 507.

    1. MECHNEDEBAÏ##

MECHNEDEBAÏ (hébreu : Maknadbaï ; Septante : Max « 8vaëoû), un des fils de Bani qui, du temps d’Esdras, avait épousé une femme étrangère et consentit à la renvoyer. I Esd., x, 40. Le nom est peut-être altéré. Les variantes, dans les manuscrits grecs, en sont nombreuses : Sinaiticus : ’A/aSvaéo-i ; Lucien : xai Na8*&oiS. D’après le grec, on pourrait supposer que le dernier élément du nom était le dieu Nabo.

    1. MÉDABA##

MÉDABA (hébreu : Mêdbd’; Septante : MaiSoëit, Jos., xiii, 9 ; M ?18aë « ; I Par., xix, et I Mach., ix, : 36, ;

233. — Monnaie de Médaba trouvée à Jérusalem.

ATTO KEEA ANTONINO. Buste d’Élagabale, à droite, la tête laurée.

fy IrtHAABQN TrXH. Astarté, debout à gauche, la tête toure lée, " vêtue d’un court chiton et posant le pied droit sur une prous de navire ; sur la main droite tendue, un petit buste d’honime> dans la main gauche, une corne d’abondance. Voir E. Babelon, dans Académie des Inscriptions, Comptes rendus, 1898, p. 389.

Vulgate : Medaba, Nom., xxi, 30 ; Jos., xiii, 9, 16 ; IPar., xix, 7 ; Is., xv, 2 ; Madaba, I Mach., ix, 36, 37), ville de la tribu de Ruben (fi g. 233).

I. Nom. — Médaba, d’après Gesenius, Thésaurus, p. 775, et plusieurs autres interprètes, dériverait dewê, « eaux, » et de dâbâh, « être tranquille, » et signifierait « la ville aux eaux tranquilles ». Fûrst, Hebràiscfies Handwôrterbuch, Leipzig, 1876, t. i, p. 727, traduit « Rivière d’abondance, c’est-à-dire rivière forte et abondante ». L’état physique du territoire de Mâdaba, où font défaut toute espcce de cours d’eau et de sources ne paraît pas justifier cette étymologie, non plus que l’orthographe de ce nom dans l’inscription de la stèle deMésa où ce nom est écrit Mahdeba’, « sine. L’interprétation de saint Jérôme, De nominibus hebr., t. xxiii, col. 807, aquarum famés, « manque d’eau, » semble plus vraisemblable. Il traduit cependant encore : aquæ eniinentes, « les eaux supérieures, » ibid., col. 795.

II. Situation. — Médaba est citée la première fois au livre des Nombres, xxi, 30, dans le chant de guerre des Amorrhèens d’Hésébon célébrant leurs triomphes sur lesMoabites. « Leur joug, y est-il dit, a été brisé d’Hésébon à Dibon. Nous avons porté nos ravages jusqu’à Nophé et jusqu’à Médaba » (d’après l’hébreu) ; Vulgate, inexactement : « dans leur lassitude, ils sont parvenus à Nophé et jusqu’à Médaba. » Ce texte indique Médaba

au sud d’Hésébon, entre cette ville et Dibon. Josué, Xni, 9 et 16, montre Médaba au nord de l’Arnon et d’Aroër, bâtie sur la lisière de cette vallée, sur la plaine (misor) à laquelle elle donne son nom et nécessairement au sud d’Hésébon, puisqu’elle est attribuée avec son territoire à la tribu de Ruben dont Hésébon formait la limite septentrionale. Ptolémée, v, 16, place Mï|8dtëa {des manuscrits ont Urfiava, Mqôja et MriSûva), à 68° 30’de longitude et 30° 45’de latitude, c’est-à-dire au sud d’Hésébon marqué à 68° 30’et 31°. D’après Eusèbe, « Meddaba, ville d’Arabie, ayant gardé son ancien nom, est située près d’Ésébon, » à dix milles ou 15 kilomètres de Cariathaîm, qui est l’occident, non loin de Baara ; à douze milles de Matthané, située elle-même à l’Orient.

appelé MiSôr de Médaba ; il dominé la plaine de quelques mètres. Le sommet de la colline est couronné par les constructions de la mission catholique latine, entourées d’un mur ; elles se dressent sur les débris d’anciens bâtiments paraissant être ceux de la citadelle de la ville. Les habitations du village se groupent tout autour, étagées sur les flancs de la colline. La plupart sont assez grossièrement bâties, bien que leurs murs soient formés en grande partie avec des pierres d’un bel appareil, empruntées aux ruines des églises, des monuments publics et des demeures particulières de la cité antique sur laquelle s’élève le village moderne. Souvent des tronçons de colonnes sont dressés aux portes des maisons et des chapiteaux corinthiens ou ioniques encastrés

234. — Médaba, vu du sud-est. D’après une photographie de M. L. ifeidet.

Onomasticon, aux mots Meddaba, Cariathaîm et Matthané, édit. Larsôw et Parthey, Berlin, 1862, p. 284, 252, 275 ; cf. S. Jérôme, De situ et nominibus loc. hebr., t. xxiii, col. 910, 885, 889, 904. À huit kilomètres, au sud, légèrement ouest de Ifesbân, l’antique Hésebon ; à vingt-sept kilomètres au nord de l’Ouadi-.Modje&, jadis la vallée d’Arnon, et autant ou à peu près des ruines de’Ar’ar et de Dibàn, dans lesquelles on reconnaît les villes bibliques d’Aroër et de Dibon ; à vingt-deux kilomètres au nord-nord-est de Khirbet Qêraïéh, identifié, avec grande probabilité, avec la Cariathaîm des Livres Saints (voir t. ii, col. 773), on trouve aujourd’hui une localité appelée. par les Arabes Mâdaba ou Médaba. C’est évidemment l’ancien nom de Médaba. Cette identité du nom, la corrélation entre les indications bibliques et historiques et la situation de la localité actuelle, l’ont fait universellement reconnaître pour la ville de la Bible. La légère différence entre l’une ou l’autre des données anciennes et la position réelle de la ville peut s’expliquer par ce que les chiffres et les directions indiqués dans Eusèbe ou les autres spnt simplement approximatifs. III. Description. — Le village actuel de Mâdaba (fig. 234) est bâti sur une éminence s’élevant au centre d’une dépression forjnée au milieu du plateau jadis

dans leurs murs. Dans plusieurs d’entre elles, de superbes mosaïques, avec de riches dessins de figures d’hommes, d’animaux et d’arbres, ou avec des inscriptions grecques, servent encore de pavement. Autour du village, çà et là, on remarque des traces d’une ancienne enceinte. Elle paraît avoir eu deux portes seulement, l’une à l’est, l’autre du côté septentrional. Les assises restant des jambages de la porte orientale sont faites de pierres taillées à refend d’un mètre environ de longueur et de plus de soixante centimètres de largeur et d’épaisseur. Appartenaient-elles aux portes de la ville de l’époque judaïque ? Il le semble. À l’intérieur, à droite de la porte en entrant, un espace entouré de bases nombreuses de colonnes paraît avoir été une place publique ou forum. La ville s’étendait en dehors de la muraille, où l’on retrouve des vestiges d’édifices importants et de plusieurs églises. Une grande piscine de cent vingt mètres de longueur d’est à ouest et cent environ de largeur recevait, au sud de la ville, les eaux de pluie découlant du plateau par les ravins qui entourent la cité. Il est difficile de déterminer l’origine des débris nombreux amoncelés de toutes parts et de spécifier ceux qui peuvent avoir appartenu à la ville primitive ou à l’époque judaïque. Une inscription sépul

craie, en langue arâméenne et en caractères nabuthéens, est datée de la 46° année du roi nabuthéen (t. i, col. 943), nommé par saint Paul, II Cor., xi, 32, Arétas (IV) Philodème, c’est-à-dire de l’an 37 de l’ère chrétienne. Recueillie en 1889, par le P. Zéphyrin Biever, missionnaire latin de la localité, elle est aujourd’hui au musée pontifical du Vatican. Cf. J. Lagrange, dans la Zeitschrift fur Assyriologie, 1890, p. 290 ; J. B. De Bossi, Inscrizione in scritturae Ungua nabatea trovata in Madaba, in-4°, Borne, 1893. Les ruines de l’époque gréco-romaine sontde beaucoup les plus nombreuses. Les unes sont païennes, la plupart chrétiennes. On a découvert jusqu’ici, tant dans l’intérieur de l’enceinte qu’en dehors, neuf ou dix églises bâties du iv= ou v 8 siècle au vu ». Elles étaient pavées de riches mosaïques, couvertes d’inscriptions grecques. L’œuvre la plus curieuse en ce genre est une carte géographique construite au Ve ou au vi c siècle, La carte formait la plus grande partie du pavement d’une église située au nord-est de la ville. Sa longueur, dans le sens de la largeur de l’église, du nord au sud, était de 15 mètres et sa largeur de 13 environ. Elle comprenait tout le territoire des douze tribus d’Israël, le pays de Moab, la basse Egypte et une partie, ce semble, de l’Idumée, de l’Ammonitide et de la Syrie. Toutes les principales localités bibliques y étaient inscrites et figurées dans les formes qu’elles devaient avoir au temps de la construction de la mosaïque. Jérusalem y était représentée avec ses principaux monuments. Les souvenirs évangéliques avaient été l’objet d’une attention spéciale. Découverte en décembre 1896 par le P. Cléophas Kœkilidos, bibliothécaire du couvent grec du Saint-Sépulcre de Jérusalem, la mosaïque venait malheureusement d’être gravement mutilée par les constructeurs de la nouvelle église qu’on élevait sur les ruines de l’ancienne. Il reste la tribu de Juda presque entière, une partie de la tribu de Benjamin et des tribus de Dan, Ephraim, Siméon, Ruben, des fragments insignifiants de Zabulon et de Nephthali, et d’autres plus considérables de Moab, de l’Egypte et du désert de l’égarement, le quart environ de la totalité de la carte. Elle était, ce semble, la représentation de la topographie sacrée telle qu’elle était connue alors et qu’Eusèbe de Césarée décrit dans son célèbre ouvrage, YOnomasticon, et dont il avait tracé lui-même un dessin, comme il le dit dans la préface. Cf. Cléophas M. Kœkilidos, ’0 h Ma8ï)Sâ Mocraïxbi ; xai Tziay paçtxôç Tiepî Eupi’aç IlnXoiiejTÎvnç xai AiyÛ7UTov XâpTrjç, in-8°, Jérusalem, 1897 ; J. Lagrange, La m osaïque géographique de Madaba, dans la Revue biblique, 1897, p. 165-184 et 450458 ; E. Stevenson, dans le Nuovo bollettino di archeologia cristiana, Rome, 1897, p. 45-102 ; Clermont-Ganneau, Archéologie orientale, Paris, t. ii, 1898, p. 165-175. IV. Histoire. — 1° Médaba était déjà une ville importante et célèbre, au moment de l’arrivée des Hébreux sur les confins de la terre de Chanaan, comme on le voit par le chant d’Hésébon dont nous avons parlé. Num., xxi, 30. Prise aux Moabites par les Amorrhéens leurs voisins, elle semble avoir été alors consumée par les flammes. C’est dans la plaine qui se développe au sud que s’avança le roi Séhon pour s’opposer à la marche de Moïse et de son peuple se dirigeant vers lâTérre Promise. La bataille se livra entre Médaba et Jassa, Jassa était située entre Médaba et Dibon. Voir Jassa, t. iii, col. 1138. Séhon fut battu et la plaine de Médaba avec la ville fut donnée en possession par Moïse lui-même à la tribu de Ruben. Num., xxi ; cf. Jos., xiii, 8-9, 15-18. — 2° L’armée des Syriens de Mésopotamie, de Maacha et de Soba, appelée par le roi des Ammonites Hanon, fils de Naas, pour le défendre contre David dont il redoutait la vengeance, à cause de l’injure faite à ses ambassadeurs, vint prendre position près de Médaba. EUe était forte, d’après I Par., xix, 7, de 32000 chars « le guerre. Les Ammonites s’étaient établis en ordre

de bataille près des portes de la ville. Joab, envoyé par David, se trouvait entre les deux armées. Il chargea son frère Abisaï de faire face aux Ammonites, tandis que lui attaquerait l’armée des alliés. Les Syriens défaits prirent la fuite. Les Ammonites s’enfermèrent alors dans la ville tandis que Joab rentra pour le moment à Jérusalem. 1 Par., xix, 1-15. Ni le texte hébreu ni la version ne. nomment la ville près de laquelle se rangèrentles Ammonites, mais des interprètes ont cru qu’il s’agit de Médaba. Cependant le récit n’indique pas que les Ammonites se soient éloignés de leur capitale. S’ils eussent été près des portes de Médaba, leur armée eût été unie à l’armée de leurs alliés, et Joab ne se fût point trouvé entre deux corps séparés ; Médaba n’était point non plus au pouvoir des Ammonites et ils ne pouvaient y rentrer. La ville où ils se réfugient est celle sans doute où Joab ne va pas tarder à venir les attaquer de nouveau, Rabbath-Ammon, leur capitale, I Par., xx, 1, aujourd’hui’Amman, située à 30 kilomètres au nord-est de Médaba. — 3° Médaba, après les règnes de David et de Salomon, passa de nouveau, semblé-t-il, sous la domination des Moabites. Le roi Mésa se vante’en effet de l’avoir reprise aux Israélites qui l’avaient occupée sous le règne d’Amri (930-918) : « Amri, dit-il dans l’inscription de sa stèle, lignes 7-8, avait pris la terre de Médaba, et Israël y avait habité pendant ses jours et ( ?) la moitié des jours de son fils [Achab], quarante ans… [et l’a reprise ( ?)]. » Cf. Vigouroux, LaJSi&(eet les découvertes modernes, 3e part., c. iv, 6e édit., Paris, 1898, p. 469. — 4° Réoccupée par les Israélites alliés de Josaphat, roi de Juda, et du roi d’Idumée, cf. IV Reg., m, 25, elle se trouvait de nouveau au pouvoir des Moabites, au temps d’Isaïe. Le prophète, en annonçant les malheurs qui vont fondre sur ce peuple, cite (xv, 2) Médaba parmi les villes dont la ruine va susciter les rugissements de Moab. — 5° Après la captivité deBabylone et au commencement de la lutte des Machabées, Médaba était occupée par les fils de Jambri. I Mach., ix, 36. Un certain nombre de manuscrits et Josèphe, Ant. jud., XIII, i, 4, ont « les fils d’Amarée », c’est-à-dire, selon l’explication de divers interprètes, des descendants des anciens Amorrhéens. Cf. Jambri, t. iii, col. 1115. Jonathan Machabée ayant envoyé son frère Jean demander aux Nabuthéens alors, amis des Juifs, de garder ses bagages (d’après le grec ; de leur prêter leur appareil militaire, d’après la Vulgate), pendant la guerre contre le général gréco-syrien Bacchide, les habitants de Médaba les surprirent dans le voisinage de leur ville, s’emparèrent du butin et mirent à mort Jean et ses compagnons. Voir Jean 2, t. iii, col. 1153 ; Jonathas 3, t. iii, col. 1620. Pour venger leur frère, Jonathan et Simon ayant appris que les Médabéens devaient célébrer en grande pompe le mariage d’un des leurs avec la fille d’un des plus illustres d’entre les princes de Chanaan, de la ville de Nabatha, vinrent se placer avec leurs hommes d’armes dans un pli des montagnes bordant la plaine de Médaba, non loin du chemin par où devait passer le cortège nuptial. Comme l’époux, avec ses parents et ses compatriotes, s’avançait au bruit des cymbales et des instruments de musique, les frères de Jean sortant de leur embuscade, tombèrent sur eux à l’improviste et massacrèrent la plupart. Le nombre des tués fut d’environ 400, d’après Josèphe, loc. cit. Les autres se dispersèrent dans les montagnes, et les vainqueurs s’en retournèrent avec les dépouilles. I Mach ; , ix, 35-42. Au lieu de Nabatha ou Nabatath, Gabatha, d’après quelques éditions de Josèphe, Nabat selon la version syriaque, on lit Madaba, dans la Vulgate. C’est à tort, ce semble, car le contexte indique clairement une autre localité pour la ville de l’épouse. Voir Nabatha. — 6° Jean Hyrcan, profitant dé la mort d’Antiochus VII, tombé dans sa guerre contre les Parthes (128), vint attaquer Médaba, dont il s’empara après six mois d’un.

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MEDABA — MEDECIN

siège difficile. Jos., Ant.jud., XIII, rx, 1. Elle appartenait encore aux Juifs quand mourut Alexandre Jannée (79). Id., ibid., xv, 4 ; Bell, jud., i, ii, 6. — 7° L’inscription nabuthéenne de Médaba nous montre la ville occupée par les Arabes nabuthéens et sous la domination de leur roi Arétas (IV) qui régnait à Pétra, l’an 37 après J.-C. Elle est encore appelée « ville des Nabuthéens de la deuxième Arabie », dans les Actes du concile de Chalcédoine (431), où elle figure comme ville épiscopale de la province de Bosra. Cf. Lequien, Oriens christianus, 1740, t. iii, p. 773. Toutefois, s’jl faut en croire la Mischna, Mikvaoth, vii, 1, aux temps qui suivirent la destruction du Temple, Médaba aurait eu des habitants juifs. Cf. Ad. Neubauer, Géographie du Talmud, Paris, 1868, p. 252. Les documents se taisent sur l’époque de la ruine de cette ville, mais il faut vraisemblablement en attribuer la destruction aux Perses de Chosroès (614). V. ÉTAT actuel. — Depuis cette époque néfaste, Médaba paraît avoir été complètement oubliée jusqu’aux premières années du xixe siècle. Son nom fut cependant retrouvé vivant dans la mémoire des Arabes de la Transjordane par Seetzen, en 1806, Reisen durch Syrien, Palàstina, Berlin, 1854, t. i, p. 407-408. Ses ruines furent visitées et décrites d’une manière sommaire par Burkhardt, en 1810. Travels in Syria and the Holy Land, Londres, 1822, p. 365-367. Tristram, de Saulcy et plusieurs autres les signalèrent depuis. En 1880, le patriarcat latin de Jérusalem, qui, avec l’appui du consul de France, avait obtenu du gouverneur de Syrie Midhat pacha, les ruines de la ville et de la campagne des alentours, y installa une colonie d’Arabes chrétiens, de la tribu des Azézât, venus du Kérak. D’autres chrétiens et des musulmans sont venus les rejoindre. Bien que souvent menacée et plusieurs fois attaquée par les Bédouins des alentours, la nouvelle Madaba n’a pas cessé de prospérer. Le gouvernement ottoman, peu de temps après l’occupation de Kérak (1884), y a installé sous l’autorité du mutsarref ou préfet de Kérak, dépendant lui-même du ouâly ou gouverneur général de Syrie, un mudir ou « directeur » du cercle, avec divers employés. La population actuelle est d’environ 800 habitants, dont 350 sont catholiques latins, 450 grecs et les autres musulmans. — Pour l’état des ruines et l’histoire de Médaba, outre les ouvrages déjà cités on peut consulter encore : Conder, Madeba, dans The Survey of Eastern Palestine, in-4 « , Londres, 1889, p. 178-183 ; P. Séjourné, Médaba, dans la Revue biblique, i" année, 1892, p. 617644 ; P. Lammens, S. J., Mddaba, la ville des mosaïques, dans les Études religieuses, 1897, p. 721-736, 1898, p. 44-61 et 73-74 ; G. Schumacher, Madaba, dans la Zeitschrift des deutschen. Palâstina-Vereins, t. xviii, 1895, p. 113-125. L. Heiuet.

    1. MÉDAD##

MÉDAD (hébreu : Mêdad, « amour [ ?] ; » Septante : Mw6â8), un des soixante-dix anciens qui furent désignés dans le désert du Sinaï pour aider Moïse dans le gouvernement du peuple. De même qu’Eldad, il ne se rendit point à l’appel de Moïse auprès du tabernacle, mais il n’en reçut pas moins dans le camp même l’esprit de prophétie. Num., xi, 24-29. Voir Eldad, t. ii, col. 1648.

    1. MEDDIN##

MEDDIN (hébreu : Middin ; Vaticanus : Aivwv [’?] ; Alexandrinus : MaSûv ; Lucien : MaSSeîv), ville du désert de Juda, qui fit partie du territoire de la tribu de ce nom. Jos., xv, 61. Le site en est inconnu. Le texte sacré la place entre Betharaba (t. i, col. 1663) et Sachacha, mais la situation de ces deux villes est également ignorée.

MÈDE (hébreu : ham-Mâdi ; Septante : 6 Mr|80<), nabitant de la Médie ou originaire de ce pays. Le nom des Mèdes n’est pas différent en hébreu de celui de la

Médie, Mâddi, excepté dans la désignation de Darius le Mède, Daryâvéi ham-Mâdi. Dan., xi, 1. Mais la Vulgate a rendu Mâdaî, tantôt par Media, voir Médie, tantôt par Medus et Medi. Medusne se lit au singulier que Is., xxi, 2, dans le sens collectif, et Dan., v, 31 ; xi, 1 (Darius Medus). Partout ailleurs, Medi est au pluriel pour signifier les Mèdes en général, Judith, xvi, 12 ; Esther, i, 3, 14, 18, 19 ; x, 2 ; Is., xiii, 17 ; Dan., v, 28 ; vi, 8, 12, 15 ; rx, 1 ; I Mach., viii, 8 (pour la Médie) ; Act., ii, 9 ; pour désigner leurs rois, Judith, i, 1 ; Jer., xxv, 25 ; U, 11 ; Dan., vin, 20 ; IMach., i, 1 ; leurs villes, IV Reg., xvii, 6 ; xviii, 11 ; Tob., i, 16 ; iii, 7 ; iv, 21 ; v, 8 ; vi, 6 ; ix, 3, 6. — Medena provincia, dans I Esd., vi, 2, désigne la Médie.

    1. MEDE Joseph##

MEDE Joseph, théologien anglais, protestant, né à Berden dans le comté d’Essex, en octobre 1586, mort à Cambridge le 1 er octobre 1638. Ses études terminées, il obtint à Cambridge une chaire de professeur de langue grecque et la conserva jusqu’à la fin de sa vie, refusant la charge de président du collège de la Trinité de Dublin qui lui fut offerte en 1627. Parmi ses ouvrages on remarque ; Clavis apocalyplica ex innatis et insitis visionum characteribus eruta et demonslrata, una cum commentario in Apocalypsim, in-4°, Cambridge, 1627, qui a eu plusieurs éditions et a été traduit en anglais sous le titre The key of the révélation searched and démons trated out ofthe natural and proper characlers of the visions, with a conimentary thereupon, in-4° Cambridge, 1633. Les œuvres de J. Mede ont été publiées plusieurs fois : la meilleure édition est celle du D r Wortbington, 2 in-f°, Londres, 1672. On y remarque un grand nombre de dissertations sur divers textes de l’Ecriture. J. Mede est le premier qui ait contesté l’authenticité des prophéties de Zacharie. Epist., xxxi et lxi, dans ses Works. Londres, 1664, p. 786, 884. — Voir la vie de J. Mede, en tête de ses œuvres ; W. Orme, Bibliotk. Biblica, p. 310. B. Heuetebize.

    1. MÉDECIN##

MÉDECIN (hébreu : rôfê’, de râfâ’, « guérir, » et une fois, Is., iii, 7, hobês, de hâbaê, « bander ; » Septante : îaTpiSç : Vulgate : medicus), celui qui exerce la médecine.

1° Chez les Égyptiens. — Il existait dans ce pays de nombreux médecins. Odyss., iv, 230 ; Hérodote, ii, 84 ; m, 121. Les premiers médecins mentionnés dans la Bible sont égyptiens, ceux que Joseph chargea d’embaumer le corps de son père Jacob. Gen., l, 2. Au dire d’Hérodote, ii, 84, les médecins égyptiens étaient surtout spécialistes, soignant les uns la tête, les autres le ventre, etc. Il ressort cependant des monuments que la spécialisation n’allait pas toujours aussi loin. On trouvait en Egypte des médecins sortis des écoles sacerdotales et dont l’instruction se complétait par les livres et l’expérience, puis des rebouteurs qui guérissaient les fractures en invoquant la déesse Sokhit, enfin des magiciens qui agissaient au moyen des amulettes et des pratiques magiques. Cf. Papyrus Ebers, pi. xcix, lig. 2-3 ; Maspero, Notes au jour le jour, 13, dans les Proceedings of the Society of Biblical Archseology, t. xiii, p. 501503 ; Histoire ancienne des peuples de l’Orient classique, Paris, 1895, t. i, p. 216.

2° Chez les Chaldéens. — Les Chaldéens n’avaient pas de véritables médecins, capables de reconnaître le caractère des maladies et de les soigner rationnellement. Cf., Lagrange, Les prêtres babyloniens, dans la Revue biblique, 1901, p. 396. Cf. A, Damon, Notice sur la profession de médecin, d’après les textes assyro-babyloniens, in-8°, Paris, 1897 (Extrait dur Journal asiatique, marsavril 1897). À l’époque des Achéménides, les Perses étaient encore obligés de s’adresser à l’Egypte pour obtenir des médecins capables. Hérodote, iii, 1, Cepen-> dant, chez les anciens Chaldéens du xxe siècle avant J.-C, la profession médicale était soumise à des règle

ments précis qui se retrouvent dans le code des lois de Hammurabi, art. 215-223. Le médecin qui, à l’aide du poinçon de bronze, opérait avec succès une plaie grave ou une cataracte sur l’œil, avait droit à un honoraire de dix, cinq ou deux sicles d’argent, suivant la qualité des personnes. S’il tuait son malade ou lui crevait l’œil, on lui coupait les mains à lui-même. S’il ne s’agissait que d un esclave, (le médecin en rendait un autre à la place de celui qu’il avait tué, ou pavait la moitié de son prix en argent, s’il lui avait crevé un œil. Enfin celui qui avait remis un membre cassé ou guéri un viscère malade avait également droit à un honoraire de cinq à deux sicles d’argent, suivant la qualité du malade. Il est aussi question du vétérinaire qui soignait les animaux et du chirurgien qui marquait les esclaves à l’aide d’un procédé indélébile. Art. 224-227. Cf. Scheil, Textes èlamitessémitiques, 2e sér., Paris, 1902, p. 99-102, 156. Ces textes supposent certaines connaissances médicales, au moins empiriques, et l’attribution à certains hommes de l’art de guérir.

3° Chez les Hébreux. — 1. La famille d’Abraham ne parait avoir emporté de Chaldée aucune tradition spéciale sur l’art de guérir. Même après leur séjour en Egypte, les Hébreux ne connurent guère, à cet égard, que les pratiques les plus simples. Dieu leur avait promis, dans un cas particulier, Exod., xv, 26, d’être le rôfê’, o ! (i(ievo ; , sanator, « le guérisseur » de son peuple. La loi mosaïque obligea les prêtres à faire le diagnostic de certaines maladies, particulièrement de la lèpre et des affections analogues, afin d’écarter de la société ceux qui en étaient atteints. Lev, , xiii, 3-56. Les prêtres se trouvaient par là dans l’obligation de posséder différentes connaissances médicales d’ordre tout pratique ; plusieurs même arrivaient à acquérir assez d’expérience pour exercer la médecine dans une certaine mesure. La loi qui oblige à faire soigner celui qu’on a blessé, Exod., xxi, 19, suppose une connaissance quelconque de l’art de panser les blessures et de les aider à se guérir. La Vulgate parle ici de frais de médecins, impensas in medicos restituât. À cette époque, il n’était pas question de médecins à honoraires chez les Hébreux. Le texte hébreu parle seulement de dédommagements pour l’interruption du travail. Quant aux soins, ils ne pouvaient guère être donnés que par les parents ou les plus expérimentés du voisinage. À l’époque des rois, l’on constate la présence de médecins en titre, surtout pour soigner les Llessures. II Reg., viii, 29 ; ix, 15 ; Is., i, 6 ; Ezech., xxx, 21 ; Prov., xii, 18. Asa, roi de Juda, consulta les médecins, lorsqu’il fut atteint de la podagre dont il mourut. La chose dut étonner, car le texte sacré observe qu’Asa ne chercha pas le Seigneur, mais recourut aux médecins. II Par., xvi, 12. Le prophète Isaïe, iii, 7, dit qu’au moment de la détresse du pays, on cherchera partout des chefs, et qu’alors celui qu’on interpellera s’empressera de répondre : Je ne peux pas être médecin, fyôbêé, médiats. Les Septante traduisent par àpy^Yis. « chef, » sens qu’a plus probablement ici le mot hébreu. Jérémle, vin, 22, demande des remèdes et un médecin pour la fille de son peuple, mais seulement dans un sens fi guré. Dans le texte du Ps. lxxxviii (lxxxvii), 11, il n’est pas question de médecins, rôfîm, mais de morts, yefâ’îm.

2. Le livre de l’Ecclésiastique est le seul qui mentionne les médecins avec quelque détail. Ceux-ci s’étaient donc établis parmi les Juifs d’une manière plus régulière vers l’époque des Séleucides. D’après le texte grec, « le médecin raille, miôtnti, la maladie longue, » il s’en moque, se flatte qu’elle cédera bientôt ; d’après le texte hébreu : « une apparence de maladie fait la joie du médecin, » et cependant, malgré les assurances du médecin, « tel est roi aujourd’hui, qui mourra demain. » Eccli., x, 11-12. La Vulgate reproduit la première phrase sous cette double forme : « La maladie qui se prolonge fatigue le médecin, le médecin coupe le mal qui dure

peu. » Plus loin, il est dit encore’. « Honore le médecin dans ton avantage, par les honneurs qui lui conviennent ; car c’est le Seigneur qui l’a créé. La guérison vient du Très-Haut, et il recevra des présents du roi. La science du médecin lui fera lever la tête, et il sera loué en présence des grands. » Eccli., xxxviii, 1-3. Enfin, après avoir recommandé au malade de commencer par purifier son âme et d’offrir à Dieu des sacrifices, le fils de Sirach ajoute : - « Ensuite donne accès au médecin, car c’est le Seigneur qui l’a fait, et qu’il ne se détourne pas de toi, car on a besoin de lui. Il est un temps où il y aura dans leurs mains la bonne odeur, eùwSfa (ou mieux probablement, d’après l’Alexandrin : eûoSfa, la bonne route, le succès ; Vulgate : un temps où tu tomberas dans leurs mains) ; car eux-mêmes prieront le Seigneur afin qu’il leur fasse arriver l’apaisement et la guérison en vue de la vie. » Eccli., xxxviii, 11-14. Dans tousses textes, l’auteur sacré réclame pour le médecin les égards qui lui sont dus. Il conclut par ce dernier trait : « Celui qui pèche en présence de son Créateur tombera aux mains du médecin. » Eccli., xxxviii, 15.

3. Parmi les fonctionnaires du Temple, il y avait un médecin chargé de soigner les prêtres malades. Ceux-ci en effet devaient être sans chaussures pour servir dans le sanctuaire ; ils ne buvaient que de l’eau, se nourrissaient surtout de viande et ne portaient qu’une tunique. Aussi étaient-ils souvent ^saisis de douleurs d’entrailles. C’est pourquoi celui qui les soignait s’appelait le « médecin des entrailles ». Schekalim, v, 1. Les Juifs de la dispersion avaient leurs médecins attitrés. Des inscriptions témoignent de l’existence d’un àpyt’atpoç, « médecin en chef, » dans les communautés juives d Éphèse et de Venosa. Cf. Schùrer, Geschichte des jùdischen Volkes im Zeit J. C, Leipzig, t. iii, 1898, p. 12-90. Hérode, dans sa dernière maladie, suivait docilement les prescriptions des médecins, qui l’envoyèrent aux eaux de Callirrhoé (t. ii, col. 69) et lui ordonnèrent des bains d’huile, sans succès. Cf. Josèphe, Ant. jud., XVU, vi, 5.

4. Les médecins sont mentionnés dans le Nouveau Testament, mais dans des termes qui ne supposent pas grande habileté chez ceux qui exerçaient alors en Palestine. D’après saint Marc, v, 26, l’hémorroïsse, qui obtint sa guérison en touchant le vêtement du Sauveur, « avait beaucoup souffert d’un bon nombre de médecins, y avait dépensé tout son avoir sans aboutir à rien qu’à voir empirer son mal. » Saint Luc, viii, 43, en sa qualité de médecin, Col., iv, 14, voir Luc, col. 379, dit seulement qu’elle « avait dépensé tout son avoir en médecins, sans qu’aucun ait pu la guérir ». C’est encore cet évangéliste qui rapporte le proverbe dont Notre-Seigneur se servit dans la synagogue de Nazareth : « Médecin, guéris-toi toi-même, » Luc, iv, 23, proverbe qui se retrouve sous une forme équivalente chez les anciens auteurs. Cf. Euripide, TroL, 247 ; Ovide, De re amat., 316 ; Bereschit Rabba, 23 ; Tanchuma in Gen., 4, 2. Enfin, pendant le festin auquel il assistait dans la maison du publicain Matthieu, Notre-Seigneur dit aux pharisiens qui murmuraient en le voyant avec des pécheurs : « Ce ne sont pas ceux qui se portent bien qui ont besoin du médecin, mais les malades. » Matth., ix, 12 ; Marc, ii, 17 ; Luc, v, 31. — Un seul médecin, saint Luc, est nommé par son nom dans l’Écriture. Col., iv, 14. Voir Ad. Harnack, Medicinisches aus der âllesten Kirchengeschichte, dans les Texte und Untersuchungen, t. viii, Heꝟ. 4, 1892, p. 37-40. — Sur les sages-femmesqui donnaient leurs soins aux enfants au moment de la naissance, voir Enfantement, t. ii, col. 1786. Sur les praticiens qui embaumaient les corps, Gen., l, 2, 25, voir Embaumement, t. ii, col. 1727. — Cf. J. Preuss, Der Arzt in Bibel und Talmud, dans Virchmv’s Arrhiv fur pathologische Anatomie und Physiologie, 1894, t. cxxxviii, p. 261-283 ; V. Ebstein, Die Medizin im À lien Testament, Stuttgart, 1501, p. 161-164. Voir Médecine. 11. Lesèthe.

    1. MÉDECINE##

MÉDECINE, art de soigner et de guérir les maladies.

I. Époque patriarcale. — À cette époque, il n’estquestion ni de médecins ni de médecine. On peut néan, moins appliquer aux hommes de ce temps ce que Pline, H. N., xxix, 5, disait plus tard : « Quantité de peuples vivent sans médecins, non pourtant sans médecine. » La médecine des premiers Hébreux s’inspira naturellement des pratiques des Chaldéens, leurs ancêtres, et ensuite des Egyptiens, chez lesquels ils se développèrent. La médecine chaldéenne consistait surtout à reconnaître et à chasser les démons ou les esprits regardés comme agents directs des diverses maladies. Toutes les fautes commises contre les dieux, particulièrement contre le dieu ou là déesse sous la protection desquels chacun était placé dès sa naissance, entraînait comme conséquence l’invasion du corps par un génie mauvais, le dieu Fièvre, le dieu Peste, le dieu Mal-de-Tête, etc. Il s’agissait donc avant tout de chasser ce génie funeste au moyen de formules, d’actes, de purifications, de recettes, d’amulettes qu’on regardait comme capables d’effrayer les esprits et de les forcer à abandonner le

235. — Ex-voto égyptien représentant des oreilles guéries.

D’après Wilkingon, Manners and customs ofthe anc. Egyptians,

édit. Birch, t. ii, fig. 460, n. 2, p. 358.

corps rendu malade par leur présence. Cf. Fr. Martin, Textes religieux : assyriens et babyloniens, Paris, 1903, p. 71, l’hymne à Bau, déesse de la médecine, pour obtenir la guérison des palpitations de cœur, des fractures et de différentes autres maladies. Tous ces moyens, qui n’avaient aucune espèce de relation naturelle avec l’effet attendu, appartenaient à la magie et non à la médecine. Les Chaldéens ne dédaignaient pas cependant d’utiliser les simples, bien que ces remèdes naturels leur inspirassent moins de confiance que les recettes magiques. Cet usage des simples fut probablement la seule pratique médicinale que les patriarches emportèrent de leur pays d’origine. Cf. A. Boissier, Liste des plantes médicinales, dans la Revue sémitique d'épigraphie et d’histoire ancienne, t. ii, p. 135-145 ; Maspero, Histoire ancienne des peuples de l’Orient classique, t. i, 1895, p. 683, 780-782. Les Égyptiens attribuaient également les maladies à la présence d’esprits malfaisants introduits dans le corps par quelque opération mystérieuse ou venus d’eux-mêmes par méchanceté. Pour les chasser, on employait les recettes magiques, mais on avait aussi recours aux remèdes naturels appliqués par de véritables médecins. Ceux-ci se formaient à leur art par l'étude des livres et l’expérience. Souvent ils ignoraient le vrai siège du mal ; les préjugés religieux du pays leur interdisaient oute inspection

anatomique du corps humain, que seuls les embaumeurs pouvaient entamer -, non sans encourir l’exécration générale. Les médecins égyptiens n’en prescrivaient pas moins d’utiles remèdes, particulièrement contre les maladies intestinales qui sévissaient sur les bords du Nil, Hérodote, ii, 77, contre les ophtalmies également très fréquentes, etc. On attribuait les préceptes de la médecine égyptienne à Horus, Diodore de Sicile, 1, 22 ; et Thot, devenu pour les Grecs Hermès Trismégiste, était regardé comme le premier médecin et le premier chirurgien. Cf. Papyros Ebers, die atteste Buck ùber Heilkunde, trad. H. Joachim, in-8°, Berlin, 1890 ; Maspero, Histoire ancienne, t. i, p. 215, 216 ; P. Perret, Dictionnaire d’archéolog. égyptien., in-12, Paris, 1875, p. 329 ; J. G. Wilkinson, Manners of the aneient Egyptians, édit. Birch, 1878, t. ii, p 355-358, 404-413, 417. On a trouvé en Egypte des ex-voto représentant des organes ou des membres dont on avait obtenu la guérison (fig. 235).

II. Au temps de l’exode. — Moïse fut élevé, â la cour du pharaon, « dans toute la sagesse des Égyptiens. » Act., vii, 22. Il eut donc connaissance de ce qu’il y avait de sérieux dans la science de leurs médecins ; il se servit plus tard de cette connaissance pour la rédaction de plusieurs de ses lois. Celles qui se rapportent

236. — Scythes pansant des blessures.

Relief du vase d’argent de Koulba. Musée de l’Ermitage,

à Saint-Pétersbourg.

aux divers genres d’impuretés renferment des prescriptions qui constituent d’excellents moyens prophylactiques contre beaucoup de maladies. Voir Impures (Choses), Impureté légale, t. iii, col. 85$1-$261 ; N. Guéneau de Mussy, Étude sur l’hygiène de Moïse, Paris, 1885. III. Pratiques médicales. — 1° Les pratiques médicales mentionnées dans la Sainte Écriture sont simples et assez peu nombreuses. On savait parfaitement bander et soigner les plaies et les blessures. Exod., xxi, 19. La pratique de la circoncision, en particulier, exigeait des soins qu’une longue expérience dut rendre très appropriés à la circonstance. Voir Circoncision, t. ii, col. 776. Isaïe, i, 6, parle de plaies pansées et bandées, et Ézéchiel, xxx, 21, de bras cassé, puis pansé et enveloppé de bandages (fig. 236). Après la bataille de RamothGalaad, le roi Joram alla faire soigner ses blessures àJezraël. IV Reg., viii, .29 ; ix, 15. Le bandage des blessures était accompagné de lotions d’huile, Is., i, 6, et anssi de vin mêlé à l’huile. Luc, x, 34. Ce mélange était fort apprécié des anciens. Cf. Pline, H. N., xxix, 9 ; xxxi, 47 ; Columelle, De re rustic., vii, 5, 18 ; Jems.. Berachoth, 3, 1, etc. Les onctions de baume, surtout de baume de Galaad, servaient à endormir les douleurs.. Jer., viii, 22 ; xlvi, 11 ; li, 8. Les apothicaires ou parfumeurs préparaient les divers mélanges propres aux onguents. Exod., xxx, 35 ; Eccle., x, 1. Voir Baume, t. ii, col. 1517. On mit un cataplasme de figues sur l’anthrax du roi Ézéchias. IV Reg., xx, 7 ; Is., xxxviii, 21. Voir Figuier, t. ii, col. 2241. Ézéchiel, xlvii, 12, parle d’un arbre de la Jérusalem nouvelle, dont les feuilles serviront de remède, fèrùfàh, iyieiix, medicina. Saint Jean place aussi dans la Jérusalem céleste un arbre de viedont les feuilles serviront ei ; ÔEpaireiav, ad sanitatetn y « pour la santé. » Apoc xxii, 2. Dans le livre de Tobie, vi, 5, le cœur, le fiel et le foie du poisson sont préconisés comme d’utiles remèdes. Le fiel est présenté par l’ange comme efficace contre les taies blanches, XeuxâfiaTa, albugo, des jeux. Tob., vi, 9 ; xi, 13-15, Le fiel entrait dans la composition des collyres anciens ; il ne s’ensuit pas pourtant que la guérison de Tobie soit purement naturelle. Voir Collvre, t. ii, col. 844 ; Fiel, col. 2234. Le livre de la Sagesse, xvi, 12, mentione, au nombre des remèdes, l’herbe et le cataplasme émollient, porâvr], iiâlnyiia, herba, malagma, comme spécifiques qu’on aurait pu employer contre la piqûre des mouches, des cousins ou des serpents. On peut encore signaler l’emploi de la mandragore qui, dit-on, favorisait le sommeil et la fécondité, cf. Gen., xxx, 14 ; voir Mandragore, col. 653 ; l’usage de la musique pour calmer la surexcitation cérébrale de Saûl, I Reg., xvi, 16 ; l’assainissement des eaux par le sel, IV Reg., ii, 21, et l’adoucissement d’un mélange de coloquintes sauvages par l’addition de farine. IV Reg., iv, 39-41. L’efficacité de ces deux derniers procédés est probablement attribuable à une cause surnaturelle. Il en est de même, plus sûrement encore, de l’eau de la piscine de Bethesda, qui, après son agitation par l’ange, guérissait le premier malade qui s’y plongeait. Joa., v, 2-4. Enfin, saint Paul recommande à son disciple l’usage modéré du vin comme réconfortant et remède contre les maux d’estomac. Comme les causes morales influent souvent sur la santé, la fuite du mal, la joie du cœur, l’aménité des paroles sont recommandées au sage qui veut assurer son bien-être physique ou celui des autres. Prov., iii, 8 ; xii, 18 ; xvii, 22. Par contre, le vice est représenté comme essentiellement funeste à. la santé du corps. Prov., ii, 18 ; v, 5 ; vii, 27 ; Eccli., xxxvii, 30-34.

2° À partir de la domination des Séleucides, la médecine rationnelle des praticiens grecs eut occasion de s’exercer en Palestine. Le fils de Sirach recommande d’honorer le médecin et de recourir à ses soins, et en même temps, de prier le Seigneur, dé purifier son âme et d’offrir des sacrifices. Eccli., xxçviii, 1-15. — Hérode, atteint d’un mal effroyable, fit venir des médecins dont il suivit les prescriptions. Sur leurs conseils, il alla prendre les eaux de Callirrhoé, dont on se servait sous forme de bains et de potions. Voir Callirrhoé, t. ii, col. 72. On le mit ensuite dans un bain d’huile, qui devint pour lui une cause d’aggravation plutôt que de soulagement. La médecine fut d’ailleurs impuissante à le guérir. Cf. Josèphe, Ant. jud., XVII, vi, 5 ; Bell, jud., i, xxxiii, 5. — Il existait aussi et il existe encore à Tibériade des eaux thermales auxquelles on allait demander la santé. Josèphe, Vit., 16 ; Bell, jud., II, xxi, 6. De leur côté, les Esséniens restaient fidèles à la médication par les simples. Ils s'étudiaient à connaître les plantes et les minéraux qui avaient la propriété do guérir les maladies et cherchaient à ce sujet des renseignements dans les livres des anciens. Josèphe, Bell, jud., Il, vii, 6. On faisait remonter jusqu'à Salomon plusieurs de ces livres. Josèphe, Ant. jud., VIII, ii, 5. Les talmudistes citen'. un grand nombre de végétaux et de minéraux qui étaient employés comme remèdes : myrrhe, safran, hysope, cumin, menthe, bitume, etc. Voir Wunderbar, Bibtischtalmudische Medicin, in-8°, Riga, Abth. i, 18 ! >0-1860, p. 73-118.

3° À côté de cette médecine pratique et rationnelle, il se perpétuait chez les Juifs un art de guérir qui empruntait ses moyens à la magie ou à des procédés superstitieux, tels qu’en emploient les sorciers de tous les temps. Saint Marc, v. 26, parle de l’hémorroïsse qui avait en recours à toutes sortes de médecins sans résultat. Voici un exemple de la médication employée en pareil cas. « Rabbi Jochanan dit : Prenez le poids d’un denier de gomme d’Alexandrie, le poids d’un denier d’alun et le poids d’un denier de safran de jardin, pilez-les en semble et donnez-les dans du vin à la femme hémorroïsse. S’il n’y a pas d’effet produit, prenez trois fois trois logs d’oignons de Perse, cuisez-les dans du viii, ensuite faites-les boire à la femme en lui disant : Sois délivrée de ton flux. Si cela ne réussit pas, menez-la à un croisement de deux chemins, qu’elle tienne à la main un gobelet de viii, et que quelqu’un survenant par derrière lui fasse peur en disant : Sois délivrée de ton flux. S’il n’y a pas encore de résultat, prenez une poignée de cumin et une poignée de foin grec, faites-les bouillir dans du vin et donnez-les-lui à boire en disant : Sois délivrée de ton flux. » Suivent d’autres recettes analogues, dont l’inefficacité est également prévue. En fin de compte, on en vient à la suivante : « On creusera sept fossés, dans lesquels on brûlera des sarments de vignes non taillées, et la femme, tenant en main un gobelet de viii, s’assiéra successivement au bord de chaque fossé, et on lui dira en la faisant relever : Sois délivrée de ton flux. » Bàbyl. Schabbath, 110. On comprend que les talmudistes eux-mêmes n’aient pas craint de dire, en parlant des rabbis qui préconisaient de pareils traitements : « Le meilleur des médecins mérite la géhenne, s Kidduschin, 82, 1. Cf. Pline, H. N., xxix, 5. Aussi accourait-on de tous côtés auprès de Notre-Seigneur pour obtenir de sa puissance et de sa bonté des guérisons que ne pouvait procurer la médecine de son temps.

4° Les remèdes sont désignés dans la Sainte Écriture par les noms généraux terûfàh, ùj Utà, medicina, Ezech., xlvii, 12 ; refu'ôf, îânotTa, medicamina, Jer., xlvi, 11 ; Sap., xii, 4 ; marpê', Jer., xxxiii, 6 ; |iâXaY(J.ot Is., i, 6 ; Sap., XVI, 12 ; <pâp[iaxov, medicamentum, Sap., i, 14 ; è£tXa17|jL<Sî, medicina, Eccli., xviii, 20 ; remedium, Tob., vi, 7, etc. — Voir D. Calmet, De re medica veterum He~ brseorum, dans le Cursus Script. Sacr. de Migne, Paris, 1838, t. xvii, p. 999-1012 ; Brunati, De la médecine chez les Hébreux, dans les Démonstr. évang. de Migne, Paris, 1843, t. xiv, p. 480-490 ; F. Bœrner, Dissert, de statu medicinx ajntd veteres Ebreeos, Vitebsk, 1755 ; Sprengel, De medicina Ebrxorum, Halle, 1789 ; J. Schmidt, Biblischer Medicus, Zûllichau, 1743 ; Th. Shapter, Medica sacra, Londres, 1834 ; J. P. Trusen, Darstellung der biblischen Kranhheiten und der auf die Medizin bezïtglichen Stellén der heiligen Schrift, Posèn, 1843 ; R. J. Wunderbar, Biblisch-talmudische Medicin, 2 in-8°, Riga, 1850-1860 ; J. Roser, Kranhheiten des Orients, Augsbourg, 1837 ; F. Pruner, Kranhheiten des Orients, in-8°, Erlangen, 1847 ; Tobler, Beitrag zur medizinischen Topographie von Jérusalem, in-8°, Berlin, 1855 ; Bennett, Diseases of the Bible, in-16, Londres, 1887 ; W. Ebstein, Die Medizin in Allen Testament, Stuttgart, 1901, p. 164-168 ; Id., Die Medizna im Neuen Testament und im Talntud, in-8°, Stuttgart, 1903 ; F. von Œfele, Materialien zur Bearbeitung babylonischer Medicin, in-8°, Breslau, 1902 ; Frd. Kûchler, Beitràge zur Kenntniss des assyrisch-babylonischen

Medizin, in-4°, Leipzig, 1904.
H. Lesêtre.
    1. MÉDEMÉNA##

MÉDEMÉNA, nom de deux villes de Palestine.

1. MÉDEMÉNA (hébreu : Madmanndh ; Vaticanus. Max*?i[L', Alexandrinus : Be.8£êr l vâ), ï[edeJiitia, ]os., x, 31, attribuée plus tard à Siméon, si elle est, comme le pensent divers commentateurs, la même que Bethmarchaboth. Jos., xix, 5. Voir Bethmarchaboth, t. ii, col. 1696, Médeména est nommée entre Siceleg et Sensenna : elle était donc dans la partie la plus méridionale de la Palestine. Conder a placé autrefois cette ville, Tentwork in Palestine, 1878, t, H, p. 338 ; Survey of Western Palestine, t. iii, p. 392, 399, à Umm Deimnéh, ruines situées à dix-neuf kilomètres au nord-est de Bersabée, où l’on remarque des amas de pierres et des restes de fondations, mais il a renoncé depuis à cette identification, préférant ;

la placer à eUMinyéh, localité que Ed. Robinson, Bibli* cal Researches in Palestine, 2e édit., t. i, p. 602, a retrouvée au sud de Gaza, et dont le nom rappelle Mrjviotç qu’Eusèbe et saint Jérôme, Onomast., édit. Larsow et Parthey, 1862, p. 288, 289, assurent être Médeména et placent près de Gaza. — D’autres géographes identifient l’antique cité avec les ruines de Kldrbet Ma’an Yunès (le Castrum Meneenum du Codex Theodoaianus), à 4 heures au sud de Gaza. V. Guérin, Judée, t. ii, p. 230-231. Le nom de Médeména reparaît dans I Paralipomènes, II, 49, où nous lisons que Sâaph, fils de Caleb et de Maacha (d’après l’hébreu), fut « père de Médeména », c’est-à-dire qu’il s’établit dans cette ville et en fui le second fondateur ou le restaurateur. Dans ce passage, la Vulgate écrit le nom Madména.

2. MÉDEMÉNA (hébreu : Madmêndh ; Septante : Ma8e6r)vâ), ville située probablement dans la tribu de Benjamin. Is. ; x, 31. Eusèbe et saint Jérôme, Onomast., 1862, p. 288, 289, et beaucoup d’autres après eux, l’ont confondue à tort avec Médeména 1. La prophétie d’Isaïe, où elle est nommée après Anathoth, x, 30, prouve, par tout l’ensemble du contexte, qu’elle était située, au nord de Jérusalem, sur la route que suivait l’armée assyrienne de Sennachérib envahissant la Palestine. Ses habitants, dit le prophète, « s’enfuient » pour échapper aux coups de l’ennemi. Le site est inconnu. Fr. Valentiner, Beitrag tur Topographie des Stammes Benjamin, dans la Zeitschrift der morgenlàndischer Gesellscliaft, t. xii, 1858, p. 169, l’identifie avec Schafât, petit village à trois quarts d’heure de Jérusalem, à l’ouest de la route de Naplouse, où les maisons sont construites avec d’anciens matériaux. J. Murray, Syria and Palestine, 1868, p. 307. On ne peut apporter aucune preuve plausible en faveur de cette hypothèse.

    1. MÉDÈNE##

MÉDÈNE (PROVINCE) (hébreu : Madai ; omis dans les Septante ; Vulgate : Medena provincia), la Médie. Elle est ainsi appelée par la Vulgate, I Esd., vi, 2, où il est dit que’Ahmetâ’, « Ecbatane, » est la capitale de la province de Médie. Voir Ecfatane, ii, % t. ii, col. 1530 et Médie.

    1. MÉDIATEUR##

MÉDIATEUR (grec : [u<j£ttiç ; Vulgate : mediator), celui qui est interposé pour ménager les relations entre deux parties. — Les habitants de Galaad demandent à Jephlé que le Seigneur « entende entre eux », qu’il soit, d’après la Vulgate, mediator et testis, bien qu’il ne s’agisse que d’un serment. Jud., xi, 10. Job, ix, 23, réclame un arbitre, môkîah, u.emTT) « , entre lui et ses amis. Moïse a été le médiateur de la Loi ancienne transmise par le ministère des anges ; il a servi ainsi d’intermédiaire entre Dieu et son peuple. Gal., iii, 19, 20. Jésus-Christ est le médiateur de la nouvelle alliance et le seul médiateur entre Dieu et les hommes, médiateur unique, de même que Dieu est unique. I Tim., », 5. Il n’est pas un simple intermédiaire se contentant, comme Moïse, de transmettre aux hommes ce qui venait de Dieu. Il s’est fait lui-même rédempteur pour tous les hommes, il a souffert et il est mort, afin de lever par là l’obstacle qui empêchait les hommes de communiquer avec Dieu. I Tim., ii, 6. Sa médiation n’est donc pas purement attributive et accidentelle, comme celle de Moïse ; elle est réelle et naturelle, parce que Jésus-Christ réunit en sa personne la divinité et l’humanité entre lesquelles l’harmonie était à rétablir. Ayant réalisé en lui-même cette harmonie de la manière la plus intime qui se puisse concevoir, il a tout pouvoir et tout droit pour la réaliser entre le Père, dont il est le Fils et l’incontestable mandataire, et les hommes dont il a pris la nature. Ces derniers pourtant ne peuvent profiter de cette médiation qu’autant qu’ils l’acceptent. Cf. Pétau, fia incarnatione, XIII, i-xiy. La conséquence de cette

médiation est l’alliance nouvelle contractée entre Dieu et l’humanité rachetée. Heb., viii, 6 ; IX, 15 ; xii, 24.

Voir Jésus-Christ, t. iii, col. 1514.
H. Lesêtre.
    1. MÉDIE##

MÉDIE (hébreu : Mâdaï, II (IV) Reg., xvii, 6 ; xviii, 11 ; Esther, 1, 3 ; Is., xiii, 17 ; xxi, 2 ; Jer., xxv, 25, Ll, ll, 28 ; Dan., v, 28 ; vi, 13 (12) ; IX, I Esd., vi, 2 ; chaldéen : Mâdi, Dan., xi, 1 ; Mâdàia’, Dan., vi, 1 ; Septante : MVjSot, IV Reg. xvii, 6 ; xviii, 11 ; Esther, i, 3 ; Is., xiii, 17 ; xxi, 2 ; Jer., xxv, 25, xxviii (hébreu et Vulgate Ll), 28 ; Dan., IX, 1 ; v, 28 ; viii, 20 ; 1 Mach., i, 1 ; Act., H, 9 ; I Mach., xiv, 1, 2 ; Vulgate : Medi, dans tous les livres, excepté Media, Jer., li, 28 ; I Mach., vi, 56 ; xiv, 1-2 ; Medena, I Esd., vi, 2), contrée d’Asie.

I. Description de la Médie. — La situation géographique de la Médie est facile à déterminer, quoique les limites de cette région ne soient pas très précises. Elle était séparée de la Caspienne, au nord, par une chaîne de montagnes aujourd’hui connue sous le nom iranien d’Elburz et plus anciennement Harabèrëzaiti, ou Ariobarsanès. Les auteurs classiques ne donnent pas de

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231. — Carte de la Médie.

nom à cette chaîne, ils parlent seulement de son plus haut sommet que les Grecs appellent Iasonion et qui a 5700 mètres d’altitude, Ptplémée, VI, ii, 4 ; Strabon, XI, xm, 10. À l’est, elle confinait à la Parthie dont elle était séparée par le désert ; au sud, à la Perse et à l’Élymaide ou Susiane dont elle était séparée par les monts Pararhoatras, à l’ouest, à l’Assyrie, dont elle était séparée par les monts Zagrus et Choatras ; au nord-est, à l’Arménie, dont la séparaient le lac Thospitis, diverses montagnes et une partie du cours de l’Araxe, Pôlybe, v. 44 ; Strabon, XI, xiii, i ; Pline, H. N., vi, 1 ; Ptolémée, VI, ii, 1-5 ; divisent la Médie en deux parties : la grande Médie et la Médie Atropatène. Cette dernière ne porta ce nom que depuis le moment où le satrape Atropatès en devint le souverain indépendant, c’est-à-dire depuis la destruction de l’empire perse par Alexandre Arrien, Anabas., m, 8 ; vi, 29 ; Diodore de Sicile, xviii, 3 ; Strabon, XI, xiii, 1. La Médie Atropatène était la partie nord-ouest de la Médie. Elle était située entre l’Arménie au nord, les Cadusiens à l’est, la grande Médie au sud et l’Assyrie à l’ouest. On. y trouve un beau lac salé appelé Kapauta ou Matianus. La principale ville était Gazaca, l’Ecbatane du Nord. Voir Ecbatane 1, t. ii, col. 1529. L’Atropatène est un haut plateau dont la partie la plus basse, celle où est situé le lac Kapauta, a 1 300 mètres d’altitude. Les hautes montagnes de l’est et < leurs versants du côté de la mer Caspienne étaient le séjour de tribus aryennes qui firent pendant des siècles la guerre aux Mèdes et aux Perses (Dg. 237).

917

MEDIE

918

La grande Médie avait pour bornes : au nord, l’Hyrcanie ; à l’est, la Parthyène ; au sud, la Gabiane et le pays des Cosséens ; à l’ouest, les monts Zagros et l’Assyrie.. Strabon, XI, xiii, 5-6. La majeure partie de la grande Médie se compose de plateaux élevés et froids. Du côté des portes Caspiennes on rencontre au contraire des vallons. riants et propres à toutes les cultures. Cette contrée est très favorable à l’élevage des chevaux, elle produisait une herbe que les anciens appellent herba medica. C’est là que se fournissaient les haras des rois perses. On appelait ces chevaux niséens (fig. 238) du nom de la plaine (Nisœi campi) où ils étaient élevés. Hérodote, vu, 40 ; Diodore de Sicile, xvii, 100 ; Élien, Hist. anim., m, 2 ; Strabon, XI, xiii, 7. Ils figurent dans le tribut payé par les Mèdes aux Assyriens. G. Maspero, Histoire

xi, 2, est également signalée par les’historiens de l’antiquité. Hérodote, vii, 62, dit qu’ils se nommaient primitivement Ariens et qu’ils prirent le nom de Mèdes à la suite de l’expédition de Jason et de Médée. Il n’y a pas à tenir compte de cette légende grecque et il faut seulement retenir le témoignage qui les rattache à la race aryenne. C’est là du reste un fait confirmé par la langue qui est du groupe aryen. Cf. J. Oppert, Le peuple et la langue des Mèdes, in-8°, Paris, 1879. Les Mèdes vécurent longtemps en tribus séparées. Hérodote, i, 96. Ces tribus eurent des guerres fréquentes avec les Assyriens, en particulier sous Théglathphalasar III, p. 49, 51. Fr. Lenormant, Lettres assyriologiques, 1. 1, in-8°, Paris, 1871, p. 49-51. G. Maspero, Hist. ancienne, t. iii, p. 142, 153. À l’époque de Sargon, c’est-à-dire vers 710 avant

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238. — Char perse attelé de chevaux niséens. Palais de Persépolis.

ancienne, 1899, t. iii, p. 454. À côté des espèces les plus redoutables de bêtes féroces, le lion, le tigre, le léopard, l’ours, on rencontrait beaucoup d’animaux domestiques : l’âne, le buffle, le mouton, la chèvre, le chien, le dromadaire, le chameau à deux bosses. La flore n’était pas moins remarquable. Le pays produit des fruits variés, entre autres le citron que les anciens appelaient malum medicum. Virgile, Georg., II, v, 126-135 ; Pline, H. N : f xii, 3. Strabon, XI, xiii, 7, mentionne aussi parmi les produits du pays le silphium, mais il était, dit-il, inférieur à celui de la Cyrénaïque. Cf. G. Maspero, Histoire ancienne, t. iii, p. 453-454. Nombreuses aussi étaient les pierres précieuses, en particulier le lapis-lazzuli. Pline, H. N., xxxvii, 5, 8, 10, 11. Cf. G. Maspero, ibid.

Les principales villes de la grande Médie étaient Ecbatane, Rages, Bagistana, aujourd’hui Behistoun. Voir Ecbatane 1, t. ii, col. 1520 ; Bagès. Près de Rages ou sur le même emplacement que cette ville s’éleva la colonie grecque d’Europos qui devint la capitale des Parthes sous le nom d’Arsacée. Strabon, XI, xiii, .6-Cf. H. Kiepert, Manuel de Géographie ancienne, trad. franc., in-S », Paris, 1887, p. 40-44.

II. Histoire des Mèdes. — L’origine aryenne ou japhétique des Mèdes, qui est indiquée dans la Genèse,

J.-C. un certain nombre de tribus se réunirent autour d’un prince qu’Hérodote, 1, 96-98, appelle Déjocès et dont on retrouve le nom sous la forme Dayaoukkou ou Dahyaukâ dans les inscriptions assyriennes, Annales de Sargon, lig. 75-77. Cf. J. Oppert, Records of the past, t. viii, p. 33 ; H. Winckler, Die Keilschrifttexte Sargon’s, in-8°, Leipzig, 1889, p. 20 Cf. G. Maspero, Hist. ancienne, t. iii, p. 326. Ce Déjocès, d’abord allié aux Assyriens, avait été plus tard, à la suite d’une campagne de Sargon contre la Médie, en 715, déporté à Hamath en Syrie, Fr. Lenormant, Lettres assyriologiques, t. i, p. 59. Dans la suite il se rendit indépendant et fut ie véritable fondateur du royaume mède. Il profita pour cela des embarras de Sargon occupé à des guerres contre Babylone et la Commagène et par le siège d’Azot. Fr. Lenormant, Ibid. Cf. F. Vigoureux, La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., t. iii, p. 566. C’est à l’époque de sa victoire sur les Mèdes que Sargon avait déporté un certain nombre d’Israélites en Médie. Sennachérib remporta quelques victoires sur ce pays, mais ce ne furent que des succès passagers et elles n’empêchèrent pas les Mèdes d’achever l’oeuvre de son indépendance. Déjocès avait fondé la ville d’Ecbatane, qui, selon H. Rawlinson, doit être distinguée de ]’Ecbatane du sud ou Hamadân (voir Ecbatake 1,

t. ii, col. 1529), et d’après G. Maspero, Histoire ancienne, t. iii, p. 325 n. 2, doit être confondue avec elle.

La liste des premiers rois de Médie nous a été transmise par Hérodote, i, 98-107 et par Ctésias, Epitome Diodori, 30-32, édit. Gilmore, in-8°, Londres, 1888, p. 97111. Voici ces deux listes :

LISTE D HERODOTE

années.

00

Déjocès 53

00

, 00

, 00

00

Phraortes 22

Cyaxare 40

Astyages. 35

LISTE DE CTESIAS

années.

Arbacès 28

Madaucès 50

Sosarmus 00

Artycas 52

Abianès 23

Artæus 40

Artynè 22

Astybarras 40

Aspadas ou Astyages… 00

La liste de Ctésias est une liste de fantaisie faite avec celle d’Hérodote, en répétant les années de règne de deux en deux. Le chiffre de 28 attribué à Arbacès est destiné à rendre la liste vraisemblable. G. Maspero, Bist. anc., t. iii, p. 447. Il n’y a donc aucun compte à tenir de cette liste. Cf. Fr. Lenormant-E. Babelon, Uist. ancienne des peuples de l’Orient, t. v, 1887, p. 418 ; Gilmore, The Fragments of the Persika of Ktesias, p. 92-96.

Le successeur de Déjocès, Phraorte ou Fravartisch, l’Arphaxad de la Bible, monta sur le trône vers 655, à l’époque où Assurbanipal était encore tout-puissant. II commença par s’annexer les petits États voisins et les Perses qu’il vainquit, puis il attaqua le roi d’Assyrie et fut battu et tué. Hérodote, i, 102 ; Fr. Lenormant-E. Babelon, Histoire ancienne, t. v, p. 424-428 ; G. Maspero, Hist. anc., t. iii, p. 454-465. Voir Arphaxad, t. i, col. 1030. Le fils de Phraorte, Cyaxare ou Houvaksha-tara, lui succéda. Ce fut un grand capitaine et un grand administrateur. Il organisa une armée régulière, battit Assurbanipal et assiégea Ninive. La ville fut sauvée grâce à une invasion des Scythes que le roi d’Assyrie appela à son secours. Hérodote, i, 103-104. Délivré d’eux par la trahison et par un immense massacre, Cyaxare s’allia à Nabopolassar, roi de Babylone, et cette fois Niaive succomba sous les coups des deux alliés. Ceux-ci se partagèrent les dépouilles. Le roi des Mèdes eut l’Assyrie proprement dite et ses dépendances du haut Tigre, ainsi que les régions du [nord et de l’est. L’Arménie ruinée par les Scythes tomba également en son pouvoir ainsi que la Cappadoce et quelques pays voisins. Trois ans après la chute de Ninive, Cyaxare réclama un otage scythe qui s’était réfugié chez Alyatte, roi de Lydie, et après des alternatives de victoires et de défaites conclut avec lui un traité qui donnait pour limite aux deux royaumes l’Halys, rivière qui partage la Cappadoce. II scella l’alliance par le mariage de son fils Astyage ou Aytahaga, en assyrien Ischtouvigou, et mourut l’année suivante, 584 avant J.-C. Hérodote, l, 103-106, 16, 73-74 ; cf. Lenormant-E. Babelon, Hist. anc., t. jv, p. 428-435 ; G. Maspero, Hist. anc, t. iii, p. 465-472, 480-486, 521, 525-530.

Le règne d’Astyage fut long et, pendant les trente premières années, sans événement important. La fin en fut marquée par la révolte de Cyrus, fils de Cambyse, roi de Perse, qui secoua le joug du roi de Médie, et substitua la suzeraineté des Perses à celle des Mèdes. Ce ne fut guère qu’une transformation intérieure ; pour les peuples voisins ce fut toujours l’empire des Mèdese des Perses. Hérodote, i, 46, 74-75, 107-130 ; Fr. Lenormant-E. Babelon, Hist. anc., t. v, p. 435-444 ; G. Maspero, Hist. anc, t. iii, p, 595-500. Voir Cyrus, t. ii, col. 1191.

Cyrus étendit rapidement son empire. Il défit Crésus, roide Lydie, s’empara de Sardes et, après la Lydie, sou mit les cités grecques de la côte, la Carie, la Lycie et les régions orientales de l’Iran. Maître de ce vaste domaine, il attaqua l’empire babylonien, s’empara de Babylone et délivra le peuple juif de la captivité. Hérodote, i, 188-191 ; Xénophon, Cyropédie, vii, 5 ; Fr. Lenormant-E. Babelon, Hist. anc, t. v, p. 451, 453 ; 476-499 ; G. Maspero, Hist. anc, t. iii, p. 613-617, 634-637. Ainsi s’accomplirent les prophéties. Le successeur de Cyrus, Cambyse, agrandit encore l’empire médo-perse ; il conquit l’Egypte. Une expédition malheureuse contre l’Ethiopie augmenta les crises d’épilepsie auxquelles il était sujet et il mourut sans qu’on sache s’il avait été assassiné ou s’il s’était donné la mort. Hérodote, III, i, 4, 7-38, 44, 61-66, 89, 139, 181 ; Fr. Lenormant-E. Babelon, Hist anc, t. vi, p. 1-13 ; G. Maspero, Hist. anc, t. iii, p. 655671. Pendant l’expédition de Cambyse en Egypte, un mage nommé Gaumata s’était emparé du trône en se donnant faussement pour Smerdis, fils de Cyrus. Après la mort de Cambyse, Darius conjuré avec six autres Perses le tua et fut proclamé roi en avril 521. Il régna jusqu’en 485.

Darius I er affermit la domination médo-perse en Egypte, soumit une partie de l’Inde, les lies de la mer Egée, la rive européenne du Bosphore et de l’Hellespont et une partie de la région du Caucase. Il réprima une révolte de Babylone et entreprit une campagne malheureuse contre les Scythes. Ses armées furent encore battues par les Grecs à Marathon. Ce fut lui qui divisa l’empire en vingt satrapies. La Palestine était sous sa dépendance et il se montra bienveillant pour les Juifs. Voir Darius I er, t. ii, col. 1209. Son successeur, Xerxès ou Ksayârsâ, de 485 à 465, est surtout célèbre par ses luttes contre les Grecs et ses défaites à Salamine et à Platée (480-479). Il mourut assassiné par deux de ses officiers. C’est lui que la Bible désigne sous le nom d’Assuérus. Voir Assuérus, t. i, col. 1141 ; Esther, t. ii, col. 1973. Les règnes des successeurs de Xerxès n’ont point d’intérêt pour l’histoire biblique ; il n’est de nouveau question de l’empire médo-perse qu’à l’occasion de sa destruction par Alexandre, roi de Macédoine, vainqueur de Darius 1Il Codoman. Cette destruction avait été annoncée par Daniel.

Comme l’avait prédit le prophète, les Grecs détruisirent l’empire médo-perse et Alexandre fut maître de l’Asie jusqu’à l’Inde. I Mach., i, 1. Voir Darius III Codoman, t. ii, col. 1306. Cependant la province de Médie ne fut jamais complètement soumise aux Grecs. Atropatès, satrape de la petite Médie, en conserva le gouvernement, Justin, XIII, iv, 12 ; il se rendit plus indépendant encore à la mort d’Alexandre et se proclamaroi. C’est de lui que cette partie de la Médie prit le nom d’Atropatène. Sa dynastie régnait encore sur ce pays au temps de Stra^-J. Strabon, XI, xiii, 1. Cf. J. G. Droysen, Histoire de l’Hellénisme, trad. franc., in-8°, t. n r Paris, 1884, p. 32, 134, 437, 750 ; t. iii, 1885, p. 80, 344, 599. La grande Médie eut sous Alexandre pour satrape Pithon, qui conserva son gouvernement après la mort du roi, Justin, XIII, iv, 12 ; après lui Orutabès gouverna la province. Diodore de Sicile, XIX, xlvi, 5. Séleucus I er Nicator occupa la Médie, mais il ne s’y établit pas solidement. Antiochus III fit aussi des expéditions dans ce pays et confia la satrapie de Médie à> Molon, Polybe, V, XL, 7. I. G. Droysen, Histoire de-V Hellénisme, t. ii, p. 32, 134, 252, 287, 360 ; t. iii, p. 344.

Ces expéditions continuèrent sous Antiochus IV. I Mach., vi, 56. La Médie fut ensuite conquise par les Arsacides, rois des Parthes, et incorporée à leur empire. I Mach., xiv, 1-3. Voir AnsACE, t. i, col. 1034. Rages, ou Europos prit alors le, nom d’Arsacéia. Strabon, XI, xm, 6. Les Arsacides conclurent de nombreuses alliances matrimoniales avec les descendants d’Atropatès, souverains dé la Médie Atropaténe. Strabon, XI, nu, 1.

III. Mœurs et coutumes des Mèdes. — La religion des..

921

MÉDIE

922

Mèdes était celle de Zoroastre. Elle reposait essentiellement sur la croyance à deux principes, Ormuzd ou Ahouramazdâ (fig. 239), principe de la lumière et du bien,

239. — Ahouramazdâ. Persépolis.

D’après Texier, Description de F Arménie, la Perse

et la Mésopotamie, 2 in-P, Paris, 1840-1852, pi. 1Il bis.

et Ahriman ou Angrômainyous, principe des ténèbres et du mal. Ormuzd et Arhiman sont secondés dans leur œuvre bienfaisante ou malfaisante par des génies de

S’il sort de la voie droite, il ne peut y rentrer que par le repentir et la purification. Il doit bien traiter les animaux bienfaisants, créatures d’Ormuzd, et détruire les animaux nuisibles, créatures d’Ahriraan. La polygamie est encouragée. Après la mort, les corps étaient exposés à l’air et livrés en pâture aux bêtes de proie. On recueillait ensuite les os et on les enfermait dans un petit tombeau de terre ou de pierre ou dans un monument creusé dans le roc ou élevé au-dessus de la plaine. L’âme du juste allait dans des plaines lumineuses, l’âme du coupable vers les régions ténébreuses et empestées du nord. Ni Ormuzd, ni Ahriman, ni les génies des différents ordres n’avaient de temples ni de statues ; on leur dressait sur les collines, dans les palais ou dans les villes, des autels sur lesquels on allumait du feu en leur honneur. On leur offrait des parfums et des fruits et on leur sacrifiait des animaux. Le roi était l’image d’Ormuzd ici-bas ; Phanias d’Éphèse, Fragmenta Historîcorum Grxcorum, 9, édit. Didot, t. ii, p. 296. Lui seul pouvait se passer de l’intermédiaire des Mages. Les Mages étaient les prêtres. Ils formaient une caste et étaient soumis à de nombreuses pratiques de purifica 240. — Soldats mèdes et perses. Palais de Persépolis. D’après Coste et Flandin, Voyage en Perse, Perse ancienne, t. ii, pi. c, planches. Le premier et le troisième personnages sont mèdes.

-différents ordres. Dans l’ordre du bien, les génies supérieurs sont les Ameschaspentas et les génies d’ordre secondaire les Yozatas. Les suppôts d’Ahriman sont les Darvand et les Daévas. Tiraillé entre les deux principes, l’homme doit s’efforcer d’agir selon la justice, c’est-à--dire de suivre l’impulsion d’Ormuzd et de ses auxiliaires.

tion, entre autres à l’abstinence de viande. Fr. Lenormant-E. Babelon, Hist. anc, t. v, p. 385-417 ; G. Maspero, Hist. anc., t. iii, p. 377-395.

Les anciens Mèdes (fig. 240) étaient un peuple guerrier. Hérodote, vii, 61 ; Strabon, XI, xiil, 6, 9, signalent leur habileté à tirer de l’arc. Voir Arc, 1. 1, col. 897. Us avaient

aussi une excellente cavalerie. Strabon, XI, xiv, 2, 12. D’après Xénophon, Cyrop., II, i, 7, ils ne combattaient jamais pour le pillage, mais uniquement pour l’honneur. L’armée des Mèdes se composa d’abord de contingents fournis par les diverses tribus. Cyaxare organisa une armée régulière en séparant les corps de troupes d’après leurs armes. Hérodote, I, 103. Les fantassins étaient coiffés d’un bonnet de feutre à forme haute qu’on appelait tiare ; ils étaient vêtus de tuniques longues aux manches amples (Bg. 241), garnies parfois de plaques de

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241. — Soldat mède à-tunique longue et amples manches, portant le carquois. Persépolis. Bas-relief de la salle hypostyle de Xerxès. Moulage du Musée du Louvre.

fer, ils portaient des jambières et dos brodequins en cuir mou. Leurs armes étaient la pique, une courte épée, un

242. — Cavalier mède. Cylindre méde. Bibliothèque nationale.

ou deux javelots légers, un arc et des flèches. Les cavaliers (fig. 242)étaient vêtus de la même façon, ne se servaient ni de selles, ni d’étriers, et avaient les mêmes

armes que les fantassins. Hérodote, vii, 61, 62, 86. Cf. G, Maspero, Hist. anc, t. iii, p. 465-466. Les Perses adoptèrent ce costume après qu’ils eurent conquis la Médie. Hérodote, vii, 61-62 ; Xénophon, Cyropédie, I, m, 2 ; Strabon, XI, xiii, 9. Voir t. i, fig. 587, col. 1886. Avant la conquête du pays par leS Perses, les mœurs des Mèdes étaient austères, mais ils prirent les habitudes de luxe de leurs vainqueurs, du moins les habitants de la grande Médie, car les montagnards de l’Àtropatène conservèrent leurs mœurs rudes en même temps que leurs habitudes de brigandage. Strabon, XI, XII, 5 ; xiii, 11. Les rois de Médie étaient de la part de leurs peuples l’objet d’une adoration religieuse, ils étaient obligés d’avoir cinq femmes. Strabon, XI, xiii, 11. À partir de la conquête de la Médie par les Perses, les mœurs, les usages, la vie des deux peuples se confondirent. Héro Wmxrrî

243. — Gardes du roi Darius. Suse. Musée du Louvre.

dote, XI, xiii, 11. La garde des rois de Perse se composait de Mèdes et de Perses (fig. 243).

III. Les Medes dans la Bible. — Les M*èdes descendaient de J.ipheth parMadaï, son troisième fils. Gen., x, 2 ; I Par., 1, 5. Voir Madaï, col. 531. Il est question pour la première fois des Mèdes dans la Bible à l’occasion de la prise de Samarie par les Assyriens. Le vainqueur transporta une partie des captifs dans les villes des Medes. IV (II) Reg., xvii, 6 ; xviii, 11. L’auteur du livre de Tobie nous montre ces captifs établis en Médie. Raguël et Gabélus étaient au nombre des Israélites transportés dans ce pays. Raguël était très probablement établi à Ecbatane. Septante, Tob., iii, 7 ; vi, , 5, ix, 2 ; Vêtus Itala, vi, 10. Les Septante, vi, 9, et la Vulgatë, ni, 7, et vi, 9, portent par erreur Rages. Gela est évident par le verset qui dit que Gabélus et Raguël habitaient des villes éloignées. Tob., ix, 5. Gabélus était fixé à Rages. Tob., i, 16 ; iv, 21, v, 8 ; ix, 3, 6. Bans ce der

nier verset les Septante n’ont pas le nom de la ville. Voir Ecbatane 1. t. ii, col. 1520 ; Gabélus, t. iii, col. 21 ; Rages ; Raguel. Cf. F. Vigouroux, Manuel biblique, 11e édit., in-12, Paris, 1899, t. ii, p. 178 ; Id., Les Livres Saints et la critique rationaliste, 5e édit., in-12, Paris, 1902, t. IV, p. 572-576. Après la mort de ses parents le jeune Tobie se fixa à Ecbatane. Tob., xiv, 14-16 (texte grec). La Vulgate ne nomme pas la ville.

Au début du livre de Judith, il est question d’Arphaxad, roi des Mèdes, qui, après avoir conquis un grand nomhre de nations, bâtit Ecbatane. Judith, i, 1-4. Le roi dont il s’agit ici porte un nom qui est inconnu dans la liste des rois de Médie. C’est probablement une erreur de transcription pour Aphraate ou Phraorte, fils et successeur de Déjocès, 647-625 avant J.-C. Dans les versets suivants est racontée la campagne de Nabuchodonosor, c’est-à-dire d’Assurbanipal, contre Arphaxad et sa défaite en une plaine appelée Ragau dansle grec et dans la Vulgate, et Doura dans la version syriaque. Judith, i, 56. Voir Ragau ; Assurbanipal, t. i, 1144 ; Arphaxad, t. i, 1030. Assurhanipal raconte dans l’inscription d’un cylindre qu’il a battu Birizfyatri, chef de la Médie, ainsi que ses alliés, et qu’il les emmena captifs à Ninive. Cyl. A, col. iii, iv ; G. Smith, History of Atsurbanipal, in-4°, Londres, p. 97 ; Eb. Schrader, Keilinschrtftliche Bibliothek, t. ii, p. 178 ; British Muséum, À guide to the Babylonian and Assyrian antiqitities, Londres, in-8°, 1900, p. 197, n° 12.

Isaïe, xiii, 17-18, annonce que les Mèdes marcheront contre Babylone et en extermineront les habitants. « Voici que j’excite contre eux les Mèdes qui ne font pas cas de l’argent et qui ne convoitent pas l’or. De leurs arcs, ils abattront les jeunes gens. Ils seront sans pitié pour le fruit des entrailles. Leur œil n’épargnera pas les enfants. » Il renouvelle cette menace, xxi, 2 : « Monte, Élam (la Perse) ! assiège, Médie ! » Jérémie, li, 11, 28, annonce également le châtiment de Babylone par les Mèdes. « Jéhovah a excité l’esprit des rois de Médie parce qu’il veut détruire Babylone. Préparez contre elle les nations, les rois de Médie, ses gouverneurs et tous ses chefs, et tout le pays Sous leur domination. » Il annonce égalemenf que les rois d’Élam et des Mèdes boiront la coupe de la colère divine. Jer., xxv, 25. Daniel expliquant à Baltassar le sens du mot Perês ou Phares, le traduit ainsi : Ton royaume a été partagé {perisaf) et il a été donné aux Mèdes et aux Perses. Dan., v, 26-28. La même nuit l’armée des Mèdes et des Perses entrait à Babylone et Baltassar, roi de Chaldée, était tué ; Dan., v, 30 ; Hérodote, i, 191 ; Xénophon, Cyrop., VII, v, 26-31. Voir Baltassar 2, t. i, col. 1420 ; Cyrus, t. ii, col. 1192. Le gouverneur de Babylone après la prise de cette ville est appelé par la Bible Darius le Mède, Dan, v, 31 (hébreu, v, 1) ; cf. ix, 1 ; xi, 1 ; le personnage dont le nom assyrien est Ugbaru était le chef de l’armée qui avait pris Babylone. Il exerça le pouvoir souterrain jusqu’à l’arrivée de Cyrus, trois mois après. Voir Darius le M&de, t. H, col. 1297. Il se montra très bien disposé à l’égard de Daniel et en fit un des trois ministres qui étaient placés au-dessus des 120 satrapes. Dan., vi, 1-2 (hébreu, vi, 2-3). Cependant les satrapes, jaloux de l’influence de Daniel, obtinrent que Darius portât un édit d’après lequel quiconque adresserait une prière à un homme ou à un Dieu autre que lui^serait jeté dans la fosse aux lions. À cette occasion et à plusieurs autres reprises, Daniel signale une coutume suivant laquelle lorsqu’un écrit est signé du roi, il est irrévocable selon la loi des Perses et des Mèdes. Dan., vi, 8, 12, 15 (hébreu, 9, 12, 16). Lorsque le gouverneur de Syrie, contestant l’existence de la permission donnée par Cyrus, essaya d’empêcher Zorobabel de reconstruire le Temple ainsi que l’avait permis Cyrus, celui-ci s’adressa à Darius I er, son successeur, et l’édit fut retrouvé à Ecbatane, capitale de la grande Médie. Esd., vi, 2. Voir

Ecbatane, 2, t. ii, col. 1528 ; Daniel, t. ii, col. 12501251. Dans une vision, Daniel avait vu la destinée de l’empire des Mèdes et des Perses sous le symbole d’un bélier à deux cornes, terrassé par le bouc, c’est-à-dire par le roi de Javanou le roi des Grecs, Alexandre. Dan., vin, 3-8, 20. C’était la répétition sous une autre forme de la vision du colosse où l’empire médo-perse était représenté par la poitrine et les bras d’argent, Dan., il, 32, 39, et devait céder la place à l’empire grec représenté par le ventre et les cuisses d’airain. C’était encore ce qu’il avait vu dans la vision de l’ours et du léopard, Dan., vii, 5-6 ; F. Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, t. iv, p. 390-394. Isaïe, un, 17, fait allusion à la réputation des Mèdes comme archers ; Jérémie, l, 42, à l’excellence de leur caractère ; Isaïe, xiii, 17, à leur désintéressement.

La victoire des Grecs, ayant à leur tête Alexandre, roi de Macédoine, sur Darius, roi des Perses et des Mèdes, est mentionnée dans I Mach., i, 1. Voir Darius III Codouan, t. ii, col. 1306. Lysias revenait d’une expédition en Médie, lorsqu’il prit la direction des affaires soùs Antiochus V. I Mach., vi, 56. Les Parthes (Perses) conquirent la Médie, c’est pourquoi Arsace est indiqué comme roi de Perse et de Médie, Démétrius II essaya en vain de lui prendre ce pays ; il fut battu et fait prisonnier. I Mach., xiv, 1-3. Voir Arsace, t. i, col. 1034. Dans I Mach., viii, 8, la Médie est nommée parmi les pays que les Romains donnèrent à Eumène II, roi de Pergame. C’est une erreur de transcription. Il s’agit ici de la Mysie. Voir Eumène II, t. i, col. 2043. Dans le Nouveau Testament il est question de Juifs ou de prosélytes hahitant la Médie parmi les auditeurs de saint Pierre, dans le discours qu’il prononça au Cénacle, le jour de la Pentecôte. Act., ii, 9.

IV. Bibliographie. — Fr. Lenormant. Lettres assyriologiques, i" série in-4°, Paris, 1871 ; G. Rawlinson, The five great monarchies, 4e édit., in-8°, Londres, 1879, t. ti ; J. Oppert, Le peuple et la langue des Mèdes, in-8°, Paris, 1879 ; A. Delattre, Le peuple et l’empire des Mèdes, in-4, Bruxelles, 1883 ; J. V. Præk, Medien und das Haus der Kyaxares, in-8°, Berlin, 1890 ; F. H. Weisbach et W. Bang, Die altpersischen Keilinscriften, in-4°, Leipzig, 1893. E. Beurlier.

MÉDISANCEfhébreu ^a/tîZ, dibbâh, etc. ; Septante : p), aaç7][ji{a, xaTaXaXti, XaXt’a, Xawopix, tyôyot ;  ; Vulgate : detractio, blasphemia, vituperalio, etc.), propos malveillant. Dans le langage moderne, qui est plus précis, la « médisance » s’entend proprement de la révélation par paroles des fautes ou des défauts du prochain et la « calomnie » des accusations mensongères portées contre le prochain. Ces distinctions n’existent pas dans l’Écriture et la médisance, conformément à l’étymologie de ce mot, maledicentia, s’entend de toutes les paroles mauvaises, vraies ou fausses et plus orx moins injurieuses, qu’on profère contre quelqu’un. Outre les mots indiqués ci-dessus, qui s’appliquent plus spécialement aux propos malveillants, il y a dans la Bible, dans le texte original comme dans les versions, nombre d’autres termes qui désignent des injures ou des outrages et qui se rencontrent dans des phrases qui condamnent ou blâment la médisance et les médisants.

1° Les livres de l’Ancien Testament, et particulièrement les livres sapientiaux, et dans le Nouveau Testament les Épitres s’élèvent souvent contre ce vice, parce que les conséquences en sont funestes. Ps. xlix, 19-21 ; cvm, 20 ; xxxix, 9-10 ; Prov., xvi, 27-30 ; xxi, 28 ; exix, 5 ; xviii, 6-7 ; xxiv, 28 ; xxvi, 20-24 ; xxx, 10 ; Eccli., xxviii, 13-21 ; I Cor., v, 4, 11 ; vi, 10 ; Jac, iii, 6. Le juste ne doit médire de personne. Ps. xiv, 3 ; Tit., iii, 2 ; Jac, îv, 11 ; Ps. xiv, 5 ; xxxiii, 13 ; c, 5 ; Prov., x, 18 ; xi, 13 ; xx, 19 ; Sap., i, 11 ; Eccli., v, 14, 16 ; Jer., vi, 28 ; Rom., i,

30 ; II Cor., xil, 20 ; I Tim., iii, 41 ; Tit., ii, 3 ; I Pet., ii,

I. — C’est la langue qui est l’instrument de la médisance et elle donne la mort ou la vie, selon qu’elle parle bien ou mal. Prov., xviii, 21 ; Jac, iii, 8-9. Aussi le mot « langue » est-il assez souvent employé dans l’Écriture dans le sens de médisant ou de médisance, Ps. cxl, 12 (hébreu), « l’homme de langue » pour qui parle mal, « langue de mensonge » ou langue trompeuse, Ps. cviii, 2 ; Prov., iv ; 17 ; xii, 19 (cꝟ. 22) ; xxvi, 28 ; « la langue double, i> Eccli., v, 11 ; « langue troisième, » Eccli., xxviii, 15. Cf. dans l’hébreu, Job, v, 21 ; Jer., xviii, 18 ; Ezech., xxxvi, 3. La médisance n’est souvent que calomnie et mensonge, Prov., x, 18 ; xiv, 5, 25 ; mais même quand elle dit des choses vraies, si l’on n’est pas tenu par devoir ou par justice à révéler le mal du prochain, on est répréhensible et digne de blâme. Lev., xix, 16 ; Eph., iv, 31 ; I Pet., iii, 10 ; Prov., viii, 13 ; cf. Rom., iii, 8 ; II Tim., iii, 3. Il faut imiter l’exemple des anges qui ne disent du mal de personne. II Pet., ii, 11 ; Juda, 9.

2° L’Écriture rapporte plusieurs exemples de médisance et de calomnie, celui du serviteur de Miphiboseth, II Reg., xix, 27 ; des Chaldéens qui accusent les compagnons de Daniel auprès de Nabuchodonosor, Dan., iii, 8 ; des ennemis des Juifs revenus de captivité écrivant contre eux à Artaxerxès. I Esd., iv, 6-16, etc. — Les saints de l’Ancien Testament, Ps. xxx, 13-14 ; xl, 6 ; xxvi, 12 ; xxxiv, 11 ; Jer., xv, 10 ; Jésus-Christ, Matth., Xi, 19 ; Marc, ix, 39 ; Luc, ii, 34 ; les Apôtres, Act., xix, 9 ; xxiv, 5 ; xxviii, 22 ; II Cor., vi, 8, et les premiers chrétiens, Matth., v, 11 ; Luc, vi, 22 ; I Pet., ii, 12 ; iv, 4, furent en butte à la médisance. Saint Paul, Tit., ii, 8 ; m, 2, et saint Pierre, I Pet., iii, 16, recommandent aux fidèles de ne pas fournir de prétexte aux médisants, afin qu’ils n’aient pas occasion de déshonorer l’Évangile, Rom., xiv, 16 ; cf. ii, 34 ; II Pet., ii, 2 ; Tit., ii, 5 ; I Tim., vi, 1, mais quand ils sont irréprochables, ils doivent supporter avec patience un mal qu’ils ne peuvent éviter,

I Pet., iii, 9 ; cf. I Cor., iv, 13 ; à l’exemple de Jésus-Christ. Matth., xxvii, 39 ; Marc, xv, 32 ; Joa., ix, 28 ; I Pet., ii, 23 ; iv, 14.

    1. MÉDISANT##

MÉDISANT (hébreu : nirgdn, Prov., xvi, 28 ; xviii, 8 ; xxvi, 20, 22 ; rakil, Lev., xix, 16 ; Prov., xi, 13 ; xx, 19 ; Ezech., xxii, 9 ; Septante : xc<Ta(XaXuv(xaîâXaXoç), Rom., i, 30 ; SïyXtoo-ffoç ; XoiSopoç ; Vulgate : detractor, etc.), celui qui dit du mal des autres. Voir Médisance.

    1. MÉDITERRANÉE##

MÉDITERRANÉE (MER). Ce nom ne se trouve pas dans la Vulgate (l’expression per mediterranea de

II Mach., viii, 35, sous-entend loca, comme le grec original 8tà tïjç [leaoyeîou sous-entend ôSoû, « par le chemin situé au milieu des terres » ), mais la mer ainsi appelée est bien connue dans la Bible ; elle a même un rôle physique et historique qu’il est important de signaler.

I. Noms. — La Méditerranée porte dans l’Écriture les noms suivants : Hay-yâm hag-gâdôl ; Septante : ^1 8ïXa<71rc( ti (jeyâXï), « la Grande Mer. » Num., xxxiv, 6, 7 ; Jos., i, 4 ; ix, 1 ; xv, 47 ; xxiii, 4 ; Ezech., xlvii, ip, 19, 20. Dans le monde connu des Hébreux, c’était, en effet, la plus vaste. — Hay-yâm hâ-’afrârôn ; Septante : r, OaXacua 7| iuxâxri, « la mer Postérieure » ou « Occidentale », 7| WXaoca f| iiïl 8ua(iûv ; Vulgate : mare novissimum, occidentale. Deut., xi, 24 ; xxxiv, 2 ; Joël,

II, 20 ; Zach., Xiv, 8. On sait que les Hébreux déterminaient les points cardinaux en regardant l’orient ; la Méditerranée était donc « derrière » celui qui se tournait vers le levant et par là même « à l’occident ». — Yâm Pelistim ; Septante : f| flâXacroa tîjç *uXKrc.e[’(i ; Vulgate : mare Palsestinorum, « mer des Philistins, » parce qu’elle baignait le territoire de ce peuple, c’est-à-dire le sudouest de la Palestine. E-xod., xxiii, 31. — Yàm Yâfâ ; Septante : OaXairoa’LStcotiç, « la mer de Joppé, » ou de Jatta, le port le plus important de la côte palestinienne.

II Par., ii, 16 ; I Esd., iii, 7. — Le plus souvent même la Bible emploie simplement le terme général, liay-yâm, ï| ôiXociTuoc, « la mer, » le contexte indiquant suffisamment qu’il s’agit de la Méditerranée. Num., xiii, 30 ; xxxv, 5 ; Jos., xvi, 8 ; III Reg., v, 9 ; xviii, 43 ; 44 ; Ezech., xxvi, 17, etc. La Vulgate a cru quelquefois devoir spécifier : « la mer qui regarde l’occident, » Num., xxxv, 5 ; « la grande mer. » Jos., v, 1 ; xv, 4. — La Méditerranée était également, pour les Assyriens, « la mer du soleil couchant, » tiàm-tiv Sa Sul-mu Sam-H. Cf. E. Schrader, Die Keilinschriftenund dasvlte Testament, Giessen, 1883, p. 220 ; F. Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, Paris, 1896, t. iii, p. 512. Pour les Égyptiens, c’était la « Très Verte », Ouaz-oîrît. Cf. Maspero, Histoire anciennedes peuples deV Orient classique, Paris, 1895, t. i, p. 17. Les Grecs l’appellent ordinairement « la mer » ; les Latins, « Mer intérieure. »

II. La côte syrienne de la Méditerranée. — Nous n’avons point à décrire ici la Méditerranée dans son ensemble. Ne l’envisageant qu’au point de vue biblique, nous montrerons son rôle physique dans la formation de la côte syrienne, ou, plus exactement, des côtes phénicienne et palestinienne, qui appartiennent plus spécialement à l’Écriture. Voir fig. 244.

En suivant sur une carte la ligne qui marque le littoral méditerranéen depuis Beyrouth au nord jusqu’à Youadi Ghazzéh au sud, on voit qu’elle s’infléchit légèrement du nord-nord-est au sud-sud-ouest. Elle présente en même temps deux aspects différents, déterminant par là le caractère de deux peuples distincts d’origine et de mœurs, quoique extrêmement rapprochés par la langue et les relations historiques. De Beyrouth au Carmel, elle est dentelée comme une scie, marquée de distance en distance par des pointes peu proéminentes, il est vrai, assez saillantes néanmoins pour former deux parties bien opposées. Ces promontoires portent le nom de rds ou cap : râs Damûr, râs el-Abiad, râs en-Naqûrah. Les sinuosités plus ou moins prononcéesde cette ligne brisée viennent aboutir à une échancrure plus profonde, qui est la baie de Saint-Jean-d’Acre, trait caractéristique de cette partie du rivage syrien. Les pointes avancées ont servi d’assiette à des villes qui s’étagent à égale distance les unes des autres, Beyrouth, Sidon, Tyr et Akka. Au-dessous du Carmel, il n’y a plus qu’une ligne presque absolument droite. Un petit promontoire à Athlit, deux ou trois petites baies à Tantûrah, une anse étroite à Césarée, l’affreuse rade de Jaffa. quelques criques ensablées plus bas, c’est tout ce qui vient en briser la monotone rigidité. C’est une barrière uniforme et nue, composée de dunes de sables, contre laquelle les flots de la mer déposent un long ruban d’écume.

D’où vient au rivage ce modelé spécial, qui, nous le verrons, a eu ses conséquences dans l’histoire ? La forme des côtes dépend en chaque point de la puissance mécanique des vagues s’exerçant contre la terre ferme, de la structure antérieure du littoral et des mouvements qui peuvent en affecter l’équilibre. On sait quelle est la force érosive de la mer. En dehors même de la marée, les vents qui soufflent du large, où nul obstacle ne les contrarie, poussent vers la terre des flots souvent impétueux. Sous le choc de ces masses liquides, les roches tant soit peu meubles se désagrègent et l’eau s’enfonce comme un coin à travers les fentes qu’elle rencontre. La vague ramène avec elle les matériaux ainsi désa-( grégés, qui accroissent sa puissance, et elle s’en sert comme d’une mitraille pour attaquer de nouveau le rivage exposé à son action. On voit dès lors comment certaines parties se creusent plus rapidement, sont plus profondément rongées que les autres, suivant le degré de résistance ou l’état de fendillement des roches. Ces inégalités engendrent des criques ou des anses plus ou moins découpées en arc de cercle. Ajoutons par ailleurs que les lits d’écoulement taillés par les fleuves entament 929

MÉDITERRANÉE "(MER)

930

]es bords de la mer et permettent à celle-ci d’envahir avec plus de facilité le continent. « Les progrès de l’érosion marine, favorisés par l’inégale résistance des roches, peuvent même, à la longue, amener la formation A’îles en avant des côtes. » À. de Lapparent, Leçons de géographie physique, Paris, 1898, p. 262, 266.

Il est facile, à la lumière de ces principes, de comprendre la formation des côtes phénicienne et palestinienne. La première, que nous considérons depuis Beyrouth jusque vers le râs en-Naqûrah, est parallèle au Liban et à son prolongement galiléen. La montagne projette ses racines jusqu’au rivage ; les puissants éperons qui se détachent du massif principal viennent se terminer par autant de caps, dont les flancs sont coupés à pic. Ces contreforts, qui servent de socle aux grandes cimes du Liban, sont seulement séparés par des vallées plus ou moins larges, à travers lesquelles s’échappent les torrents. Renan, Mission de Phénicie, Paris, p. 836, a donc bien défini la Phénicie, lorsqu’il a dit qu’elle « ne

barques s’agrandirent ; ils utilisèrent tous les accidents de terrain pour créer des bassins où les navires fussent protégés ; ils profitèrent même des lignes de récifs qui, dans certains endroits, brisent l’élan de la vague, et en arrivèrent, au moyen d’enrochements artificiels, à avoir des ports fermés par une chaîne. C’est ainsi que la Méditerranée a contribué, pour sa part, à faire des Phéniciens le premier peuple marin. Cf. Perrot, Histoire de l’art dans l’antiquité, Phénicie, Paris, 1885, p. 8, 378. A partir du râs en-Naqûrah, la ligne devient plus droite, mais pour s’arrondir bientôt en arc de cercle entre Saint-Jean d’Acre et Khaïfa. Cette large échancrure est sans doute un reste des vieux âges géologiques, une sorte d’estuaire rappelant l’époque où les eaux méditerranéennes pénétraient au cœur de la Palestine et faisaient de la plaine d’Esdrelon un vaste et superbe lac. Du Carmel à l’puadi Gbazzéh, les conditions ne sont plus les mêmes que sur la côte phénicienne. Au lieu d’une étroite bande de terre resserrée entre les montagnes et

244. — Carte de la Méditerranée.

fut pas un pays, mais une série de ports, avec une banlieue assez étroite ». Et cependant cette contrée, qui devait devenir le berceau de la navigation, n’offre aucun de ces vastes bassins naturels, aucune de ces rades bien closes qui s’ouvrent sur beaucoup de côtes. Mais les premiers navigateurs ne demandaient pas tant : une anse pour se réfugier et plier leurs voiles, une grève de sable où faire échouer leurs barques, c’est tout ce qu’il leur fallait. Et c’est précisément la configuration même du terrain qui contraignit les Phéniciens de se lancer sur la mer. La plaine côtière, resserrée entre celle-ci et la montagne, assez large par endroits pour offrir une place aux villes, aux vergers et aux champs, est coupée par des torrents que les pluies d’automne ou la fonte des neiges rendent infranchissables. Comment les villes disséminées sur ce cordon maritime pourront-elles communiquer ensemble pendant une partie de l’année ? La voie de-mer était, en somme, la plus facile. Le matelot se contenta d’abord de longer la côte en la serrant de très prés, cherchant, pendant la tempête ou la nuit, un abri entre les saillies de la montagne, dans les petites anses mena- : gées par la nature. Les Phéniciens recherchèrent surtout, pour placer leurs premières bourgades, les points les plus faciles à défendre et en même temps les plus faciles à reconnaître du large, comme les Ilots et les promontoires. Leurs ports primitifs furent de simples petits ports de pêche, comme l’indique le nom de Sidon, hébreu : Sidôn, « pêcherie. » Avec le temps, leurs

DICT. de LA CIBLE.

la mer, nous voyons une plaine qui va s’élargissant à mesure qu’elle avance vers le sud. Avec ses collines sablonneuses et ses mamelons cultivés ou boisés, elle rappelle les vagues qui la recouvrirent autrefois et auxquelles elle doit son origine. Elle n’est autre chose, en efiet, qu’une plage soulevée, qui peu à peu a rejeté la mer loin des monts de Samarie et de Judée, dont elle baignait le pied, aux âges préhistoriques. Nous avons ici une côte plate, et, comme sur tous les terrains de ce genre, la mer y rejette, sous la forme d’un cordon littoral, les graviers, sables et limons que le courant qui longe le rivage peut charrier. Séchées par un soleil ardent, poussées et amoncelées par le vent, ces matières très meubles ont formé des dunes parfois assez hautes. Leur masse légère a fini par combler quelques vieux ports, et, comme en Egypte, est en train de faire un linceul aux antiques cités. On croit aussi que les : courants qui charrient le long de la côte le limon du Nil ont contribué à rectifier le littoral. Et ainsi le fleuve d’Egypte aurait non seulement formé le Delta, mais encore fourni son apport au littoral palestinien. En avant de ces plages, et parallèlement au rivage, il existe tout un cordon de récifs, constituant tantôt des brise-lames, tantôt des écueils.dangereux, comme à l’entrée du port de Jaflïu Ces rochers qui longent la côte, à quelques centaines de mètres, le plus souvent à fleur d’eau, sont des grès calcarés-siliceux, de formation moderne, remplis de pétoncles (Pectunculus violacescens). Ils sont ainsi pro^

IV.

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duits par l’agglutination du sable et d’un grand nombre de coquillages, au moyen d’un ciment siliceux déposé par les eaux de la mer. Cf. L. Lartet, Géologie, dans le Voyage d’exploration à la mer Morte du duc de Luynes, Paris, t. iii, p. 199 ; Lortet, La Syrie d’aujourd’hui, dans le Tour du Monde, t. xlii, p. 161, 162.

Les ports ou vestiges de ports que l’on rencontre au sud de Saint-Jean d’Acre, sont : Khaïfa, au-dessous du Carmel ; À thlit, l’ancien Castellum Peregrinorum ; Tantûrah, qui représente la vieille citéj-oyale chananéenne de Dor(oir Dor, t. ii, col : 1487) ; Qaïsariyéh, l’ancienne Césarée (voir Césarée du eord de la mer, t. ii, col. 456) ; Jafta, l’antique Joppé. Voir Joppé, t. iii, col. 1631. Audessous de cette dernière ville, on trouve à peine des traces de port. Un peu au sud du Nahr Rûbtn, se développe une petite baie, qui s’arrondit entre deux promontoires ; elle constituait autrefois l’établissement maritime de Jamnia, aujourd’hui Yebnéh. Voir Jamnia ; t. iii, col. 1115. Plus bas, quatre kilomètres à l’ouest à’Esdûd, l’ancienne Azot des Philistins, on aperçoit les ruines d’un petite ville et d’une forteresse commandant une rade, aujourd’hui solitaire-. C’est Minet Esdûd, VAzot maritime, ’AÇûtoc irapâXio ? de certains auteurs. Il faut descendre jusqu’à Ascalon pour trouver des ruines assez considérables. Voir Ascalon, t. i, col. 1060. Enfin Gaza avait, elle aussi, son comptoir maritime vers le nord-nord-ouest, dans un endroit appelé El-Minéh. Voir Gaza, t. iii, col. 118. En résumé, plus on descend vers le sud, plus le relief de la côte méditerranéenne s’efface, plus elle devient inhospitalière, dépourvue de ports. Si le littoral phénicien a comme poussé l’homme vers la mer, le littoral palestinien a été plutôt pour les Hébreux une barrière. Au lieu d’en faire un peuple marin, Dieu les a longtemps séparés des autres nations, les enfermant dans une triple barrière, les montagnes, le désert, la mer. Le « port » n’existe même pas en hébreu. Voir Port. La Méditerranée cependant, nous allons le voir, a été pour les Apôtres une grande voie de communication pour porter au loin l’Évangile. Cf. A. Legendre, La côte méditerranéenne, dans la Revue des Facultés catholiques de l’Ouest, Angers, février 1900, p. 315-333 ; juin 1900, p. 595-613.

III. La Méditerranée dans l’histoire bielique. — La Méditerranée, dans les premiers livres de là Bible, sert ordinairement à déterminer la limite occidentale du pays de Chanaan. Num., xxxiv, 5, 6, 7 ; xxxv, 5 ; Deut., xi, 24 ; xxxiv, 2 ; Jos., xv, 4, 11, 47 ; xvi, 3, 8 ; xxiii, 4. Ailleurs elle est mentionnée à propos des principales villes qui’sont sur ses bords : Tyr, Êzech., xxvi, 2, 3, 5, etc. ; Jalîa, où étaient amenés les cèdres du Liban envoyés à Salomon, III Reg., v, 9 ; II Par., ii, 16 ; où s’embarqua Jonas, Jon., i, 3, 4, etc. ; Césarée, dont Hérode le Grand avait fait un port remarquable, et d’où saint Paul partit pour Rome. Act., xxvii, 2. C’est de cette mer que le prophète Élie, placé sur le Carmel, vit monter un petit nuage, grand comme le pas d’un homme, qui devint bientôt une nuée immense, couvrant tout le ciel. III Reg., xviii, 43, 44. C’est par elle que la civilisation s’est progressivement avancée de l’Orient vers l’Occident. Elle joue surtout un rôle considérable, vraiment providentiel, dans la première diffusion du christianisme. Les Juifs, dispersés dans le monde grécoromain, avaient établi des colonies sur une foule de points de la côte méditerranéenne, principalement en Asie Mineure et en Grèce. Or, c’est dans ces foyers du judaïsme que saint Paul, en particulier, porta la parole évangélique ; c’est sur « la Mer Intérieure j> qu’il fit ses incessants voyages, qu’il courut tant de dangers. Les villes les pius célèbres mentionnées dans les Actes se trouvent sur les bords de la Méditerranée ou non loin du rivage. Citons simplement : Antioche et Séleucie, Tarse, Attalie, Milet, Éphèse, Smyrne, Philippe, Thessalonique, Athènes, Corinthe. Voir ces noms. Les îles de

Cypre, de Crète, de Rhodes, de Malte, etc., ont leur nom marqué dans ces annales primitives de la religion chrétienne. Énumérer tous ces souvenirs serait faire l’histoire de saint Paul ; il nous suffit de rappeler ici, d’une manière générale, la place qu’occupe la mer dont nous parlons dans les événements qui ont changé la face du monde. Voir Paul (Saint). De même pour la civilisation profane et le commerce, voir Phéniciens. Pour les difficultés de la navigation au temps des Apôtres, voir Navigation.

A. Legendre.
    1. MEÉTABEL##

MEÉTABEL (hébreu : Mehêtab’êl, « celui ou celle dont Dieu est le bienfaiteur [ ?] » ), nom, dans le texte hébreu, d’une femme idnméenne et d’un Israélite. La Vulgate écrit le nom de l’Israélite : Métabéel.

1. MEÉTABEL (Septante : Mereêe^ ; Alexandrinus : MeToêe<î).), fille de Matred et petite-fille de Mézaab. Elle devint la femme d’Adar ou Adad, roi d’Édom, qui régnait à Phaù. Gen., xxxvi, 39 ; I Par., i, 50.

2. MEÉTABEL. Voir MÉTABÉEL.

    1. MEGBIS##

MEGBIS (hébreu : Magbîs, « rassemblement [ ?] ; » Septante ; MaYeëi ?), nom d’homme, selon les uns ; nom de ville, selon les autres. « Les fils de Megbis » revinrent de la captivité de Babylone avec Zorobabel au nombre de cent cinquante-six. I Esd., H, 30. Ils ne figurent pas dans la liste parallèle de Néhémie. II Esd., vii, 3334. Ou a rapproché ce nom de celui du Perse Mégabyze. Hérodote, ii, 70, 160. Ceux qui font de Megbis une localité la placent dans la tribu de Benjamin parce qu’elle est nommée après d’autres villes de cette tribu, Rama, Gabaa, Machmas, Béthel, Haï. Comme la plupart des noms qui figurent dans le catalogue d’Esdras sont certainement des noms de villes, on peut en déduire avec probabilité que Megbis l’est aussi, quoiqu’elle soit d’ailleurs complètement inconnue.

    1. MEGILLOTH##

MEGILLOTH, « rouleaux. » — 1° Nom. — À l’époque du Talmud, on appelle n’Alo tfDn, « les cinq rouleaux, » cinq livres de l’Écriture Sainte qu’on lisait à certaines solennités : le Cantique dés cantiques à Pâques, Ruth à ia Pentecôte, les Lamentations le 9 du mois A’ab (août), anniversaire de la destruction du temple d’Hérode, l’Ecclésiaste à la fête des Tabernacles, Esther à la fête des Purim (14 adar). Bien que tous les livres anciens eussent généralement la forme de rouleau et qu’un volume quelconque, sans excepter le Pentateuque, pût s’appeler ainsi megillaf sêfer, Ps. XL, 8, Ezech., H, 9, ou simplement megillâh, Zach., v, 1 ; Jer., xxxvi, 14, 27, etc., l’usage restreignit peu à peu ce mot à un rouleau de peu d’étendue. La Mischna, par exemple, appelle megillat sôtdh la feuille où le mari jaloux devait écrire les malédictions contre sa femme soupçonnée d’infidélité. Num., v, 23. On nomma megillâh, par antonomase, le rouleau où était écrit le livre d’Esther qui devait se lire tous les ans, le jour commémoratif du supplice d’Aman et de la délivrance des Juifs sous Assuérus. Un traité de la Mischna porte ce nom (10e de la 2° partie). Il y est question, entre autres choses, du jour où doit se lire le livre d’Esther (du Il au 15 adar, suivant les localités) et de la manière dont cette lecture doit s’accomplir. On distinguait au moyen de qualificatifs d’autres rouleaux encore : le Rouleau du jeûne, le Rouleau des hommes pieux (hasîdim), le Rouleau des secrets, surtout le Rouleau des Asmonéens qui nous a été conservé dans un grand nombre de manuscrits. Voir The Scroll of the Hasmonœans Megillath Bene Hàshmunai, dans les Transactions of the 9°> international Congress of Orientalisls, Londres, 1893.J. ii, p.3-35.

2° Collection des cinq Megilloth. — Il n’est pas possible de dire à quelle époque les cinq Megilùiih

commencèrent à avoir une existence indépendante. Nous croyons que le Livre de Ruth était joint originairement au Livre des Juges et les Lamentations à Jérémie, comme dans les Septante, et que le canon hébreu ne comprenait donc que vingt-deux livres. On détacha l’épisode de Ruth et les poésies, des Lamentations pour des usages liturgiques et on prit l’habitude de les joindre aux trois autres petits Livres qui jouaient un rôle analogue. Dans les manuscrits et les éditions imprimées, de la Bible hébraïque les Megillôth sont tantôt réunies et placées après le Pentateuque, tantôt mêlées aux Hagiographes. Dans un cas ccmme dans l’autre, l’ordre est très variable. Voir Ginsburg, Introduction to the massoretico-crit. édition of the Hebrew Bible, Londres, 1897, p. 4, 7. Dans les trois premières éditions de la Bible entière (Soncino, 14*8, Naples, 1491-1493, Brescia, 1494) qui placent les Megillôth après le Pentateuque l’ordre adopté est le suivant : Cant., Ruth, Lanient., Eccles., Esther. De Rossi, Annales Hebrmotypogr. sxc. xv, Rome, 1799, p. 130, parle d’une édition des cinq Megillôth sans lieu ni date qu’il suppose avoir été imprimée à Bologne en 1482, à cause de l’identité des caractères avec ceux du Pentateuque paru dans cette ville. Ce serait la première édition. Le Livre d’Esther y est accompagné du commentaire d’Ibn-Ezra ; les autres, de celui de Raschi. Les rouleaux liturgiques du Livre d’Esther sont très communs et l’on en trouve dans toutes les grandes bibliothèques publiques. Nous ne nous souvenons pas d’avoir jamais rencontré les cinq Megillôth seules dans le même rouleau ou le même codex.

F. Prat.

    1. MEGPHIAS##

MEGPHIAS (hébreu : Magpî’ds ; Septante : Meyai^), un des chefs du peuple qui, du temps de Néhémie, signèrent l’alliance avec Dieu. II Esd., x, 20 (hébreu, 21).

    1. MÉHUSIM##

MÉHUSIM (hébreu : Mêhusim ; Septante : ’û<r(v), femme de Saharaïm. Voir Husim 2, t. iii, col. 784.

    1. MEIER Ernst Heinrich##

MEIER Ernst Heinrich, exégète protestant allemand, né à Rusbend (Schaumbourg-Lippe), le 17 mai 1813, mort à Tubingue le 2 mars 1866. Il fit ses études à Gœttingue, où il fut l’élève d’Henri Ewald qu’il suivit à Tubingue en 1838, mais qu’il abandonna plus tard en prenant parti pour Bauer contre son ancien maître. En 1848, il fut nommé professeur extraordinaire, et plus tard professeur ordinaire de langues orientales à Tubingue. Il était d’une sensibilité extrême et un travailleur acharné, mais il manquait de méthode dans ses études. Ses principaux ouvrages sont : Uebersetzung und Erklàrung des Propheten Joël, Tubingue, 1840 ; Hebrâisches Wurzelwôrlerbuch, Mannheim, 1845. Der Prophet Jesaja erklârt (les xxm premiers chapitres), in-8°, Pforzheim, 1850 ; Die Form der hebmïschen Poésie nachgewiesen, in-8°, Tubingue, 1853 ; Geschichte der poetischen NationalrLiteratur der Hebrâer, in-8°, Leipzig, 1856 (cette histoire est une tentative de transformer l’introduction à l’Ancien Testament en une histoire de la littérature des Hébreux) ; Uebersetzung und Erklàrung der Debora-Liedes, in-8°, Tubingue, 1859 ; Erklàrung phônikischer Sprachdenkmâler, die man auf Cypern, Malta und Sicilien gefunden hat, in-4°, Tubingue, 1860. ^Yoit C. Siegfried, dans Allgemeine Deutsche Biographie, t. xxi, 1885, p. 189-192.’MEIGNAN Guillaume René, cardinal du titre de la SainteTrinité-des-Monts, né à Chauvigné (Mayenne) le 12 avril 1817, mort à Tours (Indre-et-Loire) dans la nuit du 19 au 20 janvier 1896. Après avoir terminé ses études classiques, commencées au petit collège de Haute-Follis (Mayenne), continuées au lycée d’Angers dont le futur cardinal-archevêque de Cambrai, l’abbé Régnier, était proviseur, et à Château-Gontier (Mayenne), Je jeune Guillaume René alla étudier la philosophie au

grand séminaire du Mans, et y reçut la tonsure des mains de Ms » Bouvier, le 28 mai 1836. À la fin de ses études théologiques, il fut ordonné sous-diacre en 1839. Trop jeune encore pour être prêtre, il professa, en attendant, la troisième, dans un collège du Mans, celui de Tessé, aujourd’hui disparu. Il y retrouva, comme supérieur, son professeur d’Écriture Sainte du séminaire, l’abbé Bercy, mort chanoine titulaire de Notre ?Dame de Paris, orientaliste de mérite et qui avait étudié à Munich, à Berlin, à Rome, les sciences bibliques sous les maîtres les plus célèbres. Par son influence, l’abbé Meignan donna dès lors à ses études la direction qu’il leur conserva jusqu’à sa mort. Mo r Bouvier, après avoir ordonné prêtre le jeune professeur de troisième (14 juin 1840), l’envoya à Paris pour s’y préparer, en suivant les cours de V. Cousin, à l’enseignement de la philosophie. Mais l’abbé Meignan ne séjourna à Paris que le temps nécessaire pour devenir bachelier es lettres (8 janvier 1842) ; après quoi, conseillé par Ozanam, Montalembert et surtout par l’abbé Maret, resté toujours, depuis, son ami, ce fut à l’université de Munich, qu’avec l’agrément de son évêque, le jeune prêtre alla se préparer à l’enseignement de la philosophie (9 avril 1842). Mœhler, Haneberg, Klee, Gœrres, Dœllinger, Phillips, Windschmann y furent ses maîtres. Tout en étudiant la philosophie, il donna à l’exégèse une place dominante dans ses travaux, stimulé par le bruit que faisaient autour de lui les disputes de l’école de Tubingue, les échos de Baur, de Strauss, d’Ewald. Cet attrait, et l’abbé Bercy qui était venu rejoindre son élève à Munich, entraînèrent celui-ci à Berlin. Il suivit, à l’université de cette ville, les cours de Neander, d’Hengslenberg et surlout ceux de Schelling. Hengstenberg exerça sur son élève une grande influence. L’abbé Meignan resta à Berlin jusqu’au 1 er mai 1843. De retour en France, il fut admis, par Msr Affré, dans le clergé de Paris. Nous l’y voyons, d’abord vicaire quillet 1843) à Saint-Jæques-du Haut-Pas et, en mê.ne temps, fréquenter à la Sorbonne les cours de Glaire, Garnier, Jules Simon, Cousin, Damiron, Egger. De Saint-Jacques, l’abbé Meignan fut nommé vicaire à Saint-Roch (janvier 1845). À cette époque, contraint d’aller chercher en Italie le rétablissement d’une santé compromise par le surmenage intellectuel, il mit à profit le séjour de Rome, dès qu’il en eut la force, pour étudier la science sacrée avec Passaglia, Patrizi, Theiner, comme maîtres, avec Gerbet et Perrone comme guides et amis, et prit le grade de docteur en théologie, à la Sapience (12 mars 1846). Après son retour en France, nous le trouvons, successivement, préfet des études au petit séminaire, naissant, de Notre-Dame-des-Champs ; puis aumônier de la maison royale de la Légion d’honneur à Saint-Denis (1847). Après divers vicariats, il fut nommé à la chaire d’écriture Sainte à la Sorbonne (5 octobre 1861). C’est là que Mo r Darboy alla le choisir pour l’associer à l’administration de l’archidiocèse de Paris, d’abord comme promoteur, ensuite comme vicaire général et archidiacre de Saint-Denis (1863). Préconisé évêque de Chàlons en 1864, Ms r Meignan fut transféré de ce siège à celui d’Arras en 1882, et, de ce dernier, au siège archiépiscopal de Tours (1884), où le chapeau de cardinal lui fut donné par Léon XIII, le 15 décembre 1892. Il mourut subitement, à l’âge de 79ans.

Dans les nombreux écrits du cardinal Meignan, il convient de faire deux parts : celle du polémiste et celle de l’apologiste biblique. Polémiste, c’est surtout contre Renan et le rationalisme allemand que le cardinal Meignan s’efforce de lutter, en suivant, chaque fois, l’adversaire sur le terrain de l’attaque. Apologiste, c’est du développement de cette preuve dela divinité du christianisme, qu’avec Pascal et Leibnitz il estime’la plus solide, les prophéties messianiques, entendues non seulement des paroles prophétiques, mais encore des

événements qui préparent et amènent Jésus-Christ, que ce prince de l’Église a composé une œuvre considérable, travail de toute sa vie, dont il dictait encore une page quelques heures avant sa mort. Mais, apologiste et polémiste, c’est surtout au grand public que s’adressent ses livres, travail de vulgarisation, sous une forme littéraire, des résultats de la critique allemande et de la controverse biblique ; antidote, dans la pensée de l’auteur, des écrits de M. Renan. Toutefois, dit le P. Brucker, nonobstant la destination spéciale de ces écrits, « la discussion et la réfutation des objections y ont une place suffisante, mais secondaire… Une discussion minutieuse, outre qu’elle rebuterait le large public que [l’auteur] veut atteindre, serait inutile à sa démonstration, qui se soutient parfaitement sans cela. Il fait bien voir, d’ailleurs, que la préoccupation principale de la critique rationaliste est, non la recherche de la vérité, mais le désir de bannir l’élément surnaturel de la Bible… L’œuvre du cardinal de Tours est la meilleure réponse… à l’Histoire d’Israël de Renan. » Eludes religieuses, octobre 1895, p. 281-288. Voici la nomenclature de ces écrits : Les prophéties messianiques. Le Pentateuque, in-8°, Paris, 1856 ; Les Deux premiers livres des Rois, in-8°, Paris, 1878. Ces deux volumes, mis au courant, furent réédités, en 1895, le premier sous le titre : De l’Éden à Moïse, le second, sous celui de : De Moïse à David, in-8°, Paris. — David roi, psalmiste, prophète, avec une introduction sur la nouvelle critique, in-8°, Paris, 1889. Cette introduction fut très discutée, et le cardinal Meignan, auquel on reprochait de s’y ranger à l’avis des rationalistes touchant le remaniement des Écritures, s’en émut et pria Léon X11I de la faire examiner. L’examinateur anonyme répondit : « Je n’aurais pas signé l’introduction, mais je n’y vois rien à reprendre. » Cf. Boissonnot, Le cardinal Meignan, in-8°, Paris, 1899, p. 475. — Salomon, son règne, ses écrits, in-8°, Paris, 1890. — Les prophètes d’Israël, quatre siècles de lutte contre l’idolâtrie, in-8°, Paris, 1892. — Les pro phètes’d’Israël et le Messie, depuis Salomon jusqu’à Daniel, in-8°, Paris, 1893. — Les prophètes d’Israël et le Messie, depuis Daniel jusqu’à Jean-Baptiste, in-8°, Paris, 1894. — M. Renan et le Cantique des Cantiques, in-8°, Paris, 1860 ; M, Renan réfuté par les rationalistes allemands, in-8°, Paris, 1863. — Les Évangiles et la critique au xw siècle, Paris, 1863 ; réédité, en 1870, avec une notice de M. de "Vogué sur les monuments encore existant en Terre Sainte, iri-8°, Paris. — Le Monde et l’homme primitif selon la Bible, in-8°, Paris, 1869.

— De l’irréligion systématique, ses influences actuelles sur les sciences, les gouvernements, et en particulier sur l’exégèse biblique, in-8°, Paris, 1886.

0. Rey.

— MEISNER Balthasar, théologien protestant, né en 1587, mort en 1628. Docteur en théologie, il fut professeur à Wittenberg et publia : Hoseas novo commentario per textus analysin, ejusdem exegesin, dubiorum solutionem et locorum communium adnotationem perspicue illustratus, in-8°, Wittenberg, 1620. — Voir Walch, Biblioth. theologica, t. IV, p. 569.

B. Heurtebize.
    1. MÉJARCON##

MÉJARCON (hébreu : Mê hay-Yarqôn, « eaux de Yarqôn » [yéréq signifie « verdure » ; yêrdqôn, « pâleur » ] ; Septante : Q&laaaa’lepâxcov), localité de la tribu de Dan, mentionnée entre Gethremmon (voir Gethremmon 1, t. iii, col. 229) et Arécon. Jos., xrx, 46. Les eaux de Yarqôn ou Méjarcon peuvent désigner le Nahr elr Audjék. Voir Arécon, t. i, col. 930.

    1. MÉLANCHTHON Philippe##

MÉLANCHTHON Philippe, théologien protestant allemand, l’un des chefs de la Réforme, né à Bretten, le 14févrierl497, mort à Wittenberg le ! 9avril 1560. Ii s’appelait proprement Schwarzerd, mais il est beaucoup plus connu sous la forme grecque qu’il donna à son nom. Il

commença ses études à l’école de Bretten, puis il eut pour précepteur Jean Unger. En 1507, il fréquenta l’école" latine de Pforzheim, où il eut pour maître Georges Simler, qui lui fit comprendre et goûter les poètes latins et grecs. C’est de cette époque que date son intimité avec le célèbre Reuchlin, dont il était consin, et qui venait souvent à Pforzheim. À partir de 1509, il suivit les cours de l’université de Heidelberg, et, en 1512, il passa à celle de Tubingue, où il acheva ses études. En 1518, l’électeur de Mayence lui offrit la chaire de grec et d’hébreu à l’université de Wittenberg ; il accepta, et enseigna avec le plus grand succès, tout en travaillant avec ardeur à différents ouvrages d’érudition. L’année suivante, il prit part à l’entrevue qui eut lieu à Leipzig entre les catholiques et les protestants ; la même année, il fut nommé professeur à la faculté de théologie, et à partir de cette époque il s’occupa principalement d’études bibliques. En 1527, il fut chargé d’inspecter les Églises de la Thuringe et d’y répandre les nouvelles doctrines. En 1529, il assista à la diète de Spire, et en 1530 à celle d’Augsbourg, où son rôle fut important : on sait que la fameuse confession d’Augsbourg fut son œuvre. Il espéra pendant quelque temps arriver à un accord qu’il paraît avoir désiré sincèrement ; mais la plupart des réformés s’obstinèrent à soutenir des doctrines inacceptables pour les catholiques. En 1541, il fut l’un des théologiens choisis par l’empereur Charles-Quint pour discuter les points fondamentaux et tâcher d’arriver à une entente ; mais cette entente fut encore impossible. Les colloques de Worms, en 1545, et de Ratisbonne en 1546, n’amenèrent pas un meilleur résultat. Les propositions de Charles-Quint, à la diète d’Augsbourg, en septembre 1547, furent également rejetées. Il faut reconnaître que Mélanchthon, malgré la modération de son caractère, contribua pour sa part à empêcher l’entente, car il s’attacha, avec obstination, à certains articles de foi évidemment contraires à la tradition catholique la plus ancienne. Il mourut cinq ans après la paix d’Augsbourg, en déplorant les divisions toujours croissantes des différentes sectes réformées. Parmi ses nombreux ouvrages, nous ne citerons que ceux qui se rapportent directement à l’Écriture Sainte ; ce sont : Commentarii in Epistolam ad Romanos recens scripti, in-8 15, Wittenberg, 1532 ; Marbourg, 1533. Ce livre a été plusieurs fois réédité avec le texte grec. — Çommentarium in priorem ad Corinthios et in aliquot capita secundse, in-8°, Wittenberg, 1561. — Die Hauptartiket und furnemsten Punct der ganzen h. Schrifl, in-4°, s. 1. n. d. ; Strasbourg, 1522. — Annotationes in Epistolas Pauli ad Romanos et Corinthios, in-4°, Nuremberg, 1522 ; in-4°, s. 1., 1523 ; in-8°, Strasbourg, 1523 ; Bâle, 1523 ; s. 1., 1524. — In obscuriora aliquot capita-Geneseos annotationes, in-8°, La Haye, 1523 ; in-4°, s. 1., 1524. — In Evangelium Matthxi annotationes, in-8°, s. 1., 1523 (plusieurs édit.) ; In Evangelium Matthxi inque passionem Domini, in-8°, La Haye, 1531. — In Evangelium Joannis annotationes, in-8°, Bâle, 1523 (plusieurs édit.) ; s. 1., 1523 (plusieurs édit.) ; in-4°, La Haye, 1524. — Annotationes, Verzûchnung ; und kûrzlich Anzaig des rechien Vertands der Epistel zu den Rômern verteutscht, in-4°, s. 1., 1523. — riapoijvi’ii sive Proverbia Salomonis cum annotationibus, in-8°, Nuremberg, 1525 ; La Haye, 1525 et 1529 ; 1532 ; 1538 ; Nuremberg 1586. — Scholia in Epistolam Pauli ad Colossensés, in-8°, La Haye, 1527 et 1534 ; Wittenberg, 1559.

— Dispositio orationis in Epistolam Pauli ad Romanos, in-8°, La Haye, 1529 ; s. 1., 1529 ; Wittenberg, . 1530. — Argumentum in Jeremiam prophetam, in-8°, Wittenberg, 1542. — In Danielem prophetam com mentarius, in-8°j Wittenberg, 1543 ; Leipzig, 1543 ; j Francfort, 1546 (a été traduit en allemand et en fran| çais). — Insignis et uculentissima S. Scripturæ me-’thodus inMose ostensa. Idem Psalmorum exi et exie

pia et erudita eriawatio et alla, in-8°, Erfurt, 1546.

— Enarratio brevis concionuni libri cui titulus Ecclesiastes, in-8°, Wittenberg, -1550, 1551 et 1556 ; traduit en allemand, in-8, Wittenberg, 1561. — Conciones explicantes integrum Evangelium Matthsei habitse a Sebast. Froschelio, scriptse a Melanchthone, in-8°, Wittenberg, 1558. — Psalterium Davidis intggrum, in quo psalmi 83 illustrali sunt, in-8°, Wittenberg, 1561.

— Enarratio Epistolm 1 ad Timotheum et duorum capitwm secundx, in-8°, Wittenberg, 1561. — Voir Matthes, Ph. Melanchthon, sein Leben und Wirken, Altenburg, 1841 ; Herrlinger, Die Théologie Melanchthon’s, Gotha, 1879 ; A. Thoma, Philipp Melanchtons Leben, in-8°, Karlsruhe, 1897 ; G. Ellinger, Philip Melanchton, in-8°, Berlin, 1902. A. Régnier.

    1. MELCHA##

MELCHA (hébreu : Milkâh, « reine ; » Septante : MeXx » ), nom de deux femmes dans l’Ancien Testament.

1. MELCHA, fille d’Aran et sœur de Lot et de Jescha, née à Ur des Chaldéens. Gen., xi, 27-29. Elle épousa Nachor, son oncle, et émigra avec Abraham à Haran en Mésopotamie, ꝟ. 29-31. Elle eut huit fils, dont le dernier fut Bathuel, qui devint père de Eébecca, femme d’Isaac, Gen., xxii, 20-23 ; xxiv, 15, 24, 27, et grand-père de Rachel et de Lia, les deux femmes de Jacob.

2. MELCHA, une des cinq filles de Salphaad, de la tribu de Manassé. Num., xxvi, 33 ; xxvii, î ; xxxvi, 11 ; Jos., xvii, 3. Voir Maala, col. 468.

    1. MELCHI##

MELCHI (grec : MeXxO, nom de deux Israélites. C’est sans doute une abréviation de Melchias. Voir Mel CHIAS.

1. MELCHI, fils de Janné et père de Lévi, un des ancêtres de Notre-Seigneur, dans la généalogie de saint Luc, iii, 24.

2. MELCHt, fils d’Addi et père de Néri, un des ancêtres de Notre-Seigneur dans la généalogie de saint Luc, iii, 28.

MELCHI A. Voir Melchias 3, 4, 5.

    1. MELCH I AS##

MELCH I AS (hébreu : Malkîyâh ; une fois : Malkîyâhû, « Yàh (Jéhovah) est mon roi » ), nom d’une dizaine d’Israélites. La Vulgate écrit quelquefois ce nom Melchia.

1. MELCHIAS (Septante : MeX’/taç), lévite, fils d’Athanaï et père de Basaïas, de la famille de Gersom, un des ancêtres d’Asaph qui fut chef de chœur du temps de David. I Par., vi, 40 (hébreu, 25).

2. MELCHIAS (Septante : Wltlxtaç), prêtre, père de Phassur. Un de ses descendants s’établit à Jérusalem après la captivité. I Par., ix, 12 ; II Esd., xi, 12. Son fils Phassur fut un des ennemis du prophète Jérémie, xxi, 1 ; xxxviii, 1. Quelques commentateurs croient qu’il n’est pas différent de Melchias 11.

3. MELCHIAS (Septante : MeXxîac ; Vulgate : Melchia), prêtre, descendant d’Éléazar, qui fut institué.chef de la cinquième des vingt-quatre familles sacerdotales du temps de David. I Par., xxiv, 9.

4 et 5. MELCHIAS (Septante : MeXx’a ; Vulgate : Melchia), deux des « fils de Pharos » qui avaient épousé des femmes étrangères et qui les répudièrent du temps d’Esdras. I Esd., x, 25. Dans ce ꝟ. 25, au lieu du second Melchias, les Septante portent : ’Aaaêi’a.

6. MELCHIAS (Septante : Me^a, MiXyiac), un des G fils de Hérem » qui s’était marié avec une femme

étrangère et qu’il renvoya à l’époque de la réforme d’Esdras. I Esd., x, 31. Il travailla, sous Néhémie, à la reconstruction des murs de Jérusalem et de la tour des Fourneaux (t. ii, col. 2344-2345). II Esd., iii, 11.

7. MELCHIAS (Septante : MsV/îa), fils de Réchab, chef du district de Béthacharam (t. i, col. 1651-1652). Du temps de Néhémie, il rebâtit une des portes de Jérusalem, la porte du Fumier (voir Jérusalem, 8°, Porte Sterquiline, t. iii, col. 1365), avec ses battants et ses verrous. II Esd., iii, 14.

8. MELCHIAS (Septante : MeXyja), ben-has-sôrfî (Septante : EapsçQ, porte le texte hébreu ; filius aurificis, « fils de l’orfèvre, » traduit la Vulgate, dont l’interprétation est assez communément adoptée. II Esd., iii, 30 (hébreu, 31) ; cf. y. 31 (32). Lors de la reconstruction des murs de Jérusalem par Néhémie, Melchias répara « jusqu’aux nîaisons des Nalhinéens et des marchands, vis-à-vis de la porte de Mifqad (voir Jérusalem, 14°, Porte judiciaire, t. iii, col. 1365), jusqu’à la chambre haute de l’angle » (texte hébreu, ꝟ. 31).

9. MELCHIAS (Septante : MsXy.i’aç ; Vulgate : Melchia) f un des sept prêtres qui se tinrent à la gauche d’Esdras, pendant qu’il fit la lecture de la Loi au peuple assemblé à Jérusalem. II Esd., viii, 4. C’est probablement le même prêtre qui signa l’alliance contractée avec Dieu à l’instigation de Néhémie. II Esd., x, 3. Dans ce dernier passage, les Septante écrivent le nom MeX/loc (Alexandrinus : MsXxet’a) et la Vulgate : Melchias. Il prit part également à la fête de la dédicace des murs de Jérusalem, II Esd., xii, 41, à moins qu’il ne faille reconnaître ici un autre prêtre du même nom, comme le font certains interprètes.

10. MELCHIAS, fils d’Énan et père d’Àchitob, de la tribu de Ruben, un des ancêtres de Judith, viii, 1. Ce nom ne se trouve pas dans les Septante.

11. MELCHIAS (hébreu : Ualkhjâhû ; Septante : M$Xj (iaç), fils d’Amélech (hébreu ham-mélék). C’est dans la citerne de ce Melchias que les ennemis de Jérémie descendirent le prophète pour qu’elle lui servît de prison. Jer., xxxviii, 6. Divers interprètes pensent que ham-mélék est un titre de dignité ou signifie « faisant partie de la famille royale » et ils identifient ce Melchias avec le père de Phassur. Voir Melchias 2. Cette opinion ne manque pas de vraisemblance.

    1. MELCHIEL##

MELCHIEL (hébreu : Malkî’êl, « Dieu est mon roi ; » Septante : MsXxtiX, MeX/i^X), le second des deux fils de Béria, petit-fils d’Aser et arrière-petit-fils de Jacob. Gen, , xlvi, 17. Il devint le chef de la famille des Melchiélites. Num., xxvi, 45. D’après I Par., vii, 31, il fut « le père de Barsaïth ». Mais Barsaïth est-il un nom de personne ou de lieu ? Il est impossible de le déterminer. Voir Barsaïth, 1. 1, col. 1470.

    1. MELCHIÉLITE##

MELCHIÉLITE (hébreu : ham-Malki’êll ; Septante 6 MeXxfnXï ; Vulgate : Melchiélitœ), descendant de Melcniel, de la tribu d’Aser. Num., xxvi, 45. Voir Melchiel.

    1. MELCHIRAM##

MELCHIRAM (hébreu : Malkirâm, « mon roi est élevé ; » Seplante : MeXxipây-) » second ou troisième fils de Jéchonias, roi de Juda. I Par., iii, 18. La Vulgate le donne comme troisième, de même que les Septante, parce que ces deux versions rendent le mot hébreu’assîr, v. 17, comme un nom propre, tandis que d’autres traducteurs le prennent pour un qualificatif de Jéchonias : « Jéchonias captif (à Babylone). » Voir Asm 1, t. î, col. 1102. D’autres traducteurs, tout en prenant Asîr pour un nom propre, font cependant de Melchiram le

second fils de Jéchonias, parce que, au lieu de traduire avec la Vulgate : « Les fils de Jéchonias furent Asir, Salathiel, Meîchiram, etc., » ils traduisent ainsi l’hébreu : « Fils de Jéchonias, Asir, dont le fils fut Salathiel, Meîchiram, etc. » La Vulgate a omis, dans sa traduction, le mot « son fils », qui qualifie Salathiel dans l’hébreu. Ceux qui régardent’assir comme un adjectif rapportent le premier possessif « son » à Jéchonias ; ceux qui en font un nom propre le rapportent à Asir, c’est-à-dire « fils d’Asir ».

: MELCHISÉDECH (hébreu : Malkî-Çédék ; Septante : 

MEXx’ffsSéx), r °i de Salem, au pays de Chanaan, à l’époque d’Abraham.

1° Ce qu’il était. — Le nom de Melchisédech, malkîçédéq, est hébreu et signifie « roi de justice ». La ville de Salem n’était autre, d’après plusieurs commentateurs, que Jérusalem. Voir Jérusalem, t. iii, col. 1319, et Salem. Melchisédech était roi de cette ville et duterritoire qui en dépendait. De plus, il était prêtre de’El’Éhjûn, « le Dieu Très-Haut, » le vrai Dieu, le même que servait Abraham. Du nom hébreu de Melchisédech et de sa résidence, on peut conclure qu’il était Chananéen, comme cet Amorrhéen de nom analogue, Adonisédech, qui était roi de Jérusalem à l’époque de la conquête du pays par Josué, x, 1. Malgré la malédiction qui avait frappé leur père Chanaan, Gen., ix, 25, tous les Chananéens ne professaient pas nécessairement l’idolâtrie au temps d’Abraham. Le patriarche et ses fils sont souvent en rapport avec des hommes du pays qui ne paraissent mériter aucun blâme à raison de leur conduite ou de leur religion. Il n’y a donc pas lieu de faire de Melchisédech un Sémite étranger établi au pays de Chanaan. Le roi de Salem est en même temps prêtre, hôhên, nom qui apparaît pour la première fois dans la Bible. Il exerce cette fonction en qualité de chef de famille. La Sainte Écriture n’en dit pas davantage sur L’origine et la condition de Melchisédech, Gen., xiv, 18.

2° Sa rencontre avec Abraham. — Lorsque Lot, neveu d’Abraham, eut été pris à Sodome par Ghodorlahomor et ses trois alliés, le patriarche se mit à la poursuite des vainqueurs, les battit, fit sur eux grand butin et ramena Lot avec tout ce qu’il possédait. Voir Abraham, 1. 1, col. 77. À son retour, le roi de Salem, Melchisédech, vint au-devant de lui, Heb., vii, 10, offrit du pain et du vin et bénit Abraham, en disant : « Béni soit Abraham par le Dieu Très-Haut, qui a fait le ciel et la terre ! Béni soit le Dieu Très-Haut qui a livré tes ennemis entre tes mains ! » Et Abraham lui donna la dîme de tout. Gen., xiv, 18-20. L’hiphil hôfî’a le sens de « faire sortir, mettre au-dehors, présenter ». Cf. Gen., xxiv, 53 ; Exod., iv, 6, 7 ; xii, 51, etc. Il est bien traduit par les versions : Krivs’j’xe, « il apporta, » proferens, « présentant. » Par lui-même, le mot ne signifie pas : offrir à Dieu, ou : offrir en sacrifice. Melchisédech se contente d’apporter du pain, léhém, comprenant peut-être toute espèce de nourriture, et du vin. Josèphe, Ant.jud., i, x, 2, dit que Melchisédech exerça l’hospitalité envers les soldats d’Abraham et leur donna en abondance les choses nécessaires à la vie. Un certain nombre de commentateurs pensent que Melchisédech ne fit pas autre chose que ravitailler les hommes qui accompagnaient Abraham. Mais le texte sacré ajoute la remarque suivante : 8 Et lui prêtre du Dieu Très-Haut, s Si ce renseignement n’avait pour but que de caractériser la personnalité de Melchisédech, il eût été mieux à sa place après le titre de « roi de Salem ». Mais il vient entre la mention du pain et du vin apportés par Melchisédech, et celle de la bénédiction prononcée sur Abraham. Il n’était pas nécessaire d’être prêtre pour bénir ; quiconque avait autorité paternelle, civileou religieuse pouvait le faire. Voir Bénédiction, t. i, col. 1581. La qualité de prêtre, attribuée à Melchisédech, est donc rappelée à raison de

l’acte qui précède, c’est-à-dire de l’offrande du pain et du vin. C’est ce que suppose la Vulgate en ajoutant la conjonction enim : « Car il était prêtre du Dieu Très-Haut. » Il est naturel qu’Abraham, rencontrant après sa victoire un prêtre du vrai Dieu, en ait profité pour offrir à Dieu ses actions de grâces. Il est égale- » ment présumable que Melchisédech, avant d’offrir des aliments aux vainqueurs, exerça sa fonction sacerdotaleen offrant à Dieu une partie des aliments apportés. Le texte ne le dit pas positivement, mais il ne dit pas non plus le contraire, et il insinue l’idée de l’offrande en insistant sur le sacerdoce de Melchisédech. L’Épîtreaux Hébreux, vii, 1-17, qui établit un parallèle détaillé entre Notre-Seigneur et Melchisédech, ne fait pas allusion à l’offrande de ce dernier, sans doute parce qu’il y avait dans les rites mosaïques un sacrifice ou oblation de farine ou de pain et de vin et qu’il n’y avait pas ainsi sur ce point de différence et de symbole particulier à relever entre Melchisédech et le sacerdoce d’Aaron. Mais les Pères supposent expressément un sacrifice de pain et de vin présenté à Dieu par le roi de Salem. Cf. S. Cyprien, Epist. lxiii, ad Cœcil., 4, t. ix, col. 376 ; S. Jérôme, Epist* lxxiii, ad Evagr. r 3, t. xxii, col. 673 ; In Matth., iv r 26, t. xxvi, col. 195 ; S. Augustin, De divers, question.* 61, t. XL, col. 49 ; De civ. Dei, xvi, 22, t. xli, col. 500. La même idée est exprimée, par Clément d’Alexandrie, saint Jean Chrysostome, saint Isidore de Peluse, saint Cyrille d’Alexandrie, saint Césaire d’Arles, Arnobe, etc. Cf. Pétau, De incarn. Verbi, XII, xii, 6-11. Elle est rappelée au canon de la Messe, 2* orat, post consecr., et semble visée dans la première antienne des vêpres du Saint-Sacrement. — En dehors de cet épisode de sa rencontre avec Abraham, les textes historiques ne font plus mention de Melchisédech.

3° Son caractère figuratif. — Au Psaume ex (cix), 4, il est dit du Messie futur : « Tu es prêtre pour toujours selon l’ordre de Melchisédech. « L’expression hébraïque’âl-dibrâfi veut dire « à la manière, selon le mode », xarà tt|V tâ ?iv, comme traduisent littéralement les Septante. L’intention de l’auteur sacré est donc d’exclure toute autre espèce de sacerdoce, par conséquent le sacerdoce à la manière d’Aaron. Saint Thomas, Sum. tlieol., III a, q. xxii, a. 6, ad 2 um, observe que Melchisédech est nommé ici non comme le chef, mais comme le type d’un sacerdoce particulier. — L’auteur de l’Èpître aux Hébreux explique le caractère figuratif de Melchisédech. Il tire une première application de son nom propre, « roi de justice, » et du nom de sa ville, « roi de paix, » Salem se référant à, Sâlôm, qui veut dire « paix ». Melchisédech est « s, ans père, sans mère, sans généalogie, n’ayant ni commencement ni tin de vie, mais ressemblant au Fils de Dieu et restant prêtre pour toujours ». Heb., vii, 3. Cette description ne va pas à faire de Melchisédech un être à part. Elle porte seulement sur le silence de la Genèse, qui ne dit rien de l’origine ni de la mort du personnage, « dont la génération n’est point racontée, » fù Y 6VSa * o Y°^t Jiev0 Ç>e dont la généalogie n’est pas donnée. » Heb., vii, 6. Saint Paul remarque ensuite que c’est le supérieur qui bénit et [qui reçoit la dime de son inférieur. Melchisédech reçoit la dime d’Abraham et le bénit. À Melchisédech sont donc inférieurs et Abraham lui-même et tous les prêtres lévitiques qui devaient un jour naître de lui. Or la Sainte Écriture dit que Jésus-Christ est prêtre selon l’ordre de Melchisédech ; c’est donc qu’il a un autre sacerdoce que celui d’Aaron, que son sacerdoce est supérieur à celui de ce dernier et qu’il doit le remplacer. Heb., viii, 4-18. Comme on le voit, le raisonnement se base seulement sur la bénédiction donnée et sur la dime reçue. Ces deux actes pouvaient seuls établir la thèse de l’auteur sacré, à savoir la supériorité de Melchisédech sur Abraham et celle de Jésus-Christ sur les pontifes et les prêtres lévitiques. La nature du sacrifice offert par Mel

chisédech n’important nullement à la thèse, l’auteur n’en fait pas mention. On ne peut donc rien conclure de son silence contre l’interprétation des Pères et du concile de Trente qui dit de Jésus-Christ, Sess. xxii, de sacrif. Missæ, cap. r : « Se déclarant constitué pour toujours prêtre selon l’ordre de Melchisédech, il offrit son corps et son sang sous les espèces du pain et du vin. » Cf. Franzelin, De SS. Eucharist., th. viii, Rome, 1873, p. 338-333.

4° Opinions et hypothèses sur Melchisédech. — Les anciens Juifs, afin d’expliquer la supériorité du roi de Salem sur Abraham, imaginèrent que ce roi n’était pas autre que Sem, leur ancêtre, fils de Noé qui, d’après leurs calculs chronologiques, vivait encore à cette époque. Cette identification se trouve dans le Targum de Jérusalem, où nous lisons : « Melchisédech, roi de Jérusalem, est Sem (fils de Noé, ajoute le Targum de Jonathan), qui était grand-prêtre du Très-Haut. » Walton, Biblia Polygl., t. iv, p. 24. Saint Jérôme dit que c’était l’opinion générale des Juifs de son temps. Epist. lxxiii, ad Evang., 5, t. xxii, col, 679. Cf. In ls., . XII, c.xii.t. xxiv, col. 414. D’après saint Épiphane, User, v, 6, t. xli, col. 981, elle était aussi commune chez les Samaritains. Luther et Mélanchton l’acceptèrent au xvi c siècle. Saint Épiphane réfute cette erreur en s’appuyant sur la chronologie des Septante, lbid., col. 981-983.

Des hérétiques, combattus par ce même Père, ibid., col. 972 et par d’autres docteurs de l’Eglise, soutinrent aux iv" et Ve siècles que Melchisédech était une « force ou vertu de Dieu » supérieure à Jésus-Christ même, y.syâlr)v Tiva 6yva|xtv |j.e : ÏÔT£pov toO XptuToO, comme s’exprime l’évêque de Salamine. On les appela Melchisédéchiens. Tertullien, De prxscript., 53, t. ii, col. 75 ; Théodoret, Hxret. fab., ii, 6, t. lxxxiii, col. 392 ; S. Jean Chrysostome, Hom. in Melchis., 3, t. lvi, col. 260. Cf. S*. Augustin, De hxr., 34. t. nu, col. 31 ; S. Cyrille d’Alexandrie, Glaphyr. in Gen., ii, 7, t. lxix, col. 67 ; Philastre, De hœres., 52, t. xii, col. 1168. — D’autres, au contraire, enseignèrent que le roi de Salem était le fils de Dieu. S. Épiphane, Hœr. lv, 7, col. 985 ; S. Ambroise, De Abraham, i, 3, n° 16, t. xiv, col. 427. Pour d’autres, c’était le Saint-Esprit. S. Epiphane, Hxr. lxvii, 3, t. xliii, col. 176 ; S. Jérôme, Epist. lxxii, 1, t. xxii, col. 676. D’après ce dernier Père, ibxd-, 2, col. 677, pour Origène et Didyme c’était un ange. Depuis on a imaginé que c’était Hénoch, Cham, Chanaan, Mesraïm, Job. Voir Sal. Deyling, Observationes sacræ, 3 part. in-4°, Leipzig, 1708-1715, t. a, p. 55-65 ; Hermann van Elowich, Melchisedecus ab injuria P. Juricei defensus (Jurieu l’identifiait avec Cham), et Melchisedecus minus féliciter ab H. Hulsio in Henocho detectits, dans le Thésaurus de Hase et Iken, Leyde, 1732, t. i, p. 175-187. La majorité des anciens Pères n’a jamais admis ces erreurs et ces hypothèses. « J’ai consulté Hippolyte, Irénée, Eusébe de Césarée et d’Émèse, Apollinaire aussi et notre Eustathe, dit saint Jérôme, Epist. lxxii, 2, col. 677, et j’ai constaté que tous, par des arguments différents et des sentiers divers ont abouti au même point, savoir que Melchisédech était un Chananéen, roi de la ville de Jérusalem, qui était appelé d’abord Salem. » Voir S. Cyrille d’Alexandrie, Glaphyr. in Gen., ii, 7, t. lix, col. 67 ; Théodoret, Qu&st. in Gen., 64, t. lxxx, col. 172 ; S. Épiphane, User, lxvii, 7, t. xlii, col. 181. — Aujourd’hui les assyriologues cherchent quelques traits de ressemblance entre Melchisédech et le roi de Jérusalem Ébed-tob ou Abdi-Khiba, dont on a retrouvé quelques lettres dans la correspondance de Tell el-Amarna, mais ces traits sont trop vagues pour qu’on puisse en tirer quelque conclusion positive. Voir Sayce, dans Hastings, Dictionary of the Bible, t. iii, 1900, p. 335. Ils peuvent néanmoins confirmer les paroles de saint Jérôme, contre l’opinion de quelques critiques de nos jours, qui, renouvelant sous une autre forme les hypothèses aventureuses que

l’on vient de voir énumérées, prétendent que Melchisédech est simplement le type du grand-prêtre juif au IVe siècle avant notre ère, H. Guthe, Bibelwôrterbuch, 1903, p. 426, comme si l’idée que les Juifs se faisaient de leur patriarche n’était pas en opposition complète avec le rôle qu’on prétend lui faire ainsi jouer. — Voir L. Borger, Historia crilica Melchisedeci, in-8°, Berne, 1706 ; Henderson, Melchisedek, Londres, 1809 ; C. A. Auberlen, Melchisédech’s ewiger Leben und Priesterthum, dans les Theologische Studien und Kritiken, t. ii, 1857, p. 453-504 ; G. Rôsch, Die Begegnung Abraham mit Melchisedek, dans la même revue, 1885, p. 321-366 ; Fritz Hommel, Geschichte Babyloniens und Assyriens, in-8°, Berlin, 1885, p. 162 ; Id., Die altisrælitisclie Ueberlieferung in inschriftlicher Beleuchtung, in-12, Munich, 1897, p. 150-160 ; R. Kittel, Geschichte der Hebrâer, <L ! in-8°, Gotha, 1888-1892, 1. 1, p. 162. — On trouve dans les Œuvres de saint Athanase, t. xxviii, col. 525530, une vie fabuleuse de Melchisédech [Historia de

Melchisedec).
H. Lesêtre.
    1. MELCHISUA##

MELCHISUA (hébreu : Malkisu’a, « aide est mon roi ; » Septante : MsX/iai ; Aleœandrinus : Meyx’.iroué), un des quatre fils de Saûl, roi d’Israël, le troisième nommé dans I Reg., xiv, 49 ; le second, dans I Par., vin, 33 ; ix, 39. Sa mère était probablement Achinoam, fille d’Achimaas. I Reg., xiv, 50. Melchisua périt sur le champ de bataille de Gelboé comme son père et succomba sous les coups des Philistins comme ses frères Jonathas et Abinadab. I Reg., xxxi, 2 ; I Par., x, 2.

    1. MELCHOM##

MELCHOM (hébreu : Milkôm, Malkom ; Septante : MoXo^, Me), -/6X), forme particulière, dans la Vulgate, IV Reg., xxiii, 13 ; I Par., xx, 2 ; Jer., xlix, 1, 3 ; Amos, i, 15 ; Soph., i, 5, du nom du dieu appelé plus ordinairement Moloch. Voir Moloch. Dans I Par., xx, 2, la Vulgate a pris l’hébreu malkâm pour un nom propre, comme l’ont fait les Septante, Mo^àetoû pauiXÉoiç txÙTûv, tandis qu’elle l’a considéré dans II Reg., Xli, 30, comme un substantif commun désignant le roi des Ammonites, régis eorum, s leur roi. » Cette dernière interprétation est la plus communément adoptée, quoiqu’il soit aussi possible de le prendre pour le nom du dieu. David s’empara de la précieuse couronne qui était sur la tête de malkâm. Voir Couronne, 1, 1°, t. ii, col. 1083.

    1. MÊLÉ À##

MÊLÉ À (grec : MeXeî ; ), fils de Menna et père d’Éliakim, un des ancêtres de Notre-Seigneur dans la généalogie de saint Luc, iii, 31.

    1. MÉLECH##

MÉLECH (hébreu : Mélék, « roi ; » Septante : MeXix), de la tribu de Benjamin, fils de Micha et arrière-petit-fils de Jonathas, fils de Saûl. 1 Par., viii, 35 ; ix, 41.

    1. MÉLITON##

MÉLITON, écrivain ecclésiastique. Tous les renseignements biographiques qu’on possède sur lui se bornent aux points suivants : il vécut pendant la seconde moitié du IIe siècle et fut évêque de Sardes, en Lydie. Sur son activité littéraire, on a un certain nombre de témoignages. Polycrate d’Éphèse, dans sa lettre à Victor de Rome, écrite en 194 ou en 195 et citée par Eusèbe, H. E., V, 24, 5, t. xx, col. 496, mentionne « Méliton l’eunuque (c’est-à-dire ici-ï celui qui n’est pas marié » ), agissant en toutes choses selon la direction de l’Esprit Saint et qui repose à Sardes dans l’attente de la possession dès cieux, pour laquelle il ressuscitera d’entre les morts ». A en croire Eusèbe, H. E., IV, xxvi, 4, et cf. VI, xiii, 9, t. xx, col. 393 et 548, Clément d’Alexandrie aurait composé son ouvrage Ilspi toù maya, à cause de Méliton qui aurait écrit sur le même sujet un traité en deux livres. On ne s’accorde pas sur le sens exact de l’expression ii a’tTi’aî tt, î toO MîXituvoî YP a< Pîiï> * à cause do

l’écrit de MéJiton. » Hefele, Conciliengeschichte, 1874, t. i, p. 29 ; Weitzel, Passafeier, 1848, 26, 74 ; Steitz, Studien und Kritiken, année 1856, p. 778, et Thomas, Melito von Sardes, 1893, p. 11-12, pensent que l’écrit de Méliton donna simplement occasion à la composition de celui de Clément d’Alexandrie. Harnack, Texte und Untersuchungen, 1883, t. i, p. 24, admet que le traité de Clément fut dirigé contre celui de Méliton. Le témoignage de Tertullien sur Méliton nou£ a été conservé par saint Jérôme, De viris ilhist., 24, t. xxiii, col. 644, où il dit : Huius elegans et declamatorium ingenium Tertullianus in septem libris quos scripsit adversus ecclesiam pro Montano cavillatur dicens eum a pierisque nostrorum prophetam putari. Il résulte de cette citation que, si d’une part Tertullien tourne en dérision le caractère élégant et déclamatoire de l’esprit de Méliton, de l’autre, il atteste sa fécondité d’écrivain, déclare que l’évêque de Sardes, ne fut pas montaniste et enfin qu’il était, conformément à l’assertion de Polycrate d’Éphèse, un prophète rempli de l’esprit de Dieu. On a essayé d’expliquer les mots a plerisque nostrorum, du texte de saint Jérôme par « les Montanistes ». Voir Schwegler, Montanismus, 1841, p. 171, 223 ; Hilgenfeld, Der Paschastreit der allen Kirche, 1850, p. 273. Cette interprétation ne tient pas debout, comme l’a démontré Harnack, Texte und Untersuchungen, 1883, t. i, p. 241242. L’auteur inconnu, peut-être saint Hippolyte, du « Petit Labyrinthe », cite avec honneur Méliton. Après avoir rappelé que Justin, Miltiade, Tatien, Clément et d’autres sont des témoins de la divinité du Christ ; il ajoute : Ta "ràp Eîpijvafou te xa MeXfxwvo ; xai tûv Xotitôv tiç àyvoeï 61ëXia, @eôv xai avOpamov xaT « YYsXX<ma tbv Xpi<TTov, voir Eusèbe, H. E., IV, XXVI, 5, t. XX, col. 393. Dans deux passages d’Origène, Ad Psalmi m insctiptionem, édit. Lommatzsch, t. xi, p. 411, t. viii, p. 49, Méliton est cité, dans le premier, comme ayant vu en Absalon un type du démon révolté contre le royaume du Christ, et, dans le second, comme ayant laissé des écrits sur Dieu anthropomorphe. C’est à Eusèbe que l’on doit les indications les plus abondantes sur l’œuvre littéraire de Méliton. Il donne une longue liste de traités composés par l’évêque de Sardes. H. E., IV, XXVI, t. XX, col. 393. 1° MeXf-ctavo ; itepi tou KÔ.axa 8ûo. Le début de cet ouvrage transcrit par Eusèbe, ibid., lY, xxvi, 2, col. 393, fournit une donnée pour la chronologie de la vie de Méliton. Il y est parlé de « Servilius (lire Sergius, avec Rufln) Paulus, proconsul d’Asie ». Toutefois on n’est point d’accord sur l’interprétation précise de cette donnée. Waddington, Fastes des provinces asiatiques, p. 226,-place le gouvernement de ce proconsul en l’an 164-165 ; Keim, Aus dem Urchristentum, p. 165, en 166 ; Renan, Marc-Aurèle, 1882, p. 198, en 167 ; Hilgenfeld, Der Paschastreit der allen Kirche, 1850, p. 25-2, en 168. Voir Thomas, Melito von Sardes, 1893, p. 20 ; Harnack, Geschichte der altchristlichen Litteratur, 1897, t. H, p. 359. Il est vraisemblable que dans ce traité, Méliton soutint la tradition de l’Église d’Asie Mineure, c’est-à-dire la pratique des Quartodécimans. — 2° XltçX itoXtTei’a ; xa Trpoçïirâv. Saint Jérôme, De viris illust., c. xxiv, t. xxiii, col. 644, semble avoir lu nep’i itoXiTEÎac itpoovj-ôv, car il traduit De vita prophetarum. Cet écrit visait probablement le montanisme. Cf. Bonwetsch, Die Geschichte des Montanismus, 1881, p. 20. Pourtant, il n’est pas aisé de déterminer en quel sens Méliton s’est prononcé. Peut-être, comme saint Irénée, a-t-il gardé une attitude expectante. — 3° Utpi èxxXï]oîaç. — 4° IIep Kvpmxîjs. — 5* Iltp nimitûi àvGpwxo’j. D’autres manuscrits, la traduction syriaque et Rufin ont lu itep’t <pû<7so>c àvOpûitou. — 6° Ilepi irXânEuK. Rufin traduit De figmento et saint Jérôme De plasmate. Woog, De Melilone, 1744, p. 23, et Piper, Theologische Studien <und Kritiken, 1838, p. 8J, interprètent ce titre par Creatio mundi. Mais tous les autres auteurs ont pensé

qu’il s’agissait, dans ce traité de Méliton, de la création de l’homme. — 7° l O itepi -àiraxo-ij ; touts » ; . — 8°’0 reepl cùcOïimpe’iov. Les manuscrits grecs d’Eusèbe réunissent ces deux titres dans la formule suivante : . xai ô nsp’i ûiraxoïç nftrrewi ; ala-9ï)Tï]p ! (.>v. Mais Rufln a traduit De obedientia fidei ; de sensibus, et Nicéphore a séparé les deux titres. D’autre part, le traducteur syriaque a rendu seulement les mots xcd à itepi ûtocxoîjî Ttiorew ; , tandis que saint Jérôme ne mentionne que De sensibus librum unum. Il est donc probable qu’il faut, avec la plupart des auteurs, distinguer deux traités. — 9° Ilept i^uX’i ? x<x ^ a(i>u.aTo ; . Quelques manuscrits ajoutent r vaôç. Cureton, SpiciUgium Syriacum, 1855, p. 31-50, et Otto, Corpus apolog. christ., 1872, t. IX, n. xiii, ont publié quelques fragments syriaques de ce traité. G. Krûger, Melito von Sardes oder Alexandcr von Alexandrien, dans la Zeitschr. f’ùr wissensch. Théologie, t. xxx, 1888, p. 434-448 ; cf. Theolog. Litteralurzeitung, 1893, p. 570, a conjecturé que quatre des fragments syriaques publiés par Cureton faisaient partie d’un même traité de Méliton qui aurait été intitulé Ilepl ^vxiii %aï (Tto^LûcToç xai eU to icà60 ; . Cette hypothèse ne sembla pas absolument démontrée. Si Harnack, Geschichte. der altchristlichen Litteratur, t. i, p. 251 ; t. ii, part. i, p. 518, et E. Preuschen, dans la Realencyclopâdie fur pi’ote.stantische Theologie, t. xii, 1903, p. 561, s’y rallient, Thomas, Melito von Sardes, p. 50, ne se montre pas très favorable et Bardenhewer, Geschichte der altkirchlichen Litteratur, t. i, p. 1902, p. 555, se contente de mentionner l’opinion de Krûger. — 10° Hspi XompoO, c’est-à-dire d’après Rufin, de lavacro, et d’après saint Jérôme de baptismate. Un fragment de ce traité a été publié par le cardinal Pitra (Analecta sacra, t. ii, p. 3-5) et Mercati (Symbolm Melitonianse, dans Theologisch Quartalschrift, t. lxxvi, 1896, p. 596-600) a donné, d’après un manuscrit de l’Ambrosienne à Milan, des variantes à ce traité. — 11° nspi àlrfitia : , — 12° Ilept XTÎuewç xaY fevé<îewî XpitrroO. — 13° Htp npoçmTeia ; . Beaucoup de manuscrits ont A6yo ; aireoO itep 7rpo<pï]TeJ<x{. Rufin traduit : De prophetia ejus et saint Jérôme : De prophetia sua. Dans un fragment de papyrus trouvé à Oxyrhynque et publié par Grenfell et Hunt, The Oxyrhynchus Papyri, .part. 1, 1898, p. 8-9, Harnack a cru retrouver un extrait de l’ouvrage de Méliton rapt TtpoçY|-Tei’a ; . Voir Sitzungsberichfe der k. preuss. Akad. der Wissensch. zu Berlin, 1898, p. 517-519. Mais comme l’a très bien fait remarquer Erwin Preuschen, dans la Realencyclopâdie fur protestatitische Théologie, 1903, t. xii, p. 166, cette identification n’est rien moins que certaine. — 14° nep : çtXoÇevfaç, — 15°’H xXei’ç, Clavis. Ce titre évoque le souvenir de l’œuvre qui a été considérée comme Je travail capital de Méliton, le pendant des Formulée spiritalis intelligentise d’Eusèbe. En 1653, Labbe avait signalé dans la bibliothèque des Jésuites du collège de Clermont à Paris un manuscrit latin, Melitonis Clavis sanctee Scripturx.oirDescriploribusecclesiasticis, &j3, t. ii, p. 87. Sirmond connut ce traité. Lequien le copia pour Grabe qui fut empêché par la mort de publier la Clavis dans son Spicilegium. La copie en question est aujourd’hui encore conservée à la Bibliothèque bodléienne à Oxford. Magnus Crusius, cf. Fabricius-Harles, Bibliotheca grxca, t. vii, p. 150, et Woog, De Melitone Dissertaiio secunda, p. 21, transcrivirent également ce traité. Ni Galland (voir Bibliotheca Patrum, t. i, c. xxiv, p. cxx), ni Routh, Reliquiæ sacrse, 1814, 1. 1, p. 133, qui connurent l’ouvrage, ne jugèrent à propos d’en entreprendre la publication. Le cardinal Pitra retrouva le manuscrit du collège de Clermont, à Rome, dans la bibliothèque Barberini, qui est aujourd’hui au Vatican, et il fut assez heureux pour découvrir la Clavis] sanctse Scripturse dans sept autres manuscrits. Le patient érudit publia le texte et consacra tous ses efforts à défendre l’authenticité du document découvert et l’identification de

la Clavis avec la Klds citée par Eusèbe. Voir Spicilegiutn Solestnense, 1853, t. H, p. 1-519 ; t. iii, p. 1-307 ; Analecta sacra, t. ii, p. 6-127, 573-585, 623. Toute cette érudition dépensée pendant trente ans de 1852 à 1884 fut en pure perte. Il est certain que la Clavis Sanctss Scripturx n’a rien de commun avec la KXsk de Méliton. Voir G. S. Steitz, dans les Theologische Sludien und Kritiken, t. xxx, 1857, p. 584-596 ; G. Salmon, dans À Dictionary of Christian Biography, 1882, t. iii, p. 897-898 ; Harnack, Texte und Vntersuchungen, t. i, 1883, p. 275-276, et Geschichte der altchristlichen Litteratur, 1892, t. i, p. 254 ; dom 0. Rottmanner, dans le Bulletin critique, 1885, p. 47-52 et le Theologische QuartaUchrift, t. lxxviii, -1896, p. 614-629 ; Duchesne, dans le Bulletin critique, ’1885, p. 196-197 ; Thomas, Melito von Sardes, 1893, p. 66-68 ; Preuschen, Realencyclopâdie fur prot. Théologie, t. xii, p. 566 ; Bardenhewer, Geschichte der altkirchlichen Litteratur, t. i, 1902, p. 555. Toutefois, comme l’étude de la Clavis Sanctse Scripturse rentre dans le cadre du dictionnaire, nous en dirons un mot ici. Originairement écrit en latin, ce traité n’est nullement une traduction du grec. Dans les manuscrits, il est intititulé tantôt Anonymus de mystica significatione vocum ac loquutionum biblicarum (manuscrit de Troyes), tantôt Distinctionum quarumdam tractatus (autres manuscrits de Troyes), tantôt Glossse in varios Sacrœ Scriptural libr os de sensu sprirituali multovum locorum (manuscrits de Paris). Seuls le manuscrit du collège de Clermont, aujourd’hui à la Vaticane, dans le fonds Barberini, et celui de Strasbourg attribuent à Miletus ou Melitus Asianus episcopus l’ouvrage qu’ils appellent Clavis ou Liber clavorum. Cette attribution et ce titre sont, sans doute, dus à la fausse érudition d’un clerc du xi » siècle qui aura lu dans saint Jérôme que Méliton composa un traité intitulé Claitis. L’ouvrage en question se présente sous une double rédaction, l’une complète, l’autre abrégée. C’est une sorte de lexique de la Bible, disposé non point d’après l’ordre alphabétique, mais selon l’ordre des matières, et donnant l’explication des divers sens mystiques auxquels les mots de la Bible peuvent donner lieu. Il y a quatorze chapitres intitulés respectivement : De Deo, de filio Dei secundum carnem, de supernis creaturis, de diebus anni et temporibus, de numeris, de mundo et partibus eius, de signis infructuosis, de variis hominum appellationibus, de variis sedificationum vocabulis, de metallis et aliis sive his quse ex eis fiunt, de avibus, de bestiis et ceteris animantibus, de civitatibus sive provinciis. La Clavis renferme des emprunts à Denis l’Aréopagite, Grégoire le Grand et même à Paschase Radbert ; elle est donc d’origine relativement récente, peut-être de l’époque des derniers Carlovingiens ou des premiers Capétiens. Quant à l’ouvrage de Méliton,-f) KXetç, dont nous ne connaissons que le titre, on a émis de vaines conjectures pour en déterminer le caractère. Schwegler, Der Montanismus, p. 223, a pensé aux clefs du royaume des cieux ; Otto, Corpus apotog., p. 401, à la clef de la science, xWç xrjç yv<i(js<oç (cf. Luc, XI, 51) ; Harnack, Texte und Vntersuchungen, t. i, p. 249, a songé aux clefs de l’Apocalypse (cf. Apoc, i, 8 ; iii, 7 ; îx, 1 ; xx, 1), Toutes ces hypothèses ne reposent sur aucun fondement.

— 16° Ilep ! toO StaëôXou xal tîj ? àiroxoeXij’J/ew ; jîuiû-ïvov. Xes manuscrits grecs d’Eusèbe et le traducteur syriaque finissent ces deux traités. Rufin et saint Jérôme les séparent. On a rapproché du traité IIspl tîjc àTioxaX’J^sw ; ’Itoowou le passage de Gennade (Deecclesiasticis dogmalibus, c xxv) : In divinis repromissionibus nihil terrenum vel transitorium expectamus, sicut Meletiani sperant. Par Meletiani, on entendait « disciples de Méliton », et l’on a conjecturé que Méliton aurait enseigné le chiliasme dans son ouvrage sur l’Apocalypse. On pourrait toutefois voir aussi dans les Melitiani ou Melitani les travaux de Mélèce d’Egypte, mais comme rien ne prouve

que ceux-ci professaient le chiliasme, on a généralement admis que Gennade visait Méliton de Sardes. — 17° Ilepl êv(jfc>(i(XTou ©eoCs. Comment faut-il définir ce traité ? Saint Jérôme a gardé le titre grec. Rufin a traduit : De Deo corpore induto. Pitra, Spicil. Solesm., t : H, p. 11, et d’autres encore ont voulu identifier ce traité avec l’ouvraje de Méliton cité par Anastase le Sinaïte (Hodegos, éd. Gretser, c. xiii, p. 260) jtsp (japxtÔTewç Xpurtoû. Cette assimilation est généralement rejetée (cf. Harnack, Texte und Vntersuchungen, 1. 1, p. 256). C’est ce travail qui a fait reprocher à Méliton l’erreur de l’anthropomorphisme par Origène (voir Théodoret, cap. 20, Quxstionum in Genesim, t. xii, col. 93) et Gennade, De ecclesiast. dogmat., c. IV, t. lviii, col. 982. Ce reproche ne semble toutefois pas absolument justifié. Voir Routh, Reliquise sacrai, t. i, p. 134-145 et Salmon, dans À Dictionary of Christian Biography, t. iii, p. 898. Après avoir énuméré les dix-sept traités que nous venons d’examiner, Eusèbe ajoute que Méliton composa’Eiri Kim xat to irpôç’Avtwvtvov g16).i’810v, et il en reproduit trois extraits. Les deux premiers font allusion aux traitements barbares qu’ont à subir les chrétiens d’Asie Mineure ; dans le troisième Méliton rappelle tout le bien que la philosophie chrétienne a fait à l’empire romain, et il oppose à la conduite de l’empereur actuel les écrits favorables aux chétiens dus à son grand-père Hadrien et à son père Antonin le Pieux. Il y a du même ouvrage un extrait dans la Chronique Pascale. Voir Patr. Gr., t. xcii, col. 632. On admet généralement que l’Apologie de Méliton fut présentée à Marc Aurèle vers 169 et 176. En 1855, Cureton publia dans son Spicilegium syriacum, p. 22-31, un texte syriaque qui porte pour titre : Oratio Melitonis philosophi quse habita est coram Antonino Csesare. Il y ajouta une traduction anglaise, ibid., p. 41-51. Le même texte a été republié par Pitra (Spic. Solesm., t. ii, p. xxvii-liii), avec une traduction latine faite par Renan, puis par Otto (Corpus apolog., t. ix, p. 501-66), avec une traduction iatine. Il y a eu une traduction danoise de Roerdam, Melitos Taie til Keyser Antonin… oversatte fra syrisk, 1856, une version allemande de B. Welte dans Theol. Quarlalschr., t. xliv, 1882, p. 392-410, et une autre de V. Grône, dans la Bibliothek der Kirchenvâter, Kempten, 1853. On ne retrouve pas dans ce texte syriaque les passages de l’apologie grecque cités par Eusèbe. Il n’est donc pas du tout certain que le texte publié par Cureton, soit de Méliton. Celui-ci et Salmon, À Dictionary, t. iii, p. 895, ont cru qu’il s’agissait d’une apologie de Méliton différente de celle mentionnée par Eusèbe. D’après Ewald, dans les Gottingische gelehrte Anzeigen, 1856, p. 658, on pourrait identifier l’apologie syriaque avec l’ouvrage intitulé : IIspl àlrfielai. Mais le texte syriaque semble bien être un original et ne point dériver du grec. Voir Nôldeke, dans les Jahrbùcher fur prot. Théologie, t. xiii, 1887, p. 345, 351. D’après Bardenhewer, Geschichte der altkirchlichen Litteratur, t. i, p. 554, la question de l’attribution du texte de l’apologie à Méliton devrait encore être examinée de plus près. Eusèbe, H. E., iv, 26, t. xx, col. 396, cite également de Méliton un recueil d’extraits des Livres Saints, ’ExXoyat, en six livres. De ce traité en six livres, dédiés à un certain Onésime, Eusèbe, H. E., iv, 26, col. 396, donne le commencement. Ce passage est du plus haut intérêt, il constitue la plus ancienne liste des livres de l’Ancien Testament sortie d’une plume chrétienne. Il faut peut-être rattacher aux’ExÀo-yat quatre scolies portant le nom de Méliton dans les chaînes sur la Genèse. Voir Routh, Reliq. sacræ, t. i, p. 122-124 ; Otto, Corpus, t. ix, p. 416-418. Deux ouvrages de Méliton sont mentionnés par Anastase le Sinaïte ; l’un est intitulée ! ? zb iriOoe, et Anastase (Hodegos, c. xii, Patr. Gr., t. lxxxix, col. 197) en cite l’extrait suivant : 0eô{ iréirovïev Oui » SeljtSç’lopar^hi&oç. Les fragments syriaques publiés par Cureton donnent aussi ces extraits.

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MËLITON — MELLUCH

II a été question plus haut de l’autre traité signalé par Anastase, Ilepl oapxtiasut Kf taxai. Il reste à dire au sujet des travaux de Méliton que les quatre lignes du fragment arménien ex Melitonis epistola ad Eutropium publiées par l’abbé Martin, dans Pitra, Analecta sacra, t. iv, p. 16 et 292, ne sont pas du tout de l’évêque de Sardes. Autant faut-il en dire de la passion latine de Baint Jean, Acta Joannis, qui dans certains manuscrits porte le nom de Mellilus ou de Melilo, de la pièce intitulée De transitu B. Marise virginis et de la Catena in Apocalypsin. Tous ces ouvrages sont fort postérieurs à l’époque de Méliton. La passion de saint Jean date d’au delà du VIe siècle et dérive des actes gnostiques de Cet apôtre ; le récit de la mort de la Sainte Vierge est une compilation récente de sources grecques, et la Catena in Apocalypsin ne remonte pas au delà du xm c ou du xiv » siècle. Nous ne dirons rien de la doctrine de Méliton. On trouvera les éléments de cette étude dans les ouvrages qui ont été cités. Bon nombre des appréciations émises à ce sujet sont arbitraires et conjecturales. L’œuvre de Méliton n’est pas suffisamment connue pour qu’on puisse émettre sur elle un jugement sûr et définitif. Pour la même raison, on n’est pas davantage fondé à formuler contre Méliton certaines accusations qui reposent sur de simples soupçons. Nous n’avons pas non plus donné à Méliton le titre de saint, qui est fort discutable. Cf. Acta sanctorum, aprilis 1. 1, p. 102.

J. VAN DEN GHEÏN.

    1. MELLO##

MELLO, nom qui désigne deux localités ou deux forteresses, l’une près de Sichem, l’autre à Jérusalem, et l’endroit où fut frappé le roi Joas.

1. MELLO (hébreu : Bêf Millô’; Septante : Vaticanus : oTxot Br)6|j.aa).cJv, Jud., IX, 6 ; otxoî B/)6[ia « ), ).wv, Jud., IX, 20 ; Alexandrinus : oïxoç MaXXwv, Jud., ix, 6, 20) serait, d’après la Vulgate, une ville située dans, le voisinage de Sichem. Jud., ix, 6, 20. Il est dit, en effet, ꝟ. 6, que tous les hommes de Sichem et toutes les familles de la ville de Mello se rassemblèrent auprès du chêne de Sichem pour établir Abimélech comme roi. Cette localité n’est plus mentionnée, du reste, qu’au j ! ’. 20, dans lequel Joatham, après avoir échappé au massacre de ses frères, égorgés par Abimélech, appelle sur celui-ci, sur les habitants de Sichem et du bourg de Mello, qui n’ont pas eu honte de l’élire roi, un feu vengeur, ou plutôt les fureurs d’une guerre réciproque qui les dévore tous. Dans les deux passages, l’hébreu a simplement Bel Millô’, « maison de Mello, » en sorte que l’on ne sait s’il s’agit d’un clan ou d’une ville. Comme Mello désigne ailleurs, II Reg., v, 9 ; III Reg., ix, 15, etc. (voir Mello 2), une forteresse ou une défense de la Jérusalem primitive, on a supposé que Bêt Millô’pouvait être lîi citadelle ou un des forts avancés de Sichem (aujourd’hui Naplouse). Quelques-uns même l’identifient avec « la tour de Sichem » dont il est question Jud., ix, 46. V. Guérin, Samarie, t. i, p. 465, pense qu’on pourrait voir l’emplacement de Beth Mello dans un site ruiné, appelé Khirbet ed Dûârah, qui devait autrefois toucher

presque à l’antique Sichem.
A. Legendre.

2. MELLO (hébreu : ham-Millô’, toujours avec l’article ; Septante : r Sxpa, II Reg., v, 9 ; III Reg., xi, 27 ; ty)v MeXù xii tt)v axpav, III Reg., IX, 15 ; t^v Me>w,

III Reg., ix, 24 ; tô âvdcXt)Hu.a, H Par., xxxii, 5 ; omis

I Par., xi, 8), construction qui servait de défense à l’ancienne cité jébuséenne, devenue cité de David et située au sud-est de Jérusalem, sur la colline d’Ophel.

II Reg., v, 9. Voir Jérusalem, Topographie ancienne, t. iii, col. 1350. Quelle était la véritable nature de ce qu’on appelle régulièrement dans l’Écriture « le Mello » ? On ne sait. Si, avec la plupart des auteurs, l’on rapproche le nom de la racine mdlà’, « remplir, être plein, » il signifierait « le plein ». Cf. Gesenius, Thésaurus, t. i,

p. 787, 789. De là on a conclu à une sorte de remparl, vallum, agger, ou de « terre-plein », à une place qui peut ère « remplie » de monde, à une tranchée ou à un fossé « plein » d’eau. Il convient de ne pas trop appuyer sur de semblables étymologies. Nous avons peut-être là un terme archaïque, un vieux mot jébuséen, dont là signification précise nous est inconnue. Les Septante eux-mêmes ont été embarrassés pour le rendre ; ils y ont vu tantôt une « citadelle », âxpa, II Reg., v, 9 ; III Reg., xi, 27, tantôt une « élévation » ou rempart « élevé », âvai^iina, II Par., xxxii, 5, tantôt un nom propre de lieu, MsXii, III Reg., ix, 15, 24. Les Targums le traduisent par millêçâ’, mot par lequel ils représentent ailleurs l’hébreu sôlelâh, qui désignait une terrasse élevée contre les murailles d’une ville assiégée. Les différents passages de l’Écriture où il est cité nous permettent de regarder le Mello comme un ouvrage de défense, qui primitivement protégeait la ville des Jébuséens, et que David, Salomon et Ézéchias restaurèrent ou fortifièrent tour à tour. II Reg., v, 9 ; III Reg., ix, 15, 24 ; xi, 27 ; I Par, , xi, 8 ; II Par., xxxii, 5. Il devait être un des points importants de Jérusalem, à en juger d’après les frais ou les corvées que sa restauration occasionna sous Salomon, III Reg., ix, 15, et le soin que prit Ézéchias de le garantir contre l’attaque des Assyriens. II Par., xxxii, 5. Il semble qu’on peut le placer au nord-ouest de la colline d’Ophel, du côté de la vallée du Tyropœon. Voir la carte de Jérusalem ancienne, t, iii, fig. 249. On croit aussi que c’est la tour ou citadelle, appelée Bê( Millô’, où fut assassiné Joas. IV Reg., xii, 20. — Cf. C. Schick, Die Baugeschichle der Stadt Jérusalem, dans la Zeitschrift des Deutschen Palâstina-Vereins, Leipzig, t. xvii, 1894, p. 6 ; G. St. Clair, Mille, House ofMillo and Silla, dans lePalestine Exploration Fund, Quarterly Statement, Londres, 1891, p. 187.

A. Legendre.

3. MELLO (MAISON DE) (hébreu : Bè{ Millô’, Septante : olxoç MocaXti), endroit où Joas fut frappé par les conspirateurs. IV Reg., xii, 20. On est porté à croire que Mello désigne ici l’ouvrage de défense dont il est question II Reg., v, 9 ; III Reg., ix, 15, 24. Voir Mello 2. L’Écriture ajoute que c< la maison de Mello était à la descente de Sella ». Voir Sella.

    1. MELLOTHI##

MELLOTHI (hébreu : Mallôfi, « ma plénitude ; » Septante : MaXXifl ! ’; Alexandrinus ; MeaXuOi, MeM^ef), lévite, le douzième des quatorze fils d’Héman, chef de chœur du temps de David. Mellolhi fut mis à la tête de la dix-neuvième division des musiciens du sanctuaire, comprenant, avec ses fils et ses frères, douze exécutants.

I Par., xxv, 4, 26.

    1. MELLUCH##

MELLUCH (hébreu ; Mallûk, « conseiller [ ?] » ), nom, dans la Vulgate, de trois Israélites. Ce nom propre hébreu a été écrit ailleurs par saint Jérôme Maloch. Voir Maloch.

1. MELLUCH (Septante : MaXoûx)> îu n des fils de Bani » qui avait épousé une femme étrangère et qui fut obligé de la répudier du temps d’Esdras. I Esd., x, 29.

2. MELLUCH (Septante : MaXov-/), prêtre qui signa l’alliance contractée avec Dieu du temps de Néhémie.

II Esd., x, 4. Il est possible qu’il soit le même prêtre de ce nom qui était revenu avec Zorobabel de la captivité de Babylone. II Esd., xii, 2. Dans les deux passages il est nommé avec Hattus. Voir Hattus 3, t. iii, col. 449. S’il en est ainsi, ces deux prêtres auraient atteint une grande vieillesse. Divers commentateurs croient aussi que Melluch est le Milicho de II Esd., xii, 14, dont le nom aurait été défiguré. ïl est nommé comme chef de la famille sacerdotale qui, sous le pontificat de Joacim, était représentée par Jonathan. Voir Jonathan 11, t. iii, col. 1615.

3. MELLUCH (Septante : Ma>oûx). un des chefs israélites qui signèrent l’alliance théocralique du temps de Néhémie. II £sd., x, 27.

MELO (Gaspard de), exégète catholique espagnol, mort vers 1597. Il appartenait à l’ordre des augustins de la province d’Estramadure. Il était docteur en théologie, et fut professeur d’Écriture Sainte à Valladolid. Ou a de lui : In S. Matthasum, in-f", Vallisoleti, 1584 ; In S. Lucie Evangelium commentaria, in-f c, ibid., 1597 ; In Apocalypsin commentaria, in-f°, ibid., 1589. Voir D. Nicolas Antonio, Bibliotheca hispana nova, in-P>, Madrid, 1783-1788, t. i, p. 259.

A. Regnieb.

    1. MELON##

MELON (hébreu’âbattihîm, Num., xi, 5 ; Septante : TtlTtove ;  ; Vulgate : pepones), fruit rafraîchissant recherché des Hébreux.

I. Description. — On désigne sous ce nom vulgaire les fruits charnus de diverses Cucurbitacées appartenant à des genres très différents. Le melon proprement dit est produit par le Cuctimis Melo de Linné (fig. 245),

245. — Cucumis Melo. Tige, fleurs et fruit.

plante annuelle à tiges rameuses, ordinairement étalées sur le sol, bien qu’elles soient pourvues de vrilles qui pourraient s’attacher à un support. Feuilles pétiolées à limbe palminerve de contour variablesôuventréniformesarrondies, plissées ou ondulées sur les bords, parfois nettement découpées en 3 ou 5 lobes. Tous les organes végétatifs sont rudes, étant recouverts de poils courts simulant de petits aiguillons. Les fleurs sont monoïques, c’est-à-dire mâles et femelles distinctes, mais portées sur le même pred : les premières avec 5 étamines triadelphes, les autres avec un ovaire infère à 3 loges multiovulées, toutes avec une corolle jaune à 5 lobes soudée avec le calice. Le fruit mûr sous une écorce épaisse présente une chair sucrée succulente et parfumée, avec des graines nombreuses dans la cavité centrale qui résulte de la résorption des loges et des placentas. La plante est très variable sous le rapport de la dimension de ses parties, mais surtout le fruit qui réduit parfois au volume d’une noix peut atteindre la grosseur d’une citrouille. Sa forme est ronde, allongée ou aplatie ; sa surface peut être lisse ou relevée de rides imitant des broderies, souvent pourvue de côtes longitudinales séparées par autant de sillons allant du pédoncule jusqu’à l’œil, large cicatrice laissée par la désarticulation des

enveloppes florales. — Le type primitif du melon, originaire de l’Inde, ne s’y retrouve plus, mais il devait peu s’écarter de la variété cultivée comme ornement sous le nom de Melon-de-poche, le Cucumis Dudaim à fruits déprimés de la taille d’un œuf, assez parfumés mais de saveur fade. Malgré son nom vulgaire de Melon d’Egypte, le Cucumis Chate L. a comme le précédent une origine plus orientale. — Les melons d’eau ou pastèques appartiennent au genre Citrullus et peuvent être regardés comme des variétés du Citrullus vulgaris de Schrader (fig. 246), distinct du genre Cucumis par ses

246. — Citrullus vulgaris. Tige, fleurs et fruit.

fleurs mâles solitaires, et ses vrilles rameuses. Le fruit est rond et lisse ; la chair de couleur très variable n’est que légèrement sucrée, mais très aqueuse, ce qui la fait rechercher comme rafraîchissante. — Enfin, certaines Cucurbitacées ont pu être appelées Melon bien que leurs fruits n’aient aucune qualité alimentaire. Ainsi l’Ecballium silvestre de Richard, vulgairement nommé Melon d’attrape, parce que ses baies se détachent élastiquement de leurs pédoncules à la maturité, lançant au loin un suc visqueux mêlé aux graines. Ainsi encore le Melon des prophètes, Cucumis prophetarum L., des déserts de l’Arabie, dont le fruit est tout hérissé, de la grosseur d’une cerise, avec une chair amère. F. Hy.

II. Exégèse. — Les’âbattihîm sont du nombre des fruits ou légumes que les Israélites sortis d’Egypte regrettaient de ne plus trouver au désert comme dans la terre de Gessen. Num., xi, 5. Ils sont placés aussitôt après les qiBu’îm, qui désignent certainement les comcombres (t. ii, col. 890). D’après la traduction des Septante et de la Vulgate (iréirove ; , pepones) les’âbattihîm sont les fruits du Cucumis Melo, les melons ordinaires. C’est du reste le sens du mot arabe de même

racine, >o=o> ba((ikh, biltikh, Ibn El-Beïthar, Traité des

Simples, dans Notices et extraits des manuscrits de la Bibliothèque nationale, in-4°, t. xxii, 1877, p. 239. Selon Maimonide dans son commentaire sur Terumoth, vin, 6, cité par 0. Celsius, Hierobotanicon, in-8°, Amsterdam, 1748, t. ii, p. 357, n.abbattichin s’appelle en arabe baftikh et dans notre pays (Espagne) melon. » Unger, Die Pflanzen des alten Aegyptens, in-8, Vienne, 1859, fig. 25, prétend avoir trouvé la représentation du melon dans une tombe de Saqqarah. Mais Aiph. de Candolle, Origine des plantes cultivées, in-8°, Paris, 1886,

p. 208, ne croit pas prouvée la culture du melon chez les anciens Égyptiens, et ne juge pas certaine l’identification prétendue. Cependant FI. Pétrie a découvert dans les tombes gréco-romaines de Haouara ou Fayoum quelques spécimens du Cucumis Melo. Et sur les tables d’offrandes de la Ve dynastie, il paraît être plusieurs fois représenté (fig. 217). Fr. Wœnig, Die Pflanzen im alten Aegypten, in-8°, Leipzig, 1886, p. 201, 205.

Quoi qu’il en soit du melon ordinaire, celui qui était surtout connu en Egypte était le melon d’eau, Citrullus vulgaris. C’est lui surtout qui paraît devoir être compris sous le terme hébreu’âbattihim connu sous le nom arabe biftihh, d’où vient notre mot pastèque. Dans les tombes égyptiennes ont été fréquemment trouvées des graines et des feuilles du Citrullus vulgaris ; on en voit aussi sur des tables d’offrande delà Ve dynastie (fig. 247).

    1. MELQART##

MELQART, le dieu principal de Tyr. Voir Hercule, t. iii, col. 602.

    1. MELTIAS##

MELTIAS (hébreu : Melatyâh, « Yâh est libérateur ; » Septante : MaXrt’aç), Gabaonite qui vivait du temps de Néhémie. Il travailla, avec Jadon de Méronath (t. iii, col. 1104) et les gens de Gabaon et de [Maspha, à la restauration de la partie septentrionale des murs dé Jérusalem. II Esd., iii, 7. Meltias était probablement le chef des Gabaonites qui travaillaient avec lui, comme Jadon l’était peut-être des hommes de Maspha. Le texte ajoute un membre de phrase qui est ainsi traduit par la Vulgate : « Ils bâtirent… pour le chef qui était dans la contrée au delà du fleuve. » Les Septante traduisent : « …jusqu’au trône du chef d’au delà du fleuve. » Le texte hébreu est fort obscur et diversement interprété par

247. — Melons et pastèques sûr les tables d’offrandes. D’après Lepsius, Denkm&ler, Abtb. ii, Bl. 64, 68, 70.

Le nom égyptien J „ " Lî "B| i i, beduqqa, bouttouka, est la forme antique du copte ftevyKe, fte-rrjçe, betuke, belikhe, apparenté au bitfikh arabe, et paraît être la pastèque. La version copte rend le hItiwv des Septante, Num., xi, 5, par nevenenwn, pelepepôn.. Or ce mot se retrouve dans les Scalx, dit V. Loret, La flore pharaonique, 2e édit., Paris, 1892, p. 73, sous les deux formes nevnenEKiigoTq, pelpepen-n-houf, pastèque jaune, et nevneneitu.Ju.i<.oii, pelpepen-m-milon, pastèque verte. Les pastèques sont excellentes en Egypte et y sont meilleures que les melons.

La Bible ne nous parle pas des melons ou pastèques de Palestine : ils devaient y être cultivés. Aujourd’hui la plaine de Saron et la Sephéla sont riches en ce genre de culture. Des jardins qui environnent Jaffa on exporte annuellement d’énormes quantités de melons, surtout de pastèques. J. Wimmer, Palâstina’s Boden mit seiner Pflanzen (Gôrres-Geseïlschaft, 1902, n), in-8°, Cologne, 1902, p. 58. — Voir 0. Celsius, Hierobotanicon, in-8°, Amsterdam, 1748, t. i, p. 356-382 ; Abd-Allatif, Relation de l’Egypte, trad. Silvestre de Sacy, in-4°, Paris, 1810, p. 34-35, 125-128 ; H. B. Tristram, The Natural Hislory of the Bible, 8e édit., in-8°, Londres, 1889, p. 468.

E. Levesque.

    1. MÉLOTHI##

MÉLOTHI, ville d’Asie Mineure nommée seulement dans la Vulgate. Judith, ii, 13. C’est probablement la ville de Cappadoce appelée Mélitène (MeXinivi, ). Elle était la capitale du district du même nom et située dans la partie la plus orientale de la Cappadoce. Pline, H. N., yi, 3, en attribue la fondation à Sémiramis, reine d’Assyrie, ce qui nous reporte peut-être au règne d’Assurbanipal. Voir t. i, col. 1144. Cette ville était située sur un petit affluent de l’Euphrate, dans une région très salubre. Ses ruines portent aujourd’hui le nom de Malatia. La Vulgate dit que c’était une ville célèbre, opinatissima. Elle le fut surtout pendant les premiers siècles de l’ère chrétienne. Le texte grec ne la nomme pas. Comme elle était peu éloignée de l’Euphrate, Holoferne a pu s’emparer de cette ville dans sa première campagne. Voir Cal met, Commentaire littéral, Judith, 1722, p. 382.

les commentateurs modernes : les uns l’entendent en ce sens que les Gabaonites et les Masphites qui travaillaient en cet endroit dépendaient du gouverneur d’au delà du fleuve, et ils expliquent ainsi comment les gens de Maspha figurent en plusieurs endroits, Il Esd., iii, 7, 15, 19, parmi les constructeurs des murailles ; d’autres pensent que c’est une indication locale ; Meltias et Jadon bâtirent vers l’endroit où était le trône, c’est-à-dire le siège ou bien la résidence du gouverneur d’en deçà du fleuve, quand il se rendait à Jérusalem. La concision et le vague du texte laisse le champ ouvert à toute sorte de conjectures.

MEM, e, et o à la fin des mots, treizième lettre de l’alphabet hébreu. Son nom signifie probablement « eau », comme le mot hébreu o>d, maïm = d>d. Dans l’ancienne écriture phénicienne, cette lettre paraît représenter l’eau courante vv ».La lettre grecque y. d’où

vient la nôtre, qui lui est à peu près semblable, M, iii, n’est que la forme phénicienne retournée. Les anciens Grecs, en se servant de l’écriture dite boustrophédon qui, comme le bœuf, lorsqu’il laboure, allait alternativement de droite à gauche et, en retournant les lettres, de gauche à droite, changèrent finalement la direction de l’écriture et marchèrent toujours de gauche a droite, tandis que les Phéniciens et les Hébreux marchaient invariablement de droite à gauche.

    1. MEMBRES##

MEMBRES (hébreu : yeçurim, baddîm ; chaldéen : haddâm ; Septante : (liXoç, (j.éXr) ; Vulgate : membrum, membra), appendices longs et articulés, disposés par paires, de chaque côté du corps, pour l’exécution des principaux mouvements. Voir Bras, 1. 1, col. 1909 ; Jambe, t. iii, col. 1113 ; Main, col. 580 ; Pied.

1° Au sens propre. — Job, xvii, 7 ; xviii, 13, constate que, par l’effet de sa terrible maladie, ses membres sont devenus comme une ombre, et dévorés par le premierné de la mort : , c’est-à-dire par le mal précurseur de la mort. — La mère des Machabées ne sait comment les membres de son enfant se sont formés dans son sein.

II Mach., vii, 22. — On met en pièces les membres de ceux qu’on veut châtier ou martyriser. Dan., ii, 5 ;

II Mach., i, 16 ; vii, 7. — Antiochus Éphiphane se fracassa les membres en tombant de son char. II Mach., ix, 7. — Saint Jacques, iii, 5, 6, appelle la langue un petit membre puissant par ses effets. — Les versions donnent quelquefois le nom de membres aux morceaux des victimes offertes en sacrifice. Lev, , i, 8, 12 ; ix, 13 ;

III Reg., xviii, 33.

2° Au sens figuré. — Notre-Seigneur dit qae la perte d’un membre est préférable à celle de tout le corps, Matth., v, 29, 30, c’est-à-dire qu’il vaut mieux consentir

contribuant au bien de l’ensemble. Tout bien spirituel doit donc profiter à tous les membres, quel que soit celui d’entre eux qui l’opère. I Cor., xii, 12-30. Chacun des membres, faisant partie d’un corps bien ordonné et solidement assemblé, tire profit de ce qui édifie l’ensemble ; dans l’Église, « nous sommes membres les uns des

autres. » Eph., iv, 16, 25.
H. Lesêtre.
    1. MEMMIUS##

MEMMIUS (grec : Mlfiaioç) Quintus, un des deux légats romains qui écrivirent aux Juifs pour confirmer les privilèges accordés à ce peuple par Lysias. II Mach., xi, ’34. Ce personnage est par ailleurs absolument in , J*wtftj>i’t'/y an.

248. — Memphis et ses environs. D’après la Description de l’Egypte, Paris, 1825, t. V.

un sacrifice, même très pénible, plutôt que de compromettre le salut de son âme. — Il faut que les membres qui ont servi à l’iniquité servent désormais à la gloire de Dieu. Rom., vi, 13, 19 ; vii, 5, 23 ; Jacob., iv, 1. — Les membres du chrétien sont les membres du Christ, 1 Cor., vi, 15 ; Eph., v, 30, et les temples du Saint-Esprit, I Cor., vi, 19, par l’effet de la grâce et de l’union intime de l’âme régénérée avec Dieu. C’est pourquoi il faut mortifier ses membres, Col., iii, 5, c’est-à-dire faire mourir en soi tout ce qui est opposé à la volonté de Dieu. — Saint Paul développe la comparaison entre les membres du corps humain et les fidèles, qui font partie du corps mystique de l’Église. De même qu’il y a plusieurs membres dans un seul corps, chacun avec sa fonction spéciale, ainsi les fidèles sont les membres d’un même corps en Jésus-Christ, chacun avec son aptitude particulière, prophétie, ministère, enseignement, etc. Rom., xii, 4-7. Les fidèles sont le corps du Christ et chacun d’eux est un membre, avec ses fonctions particulières, plus ou moins honorables, mais toutes nécessaires au corps et

connu. Voir Manilius. La gens Memmia était une famille plébéienne qui n’apparaît pas dans l’histoire romaine avant l’an 173 avant J.-C. Depuis lors elle occupe souvent le tribunat de la plèbe. Un Titus Memmius fut légat du Sénat en Achaïe et en Macédoine en 170. Tite Live, xuii, 5. Aucun des membres de la famille qui nous sont connus n’a porté le prénom de Quintus. On peut en voir la liste dans W. Smith, Dictionary of Greek and Roman biography, 1854, t. ii, p. 1026-1027 ; V. De-Vit, Totius Lalinitatis Onomasticon, t. iv, 1887, p. 453. E. Beuruer.

    1. MEMPHIS##

MEMPHIS (hébreu : Môf, Ose., ix, 6 ; Nôf, Is., xix, 13 ; Jer., ii, 16 ; xliv, 1, slvj, 14, 19 ; Ezech., xxx, 13, 16 ; Septante : Mépqptc ; Vulgate : Memphis), ancienne capitale de l’Egypte (fig. 248).

I. Noms. — Memphis était appelée en égyptien

U

©, Men-noftr, « là bonne place, la bonne station, » d’où est dérivé le nom européen. Men-nofir

était, à l’origine, le nom de la pyramide du pharaon Pépi I (Vie dynastie) et du quartier qui se forma dans le voisinage de la pyramide autour de la résidence du même souverain ; de là le déterminatif de la pyramide dans le terme égyptien ; plus tard le nom s’étendit à toute la ville. Memphis est appelée en copte, Axenqi, Aïeule, jULejuiie, ejutenA ; en assyrien, Minpi,

Me-im-pi ; en arabe, <_sl^ «  « . Tous ces noms, comme le nom hébreu et grec, dérivent de l’égyptien niennofir par la chute de r. final. — Dans les inscriptions égyptiennes, Memphis est encore désignée sous plusieurs appellations symboliques dont quelques-unes

249. — Monnaies égyptiennes de l’époque romaine. Les revers reproduits ici portent tous le nom de MEM#IE. — 1, 2, 3. Isis dans différentes attitudes. — Sur le plomb 4, le dieu Phtah. — 5. Le bœuf Apis.

indiquent proprement des quartiers de la ville ; voici les principales, d’après le Dictionnaire géographique

de l’Ancienne Egypte, de Brugsch : y i W, Aneb, ou a nîln ©’Aneb-u, « la ville de la muraille, la ville des murailles. » « C’est un des noms qui ne sont pas rares dans les textes et qui servent à désigner la ville de Memphis, renommée par la grandeur et la solidité de ses fortifications. » — Lt I O ? Aneb-hadj, « le Mur blanc, » nom donné à la ville de Memphis comme métropole du premier nome de la Basse-Egypte. Ce nom signifie proprement le quartier de Memphis contenant la citadelle. Les garnisons, même étrangères, y résidaient. Au temps d’Hérodote, m, 91, les Persans se trouvaient év t# Aeuxû

Tùyzïià èv Méjiç’.. — Ld CI - S i ©> Ha-ka-Ptah, « la demeure de la personne de Ptah, » expression qui désigna d’abord le temple de. Ptah, puis la ville entière et qui, d’après certains auteurs, devint dans la bouche

des Grecs "AtYumo ; , Egypte. — | J rj^ « ij, Ha-Ptah,

ou C*3 8 "1, Pi-Ptah, « la demeure de Phtah, » nom

i - î I 4£^* I

sacré de Memphis. — ^  % ©î Kha-nofer, « la bonne

couronne. » — ^| ; ttt. ©) Khu-to-ui, « l’illumination des deux pays, » c’est-à-dire de la Haute et de la Basse Egypte.

"ni

, Ha-ka-knum~nuteru, * la mai son de culte des architectes divins, j — t£ J ^^. ijl

7^r. © } Ma-kha-to-ui, <s la balance des deux pays, » c’est-à-dire le point de partage de la Haute et de la Basse-Egypte. — is. On trouve dans une des médailles frappées pour le nome de Memphis le mot lui-même de No|ioç, circonstance qui la distingue de celle des autres préfectures. Au pied de la figure qui est au revers, on voit le bœuf Apis, . symbole du culte de cette ville ; et autour on lit Nojj.o{ MevçiTïiç. On remarquera ici le v au lieu du p.. L’ancien nom y est mieux conservé que dans le mot Ms|iç(< adopté par les Grecs, et on l’y retrouve comme dans d’autres noms qui subsistent encore en Egypte, tels que Menouf, Menfalout, etc. » Description de l’Egypte, t. iv, p. 425. Le musée gréco-romain d’Alexandrie contient quatre médailles et trois jetons du nome de Memphis. La riche collection de M. Dattari du Caire’compte de ce même nome treize médailles et onze plombs. Voir Monete imperiali greche. Nunii Alexandrini, Le Caire, 1900, p. 412-426. Nous devons à l’obligeance de M. Dattari de pouvoir reproduire quelques-uns de ces beaux échantillons (fig. 2£9).

II. Emplacement. — Les savants de l’Expédition française eurent de la peine à découvrir la vraie place de Memphis ; Guillaume de Tyr réfutait déjà une erreur souvent reproduite depuis, qui consistait à identifier Memphis avec le Vieux Caire, Babylone d’Egypte : « Nequedent, aucunes genz disent que celé Babyloine fu la très nomée citez d’Egypte qui ot non Memphis, et était chiés de toute la terre entor ; mes ne semble mie que ce soit voirs. Car outre le flun du Nil qui cort delez ceste Babyloine dont je vous parole, loin d’iluec bien à’Xmiles aperent les ruines et les murailles d’une trop anciene cité qui bien démonstrent que ce fu trop grand chose. Li vilain gaagneeur du pais disent que ce fu Memphis. » Guillaume de Tyr, édit. Paulin Paris, 1880, t.’n, p. 273. « Li vilain gaagneeur » avaient raison. L’état actuel des fouilles ne permet pas encore de délimiter d’une façon précise l’enceinte de cette immense ville, mais il est sûr que Memphis s’étendait dans la plaine où l’on trouve aujourd’hui les villages de Bedraschên, de Mit-Rahînet, à une vingtaine de kilomètres du Caire, sur la rive occidentale du Nil. Les divers noms donnés à cette ville, indiquant plutôt des quartiers, des agglomérations autour des temples, laissent supposer que l’enceinte de Memphis était très développée. Voir Description de l’Egypte d’après les Mémoires de Maillet, par l’abbé Le Mascrier, Paris, 1735, p. 261 ; Brugsch’s Egypt under the Pharaohs, 1881, t. î,

p. 50. Memphis était dans le nome Lj I, Aneb-hadj. — An Atlas ofancient Egypt, Exploration Fund. Dans les champs où fut Memphis, on exhume parfois des colosses (fig. 250), qui attestent son ancienne splendeur, mais de ses monuments, il ne reste rien, si ce n’est les tombeaux voisins de Saqqarah où ont été ensevelis ses anciens habitants, et sur son site croissent aujourd’hui de nombreux palmiers (fig. 251), « vert linceul étendu sur les décombres limoneux qui furent Memphis, » E.-M. de Vogué, Le maître de la mer, 1903, p. 297. Seuls, les tombeaux des vieux Égyptiens, qui les appelaient « des demeures éternelles », subsistent encore auprès, « là (où) commence avec le désert l’empire de la mort… Dans la jaune nudité de l’horizon, les dunes sépulcrales, perforées d’excavations, moutonnent indéfiniment autour des pyramides à degrés : ces pyramides de Saqqarah, aïeules de leurs énormes plagiaires de Gizé… Le peuple de Memphis venait reposer sur ce plateau, sous la garde de ses princes. » Ibid., p. 298.

III. Histoire. — Mena, originaire de Thini, passe pour le fondateur de Memphis. On connaît le récit d’Hérodote, il, 99, et celuf de Diodore de Sicile, i, 50, 51, 67. Linant pacha aurait retrouvé la digue élevée par Mena pour détourner le cours du Nil ; ce serait Ja

grande digue de Cocheiche utilisée encore de nos jours. Memphis a servi de capitale à plusieurs dynasties de souverains (III « , IV », VI « , Vils VIII », XXIV « ). C’est, après Thèbes, dit M. Brugsch, la ville « sur laquelle les monuments épigraphiques et les papyrus ont le plus à nous apprendre ». Malgré ce langage des pierres et des papyrus, l’histoire de Memphis reste enveloppée de ténèbres ; espérons que les fouilles pratiquées sur ses ruines, que les richesses trouvées chaque année plus nombreuses dans sa nécropole, apporteront quelque lumière ; le moment d’écrire son histoire n’est pas encore venu. On n’a que de vagues renseignements sur sa ruine si com beaux. » N’y a-t-il pas là une allusion évidente à la vaste nécropole de Memphis, aussi et peut-être plus admirable encore que la ville elle-même ? Jérémie, ii, 16, déclare aux Juifs qui comptent sur le secours de l’Egypte, que les enfants de Memphis leur briseront la tête, et xliv, 1, que la vengeance divine poursuivra ceux d’entre eux qui se réfugieront à Memphis. — 2° Lesautrestextesannoncent la ruine et la destruction de Memphis : « Les princes de Memphis se trompent, les chefs des tribus égarent l’Egypte, » dit Isaïe, xix, 13 (d’après l’hébreu), dans son oracle contre l’Egypte. Jérémie, Xlvi, 14, annonce aux habitants de Memphis l’invasion de l’armée de

250. — Statue colossale de Ramsès II, découverte dans lea champs do Memphis. D’après uns photographie.

plète ; les désastres qu’éprouva Memphis de la part de divers conquérants ne semblent pas tout expliquer. La revue Le Nil a émis sur sa destruction une opinion singulière, l’idée d’un cataclysme : « De terribles inondations auraient enseveli sous d’énormes masses de limon les grandes villes de Thèbes et de Memphis. » De La Motte, Le Nil, 1880, p. 19 et 25 (note de M. Revillout). — Voir sur les ruines de Memphis. Abd-Allatif, Relation de l’Egypte, trad. S. de Sacy, in-4°, Paris, 1810, p. 184-194 ; Mgypti historiée compendium, Clarendon Press, 1789, p. 119 et append. sans pagination. Sainte Iraîde était de Memphis. Koti Iep<x’80{ ex Aoïetoç Mé|xçs » ç. Synax. Ecoles, Const., Acta 11. Propyl., nov., 1902, p. 112.

IV. Memphis dans l’Écriture. — Les textes bibliques sur Memphis peuvent être répartis en deux classes : les uns ne citent cette ville qu’incidemment, en parlant des Hébreux en Egypte ; îes autres contiennent les prophéties contre la célèbre métropole. — 1° Parmi les premiers, le plus remarquable est le passage d’Osée, rx, 6 : « (Les Israélites) sont partis à cause de la dévastation ; l’Egypte les recueillera, Memphis leur donnera des tom Nabuchodonpsor en Egypte, et, ꝟ. 19, que leur ville deviendra un désert. Ezéchiel leur annonce aussi la ruine : « Ainsi parla Adonaï Jéhovah : je détruirai les idoles et j’enlèverai de Memphis ces vains (simulacres ) ; il n’y aura plus de princes de la terre d’Egypte. » Ezech., xxx, 13 (d’après l’hébreu).

L’histoire de Memphis montre suffisamment avec quelle effrayante exactitude se sont accomplies toutes ces malédictions. C’est ce qu’un des plus grands égyptologues du xix « siècle, Mariette, a fort bien constaté dans son Voyage en Haute-Egypte, 1878, t. i, p. 31 : « Il n’y a pas de ville dont les destinées aient été aussi lamentables que celle de Memphis. Elle était autrefois la ville par excellence, l’orgueil de l’Egypte ; elle étonnait le monde par le nombre et la magnificence de ses édifices. Elle n’est plus même aujourd’hui une ruine. Ainsi s’est vérifiée la parole du prophète : « fille habitante » de l’Egypte, préparez ce qui doit vous servir dans votre » captivité, parce que Memphis sera réduite en un désert ; » elle sera abandonnée et elle deviendra inhabitable. » Jer., xlvi, 19. »

V. Bibliographie. — Description de VÉgypte, expéV

dit ion de l’armée française, textes, t. v ; planches, t. v ; Brugsch, Dictionnaire géographique de l’Egypte, Leipzig, 1879-1880 ; vicomte J. de Rongé, Géographie ancienne de la Basse-Egypte, 1891, p. 1-7 ; Pierre Diacre, De loris sanclis, édit. de Naples, 1870, p. 30-31 ; Annales du musée égyptien (parurent pour la première fois en 1899), Le Caire, t. i, p. 149, 230, 280 ; t. ii, p. 97, 240, 244, 285 ; t. iii, p. 1, 169, 182 ; t. iv, p. 76 ; Mission archéol. institut français, t. ii, fasc. ii, par M. Maspero, p. 133 ; V. De-Vit, Totius latinitalis Onomasticon, t. IV, 1887, p. 458, cite tous les passages des auteurs anciens, grecs et latins, où Memphis est nommée ; Abd-AUatif,

    1. MENA’AN’IM##

MENA’AN’IM, de la racine fa, nûa’, « agiter, secouer, » II Reg., vi, 5, désigne un instrument de percussion que l’on faisait résonner en l’agitant. C’était vraisemblablement le sistre. Voir Sistre.

J. Parisot.

    1. MÉNANDRE##

MÉNANDRE (grec : Mévavè’poç), poète comique grec, Dé à Athènes en 342 avant J.-C, mort en 291, noyé, dit-on, en se baignant dans le port du Pirée. Il composa plus de cent comédies dont il ne reste que quelques courts fragments, publiés entre autres par Dûbner dans la collection des classiques grecs de Didot. Saint Paul, I Cor., xv, 33, cite un vers de Ménandre tiré de la co 251. — Ruines du temple de Phtah, à Memphig. D’après une photographie do M. Alb. Eid (avril 1904).

Relation de l’Egypte, traduction Silvestre de Sacy, Paris, 1810, p. 184-194 ; Vansleb, Nouvelle relation en forme de journal d’un voyage fait en Egypte en 1672 et 1673, Paris, 1677 ; Carte de la nécropole de Memphis, Le Caire, 1897, p. 10 ; Pierre Martyr d’Anghera, Legatio babylonica, 1577, p. 434 ; J. de Morgan, Fouilles à Dashour, 2 in4°, 1895-1903. "Voir aussi EGYPTE (HIS-TOIRE), t. ii, col. 1609. F. Larrivaz.

    1. MEMPHITIQUE##

MEMPHITIQUE (VERSION) de la Bible. Voir Coptes (Versions), t. ii, col. 933.

    1. MENIRA##

MENIRA, HiDtp, mot chaldaïque qui signifie « parole, verbe ». Il est employé dans les Targums d’Onkelos et de Jonathan Ben Uziel, et dans les livres juifs postérieurs pour désigner une sorte de médiateur entre Dieu et l’homme, >n >od>d, mêmrd de-Yehôvdh. Voir Logos, col. 327-328. Cf. J. Buxtorf, Lexicon chaldaicum, 1640, col. 125 ; A. Maier, Commentai- ûber das Evangelien des Johannes, 1843, 1. 1, p.-119-124 ; E. Schurer, Geschichte dos jûdischen Volkes, 3= édit., t. iii, 1898, p. 557.

médie de Thaïs (Menandri Fragmenta, à la suite de l’édition d’Aristophane, édit. Didot, 1862, p. 21) : *6stpou<rtv $î8ï) xrô° 6’aji.ik.lat xaxat. Vulgate : Corrumpunt mores bonos colloquia malà. « Les mauvaises compagnies (et non « les conversations », comme a traduit la Vulgate) corrompent les bonnes mœurs. » Saint Jérômeavait noté cet emprunt de l’Apôtre. Ad Corint/iios, dit-il, comm. in. TH., i, 12, t. xxvi, col. 572, qui et ipsi Attica facundia expolili, et propter locorum viciniam sapore conditi sunt, de Menandri comeedia versum sumpsit iambicum : Corrumpunt… » Il n’est pas certain, d’ailleurs, que Saint Paul eût tiré directement sa citation de Ménandre. La sentence qu’il rapporte était probablement devenue proverbiale et c’est par là qu’il avait pu la connaître. L’historien Socrate, H. E., iii, 16, t. lxvii, col. 424, . dit à tort que l’Apôtre a emprunté ce vers à Euripide.

— Voir W. Smith, Dictionary of Greek and Roman Bio— graphy, t. ii, 1854, p. 1031-1034 ; Ch. Benoit, Essai surla comédiede Ménandre, in-8°, Paris, 1854 ; Ch. Ditandy, Études sur la comédie de Ménandre, in-8, Paris, 1853 ; . G. Guizot, Ménandre, in-8°, Paris, 1855.

961

MENASSE BEN ISRAËL — MENDIANT

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    1. MENASSE BEN ISRAËL##

MENASSE BEN ISRAËL, un des plus célèbres théologiens juifs, né à Lisbonne en 1604, mort à Middelbourg en 1657. Son père, appelé Joseph, était un riche marchand qui alla se fixer à Amsterdam Jorsque son fils était encore jeune. Menasse eut pour maître dans cette ville un rabbin renommé, Isaac Uzziel, sous la direction duquel il fit de tels progrès qu’on le choisit pour chef de la synagogue, à la mort d’Uzziel, quoiqu’il n’eût encore que 18 ans. En 1626, il fonda l’imprimerie hébraïque d’Amsterdam, et en 1628 il y imprima et publia son nai > ; s, ou Figures de Rabba, contenant l’indication de tous les passages du Pentateuque cités dans le midrasch Rabba (et les cinq Megilloth, seconde partie parue en 1678). Sa réputation se répandit dans toute l’Europe lorsque, en 1632, il fit paraître en espagnol le premier volume de son Conciliador 6 de la conveniencia de los lugares de las Escripturas, 4 in-4°, Amsterdam, 1632-1651. Le but de cet ouvrage est de concilier entre eux 472 passages du Pentateuque qui semblent se contredire. Il y cite 210 auteurs juifs et 54 auteurs grecs, latins, espagnols ou portugais, sacrés ou profanes. Vossius en a traduit le premier volume en latin et Linds les quatre en anglais, 2 in-4°, Londres, 1842. La renommée qu’il s’était acquise lui fit entreprendre en 1655, un voyage en Angleterre pour obtenir que les Juifs bannis de ce pays depuis 1290 pussent y revenir. Sa requête fut refusée, mais Cromwell lui accorda une pension. Il mourut à Middelbourg en retournant en Hollande. Plusieurs de ses écrits sont restés en manuscrit. Les plus importants de ceux qui ont été imprimés, outre les deux déjà mentionnés, sont De creatione problemata xxx, in-8°, Amsterdam, 1635 ; De la Résurrection de los muertos, in-12, Amsterdam, 1636 (mis à l’Index le 3 août 1656) ; o » nn Tra, De termina vitse (en latin), in-8°, Amsterdam, 1639 (plusieurs éditions ; traduit en anglais par Thomas Pococke, Londres, 1699) ; De la fragilidad humana (sur le péché originel et la chute de l’homme), in-4°, Amsterdam, 1642 ; mp> p*i, Piedra gloriosa o de la statua de Nebuchadnezar (explication en espagnol du second chapitre de Daniel), in-12, Amsterdam, 1655 (avec quatre gravures de Rembrandt faites exprès)’; Esperança de Israël, in-8°, Amsterdam, 1650 (traduit en anglais, in-4°, Londres, 1651 ; en hébreu, Amsterdam, 1698 ; en hébreuallemand, in-8°, Amsterdam, 1691 ; en hollandais, in-12, Amsterdam, 1666) ; n » n hdwj, Le souffle de vie (en hébreu), in-4°, Amsterdam, 1652 ; nouvelle édit., Leipzig, 1862 (sur l’immortalité de l’âme, avec l’exposition de tous les textes scripturaires qui, d’après les Rabbins, se rapportent à l’immortalité de l’âme et à la résurrection ; le premier chapitre a étéi traduit en allemand par Springer, in-8°, Breslau, 1714). Une des publications les plus utiles de Menasse fut celle du texte hébreu de diverses parties de l’Ancien Testament, avec ou sans notes, du Pentateuque hébreu avec une traduction espagnole et des notes, de la Bible hébraïque complète, 2 in4°, Amsterdam (trois éditions, 1631, 1635, 1639). —Voir Kayserling, dans le Jahrbuch fur die Geschichte der Juden, Leipzig, 1861, t. ii, p. 85 sq. ; Carmoly, Mariasses ben Israël, une biographie, dans la Revue orientale, Bruxelles, 1842, p. 299-308 ; J. Fùrst, Bibliotheca judaica, in-8°, Leipzig, 1883, p. 354-358.

    1. MENATSEAKH##

MENATSEAKH (hébreu : menasêah, « chef des chantres » ). Ce mot, participe, de la forme pihel, du verbe hébreu nisêah, se lit dans le titre de cinquante-cinq Psaumes et dans Habacuc, iii, 19, précédé de la préposition S, lé, « à » (ainsi que II Par., ii, 1, 17 [Vulgate, 2, 18], xxxi, v, 13, sans préposition). Dans II Par., Il, 2, 18, la Vulgate a traduit avec raison par prsspositi, « chefs » (Septante, ꝟ. 2, iitiavœtai, « chefs ; » ꝟ. 18, èpfoSiwxTai, « chefs des travaux » ). Les divers passages du texte hébreu où est employé le pihel, nisêah, montrent


que ce verbe a toujours le sens de « présider ». I Par., xxiii, 4 ; xv, 21 ; II Par., xxxiv, 12 ; I Esd., iii, 8, 9. Voir Chef des chantres, t. ii, col. 645. La Vulgate, dans le titre des Psaumes, a traduit lamnaséah par in finem, d’après les Septante qui lisaient sans doute nwb, lanêsah.

    1. MENCEL Jérôme##

MENCEL Jérôme, théologien luthérien, né en Silésie, ministre et superintendant d’Eisleben, mort en 1590, a composé Psalterium Davidis, oder Anslegung aller Psalmen Davids, richtig abgetheilet und nutzlich erklàret, in-f°, Leipzig, 1594. — Voir Walch, Biblioth. theolog., t. iv, p. 494. B. Heubtebize.

    1. MENDELSSOHN Moïse##

MENDELSSOHN Moïse, philosophe et commentateur juif allemand, né à Dessau, le 6 septembre 1729 ; mort à Berlin le 4 janvier 1786. Son père, appelé aussi Moïse, était maître d’école et copiste de manuscrits de la Bible hébraïque. À l’âge de seize ans, il adopta le nom de Mendelssohn comme nom de famille. À quatorze ans, il avait suivi à Berlin sbn maître, le rabbin Frânkel, qui l’avait initié aux études hébraïques et talmudiques, et il y vécut dans une extrême pauvreté jusqu’à 21 ans où un riche fabricant de soies de cette ville, Bernhard, le prit dans sa maison, d’abord comme précepteur, puis en 1754 comme comptable. Bernhard étant mort, sa veuve prit pour associé Mendelssohn. Il employa à l’étude et bientôt à la composition tout le temps que lui laissaient libre les affaires et il ne tarda pas à acquérir une grande célébrité, s Depuis Moïse (le législateur), disent les Juifs, jusqu’à Moïse (Maimonide) et à Moïse (Mendelssohn), il ne s’est élevé personne comme Moïse. » Il fut l’ami de Lessing qui a fait de lui le héros de son drame de Nathan le sage, dans lequel sont exposées les idées du philosophe juif sur la religion. Son idéal n’était pas l’unité de foi, mais la liberté de penser. Tout en observant minutieusement les prescriptions mosaïques, il prêchait l’indifférence en matière religieuse. La meilleure édition de ses œuvres complètes est celle qui a été publiée par son petit-fils, Benjamin Mendelssohn, en 1843-’! 844. Ses écrits les plus importants sont ses écrits philosophiques ; nous n’avons à mentionner, ici, que ses travaux exégétiques : un Commentaire en hébreu sur l’Ecclésiaste, Berlin, 1769 et 1781 (traduit en allemand par Rabe, Amspach, 1771 ; en anglais, par Preston, Londres, 1845) ; mb^n ma>ru nsD, Séférne(ibôf has-Salôm, « Le livre des sentiers de la paix, » traduction allemande du Pentateuque par Mendelssohn, avec un commentaire grammatical et exégétique en hébreu par Salomon Dubno (sur la Genèse), Aaron Jaroslaw, H. Wessely (sur le Lévitique), Herz Homberg (sur le Deutéronome), Berlin, 1780-1783. L’introduction en hébreu par Mendelssohn fut publiée séparément, avant l’achèvement du commentaire, en décembre 1782 ; on la trouve traduite en allemand, dans les Œuvres complètes, t. vii, p. 18 et suiv. Ce Pentateuque eut un grand succès parmi les Juifs allemands. Une traduction allemande des Psaumes et du Cantique des Cantiques, qui fut publiée, in-8°, 1783-1788, est regardée comme classique par ses coreligionnaires. — Voir G. H. de Mirabeau, Mosès Mendelssohn, Londres, 1787 ; M. Kayserling, Moses Mendelssohn, sein Leben und seine Werhe, Leipzig, 1862, 2e édit., 1887 ; Sainuels, Memoirs of Moses Mendelssohn, 2e édit., Londres, 1827 ; Adler, Versohnung von Gott, Religion und Menschenthum durch M. Mendelssohn, Berlin, 1871 ; Axenfeld, Moses Mendelssohn in Verhàltniss zum Christenthum, Erlangen, 1865 ; J. Fûrst, Bibliotheca judaica, p. 359-367.

M ENDIANT (Vulgate, : mendiais), celui qui demande l’aumône. En hébreu, le mendiant n’est pas distingué par un nom particulier du pauvre en général et ce n’est que le contexte qui détermine exactement les passages où il s’agit de la mendicité proprement dite.

IV. - 31

963

MENDIANT — MÉNÉLAS

Il en est de même dans la Bible grecque.’Voici les endroits où l’Écriture fait allusion aux mendiants :

1° Ancien Testament. — 1. Le Psalmiste, dans ses imprécations contre l’ennemi qui l’a trahi, Ps. cvin (cix), 40, s’écrie : « Que ses enfants soient errants et mendiants (littéralement : qu’ils demandent, ii’èlû ; Septante : êîrair/iOTta-fcxrav ; Vulgate : mendicent ; et qu’ils cherchent, darSû, du pain) loin de leurs maisons en ruines ! » — La Vulgate parle aussi du « mendiant », mendicus, au ꝟ. 17 (hébreu, 16) du même Psaume, mais dans le texte original, il est question du « pauvre », ’ebyôn, sans allusion expresse à la mendicité. — Il en est de même au Ps. xxxix (xl), 18, où l’hébreu a l âm, « misérable » (Septante : 5ttwy_6 ; ) et le latin : mendicus. — 2. Une sentence des Proverbes, xx, 4, qui fait penser à la fable de la cigale et la fourmi, est entendue aussi de la mendicité par la Vulgate et par de nombreux commentateurs. Voir Gesenius, Thésaurus, p. 1348. (Les Septante ne traduisent pas l’hébreu d’après le texte massorétique : ,

A cause du froid, le paresseux ne laboure point ;

Il mendiera (donc) pendant l’été, mais il ne lui sera rien donné.

Hébreu : yeSû’al, « demander, » comme Ps. cix, 10 ; Vulgate : mendicabit.) Plusieurs traducteurs modernes attribuent néanmoins à ces paroles du Sage une autre signification qui n’est pas sans vraisemblance ; ils rendent ainsi le second vers : « À la moisson, il cherchera (il voudra récolter quelque chose), mais il n’y aura rien. » — 3. Dans la lettre de Jérémie, que noiis n’avons qu’en grec, le prophète reproche aux prêtres idolàtresde ne riendonneraux mendiants (Septante :-kiuijôç, ; Vulgate : mendicans), non plus qu’à l’infirme, de la portion des victimes des sacrifices qui leur est attribuée. — 4. Un épisode raconté IV Reg., vii, 3-10, nous montre quatre lépreux qui se tenaient à la porte de Samarie pendant le siège de la ville par les Syriens, du temps du roi d’Israël Joram. Il devaient être là pour demander l’aumône. — 5. La Vulgate, Deut., xv, 4, porte : « Il n’y aura aucun indigent ni aucun mendiant parmi vous. » La mention du mendiant est une addition de notre version latine et elle est en contradiction avec la suite du texte. Quelques versets plus loin, ꝟ. 11, le texte dit expressément : « Il ne manquera pas de pauvres dans la terre de ton habitation. » Dans le ꝟ. 4, il s’agit de l’année sabbatique et Dieu défend aux Israélites d’exiger cette année-là de leurs frères des paiements qui les réduiraient à l’indigence. Le passage ꝟ. 2-4 doit se traduire ainsi : « Tu pourras exiger (ta dette) de l’étranger ; mais pour ce qui t’appartient chez ton frère, ta main le lui remettra, afin qu’il n’y ait pas de pauvre (’ébyôn) chez toi. »

2° Dans le Nouveau Testament. —1. Nous y voyons que les mendiants et les pauvres n’étaient pas rares en Palestine et qu’on en rencontrait un peu partout dans le pays, comme encore de nos jours. — L’aveugle Bartimée mendiait (npoçaiTôv, mendicans) à Jéricho sur la voie publique. Marc., x, 46 ; Luc, xviii, 35. L’aveugle-né, guéri par Notre-Seigneur à Jérusalem se tenait à la porte du Temple pour mendier (npoçaixâiv, mendicus, mendicabat). Joa., ix, 8. — Jésus, dans la parabole du mauvais riche, met en scène un mendiant (irtaxôç, mendicus), Lazare, qui était couvert d’ulcères. Luc, xvi, 20, 22. — Les apôtres Pierre et Jean, après la Pentecôte, guérirent un boiteux de-naissance, incapable de marcher, qu’on portait tous les jours à la porte du Temple appelée la Belle (t. i, col. 1568), pour y demander l’aumône. Act., iii, 1-8.

2, C’étaient donc les infirmes et les estropiés qui mendiaient en Palestine, en se plaçant aux endroits, les plus fréquentés. L’Écriture recommandait avec tant d’instance la charité envers les pauvres qu’ils ne devaient pas manquer d’être secourus par les Juifs fidèles. Mais tous les enfants d’Abraham ne remplissaient pas leur devoir

à ce sujet, comme le montre la parabole du mauvais riche. Luc, xvi, 21. « (Lazare, ) dit la Vulgate, désirait ramasser les miettes qui tombaient de la table du riche, mais personne. ne lui en donnait. » Ce dernier membre de phrase ne se lit pas dans le texte grec ; toutefois, en retranchant ces mots de la parabole, il reste que le mauvais riche était insensible aux misères de Lazare. — Les Apôtres ne négligèrent pas d’exciter les chrétiens à venir en aide aux indigents. Au commencement même de l’Église, les néophytes mirent tout en commun, et de la sorte, il n’y eut pas d’indigent (êvSêifjç, egens) parmi eux, Act., iv, 34 ; mais dès que la communauté naissante se fut augmentée, elle eut des pauvres dans son sein et les Apôtres prirent alors des mesures pour les secourir. Act., vi, 1^5. Saint Paul fit faire des collectes parmi les convertis pour secourir les frères qui étaient dans le besoin : le prêtre de la loi nouvelle devenait ainsi mendiant pour soulager les pauvres de Jésus-Christ. Gal., ii, 10 ; Act., xi, 29-30 ; I Cor., xvi, 1-4 ; II Cor., viii, 1-6 ; ix, 1-2 ; Rom., xv, 2527, 31. Vpir Aumône, t. i, col. 1244 ; Pauvre.

F. Vigouroux.

    1. MENDOÇ À##

MENDOÇ À (François de), né à Lisbonne en 1573, mort à Lyon le 3 juin 1626. Entré au noviciat de Coïmbre le 28 juin 1587, il enseigna la rhétorique et la philosophie à Lisbonne et à Coïmbre, puis l’Écriture Sainte à Évora. De ses leçons d’Écriture Sainte, il n’a été imprimé que trois volumes, plusieurs fois réédités depuis. Cet ouvrage est intitulé Commentariorum… in liegum libros tomi tres ; e tome i ar parut à Coïmbre en 1621, in-f° ; le tome n à Lisbonne, 1624, in-f° ; le tome m ne fut mis au jour qu’en 1631, après la mort de l’auteur, à Lyon, in-f°. P. Bliard.

    1. MÉNÉLAS##

MÉNÉLAS (grec : MevéXoco ; ), pontife usurpateur qui vivait du temps d’Antiochus IV Épiphane (175-164 avant J.-C). Il était frère de Simon le Benjamite, II Mach., iv, 23 ; cf. iii, 4, et n’était pas, par conséquent, de race sacerdotale. Il n’en aspira pas moins au souverain pontificat et l’acheta à prix d’argent du roi Antiochus. Envoyé auprès de ce prince, pour lui porter le tribut du grand-prêtre Jason (voir JaSON 4, t. iii, col. 1141), il trahit ce pontife et obtint sa charge en offrant au roi de Syrie trois cents talents d’argent de plus (vers 170 avant J.-C). Jason n’osa point attendre son retour et s’enfuit en Ammonitide. Cependant Ménélas avait promis plus qu’il ne pouvait tenir ; il fut hors d’état de payer la somme qu’il s’était engagé à verser, et que lui réclamait Sostrate, le gouverneur syrien de Jérusalem. L’un et l’autre furent mandés en Syrie. Ménélas chargea son frère Lysimaque de tenir sa place en Judée et il partit pour Antioche, emportant des vases sacrés qu’il avait dérobés au Temple. Antiochus Épiphane était alors absent de sa capitale, et faisait la guerre en Cilicie. Ménélas en profita pour corrompre Andronique que le roi avait institué gouverneur de la ville, et obtint de cette âme vénale que le prédécesseur de Jason, Onias III, le grandprêtre légitime, injustement déposé, fût traîtreusement mis à mort. Voir Andronique 1, 1. 1, col. 565, et Onias III. Ce crime excita une telle horreur, qu’Andronique fut condamné par le roi à son retour et exécuté (170 avant J.-C). Pendant ce temps, Lysimaque commettait à Jérusalem de tels excès, qu’il fut tué par le peuple révolté. Voir Lysimaque 2, col. 460 ; II Mach., iv, 23-42. Ménélas faillit être à ce moment victime de ses crimes et de ceux de son frère. Trois députés furent envoyés auprès du roi de Syrie, qui se trouvait alors à Tyr, pour exposer les griefs du peuple. L’indigne grand-prêtre ne pouvait se justifier : il eut recours à sa ressource ordinaire, la corruption : il gagna à prix d’argent un courtisan influent, Ptolémée, fils de Dorymène, et il réussit ainsi à échapper au châtiment qu’il avait mérité et à faire mettre à mort ses accusateurs. II Mach., iv, 43-50. Quelque temps après, il rentrait triomphant à Jérusalem où il conti965

MÉNÉLAS — MÉNEPHTAH I er

966

nuait ses cruautés et ses pillages. Sur ces entrefaites, Antiochus IV entreprit une seconde campagne en Egypte (170 avant J.-C.) et le bruit de sa mort Se répandit faussement en Judée. Jason, qui ne pardonnait pas à Ménélas de l’avoir supplanté, profita de cette circonstance pour l’attaquer brusquement à Jérusalem et l’obligea à se réfugier dans la citadelle. Mais Jason ne sut pas se concilier l’esprit des habitants et Antiochus arriva bientôt après pour le punir de sa révolte. Sa vengeance fut terrible : en trois jours, il extermina 80000 hommes et en réduisit 40 000 en esclavage ; et, ce qui mit le comble à l’horreur des Juifs, à l’instigation même de Ménélas, « ce traître aux lois et à la patrie, » il profana le Temple et le pilla. II Mach., v, 1-7, 11-20 ; I Mach., i, 21-25.

Ménélas devint ainsi plus puissant que jamais. D’après la Vulgate, "le roi de Syrie lui aurait donné, à lui et à Andronique, le gouvernement de Garizim, mais cette traduction paraît peu exacte, et le texte grec, quoique obscur, ne dit point cela, mais porte : « (Antiochus) laissa dans Jérusalem, Philippe… Andronique à Garizim, et, outre ces deux, Ménélas, qui, plus méchant que les autres, s’élevait insolemment au-dessus de ses concitoyens. » II Mach., v, 23. Le texte sacré ne parle plus de lui avant l’avènement d’Antiochus Eupator. Les victoires de Judas Machabée et la reprise de la ville de Jérusalem par les Juifs fidèles eurent pour conséquence nécessaire l’éloignement de Ménélas. On ignore qui remplit à cette époque les fonctions du souverain pontificat. Lorsque Antiochus V Eupator succéda à son père sur le trône de Syrie (164 avant J.-C), Ménélas jugea l’occasion propice pour recommencer ses intrigues. Une lettre du roi aux Juifs, II Mach., xi, 29, nous apprend qu’un Ménélas, qui était probablement te grand-prêtre usurpateur, lui avait demandé que les Juifs captifs en Syrie fussent autorisés à rentrer dans leur patrie (d’après la Vulgate, ce qu’ils désiraient, c’était de pouvoir fréquenter librement les Juifs qui habitaient en dehors de la Palestine). Antiochus avait accueilli favorablement la requête et envoyé Ménélas en Judée. II Mach., xi, 32. Mais ce succès devait être le dernier de cet ambitieux. Il ne pouvait se consoler d’avoir perdu le souverain pontificat et il voulait le recouvrer à tout prix. Quand Eupator et Lysias son tuteur rassemblèrent une forte armée contre les Juifs, il jugea l’occasion favorabte et alla prendre place dans les rangs des ennemis de sa patrie. C’était là que l’attendait la justice divine pour lui faire expier ses crimes. Lysias, loin de l’accueillir avec faveur, l’accusa d’être la cause de tous les maux et il fut condamné à périr dans une tour remplie de cendres. II Mach., xiii, 1-7. Le texte grec dit que cet événement eut lieu à Bérée, II Mach., xiii, 4, ville située entre Hiérapolis et Antioche, aujourd’hui Alep, Voir Bérée 2, t. i, col. 1606-1607. Le texte sacré semble indiquer que cette exécution eut lieu au commencement de la campagne d’Antiochus V. D’après Jpsèphe, Ant. jud.. XII, IX, 7, elle fut postérieure à la conclusion de la paix. Il est possible que l’auteur des Machabées ait raconté le supplice du traître par anticipation, car son châtiment s’explique plus aisément après qu’avant la défaite de l’armée syrienne. Josèphe lui donne le nom juif d’Onias, avec le nom grec de Ménélas. Ant. jud., XII, v, 1. Cf. Bell, jud., i, i, 1>.

F. VlGOUROUX.

MÉNEPHTAH

a.

(M

pharaon de la XIXe dynastie égyp tienne, jils et successeur de Ramsès II, et selon toute probabilité le pharaon de l’Exode (fig. 252). Son nom signifie « aimé de Phtah s.

I. Histoire. — Baïenra-Meriamon, Menephtah-hotephima, d’après ses deux cartouches, fut d’abord associé au pouvoir sur la fin du long règne de Ramsès II, puis il régna seul pendant quelques années, et enfin il associa

à son trône son fils Séti II ; on assigne généralement à son règne une durée de dix-huit années. Son tombeau se trouve à Thèbes, dans la vallée de Biban el-Molouk. Il y a eu de vives controverses entre égyptologues snr l’importance des œuvres de ce roi. Il ne semble pas qu’on se trompe beaucoup en concluant avec M. Chabas que « les pharaons qui nous ont laissé des monuments plus importants et plus multipliés que Ménephtah sont en bien petit nombre ». Son activité s’exerça surtout dans la Basse-Egypte ; à Tanis il fit construire de grands monuments, et souvent il unit ses cartouches à ceux de son père Ramsès II sur des sphinx et sur des statues colos 252. — Ménephtah. Musée du Caire.

D’après une photographie.

sales. E. de Rougé, Notice des monuments du Musée égyptien du Louvre, 1883, p. 5, 23.

L’Écriture ne nomme point Ce pharaon, mais il y a lieu. de croire que son père Ramsès II fut l’oppresseur des Hébreux (voir Ramsès II) et par conséquent que c’est Ménephtah qui régnait sur l’Egypte lorsque Moïse reçut de Dieu la mission de délivrer son peuple de la servitude. Il n’obtint cette délivrance que grâce aux miracles des plaies d’Egypte. Voir Moïse. Un des monuments de Ménephtah semble contenir une allusion aux grands événements de l’exode. À Karnak il avait fait graver sur une muraille le récit de son triomphe sur les Libyens ; cette victoire fut pour lui d’autant plus glorieuse que des nations européennes assistaient les Libyens, et que c’est la première fois, que nous voyons ces nations en contact hostile avec les Égyptiens. Un autre monument, découvert en 1895 par M. Pétrie, raconte la même guerre, mais il contient de plus un passage où les Israélites sont nommés. C’est ine stèle en granit gris de Syène (fig. 253), haute de 3 m 12centim., large de WS et épaisse de m 33. Elle a été trouvée à Thèbes dans les ruines du Memnonium de Ménephtah ; elle est actuellement au Musée du Caire (Portique du Nord). Une de ses faces porte une inscription en l’honneur d’Amenhotep III, qui. l’avait fait ériger deux siècles avant Ménephtah ; 967

MENEPHTAH I"

MENI

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celui-ci s’en empara et fit graver sur l’autre face, dans une longue inscription, le récit de sa campagne de l’an v contre les Libyens. Le dernier paragraphe est le plus important. Voici ce qu’on y lit : « Maintenant que les Libyens ont été battus, le pays de Khita est pacifique, le Canaan est pris avec tout ce qu’il y a de mauvais en lui, les gens d’Ascalon sont amenés captifs, ceux de Guézer sont saisis, ceux d’Iounàman n’existent plus, le peuple d’Israël est rasé et il n’y a plus de sa graine, la Syrie est devenue comme les veuves de l’Egypte, tous les peuples réunis sont en paix. » Jusqu’ici aucun autre monument égyptien n’a fait allusion à ces dernières victoires de Ménephtah ; M. W. Groff dit que « ces lignes semblent avoir été ajoutées », Bulletin de l’Institut égyptien, 1896, p. 59, parce que les caractères sont moins profondément gravés. Il paraît difficile d’admettre qu’on ait voulu glorifier ce pharaon après sa mort, en ajoutant de nouveaux traits à ses exploits ; ce n’était pas l’usage dans la vallée du Nil. Quoi qu’il en soit, cette stèle est le premier et l’unique monument égyptien où l’on ait découvert jusqu’ici le nom

des Israélites’' « ^ ] J^. i | | j^ J ll-sir-da-l{r)-u. Ménephtah, qui est très prolixe dans sa stèle sur les Libyens, est très laconique au contraire sur les Israélites. « D’après les procédés de rédaction usités parmi les scribes égyptiens, cela signifie que le pharaon ne pouvait guère se vanter de ses rapports avec Israël. Il est cependant difficile, à cause de la brièveté de ces quatre ou cinq mots, de savoir exactement à quoi le fils de Ramsès II fait allusion. On peut émettre à ce sujet de nombreuses hypothèses. L’une des plus vraisemblables, c’est que le pharaon fait allusion à sa tentative d’anéantir en Egypte les enfants d’Israël. Il travailla, en effet, à les détruire de manière à les raser, pour qu’il n’en restât plus de graine, - comme il s’exprime ; et si son projet ne se réalisa point, ce ne fut pas faute de faire tout ce qui dépendait de lui pour y réussir. » Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., t. iv, p. 683.

Le désastre de la mer Rouge empêcha le roi d’Egypte de réaliser ses projets contre les Hébreux. Plusieurs commentateurs des Écritures ont pensé que Ménephtah avait péri lui-même dans ce désastre, mais leur opinion n’est pas fondée. « Le pharaon ne fut pas noyé avec son armée. Le texte sacré ne le dit point et l’histoire égyptienne suppose le contraire… Ménephtah Ie’fut enseveli à Biban el-Molouk, dans le tombeau qu’il s’était préparé et qu’on y voit encore. » Vigouroux, ibid., t. ii, p. 424. Cf. Fr. von Hummelauer, Commentarius in Exodum, 1897, p. 151. La momie de ce roi a été retrouvée en 1898 par M. Loret, dans le cercueil de Setnakhiti et identifiée le 10 février 1900 par M. W. Groff. « La momie porte écrit en hiératique sur le linceul, à la hauteur de la poitrine, la mention : Roi Ba-en-ra, c’est-à-dire Mer-en-ptah. » Rapport de M. W. Groff, dans le Bulletin de l’Institut égyptien, 16 février 1900, p. 23. La momie a 1™75 et se trouve maintenant au Musée du Caire : elle n’a pas encore été déroulée (1905).

II. Bibliographie. — Sur Ménephtah, voir Chabas, Recherches pour servir à l’histoire de l’Egypte aux temps de l’Exode, Chalon, juillet 1873 ; H. Brugsch, L’Exode et les monuments égyptiens, Leipzig, 1875 ; Egypt under the Pharaohs, Londres, 1881 ; Bulletin de l’Institut égyptien, an. 18951-896-1900, passim ; Michel Julien, S. J., Sinaï et Syrie, Lille, 1893, p. 38 ; Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., t. ii, p. 288426 ; W. Groff, Moïse et les Magiciens à la cour de Pharaon, dans la Rev. égypt., Nouv. sér., v, p. 219 ; Daressy, dans la Revue archéologique, 1898, t. ii, p. 263 ; P. Deiber, La stèle de Minepta-h et Israël, dans la Revue biblique, avril 1899, p. 267-277 ; Ph. Virey, Note sur le Pharaon Ménepthah et les temps de l’Exode, dans la même revue, octobre 1900, p. 578-586. F. Larrivaz.

MENI (hébreu : Meni ; Septante : ^ Tû^ï) ou bien rh Sai(iôviov on 6 Satjiojv, les manuscrits intervertissant l’ordre pour rendre les noms des deux divinités mentionnées dans Is., lxv, 11 ; Aquila et Théodotien : ™ (i£tv£( ; Symmaque : Ix-râ ; ( « , o0 ; omis dans la Vulgate, saint Jérôme n’ayant pas soupçonné le véritable sens. In Is., lxv, 11, t. xxiv, col. 639), nom d’un dieu adoré par les Israélites infidèles.

1° Il n’est nommé que dans un passage d’Isaïe, lxv, 1112, où le prophète dit, d’après le texte hébreu : « Voua qui dressez une table pour Gad et remplissez une coupe pour Meni (afin de lui offrir des libations), je vous destine (manitî) au glaive. » Gad est le dieu de la Fortune. Voir Gad 3, t. iii, col. 24. Meni est le dieu du destin. Son nom dérive de la racine niânâh, « compter, assigner, destiner, » et Isaïe fait un jeu de mots sur le nom du dieu lorsqu’il dit à ses adorateurs : « Je vous destine (manîfî) au glaive. » Mânâh signifie « part, portion, lot », Exod., xxix, 26 ; Lev., vii, 33, etc. ; « sort, ce qui échoit à quelqu’un, » Jer., ira, 25. De même menât, Ps. xi, 6 ; xvi, 5 ; lxhi, 11, etc. Il y a donc tout lieu de penser que Meni est le destin divinisé.

2° Le nom de Meni n’a pas été trouvé en dehors d’Isaïe d’une manière certaine. — 1. Le duc de Luynes, dans son Essai sur la numismatique des satrapies, in-4°, Paris, 1846-1847, p. 65-66, pi. xii, 1 et 2, a publié deux monnaies de Sinope dont l’inscription a été lue par O. Blau, De nummis Achœmenidarum, in-4°, Leipzig, 1855, p. 6, 12, i : m37, « serviteur de Meni. » Cette lecture a été acceptée par Rôdiger, dans Gesenius, Thésaurus, supplem., p. 97, et par T. K. Cheyne, Introduction to the Book of Isaiah, in-8°, Londres, 1895, p. 366 ; mais elle est fausse. Cf. E. Babelon, Monnaies des Achéménides, in-8°, Paris, 1893, p. lxxx-lxxxi. 57. — 2. On lit sur un autel de Vaison en Provence : Belus Fortunes rector, Ménisque magister. Orelli et Henzen, Corpus inscript, latin, selectarum collectio, 3 in-8°, Zurich, 1855-1856, t. iii, n. 5862, p. 168. Bélus, comme le montre l’inscription grecque parallèle, est le Bel d’Apamée (èv’An<xii.si’a) en Syrie ; Meni semble donc être une divinité orientale et son association à la Fortune, comme dans Isaïe, paraît indiquer qu’il s’agit de Meni et de Gad. Mordtmann, dans la Zeitschrift der deutschen morgen làndischen Gesellschaft, t. xxxix, 1885, p. 44. Le mot Menis est toutefois diversement expliqué par les épigraphistes qui ont étudié cette inscription. Voir G. Kaibel, Epigrammata grseca ex lapidibus conlecta, in-8°, Berlin, 1878, n. 836, p. 342 ; Léon Renier, Mélanges d’épigraphie, in-8°, Paris, 1854, p. 129-146. — 3. On trouve du moins une divinité approchante en Arabie. Les anciens Arabes païens, avant l’islamisme, rendaient un culte à une déesse Manât, une des « filles d’Allah ». Voir J. Wellhausen, Reste arabischen Heidentwms, 2e édit., in-8°, Berlin, 1897, p. 25-29. Cf. Koran, ch. lui, 19-20 ; Pauthier, Livres sacrés de l’Orient, 1857, p. 714. « Que vous semble, demande Mahomet, de Lat et d’al-Ozza ? Et cette autre Menât, la troisième déesse ? » Elle était adorée par les tribus arabes qui habitaient entre la Mecque et Médine, sous la forme d’une grande pierre qui fut brisée par un certain Saad la troisième année de l’hégire. Cf. Ed. Pococke, Spécimen historiée Arabum, in-4°, Oxford, 1650, p. 91-92 ; A. P. Caussin de Perceval, Essai sur l’histoire des Arabes, 3 in-8°, Paris, 18471848, t. iii, p. 242. Une des divinités adorées par les Nabatéens (voir Nabuthéens), vers le commencement de l’ère chrétienne, s’appelait aussi Manutu, pluriel, Manaouat, « . les destins. » Voir Corpus inscriptionum semiticarum, t. ii, parti, 197, 1. 5 ; 198, 1. 4, 8, p. 222, 224, 225, etc. Cf. Nôldeke, dans la Zeitschrift der deutsclien morgen tândischen Gesellschaft, t. xli, 1887, p. 709. Plusieurs savants pensent que Meni est la planète Vénus. Voir Rôdiger, dans Gesenius, Thésaurus, supplem., p. 97 ; B. Winer, Bïblisches Realwôrterbuch, STELE DE MÉNÉPHTAH Musée du Caire

3e édit., t. ix, p. 82 ; Frz. Delitzsch, Jesaias, 3e édit., 1879, p. 660-663 ; G. Siegfried, Gad-Meni, dans les Jahrbûcher fur protestantische Théologie, 1875, p. 356-367. D’autres, avec moins de vraisemblance, ont identifié ce dieu avec Mi)v ou Mrivri, le dieu ou la déesse Lune. Voir P. Scholz, Gbtzendienst und Zauberwesen bei den alten Hebrâer, in-8°, Ratisbonne, 1877, p, 411.

3° D’après le texte d’Isaïe, on offrait à Meni, des libations, mais comme méséh, « le vin aromatisé » qu’on offrait comme libation à ce dieu est en parallélisme avec Sulhân, « la table » garnie de mets qu’on offrait à Gad, il est probable qu’on présente à la fois aux deux divinités des mets et du viii, suivant une coutume commune dans le paganisme. Cf. S. Jérôme, In Is., lxv, 11, t. xxiv, col. 639. — Voir W. Gesenius, Commentar ûber den Jesaia, 3 in-8°, Leipzig, 1820, t. iii, p. 283285 ; Frd. Bæthgen, Beitràge zur semitischen Religionsgeschichte, in-8°, Berlin, 1888, p. 79 ; Fr. Duhm, Dos Buch Jesaia, in-8°, Gœttingue, 1892, p. 446.

F. Vigodboux.

    1. MENNA##

MENNA (grec : Moci’vdv), fils de Mathatha et père de Méléa, un des ancêtres de Notre-Seigneur, dans la généalogie de saint Luc, iii, 31.

    1. MENNI##

MENNI (hébreu : Minni, les Septante ont pris ce nom pour une préposition suivie d’un pronom suffixe, et ont traduit irap’éjioO, [tollite] a me, Jer., xxviii, 27), peuple mentionné par Jérémie, li, 27, comme devant prendre part à la destruction de Babylone avec les royaumes d’Ararat et d’Ascenez, et les rois des Mèdes.

1° Ce peuple est souvent mentionné dans les inscriptions cunéiformes assyriennes et dans les inscriptions arméniennes de Van sous les formes Man-nai, Mun-nai, Min-nai, en vannique : Ma-a-na. C’est le pays nommé Mivvui ; par Nicolas de Damas, cité dans Josèphe, Ant. jud., i, iii, 6. Les inscriptions cunéiformes établissent que ces Menni occupaient un pays situé au nord de l’Assyrie entre U-rar-tu, l’Arménie proprement dite, et le Par-su-a, district voisin de la Médie, renfermé par conséquent dans les limites de l’Arménie actuelle. Voir Arménie, t. i, col. 1002. Il faut noter cependant que les Menni formaient une nation distincte, ayant ses rois particuliers et souvent aussi une attitude politique contraire à celle de YUrartu proprement dit. Les inscriptions assyriennes permettent de préciser la situation des Menni et de reconstituer une partie de leur histoire. Les annales d’Assurbanipal désignent comme capitale lzirtu, ailleurs Zirtu, et comme villes principales Atrana, Usbia et Urmiate : cette dernière ville paraît être l’Ourmiah moderne. Ils occupaient donc le sud-ouest du lac de même nom, et non pas le pays de Van, comme on l’a cru longtemps, d’après une fausse assimilation de Mannai et de Van, le V étant rendu par M en assyrien : Van, alors Dhuspas, était la capitale de l’Arménie proprement dite.

2° Leur histoire nous est fragmentairement conservée dans les textes assyriens et les textes vanniques : sous le premier grand conquérant assyrien Théglathphalasar, au XIIe siècle, ils ne sont pas encore mentionnés : mais l’envahisseur trouve à la place qu’ils occuperont plus tard un grand nombre de populations diverses. /Assurnasirhabal (883-858) évita de même le conflit, tandis que Salmanaser (858-823) envahit leur pays dans sa trentième et sa trente et unième année, Udaki leur roi abandonna sa capitale lzirtu, mais tout se borna à quelques villes ravagées et au payement d’un léger tribut. — Plus tard Samsi-Ramman, à l’occasion d’une campagne dans le Naïri ou Mésopotamie septentrionale, reçoit encore le même tribut : son successeur Ramraan-nirari (en 808 et 807) mentionne aussi sans plus deux expéditions contre les Menni. Durant toute cette période, ils souffrirent bien davantage de la part des rois Arméniens. Menouas et son fils Argistis y firent plusieurs apparitions,

dans le but de leur imposer la suprématie de YUrartu : Sardouris y établit même sa résidence pour les maintenir dans la soumission. Mais l’inflence assyrienne ne tarda pas à devenir prédominante. Iranzou, roi des Menni, rejeta les offres de Rousas l’arménien et resta fidèle à Sargon d’Assyrie (722-705) : Aza, son fils, fut mis à mort par ses sujets pour prix de sa fidélité à Sargon et remplacé par Oullousun, qui fit alliance avec Rousas d’Ar-~ ménie. Mais Sargon arriva aussitôt ravageant et brûlant tout sur son passage. Oullousun fit sa soumission et fut maintenu sur le trône. Quant à VUratu, une invasion de Sargon le réduisit pour toujours à l’impuissance, et obligea Rousas à se donner la mort. — La suzeraineté assyrienne leur donna la paix, pendant le règne de Sennachérib (705-681) lorsque de nouveaux ennemis, les Cimmèriens et les Scythes, descendirent du Caucase, vers la fin du huitième siècle. Ces derniers s’établirent sur leur frontière septentrionale et envahirent même une portion de leur pays, puis après une vingtaine d’années reprirent leur marche vers le sud, entraînant avec eux lés Menni contre l’Assyrie sous le roi scythe Ispakai. Mais Àsarhaddon (681-668) parvint à les arrêter et à maintenir son autorité. Dès la quatrième ou la cinquième année d’Assurbanipal son fils (668-626), le roi des Menni, Ahseri, envahit de nouveau la frontière septentrionale de l’Assyrie, sans plus de succès : son pays fut ravagé par les Assyriens, ses villes détruites, et lui-même mis à mort par ses sujets révoltés. Son fils Oualli fit sa soumission à Assurbanipal, donna des otages, et fut maintenu sur le trône de son père. Malgré ses victoires continuelles, l’Assyrie était à bout de forces ; et les Scythes et les Mèdes par leurs attaques réitérées devaient bientôt amener sa chute. Comme Thubal et Mosoch, Ezech., xxxii, 26, il est probable que les Menni disparurent dans la tourmente, absorbés par l’un ou l’autre des envahisseurs. L’Arménie, en y comprenant le pays des Menni, dépendit de la Médie depuis la chute de Ninive, puis de la Perse, après la prise de Babylone par Cyrus ; elle est souvent mentionnée dans les inscriptions trilingues de Darius sans allusion aux anciens royaumes entre lesquels elle était partagée.

3° Le texte où Jérémie les mentionne comme devan détruire Babylone avec l’aide d’Ararat et d’Ascenez (ou peut-être Askouz, « les Scythes, » suivant une correction proposée par Sayce) peut signifier simplement que les peuples du nord en général viendront la renverser sous la conduite de Cyrus. Leur présence dans l’oracle de Jérémie prouve bien son antériorité notable par rapport aux événements annoncés.

VoirEb. Schrader, Keilinschriften und Geschichts-forschung, 1878, p. 160-164, 519-520 ; Frd. Delitzsch, Wo lag das Parodies, p. 245-247 ; Maspero, Histoire ancienne des peuples de l’Orient, les Empires, p. 55 ; Lenormant, Les origines de l’histoire, t. ii, p. 462, 463 ; Sayce, The Cuneiform inscriptions of Van, dans Journal of the Royal Asiatic Society, t. xiv, 3, p. 571-623 et dans les Records of the Past, new séries, t. iv, p. 114rl35 (Argistis ) et t. i, p. 163 (Menouas) ; Schrader, Keilinschriftliche Bibliothek, 1. 1, 146-149, 178-189 ; t. ii, p. 56-59 ; 240-243, Menant, Annales des rois d’Assyrie, p. 103, 104, 121,

129, 182-183, 162-167, 279-281.
E. Pannier.
    1. MENNITH##

MENNITH (hébreu : Minnîf ; Vaticanus : ’Apvûv ; Alexandrinus : Se^uet’ô), ville du pays à l’est du Jourdain.

1° Situation. — Le nom de Mennith, au témoignage d’Eusèbe, Onomasticon, édit. Larsow et Parthey, Berlin, 1862, p. 286, se retrouvait encore au iv « siècle, sous la forme MaaviO, Manith selon saint Jérôme, non loin de Philadelphie, c’est-à-dire de l’ancienne capitale des Ammonites, Rabbath-Ammon, aujourd’hui’Amman, mais le nom de Manith paraît avoir disparu depuis le rv" siècle et l’insuffisance des données bibliques laisse les géographes dans la perplexité pour la localisation de

cette ville. « Jephté, dit l’Écriture, passa ensuite chez les enfants d’Ammon pour les combattre, et le Seigneur les livra entre ses mains. Il les battit depuis Aroër jusqu’à Mennith (ve’ad bôâkd Minnifl et jusqu’à (véad) Abel-Keramtm [où étaient] vingt villes, et il en fit un grand carnage. » II Jud., xi, 33. La traduction de la Vulgate est un peu différente : « Il frappa aussi d’une très grande plaie, dit-elle, vingt villes depuis Aroër jusqu’à l’entrée de Minnith et jusqu’à Abel qui est plantée de vigne3. x La version des Septante : InâzaUv aytoùç… cv àptdfiâe ?xo<Ti 7tdXeiç, suppose qu’ils ont lu ou compris-i>y D>-rary3..n ; >. Ce sens du reste s’impose. — Les vingt villes dont il est ici parlé appartenaient-elles à l’ancien-territoire des Ammonites ou étaient-elles des localités prises sur la tribu de Gad et occupées par eux depuis qu’ils opprimaient les Israélites leurs voisins ? Elles appartenaient, ce semble, à la tribu de Gad. Aroër ici nommée est en effet, selon toute vraisemblance, l’Aroër de Gad, « en face de Rabba. » Cf. Jos., xiii, 25, et Aroër 2, t. i, col. 1224-1226. C’est la limite extrême, au nord et au nord-est de la région où étaient ces villes, puisque Jephté arrivait de cette direction, et c’est à l’opposé qu’il faut chercher Abel-Keramim et Mennith. Les vingt villes paraissent donc, ainsi qu’Aroër, avoir fait partie du territoire de Gad, avant d’être prises par les Ammonites. L’indication pourrait néanmoins signifier simplement « depuis la hauteur d’Aroër jusqu’à la hauteur d’Abel-Xeramim et de Mennith », bien que la première signification paraisse de beaucoup la plus probable. L’intention de Jephté n’était pas de conquérir le territoire des Ammonites, c’était de délivrer ses compatriotes de leur joug et de leur arracher le territoire des villes qu’ils prétendaient, à tort, être à eux. Cf. Jud., xr, 12-28. — Quoi qu’il en soit, l’expression « depuis Aroër jusqu’à l’entrée de Mennith, ’ad bô’âkd Minnip », laisse cette ville en dehors du territoire des vingt villes et par conséquent dans le territoire de Gad ou de Ruben non occupé par l’ennemi. Elle était évidemment voisine ou peu éloignée d’Abel-Keramim avec laquelle elle est nommée.

2° Identification. — Tristram a cru découvrir le nom de cette dernière localité dans celui de Kouroum (Hbân, porté par une vallée voisine de Dibân et de I’ouâdi Môdjeb ou l’Arnon. Le nom de Karém, « vigne, » pluriel Kouroum, se trouve attaché à trop d’endroits, pour être probant par lui-même ; il se trouve d’ailleurs ici beaucoup trop au sud pour correspondre à l’Abel-des-Vignes, située, suivant Eusèbe et saint Jérôme, au septième mille seulement (onze kilomètres environ) de Philadelphie ou’Amman. Onomasticon, p. 6, 9. — Conder a proposé de reconnaître Mennith, dans Miniéh, nom attaché à une ruine et à une fontaine situées à dix-sept kilomètres au sud-ouest de Médaba, dans les montagnes voisines du rivage oriental de la mer Morte et à sept kilomètres de ce lac. Armstrong, Wilson et Conder, Names and Places in the Old Testament, Londres, 1887, p. 126. Si cette identification était fondée, il en résulterait que les Ammonites avaient occupé non seulement une partie du territoire de Gad, mais encore le territoire de Ruben presque en entier, et Jephté aurait dû le reconquérir, ce qui ne paraît pas vraisemblable ; elle est d’ailleurs infirmée par l’assertion d’Eusèbe, indiquant le village de Maanith, à quatre milles (six kilomètres environ ) d’Esbus (Hésébon) sur la route de Philadelphie. — Jos. Schwarz croit Mennith identique à Mageth, ville de Galaad prise avec Casbon par Juda Machabée. I Mach., v, 36. Casbon ou Chasbon (Septante : Xaaëwv) est, pour le rabbin, identique à Hésébon et Mageth = Mennith doit être Mindja’, village situé à deux heures, vers l’est, de Uesbân. Tebuoth ha-Arez, nouvelle édit. Jérusalem, 1900, p. 268. Le village désigné est sans doute la petite ruine de Mendjâ que l’on trouve à dix kilomètres au sud-est de fjesbdn et à trois est-nord-est de Médaba.

La situation ne répond pas à celle de YOnomasticon et la transformation supposée par Schwarz de n en dj est peu probable. — La Manha à six kilomètres à l’est de Uesbàn, proposée par Kieperl, Neue Handkarle von Palâstina, Berlin, 1871, bien que plus voisine, se trouve encore en dehors de l’ancien chemin de Hésébon à Philadelphie ; la présence de ce nom en cet endroit est d’ailleurs contestable. — Parlant de Mennith : « Je n’ai pas trouvé trace de ce nom, dit Fr. de Saulcy, sur la route en question ; mais à la place assignée par Eusèbe, se trouve une localité ruinée, nommée Omm-el-Kénaféh. » Dictionnaire topographique abrégé de la Terre Sainte, Paris, 1877, p. 225.

L’endroit désigné par le savant explorateur est, sans aucun doute, la ruine appelée non Omm-el-Kénaféh, mais Omm-eUQanâfid, « la mère, » c’est-à-dire « l’endroit’peuplé de hérissons ». Cette ruine est située en effet sur l’ancienne voie romaine conduisant de Jfesbânk’Amman, à cinq kilomètres au nord de la première localité et à dix-huit kilomètres au sud-ouest de’Amman. La localité était bâtie sur le sommet d’une assez large colline, à la droite et au principe de l’ouâdi-Hesbân. À sept ou huit cents mètres au nord-est, près du chemin à droite, dans une position analogue, et dominant tout le plateau ondulé et spacieux recouvert d’une terre brune et fertile que traverse la route d’Amman et souvent occupé par des campements de Bédouins’Aduân ou des Béni-Sakher, leurs voisins, qui parcourent la contrée, est une autre petite ruine, comme sa voisine, manifestée par des monceaux informes de pierres grossièrement équarries et par des citernes ; elle est désignée du nom de Khirbet el-Beddih. Son nom n’est peut-être pas sans rapport avec Mennith. La lettre m des noms hébreux est souvent devenue b chez les Arabes : ainsi Jamnia est devenu Iabna et Tamnath, Tibna’. La finale h ( » ) reste t (i = C_>) devant une voyelle. Alors même qu’il n’existerait pas d’exemple du changement de n en d, le renseignement d’Eusèbe et de saint Jérôme témoignant de l’existence, au IVe siècle, d’un village du nom de Manith, considéré par eux comme identique avec l’antique Mennith, précisément à la distance à laquelle nous rencontrons Béddih, n’autorise-t-il pas à croire ce dernier dérivé de l’autre ? En toute hypothèse, Mennith doit se chercher en cette région. Elle devait être près de la limite commune de Gad et de Ruben et elle appartenait probablement à cette dernière tribu. Les Ammonites, pour excuser leur invasion du territoire d’Israël, prétextaient leur ancien titre de maîtres du pays. Ils le pouvaient pour la terre de Gad ; pour la terre de Ruben où se trouvait Hésébon elle avait appartenu à Moab, non à Ammon. Cf. Num., xxr, 26, 30. Si Jephté s’arrête à la limite de Mennith, n’est-ce pas parce que les Ammonites ne l’avaient pas occupée ni revendiquée ? La dernière localité reconquise par Jephté fut, ce semble, Abel-Keramim. Elle devait être aussi au nprd de Mennith et les sept milles de distance de Philadelphie à Abel-des-Vignes de V Onomasticon nous amènent non loin d’une ruine désignée du nom de Bél’at. Cette appellation n’aurait-elle pas quelque rapport avec l’Abel d’Eusèbe ? Si la relation n’est pas évidente, elle n’est pas impossible-Bel’af est du reste à trois kilomètres seulement au nord est de Béddih, à seize ou dix-sept cents mètres à l’orient de la voie ancienne de’Amman à Hesbdn et des Senaubar. Près de cette « forêt de pins », la voie passe par une gorge resserrée et une vallée étroite qui se prolonge jusqu’à Béddih : peut-être faut-il voir là l’entrée de Mennith où Jephté cessa ses exploits.

3° Mennith dansÉzéchiel. — D’après un grand nombre d’exëgètes modernes, Mennith est aussi nommée dans Ézéchiel, xxvii, 17. Le prophète, exaltant les avantages dont jouissait la ville dèTyr, montre les peuples devenus en quelque manière ses tributaires, en lui apportant les produits de leur pays. Parmi eux il en u mère les deux peuples de Juda et d’Israël. « La Judée et la terre d’Israël, ’dit le prophète, ont trafiqué avec toi ; ils ont exposé sur tes marchés le blé de Mennith, le pannag (gâteau [ ?]), Je miel, l’huile et le baume. » L’expression de l’hébreu tvjd nsn, fattê Minuit, a été entendue diversement par

les traducteurs. Pour les Septante c’est jtïto ; xal puipa, « du blé et des essences aromatiques, » la Vulgate y voit frumentum primum, le Targum & du blé excellent » ou « du blé et des épices » ; la version syriaque, « du blé et du riz ; i, la version arabe, comme la Vulgate et le Targum, « du blé excellent. » Les interprètes modernes sont également d’avis différents. Pour plusieurs, les massorètes auraient, mal lu ; la leçon constatée par les Septante est n*oïi n>ion, « du blé et des aromates » ou « du styrax ». Le styrax et le baume, >un n*SM, sont du

reste deux produits exportés de la terre de Galaad, par les marchands ismaélites. Cf. Gen., xxxvii, 25. Cf. Knabenbauer, Commentarius in Ezechielem, Paris, 1890, Ttxxvii, 17, p. 276-277. Les géographes inclinent plutôt pour la leçon des massorètes et la Mennith du prophète leur semble la Mennith du livre des Juges. — La région où elle se trouvait, connue sous le nom de Belqd’, est d’ailleurs renommée aujourd’hui encore, par l’abondance et la qualité de son blé. F. de Saulcy, Dictionnaire topographique abrégé de la Terre Sainte, Paris, 1877, p. 260. Cf. Gesenius, Thésaurus, p. 807. Armstrong, Names and Places in the Old Testament, Londres, -1887, p. 126 ; Riess, Biblische Géographie, Fribourg-en-Brisgau, 1872, p. 54. L. Heidet.

    1. MENOCHIO ou MÉNOCHIUS Jean Etienne##

MENOCHIO ou MÉNOCHIUS Jean Etienne, né à Pavie en 1575, mort à Rome le 4 février 1655. Admis dans la Compagnie de Jésus le 25 mai 1594, il professa les humanités, l’Écriture Sainte et la théologie morale à Milan. Il fut ensuite supérieur de diverses maisons de son ordre, provincial de Milan, de Rome, assistant d’Italie et admoniteur des P. P. généraux Carafa et "Piccolomini. — Tout le monde connaît son important travail d’exégèse, Brevis explicatio sensus litteralis S.Scripturie optxmis quibusque auctoribus per epitomen coMerfa, tant de fois réimprimé, sous divers titres, dans presque toutes les contrées d’Europe et inséré en tout ou en partie dans plusieurs collections. Voici quelques-unes des éditions les plus connues : Cologne, 1630, 1659 ; Anvers, 1679 ; Lyon, 1683, 1697, 1703. Au commencement du XVIIe siècle, le P. Tournemine, jésuite, fit « ne nouvelle réimpression de cet ouvrage et y ajouta un supplément considérable, Paris, 1719. Ce travail reparut dans la même ville, en 1721 et 1731, à Avignon en 1768 et à Gand en 1829. De son côté, le P. Zaccaria, en 1743, donna à Venise une édition augmentée, réimprimée, au même endroit, en 1755 et 1761. En France, au cours du xixe siècle, on ne compte pas moins de quatorze réimpressions de ces commentaires, joints à la traduction de la Bible du P. de Carrières. L’abbé Drioux en a donné une édition nouvelle en 8 vol. in-8°, Paris, 1872-1873. On doit citer encore comme ouvrages relatifs à l’Écriture Sainte : 1° Institutions politicsee Sacris Scripturis depromptse, in-8°, Lyon, 1625 ; Cologne, 1626 ; 2° Institutiones œconomicx ex Sacris Litteris depromptx, in-8°, Lyon, 1627, traduit en italien par l’auteur, in-4°, Venise, 1656 ; 3° De republica Hebrœorum libri octo, in-f », Paris, 1648 ; 4° Historia sacra degli .Atti degli Apostoli, in-4°, Rome, 1654.

P. Bliard.

    1. MENSONGE##

MENSONGE (hébreu : bad, kâzâb, kahas, Sdvé îêqér ; chaldéen : kedab, Septante : iJieïSo ;  : Vulgate : mendacium), parole ayant pour but de faire croire au prochain le contraire de la vérité.

1° La loi divine. — Dieu défend le mensonge. Exod., xxm, l ; Lev., xix, 11. Les écrivains sacrés rappellent cette défense. Eccli., vii, 13, 14 ; xli, 21 ; Eph., iv, 25 ; Col., iii, 9 ; -Jacob., iii, 14, etc. Dieu hait le mensonge. Prov., xii, 22.

La bouche qui ment tue l’âme. Sap., i, 11. Aussi Dieu fait périr le menteur. Ps. v, 7. Les menteurs n’entreront pas au ciel, Apoc, xxi, 27 ; xxii, 15, mais iront en enfer, Apoc, xxi, 8, car au ciel n’entrent que ceux qui sont sans mensonge. Apoc, xiv, 5. Pauvreté vaut donc mieux que mensonge. Prov., xix, 22. Mieux vaut même le vol que le mensonge habituel. Eccli., xx, 27.

2° La pratique du mensonge. — 1. Le démon tire le mensonge de son propre fonds et est naturellement menteur, Joa., viii, 44. L’esprit de mensonge inspire les faux prophètes. III Reg., xxii, 23 ; II Par., xviii, 22 ; II Thés-, ii, 10. Bien souvent les prophètes de mensonge se sont fait entendre. Is., îx, 15 ; Jer., v, 31 ; xx, 6 ; xxm, 14 ; xxvii, 10, etc ; Ezech., xiii, 6 ; Mich., ii, 11 ; Zach., x, 2 ; II Pet., ii, 1. Les prêtres et les scribes ont rempli ce rôle, Jer., viii, 8-10, et plusieurs ont pris le manteau des prophètes pour mentir. Zach., xiii, 4. — 2. L’homme est d’ailleurs naturellement porté au mensonge. Ps. iv, 3 ; cxvi (cxv), 11 ; Rom., iii, 4, 7. Il aime le pain du mensonge, Prov., xx, 17, il mange le fruit du mensonge, Ose., x, 13, sa langue est comme un arc qui lance le mensonge. Jer., ix, 3. Le mensonge régnait en Israël à certaines époques. Is., lvii, 4 ; Ose., iv, 2. Les Cretois avaient la réputation d’être toujours menteurs. Tit., i, 12. Le Sauveur annonce à ses disciples que les méchants ne cesseront pas de dire le mensonge contre eux. Matth., v, 11. — 3. Les eaux inondent l’abri du mensonge, Is., xxviii, 17, voir Inondation, t. iii, col. 883, ce qui signifie que le menteur subit inopinément la peine de son mensonge. Une source menteuse, Jer., xv, 18, est celle dans laquelle on ne trouve pas l’eau sur laquelle on compte. Cf. Job, vi, 15-20 ; Caravane, t. ii, col. 249. Mentir sur sa tête, c’est dire un mensonge qu’on paiera de sa vie. Dan., xiii, 55, 59. — 4. Dieu n’a pas besoin que, pour soutenir sa cause, on dise des mensonges. Job, xiii, 7.

3° Exemples bibliques. — 1. Satan ment odieusement quand il dit à Eve qu’elle ne mourra pas, si elle mange le fruit défendu, et qu’au contraire elle et Adam deviens dront comme des dieux. Gen., iii, 4 ; cf. Joa., viii, 44.

— 2. Caïn ment quand il prétend ignorer où est Abel qu’il vient de tuer. Gen., iv, 9. — 3. Par deux fois, Gen., xii, 13 ; xx, 2, Abraham fait passer Sara pour sa sœur, alors qu’elle était son épouse. Il est vrai que Sara était fille du même père, et non de la même mère, Gen., xx, 12, et que par conséquent Abraham pouvait lui donner le nom de sœur. S’il n’y a là aucun mensonge, il y a cependant une réticence grave qui expose Sara au déshonneur pour sauver la vie d’Abraham, alors que celui-ci aurait dû compter davantage sur la protection de Dieu qui lui avait déjà manifesté sa volonté. Voir Abraham, t. i, col. 76. — 4. Quand Rébecca dispose tout pour faire croire au vieil Isaac que Jacob est son fils aîné, et que Jacob se prête à la supercherie, Gen., xxvil, 1129, il y là un grave mensonge, nettement caractérisé. Voir Jacob, t. iii, col 1061. Il est bien vrai qu’Ésaù avait vendu à Jacob son droit d’aînesse, Gen., xxv, 29-34, et que l’intention divine était que Jacob fût l’héritier des promesses faites à Abraham et à Isaac. Mal., i, 2, 3 ; Rom., ix, 13. Mais encore Rebecca et Jacob devaient-ils s’en rapporter à Dieu de la réalisation de ses desseins, sans recourir à un stratagème et à des affirmations qui trompent si gravement Isaac. — 5. Bien moins grave esj ; la feinte de Rachel, qui simule une indisposition accidentelle pour ne pas se lever de la selle dans laquelle elle a caché les théraphim de Laban. Gen., xxxi, 35. —.

6. Les frères de Joseph commettent un mensonge grave et prolongé, quand ils s’arrangent pour faire croire à Jacob que son fils a été dévoré par une bête féroce. Gen., xxxvii, 32-33. Juda est amené plus tard à soutenir le mensonge devant Joseph lui-même. Gen., xliv, 20. -^

7. L’accusation de la femme de Puliphar contre Joseph est un odieux mensonge. Gen., xxxix, 14-18. — 8. Rahab

protège par un mensonge, que personne ne songe à lui reprocher gravement, la fuite des espions israélites venus à Jéricho. Jos., M, 5. — 9. Les Gabaonites usent d’un artifice mensonger pour obtenir que leur ville et ses habitants soient épargnés. Josué les maudit et les réduit en esclavage. Jos., ix, 9-15, 23. — 10. Samson se joue de Dalila en lui disant des mensonges. Jud., xvi, 7, 13. —

11. Pour dissimuler la fuite de David et le soustraire à la persécution de Saùl, Michol met un théraphim dans le lit du fugitif et fait croire aux gens du roi que David lui-même est là, alité et malade. I Reg., xix, 13-15. —

12. Amnon se dit malade ; mais c’est un mensonge par lequel il veut attirer chez lui sa sœur Thamar, dont il a dessein d’abuser. II Reg., xiii, 6. — 13. La conduite de David et de Joab, dans le meurtre d’Urie, implique une série de mensonges destinés à couvrir l’homicide. II Reg., xi, 14-26. — 14. Jézabel prépare l’homicide au moyen du mensonge, quand elle accuse Naboth d’avoir maudit Dieu et le roi. III Reg., xxi, 10-13. — 15. Giézi, serviteur d’Elisée, ment pour satisfaire sa cupidité et en est bien puni. IV Reg., v, 22-25. — 16. La ruse que Judith emploie pour s’insinuer dans la confiance d’Holopherne comporte un certain nombre de mensonges que n’excuse point le but atteint par l’héroïne. Judith, XI, 4 17. Voir Judith, t. iii, col. 1822. — 17. Les deux vieillards qui accusent Susanne sont de cyniques menteurs. Dan., xiii, 36-40. — 18. Alcime ment quand il jure aux Assidéens de ne pas-leur faire de mal. I Mach., vii, 15.

— 19. C’est par des mensonges que Tryphon attire à lui Jonathas et ensuite ses deux fils. I Mach., xii, 45, 48 ; xiii, 15, 16, 19. — 20. Hérode ment quand il dit aux mages qu’il veut aller adorer l’enfant Jésus. Matth., ii, 8. — 21. Satan ment de nouveau quand il se prétend possesseur de tous les royaumes de la terre. Luc, iv, 6.

— 22. Les pharisiens et les princes des prêtres profèrent des mensonges quand ils affirment que Jésus chasse les démons par Beelzébub, Matth., xii, 24 ; Marc, iii, 22 ; Luc, xi, 15 ; quand ils prétendent savoir qu’il est un pécheur, Joa., IX, 24 ; quand ils l’accusent devant Pilate. Luc, xxiii, 2, 5 ; Joa., xviii, 30 ; xix, 12. — 23. Les faux témoins apostés contre le Sauveur dénaturent les paroles qu’il a prononcées. Matth., xxvi, 61 ; Marc, xiv, 58, Voir Témoins. — 24. Pierre commet une série de mensonges quand il renie Notre-Seigneur. Matth., xxvi, 69-75 ; Marc, xiv, 66-72 ; Luc, xxii, 55-62 ; Joa., xviii, 15-27.

— 25. Les gardes du sépulcre reçoivent de l’argent pour mentir au sujet de la résurrection. Matth., xxviil, 13-15.

— 26. Ananie et Saphire dissimulent le prix du champ qu’ils ont vendu et ainsi « mentent au Saint-Esprit ». Act., v, 2-9. — 27 : Enfin les Juifs mentent encore dans leurs accusations contre saint Paul. Act., xxi, 28.

4° Sens relatif d’affirmations absolues. — Il faut observer que beaucoup de manières de parler usitées en Orient ne doivent pas être entendues à la lettre. Elles semblent, au premier coup d’œil, exagérer ou même contredire la réalité ; mais elles sont purement conventionnelles et doivent se prendre daus un sens tout relatif. C’est ainsi qu’on procède, par exemple, à l’égard des expressions qui proclament, d’une manière si formelle en apparence, l’universalité du déluge, ou de celles qui font aller Alexandre le Grand jusqu’aux extrémités du monde et disent que la terre se tut en sa présence. I Mach., i, 3. Quand les fils de Heth répondent à Abraham qu’ils lui donnent le champ et la grotte de Makpelah, alors qu’ils ne songent qu’à les lui vendre, ils ne mentent pas, mais ne font qu’entamer les pourparlers sous une forme conventionnelle et polie. Gen., xxiii, 11. Voir L ii, col. 889. Lorsque l’ange Raphaël se présente à Tobie sous le nom d’Azarias, fils d’Ananie, Tob., v, 8,

18, il ne ment sûrement pas, mais prend des noms symboliques en harmonie avec sa mission ; il ne faut pas les considérer comme des réalités plus absolues que la forme d’emprunt dont l’ange se revêt. Voir Azarus 28,

t. i, col. 1301. On interprétera de même dans un sens tout relatif les paroles du Sauveur : « Moi, je ne monte pas pour ce jour de fête, » Joa., vil, 8 ; « la jeune fille n’est pas morte, mais elle dort, s Luc, toi, 52, 53 ; « Lazare, notre ami, dort, » Joa., xi, 11 ; « le Fils de l’homme sera trois jours et trois nuits dans le sein de la terre, » Matth., xii, 40 ; « sur le jour et l’heure (de la fin du monde), personne ne sait rien, ni les anges dans le ciel, ni le Fils, mais seulement le Père. » Marc, xiii, 32, etc. On sait enfin que des textes, même dogmatiques, sont communément ramenés de la forme jabsolue à la forme relative. Cf. Joa., vi, 54 ; Rom., v, 12 ; Heb., vi, 6, etc. Il n’y a donc pas lieu de s’étonner si, chez les écrivains sacrés, certaines locutions ne présentent pas cette exactitude rigoureuse à laquelle nous sommes accoutumés. Ces écrivains s’expriment comme on le faisait dans leur temps et dans leur pays. Cf. Cornely, Introductio generalis in N. T. Libros, Paris, 1885, t. i,

p. 552, 567.
H. Lesêtre.

MENSTRUES. Voir Impureté légale, t. ii, col. 858.

    1. MENTHE##

MENTHE (Nouveau Testament : 7|8uo<7|jiov ; Vulgate : mentha), plante odoriférante.

I. Description. — Herbe aromatique formant des touffes vivaces qui s’étendent progressivement au moyea

254. — Mentha silvestris.

de rhizomes rampant à fleur du sol en ramification indéfinie. Elle appartient à la famille des Labiées, dont elle possède les caractères généraux : tige dressée, , prismatique-quadrangulaire, portant sur 4 rangs desfeuilles opposées qui vont en diminuant de taille à partir du point où naissent les fleurs groupées en Êraxverticilles axillaires ; calice en cloche, 4 étamines soudées vers la base du tube corollin : ovaire libre reposant sur un disque épais, profondément divisé en 4 lobes qui renferment chacun une loge uniovulée, et se séparent à la maturité en 4 coques monospermes. Le style unique, bifide au sommet, s’élève de la base de l’ovaire, entre les 4 lobes. La corolle suffit à distinguerles Menthes parmi toutes les Labiées, étant presque régulière avec 4 divisions sensiblement égales, comme ;

d’ailleurs les examines à filets droits et équidistants. L’odeur pénétrante exhalée par tout l’appareil végétatif est due à une huile essentielle sécrétée par des glandes épidermiques. Chaque espèce possède un parfum spécial : la plus estimée à cet égard est le Mentha piperita L. dont l’origine hybride doit être attribuée à la culture. Du reste toutes les Menthes usitées en parfumerie semblent être issues par croisement d’un type unique, Mentha viridis L, qui lui-même parait, en définitive, être une simple variété du Mentha silvestris (fig. 254), caractérisé par ses inflorescences terminales effilées en forme d’épi et seulement entremêlées de bractées sans feuilles véritables. On s’explique ainsi comment ces races dérivées n’existent pas à l’état spontané. Les autres Menthes sauvages ont un parfum bien moins agréable : le Mentha rotundifolia L. s’en distingue par ses feuilles ridées à pointe obtuse ou arrondie ; le Mentha aquatica L. par son inflorescence en tête arrondie, et le Mentha arvensis L. par son long épi terminal interrompu par des feuilles vertes. Enfin le Mentha Pulegium L. mérite de former un genre à part pour son calice un peu divisé en 2 lèvres et pourvu intérieurement d’un anneau de poils.

F. Hï.

II. Exégèse. — 1° La menthe n’est mentionnée que dans le Nouveau Testament, en deux endroits, Matth., xxiii, 23 ; Luc, XI, 42.’H8ûo<t[aov, terme sous lequel la menthe s’y présente, est un des noms bien connusde cette plante. « La menthe, dit Pline, H. N. xix, 47 ; doit à son odeur suave le nom qu’elle porte chez les Grecs (r)8û, « suave, » iojiYJ, « odeur » ). Elle a aussi celui de menthe d’où les anciens Latins ont tiré le nom qu’ils lui ont donné. » « Mîv6ï], dit également Strabon, VIII, iii, 14, que certains appellent y1800<t|jiov. » Aussi n’y a-t-il aucune difficulté d’identification. La menthe sauvage, Mentha silvestris, est répandue très abondamment dans la Palestine, et différentes variétés y sont encore cultivées dans les jardins. Les Juifs se servaient des branches et des feuilles odorantes dans leurs maisons, dans leurs synagogues, pour assainir et parfumer l’air. Sans doute ils devaient employer la menthe dans la parfumerie comme les Égyptiens. On Sait que chez, ces derniers cette plante, âgaï, entrait dans la composition du fameux parfum kyphi. La menthe servait aussi de condiment. « La menthe, dit Pline, H. N., xx, 53, a une odeur qui éveille l’esprit, et une saveur qui excite l’appétit : aussi entrait-elle ordinairement dans les sauces. » Dioscoride, m, 41, la regarde comme tout à fait stomachique. On peut voir dans Celsius, Hierobotanicon, in-8°, Amsterdam, 1748, t. i, p. 546, combien elle est fréquemment mentionnée dans les recettes culinaires d’Apicius. Les Juifs en faisaient le même usage comme en témoigne le Talmud à différentes reprises : Schem ve-Yobel, vii, 2 ; Oketzin, i, 2 ; Scheb., vii, 1. Aujourd’hui encore en Palestine on réduit en poudre la menthe séchée et on la mange comme aliment.

2° Notre-Seigneur énumère la menthe parmi les plantes dont les pharisiens payaient la dîme. On a répété souvent qu’elle ne rentrait pas dans les objets soumis à la dîme, et que si les pharisiens la payaient, c’était par dévotion particulière et parostentation. Ce n’est pas exact. Sans doute il est probable qu’à l’origiDe on n’était tenu qu’à la dlme des trois récoltes mentionnées/auïteutéronome, xiv, 23. Mais sous l’influence de l’esprit pharisaïque les docteurs avant l’ère chrétienne avaient décidé que tout ce qui sert de nourriture, tout ce qui se cultive, tombe sous la loi de la dîme, Masseroth, i, 1. Par conséquent la menthe ne pouvait être exceptée : il devait en être de la menthe, comme de Paneth et du cumin que le texte de saint Matthieu, xxiii, 23, cite à côté de cette plante, et qui étaient expressément soumis à la dime. Masseroth, TV, 5 ; Déniai, xi, l.J.C. Hottinger, Comment, de decimis, dans Ugolinus, Thésaurus antiquitalum, t. xx, col. 326. Aussi ce que Jésus-Christ reproche aux

Pharisiens ce n’est pas de payer cette dime (hsec oportuit facere), mais de mettre tant d’ostentation à ces petites choses, tandis qu’ils omettaient les devoirs essentiels de la justice et de la charité. Matth., xxiii, 23 ; Luc, xi, 42.

E. Levesque.

    1. MENTON##

MENTON (hébreu : zâqân ; Septante : çâpu-f ?, Vulgate : menium), partie inférieure du visage, faisant saillie au-dessous de la lèvre inférieure. Le mot zâqân ne désigne le menton qu’en tant que support de la barbe. Dans plusieurs cas, il s’agit indifféremment de l’un ou de l’autre : on rase la barbe ou le menton, Lev., xix, 27 ; xxi, 5 ; II Reg., x, 4 ; Ezech., v, 1, etc. ; on arrache les cheveux de la tête et les poils du menton ou de la barbe. I Esd., ix, 3. Voir Barbe, t. i, col. 1450. C’est pourtant le menton, [plutôt que la barbe elle-même, qui est atteint

par la teigne. Lev., xiii, 29.
H. Lesêtre.
    1. MENUHOTH##

MENUHOTH (hébreu : ham-Menuhôf ; Septante : ’A[i|jt.av£8), nom qu’on lit dans un passage obscur de I Par., ii, 52, et que l’on traduit et explique de manières diverses. La Vulgate. d’après le sens du mot hébreu, l’a rendu par requielio, a repos, » comme elle l’a fait aussi au, t. 54, où ham-Mdnahfi correspond à ham-Menuhx>f. Parmi les modernes, les uns traduisent ainsi le ꝟ. 52 : « Les fils de Sobal, père de Cariathiarim, furent Hârô’éh (Vulgate : qui videbat), #asî-Ham-Menuhôt (Vulgate : dimidium requietionU). » Et le ꝟ. 54 : « Fils de Salma : Bethléhem, et le Nétophatite, ’A terôf Bêf Yo’db (Vulgate : Coronx donius Joab) et Hasi Ham-Manahfi (Vulgate : dimidium requietionis), has-Sâre’î (Vulgate : Sarai). » D’autres prennent hâsi comme signifiant réellement, aux jr. 52 et 54, la moitié (des Manahathites). Le texte de ce passage étant altéré, il est difficile de se prononcer entre ces hypothèses contradictoires. On est plus généralement d’accord pour admettre que Menuhôt doit être un nom de lieu, et que « père de Menuhôt ne veut pas dire père d’un fils appelé Menuhôt ou ffâsî Menuhôt, mais fondateur ou restaurateur d’une ville ainsi appelée. Les autres noms de lieux énumérés^’. 54, Bethléhem, etc., justifient cette interprétation. Il est, de plus, assez vraisemblable que Menuhôt n’est pas autre que la Manahath de I Par., viii, 6. Voir Manahath 2, col. 638.

    1. MENUISIER##

MENUISIER, artisan qui fait divers ouvrages en bois. Voir Charpentier, t. ii, col. 599.

    1. MÉPHAATH##

MÉPHAATH (hébreu : Mêfa’af et Môfa’at (ketîb), Jer., xlviii, 21, « splendeur, lieu élevé, » de la racine iâfa’, « resplendir, » qui dans la langue arabe a le sens de « dominer » ; Septante, Vaticanus : MatçaâS, Maçct, MaeçXi, Ma>çâ8<x ; Alexandrinus : MijçaâS, Ma » 91, MasyaàO, McoçâO), ville Iévitique de la tribu de Ruben.

— Moïse la donna à cette tribu aussitôt après la conquête de la région transjordanique sur les rois Séhon et Og. Jos., xiii, 18. L’assemblée des anciens, réunis à Silo sous la présidence du grand-prêtre Éléazar et de Josué, l’assigna pour habitation aux lévites de la famille de Mérari. Jos., xxi, 36 (hébreu, 37) ; I Par., VI, 79. — Méphaath est toujours nommée avec Jassa et Cédimoth, excepté Jer., xlviii, 21 (Septante, xxxi, 21), où cette dernière ville fait défaut. Dans la Vulgate, Jos., xxi, 36, on trouve à leur place Jaser et Jethson ; mais le passage parallèle des Paralipomènes, d’accord, pour ce verset de Josué, avec le texte hébreu et les versions, ne permet pas de douter que ce ne soit une erreur de copiste. Selon toute vraisemblance Méphaath est unie à ces villes à cause de leur proximité mutuelle, et, comme elles, doit se chercher sur la limite orientale de la tribu de Ruben et sur la frontière du désert. Cf. Num., xxi, 23 ; Deut., ii, 26.

— Cette situation lui est aussi assignée par Eusèbe de Césarée. Après avoir nommé « Méphaat dans la tribu de Benjamin ; il en est un autre, ajoute-t-il, au delà du Jourdain, où il y a un poste militaire fortifié, près du

désert s. Onomasticon, édit. Larsow et Parthey, Berlin, 1862, p. 288. Saint Jérôme, en traduisant in quo præsidium romarwrum militium sedet propter viciniam solitudinis, ibid., p. 289, témoigne qu’il n’a rien à changer à l’indication de l’archevêque de Césarée. La Méphaath de Benjamin n’est pas connue d’ailleurs et Eusèbe fait sans doute allusion à une ville dont les exemplaires de la Bible lus par lui portent une fausse lecture. — Le prophète Jérémie, xlviii, 21, nomme Méphaat parmi les villes du Misor, c’est-à-dire de la plaine de Madaba, alors au pouvoir des Moabites : « La sentence va être exécutée contre le Misor, contre Hélon, contre Jasa, contre Méphaat, contre Dibon, contre toutes les villes de Moab, éloignées ou voisines. » — Meifa’ah est encore énumérée parmi les villages de la Belqa, dans l’ouvrage d’un auteur anonyme du XIVe siècle, Marâsid eVItlilà, édit. Jungboll, Leyde, 1857, t. H, p. 885. Dans « ne excursion à travers la région parcourue par les Arabes nomades, le D r Aloys Mousil, d’Olmùtz, a retrouvé à seize cents mètres au sud-est de Khareibet es-Sûq, et à neuf kilomètres exactement au sud de 'Amman, le nom de Neifa. Il est attaché à une localité ruinée assez considérable, bâtie sur le plateau supérieur d’une colline élevée d’où l’on domine la plaine ondulée qui s'étend indéfiniment vers l’est. L’endroit convient admirablement pour une station chargée de surveiller le désert où campent les Bédouins. M. Clermont-Ganneau n’hésite pas à reconnaître dans Neifa le Meifah du Kitdb el-Marâsid, dont l’initiale M est devenue N par une transformation souvent constatée et le Meifa’ah des Arabes ne peut pas être différent de la Mêfa’af biblique. Selon le docte écrivain, le nom de Mesæ p. 231, de la liste Notitix dignitatum imperii Romani, dans Reland, Palmstina, p. 229-234, doit être Mefæ datif de Mefa. La lettre s aura été lue f par le scribe. Méfa ou Mésa est énumérée avec Ziza et d’autres villes de la province d’Arabie occupées par des détachements militaires ; elle était gardée par un poste de cavaliers indigènes. Cf. D' Aloys Mousil, à la suite de Reise in 'Amra und andere Schlôsser ôstlich von Moab, Appendice, p. 2, dans Sitzungoberichte der Kais. Akademie der Wissenschaften in Wien, philosophisch-historische Classe, Vienne, 1902, t. cxliv, n. vu ; Clermont-Ganneau, The site of Mepha’at, dans le Pal. Expl. fund, Quarterly Htalemenl, Londres, 1902, p. 260-261.

L. Heidet.

    1. MÉPRIS##

MÉPRIS (hébreu : bûz, bûzâh, bâzôh, md’os, qdlôn ; Septante : àxiixt’a, ôvEiêio-jiôç ; Vulgate : contemptus, despectio, abjectio, ignominia), expression du sentiment que l’on a pourxe qu’on estime sans valeur morale.

1° Le mépris envers Dieu. — 1° Mépriser la loi de Dieu, c’est mépriser Dieu lui-même, qui en tirera vengeance. Lev., xxvi, 15 ; Num., xv, 31 ; Sap., xiv, 30 ; I Tim., iv, 12. David s’est rendu coupable de ce mépris quand il a commis son crime, II Reg., xil, 9. Holopherne a directement méprisé le Dieu d’Israël. Judith, xiii, 28. C’est encore mépriser Dieu que de mépriser ce qui se rapporte à lui, le serment qu’on lui a fait, Ezech., xvii, 18, 19 ; son autel, Mal., i, 12 ; son Temple et ses fêtes, Ezech., xxii, 8 ; II Mach., iv, 14 ; ses ministres, I Mach., vu, 34 ; les prophéties de ses envoyés. I Thess., v, 20. Sous la loi nouvelle, Dieu déclare même positivement que mépriser les ministres de son Église, c’est le mépriser en personne. Luc, x, 16. Il ne faut pas non plus mépriser les dons de sa grâce. Rom., ii, 4. — 2° Il était prophétisé que le Serviteur de Jéhovsh, le Messie, devait être méprisé. Is., xlix, 7. Notre-Seigneur le rappela, Marc, IX, 11, et, pendant sa passion, il encourut le mépris de tous, particulièrement celui d’Hérode. Luc, xxiii, 11. — 3° Dieu, à son tour, méprise ceux qui le méprisent, 1 Reg., ii, -30, et qui s'écartent de ses lois. Ps. cxix (cxviii), 118. Il les rend méprisables, Mal., ii, S, et un jour il les jugera. Joa., xii, 48. — 4° Dieu a

dédaigné la demeure de Silo, à laquelle il voulait substituer celle de Sion. Ps. lxxviii (lxxvii), 60. Mais il ne méprise pas les souffrances de l’affligé. Ps. xxii (xxi), 25 ; en (ci), 18.

2° Le mépris envers les hommes. — 1° Il y a des mépris qui sont justifiés. On méprise l’insensé, Prov., m, 35 ; l’impudique, Prov., vi, 33 ; l’incorrigible, Prov., xm, 18 ; le pervers. Prov., xii, 8. C’est avec raison qu’on méprise certains ordres de princes impies. Judith, ii, 5 ; v, 4 ; ix, 14 ; x, 12 ; xi, 2 ; Esth., xiii, 4 ; Dan., iii, 12 ;

I Mach., iii, 14. Sion, restaurée par Dieu, peut mépriser le roi d’Assyrie. IV Reg., xix, 21. Édom, condamné par Dieu, est l’objet d’un juste mépris. Jer., xlix, 15 ; Abd., i. 2. Sion coupable est méprisée de ceux qui autrefois l’aimaient, Jer., iv, 30, et l’honoraient, Lam., i, 8 ; iii, 45. — 2° Il y a des mépris qui ne sont pas justifiés. G’e^t sans aucune raison valable qu’on méprise quelqu’un parce qu’il est malheureux, Job, xii, 5 ; parce qu’il est pauvre, quoique sage, Eccle., IX, 16 ; parce qu’il est jeune, I Tim., iv, 12 ; malgré son intelligence, Eccli., xxvi, 26 ; à cause de sa mine, Eccli., xi, 2 ; parce qu’il tient à des observances inoffensives. Rom., xiv, 3, 10. Souvent pourtant le serviteur de Dieu est petit et méprisé. Ps. cxix (cxviii), 141. Mais Dieu défend de mépriser les petits, Matth., xviii, 10. Il se sert d’eux, bien que méprisés du monde, pour anéantir ce qui est. I Cor., i, 28. — Quand on sert deux maîtres, on en méprise un, c’est-à-dire qu’on a nécessairement pour l’un moins d'égards que pour l’autre. Luc, xvi, 13. Tobie, xiii, 16, maudit ceux qui mépriseront Jérusalem. Les officiers d’Holopherne trouvaient qu’on ne pouvait mépriser une nation qui avait d’aussi belles femmes que Judith. Judith, x, 18. Saint Paul veut qu’on préfère les plus méprisés des chrétiens, c’est-à-dire les plus humbles d’entre eux, aux juges païens, pour dirimer les différends entre les frères. I Cor., vi, 4. Il félicite les Galates de ne l’avoir pas méprisé malgré sa maladie. Gal., IV, 14.

II reprend ceux qui, à Gorinthe, lui reprochent d'être énergique de loin, mais faible et méprisable de près. II Cor., x, 10. — Les mépris déraisonnables viennent de méchants qui ne trouvent que matière à mépris dans la mort du juste. Sap., iv, 18. Qu’ils apparaissent, le mépris vient avec eux, Prov, , xviii, 3 ; qu’on les chasse, le mépris cesse. Prov., xxii, 10. Le passage de Prov., xviii, 3, se lit en hébreu : « Quand vient le méchant, vient aussi le mépris, bà' gam bûz. » Les Septante et la Vulgate ont lu : « Quand vient le méchant be'àgam, dans le marécage, » dans l’abîme, « mépris, » il méprise, il n’a pas souci de sa situation. — 3° Il y a des mépris gravement coupables : le mépris envers une mère devenue vieille, Prov., xxiii, 22 ; envers un père affaibli par l'âge, Eccli., iii, 15 ; envers le vieillard en général, Eccli., viii, 7 ; le mépris de l’esclave chrétien pour son maître, chrétien comme lui, I Tim., vi, 2 ; le mépris envers l’autorité souveraine, II Pet., ii, 10 ; Jud., 8 ; le mépris pour le ministre de l'Église, à cause de sa jeunesse. I Tim., iv, 12 ; Tit-, ii, 15 ; 1 Cor., xvi, 11. Job se rend cette justice, qu’il n’a jamais méprisé les droits de ses serviteurs. Job, xxxi, 13. Les grands de Perse craignirent que l’exemple de Vasthi n’apprît aux femmes à mépriser leurs maris. Esth., i, 17.

H. Lesêtre.

1. MER (hébreu : ydm ; Septante et Nouveau Testament : Qâlaoaa, excepté II Mach., v, 21 ; Act., xxvii, 5, où l’on trouve îté), ayoç, que la Vulgate a traduit par pelagus, rendant partout ailleurs par mare le mot hébreu ou grec), nom générique ou particulier donné dans la Bible à de vastes étendues d’eau.

I. Nom. — L’hébreu yâm, que l’on rencontre dans toutes les langues sémitiques, se rattache, selon Gesenius, Thésaurus, p. 598, à la racine inusitée, yâmam, identique à hâmam et hâmàh, « frémir, s’agiter avec bruit, » le hé initial permutant avec le yod. L'Écriture 981

MER — MER D’AIRAIN

982

prend le mot « mer » tantôt dans un sens large, tantôt dans un sens restreint. Dans la cosmogonie mosaïque, elle définit elle-même par miqvêh ham-mayim, « rassemblement des eaux, s l’ensemble des mers, yanvmîm, en tant que distinct de la terre « sèche », hay-yabâsàh. Gen., i, 10. Cette acception générale se retrouve ailleurs, principalement dans les livres poétiques, où la mer n’est considérée que dans ses conditions physiques, comme une des grandes œuvres de Dieu, et fournissant matière à des images, à des comparaisons. Cf. Exod., xx, 11 ; Deut., xxx, 13 ; Job, vii, 12 ; ix, 8 ; Ps. xxm (hébreu : xxiv), 2 ; lxiv(lxv), 8 ; lxxxvih(lxxxix), 10 ; Is., v, 30, etc. Envisagé sous ce rapport, l’hébreu yâm a pour correspondant, dans le parallélisme synonymique, (ehôm, « l’abîme. » Cf. Job, xxviii, 14 ; xxxviii, 16 ; Ps. cxxxiv (cxxxv), 6, etc. Voir Abîme, t. i, col. 52.

II. Mers dans l’Écriture. — Le mot s’applique souvent â quelques mers particulières qui avoisinent la Palestine, sans même que le nom propre y soit toujours ajouté. Le nom de la Mer Rouge (hébreu : yam-Sûf ; Septante, i ipj8poc OâXoccrcra) revient à chaque instant dans les récits qui ont trait à la sortie d’Egypte. Cf. Exod., x, 19 ; xiii, 18 ; xiv, 2, 9, 16, 21, etc. Voir Rouge (Mer). La Méditerranée est fréquemment mentionnée à propos des limites de la Terre Sainte sous les dénominations de yâm hâ-ahârôn, « mer postérieure, » c’est-à-dire « occidentale », Deut., xi, 24 ; yâm PeliSfîm, « mer des Philistins, » Exod., xxiii, 31 ; yâm hag-gâdôl, « la grande mer, » Num., xxxiv, 6, 7 ; Jos., i, 4 ; ix, 1, etc. Voir Méditerranée (Mer), col. 927. — 3° Il se restreint même aux deux grands lacs de Palestine : La Mer Morte ou « mer de Sel », yâm-ham mêlai}., Gen., xiv, 3 ; « mer du Désert, » yâm hâ-’Arâbâh, Deut., iv, 49 ; « mer orientale, » yâm haq-qadmônî, Joël, ii, 20 ; Zach., xiv, 8 ; voir Morte (Mer) ; et le Lac de Tibériade, appelé yâm Kinnérét, Num., xxxiv, 11 ; Jos., xii, 3 ; xiii,

, 27 ; ꝟ. 9âXa<r<ra t^ ; raXiXaîa ; , « mer de Galilée, » Matth., IV ; 18 ; xv, 29, etc. ; r, eiXaaaa ty] ? TiêepiâSo ; , « mer de Tibériade. » Joa., xxi, 1. "Voir Tibériade (Lac de). — 4° Bien plus les prophètes s’en servent parfois pour désigner deux grands fleuves : le Nil, Is., xix, 5 ; Ezech., xxxii, 2, et l’Euphrate. Jer., li, 36. — 5° Enfin ls mot yâm est employé pour indiquer « l’ouest » de la Palestine, la Méditerrannée formant la limite occidentale de ce pays. On trouve alors des expressions comme celles-ci : ruâh yâm, « le vent d’ouest, » Exod., x, 19 ; pe’af-yâm, « le côté occidental, » Exod., xxvii, 12 ; xxxviii, 12 (hébreu) ; yammâh, avec le hé local, « vers l’ouest. » Gen., xxviii, 14 ; Exod., xxvi, 22. — La « mer de Jazer », dont il est question Jer., xlviii, 32, n’est sans doute due qu’à une faute du texte. Voir Jazer, t. iii, col. 1150. — Hyperbo-Hquement, le mot « mer » s’applique à un vaste bassin d’airain, yâm han-nehôSét, destiné aux ablutions des prêtres et placé dans le parvis intérieur du Temple de Salomon. III Reg., vii, 23. Voir Mer d’airain, col. 982.

III. Ce qu’a été la mer pour les Hébreux. — La mer n’a pas été pour les Hébreux, comme pour d’autres peuples, un moyen d’expansion, une source de richesses, excepté sous le règne de Salomon, III Reg., ix, 26-28, car le peuple choisi n’était pas destinéA^tre un peuple de marins. Mais elle a été pour eux ce Qu’elle est pour tout homme qui sait comprendre les grands spectacles de la nature, une image et une voix : l’image de l’infinie grandeur, de l’immensité du Dieu qui l’a créée, la voix de sa puissance. Comme le ciel, comme les montagnes, elle provoque en eux et en nous, avec le Sentiment de notre néant, l’hommage de l’adoration. Les poètes sacrés et les prophètes ont mieux que personne saisi, éprouvé l’un et l’autre. Ps. lxviii (lxix), 35 ; lxxxviii {lxxxix), 10 ; xciv (xcv), 6, etc. Aucune poésie profane n’a dépassé la magnifique description de Job, xxxviii,

a-ii :

Qui donc a enfermé la mer dans ses digues,

Lorsqu’elle sortait impétueuse du sein maternel ;

Quand je lui donnai les nuages pour vêtement,

Et pour lange » d’épais brouillards ;

Quand je lui imposai ma loi,

Que je l’entourai de portes et de verroux ;

Que je lui dis ; Tu viendras jusqu’ici, et tu n’iras pas

Ici se brisera l’orgueil de tes’flots ? [plus loin ; ]

Aucune des beautés de la mer n’a échappé aux auteurs inspirés : son immensité, la profondeur de ses abîmes, le soulèvement et le bruit de ses flots, la vie qu’elle renferme en son sein avec ses innombrables poissons, les voies qu’elle ouvre aux navigateurs :

Voici la vaste mer, aux immenses bras ;

Là fourmillent sans nombre

Des animaux petits et grands.

Là se meuvent les navires,

Et le léviathan que tu as tait pour s’y jouer.

Ps. cm <civ), 25, 26.

La mer offre en même temps à l’écrivain sacré une foule d’images. Les impies sont comme la mer agitée, qui ne peut s’apaiser, et qui gonfle ses flots pour produire de l’écume et de la vase. Is., lvii, 20. La douleur de Jérusalem ruinée est grande comme la mer. Lam. il, 13. Celui qui prie sans confiance est semblable au flot de la mer sans cesse agité et poussé de côté et d’autre par le vent. Jac, i, 6. Les pécheurs sont comparés aux vagues furieuses de la mer, qui rejettent l’écume de leurs infamies. Jude, 13. Les multitudes de peuples ressemblent à une grande mer, qui répand au loin le bruit de ses vagues frémissantes. Is., xvii, 12. Elles sont souvent aussi assimilées au sable de la mer. Gen., xxii, 17 ; Jos., xi, 4, etc. — Pour les rapports de la mer avec la Palestine, voir Méditerranée (Mer), col. 927.

A. Legendre.

2. MER DE GALILÉE. Voir Tibériade (Lac De).

3. MER DE SEL OU TRÈS SALÉE. Voir MORTE (Mer).

4. MER DES PHILISTINS. Voir MÉDITERRANÉE.

5. MER DU DÉSERT. Voir Morte (Mer).

6. MER (GRANDE). Voir MÉDITERRANÉE.

7. MER MÉDITERRANÉE. Voir MÉDITERRANÉE, col.927.

8. MER MORTE. Voir Morte (Mer).

9. MER OCCIDENTALE. Voir MÉDITERRANÉE (MER), col. 927.

10. MER ORIENTALE. Voir Morte (Mm).

11. MER ROUGE. Voir Rouge (Mer).

    1. MER D’AIRAIN##

MER D’AIRAIN, vaste bassin d’airain que Salomon fit fabriquer pour le service du sanctuaire, et qui était destiné à remplacer la cuve d’airain que Moïse avait fait fondre autrefois, avec les miroirs des femmes, pour le service du Tabernacle. Exod., xxxviii, 8. Le culte consistant principalement en sacrifices sanglants, l’eau était indispensable pour laver les victimes et les prêtres. De là, chez les peuples anciens, le besoin d’accumuler l’eau dans de grands réservoirs pour le service des temples. Voir le vase d’Amathonte destiné à cet usage (fig. 255).— 1° Dans sa campagne contre Adarézer, roi de Soba, voir t. i, col. 212, David prit une grande quantité de cuivre, dont ensuite Salomon employa une partie pour faire la mer d’airain, yâm han-nehosé(, 6âXa<T<ra f, x a ^* ?j) mare xiieum. I Par., xviii, 8. Le Tyrien Hiram fondit les difféMER D’AIRAIN

984

jentes pièces qui devaient composer la mer d’airain dans la vallée du Jourdain, entre Sochoth et Sarthan. Voir la carte du Jourdain, t. iii, col. 1726. La terre argileuse qui se trouvait dans cet endroit lui permettait de faire les

t

, V :

-1

255. — ^usl dvuu !  ! i"P>. D’après l’original. Musée du Louvre. (1-85 de hauteur, 2-20 de diamètre.)

vastes moules dans lesquels il coula ensuite le métal. III Reg., vii, 46 ; II Par., iv, 17. Les pièces furent nécessairement coulées chacune à part, puis transportées k Jérusalem, où le montage dut se faire sur place.

2° La mer fondue, yâm mûçâq, mare fusile, se composait d’un bassin circulaire et de sa base. Le bassin avait dix coudées d’un bord à l’autre et cinq de hauteur. Il s’agit ici très vraisemblablement non de la coudée vulgaire, de m 450, mais de la coudée du Temple, de m 525. Voir Coudée, t. ii, col. 1060, 1061. Le bassin avait donc 5 m< 2ô de diamètre et 2 m 625 de haut. Le tour du bassin était de trente coudées, soit de lô^oX). La mesure est approximative, le rapport du diamètre à la circonférence donnant 16 m 493. La contenance de la mer d’airain est évaluée en baths, le bath équivalant à 38 lit. 88 ; elle était de 2000 baths, soit 777 hectol. 60, d’après III Reg., vu, 26, et de 3000 baths, soit 1166 hectol. 66, d’après

256. — Essai de restitution de la mer d’airain. D’après Smith, Dict. ofthe Bible, t. iii, col. 1176.

II Par., iv, 5, et Josèphe, Ant. jud., VIII, iii, 5. Or, en prenant pour bases de calcul les mesures données pour la largeur et la hauteur de la pièce, et même en la supposant parfaitement cylindrique, on ne lui trouve qu’une capacité de 564 hectolitres, si on compte d’après la coudée du Temple, et 357 hectolitres, d’après la coudée vulgaire. Mais comme le bassin avait une palme, soit m 086 d’épaisseur, et que le bord supérieur s’évasait en forme de lis, la capacité en était certainement inférieure à celle d’un cylindre ayant la largeur et la hauteur indiquées. II faut donc en conclure que les chiffres ont souffert. Toutefois les dimensions en largeur et en profondeur

sont identiques dans les livres des Rois et des Paralipomènes, et ces dimensions étaient plus faciles à vérifier, quand on le voulait, que la capacité. Il est donc probable que l’erreur de transcription porte sur les baths. En adoptant le chiffre de 1000 baths, soit 388 hectolitres, on

257. — Essai de restitution de la mer d’airain. D’après Babelon, Archéologie orientale, p. 242.

se rapprocherait asseï, semble-t-il, de la réelle contenance de la mer d’airain. On a pensé aussi que la mer d’airain pouvait avoir une base, comme le bassin d’airan, que Moïse avait fait placer dans le sanctuaire pour les ablutions des prêtres, Exod., xxx, 17-20, et que cette base formait une sorte de bassin inférieur contenant aussi une certaine quantité d’eau pour les ablutions, II Par., iv, 6, ce qui permettrait d’atteindre les 2000 baths du texte. Mais cette supposition s’accorde peu avec la description de III Reg., vii, 23-26, qui fait reposer la mer d’airain directement sur les bœufs’d’airain, et ne parle de bases que pour les dix bassins roulants. III Reg., vu, 27-35. Il se peut enfin que la forme d’hémisphère que Josèphe, Ant. jud., VIII, iii, 5, attribue à la mer d’airain

258. — Grands bassins devant un temple. Bas-relief assyrien. D’après Botta, Monument de Ninive, pi. 141.

ait comporté à la partie médiane un renflement de diamètre plus considérable que le diamètre supérieur, ce qui augmenterait beaucoup la capacité du récipient (fig. 256). Il paraît pourtant naturel que le diamètre assigné à la mer d’airain ait été pris dans sa plus grande largeur.

3° La mer d’airain avait une ornementation particulière. Au-dessous du bord, deux rangs de coloquintes 985

MER D’AIRAIN

986

faisaient le tour de la mer. Voir Coloquinte, t. ii, col. 859. Il y en avait dix par coudée ; elles mesuraient donc 0°052 de diamètre, et elles avaient ; été coulées avec la masse. Le bord lui-même affectait la forme d’un bord de coupe en fleur de lis. Douze bœufs d’airain portaient le vaste bassin sur leurs croupes tournées vers le centre. Ils étaient disposés en quatre groupes de trois, la tête tournée vers les quatre points cardinaux. III Reg., vii, 24-26 (fig. 257). Cf. Babelon, Manuel d’archéologie orientale, Paris, 1888, p. 242. Il est très probable que la mer d’airain était pourvue de conduits par lesquels l’eau se déversait, sans qu’on fût obligé de monter au sommet pour y puiser. Elle était alimentée par l’eau des sources situées au sud de Bethléhem, jaillissant à une soixantaine de mètres au-dessus de la plate-forme du Temple et amenées à Jérusalem par tout un système d’aqueducs. Voir Aqueduc, t. i, col. 799, 800. On n’a aucune donnée sur le procédé employé pour faire arriver l’eau dans la mer d’airain. Ce vaste bassin fut appelé

259 Essai de restitution d’un bassin mobile.

D’après Babelon, Archéologie orientale, p. 243. « mer » à cause de ses dimensions. Il était naturellement immobile sur ses lourdes bases. Il occupait un emplacement au côté droit du Temple, au sud-est, par conséquent à gauche quand on entrait dans le parvis des prêtres, entre le parvis d’Israël et l’autel. III Reg., vii, 39. Par la suite, le roi Achaz, dans les transformations qu’il fit subir au Temple pour le conformer au goût assyrien, fit enlever les bœufsqui soutenaient la mer d’airain et les remplaça par une base de pierre. IV Reg., xvi, 17. Il craignait sans doute que son allié et son protecteur, le roi d’Assyrie, s’il venait jamais à Jérusalem, fût choqué de voir servir de soutien à un bassin des taureaux qu’on regardait à Ninive comme des représentations de la divinité. Voir Chérubin, t. H, col. 666. Après la prise de Jérusalem, la mer d’airain fut mise en pièces par les Chaldéens, qui emportèrent le métal à Babylone. IV Reg., xxv, 13. Dans le second Temple, la mer d’airain fut remplacée par un kîyyôr, ou bassin dans lequel arrivait l’eau d’Étham. Le grand-prêtre Simon, fils d’Onias, fit des travaux pour l’adduction de l’eau en quantité abondante. Eccli., ii, 3. Le bassin d’airain était pourvu de deux ouvertures par lesquelles l’eau coulait. Pour plus de commodité dans le service des prêtres, Ben Katin porta les ouvertures au nombre de douze. Il inventa également une sorte de pompe en bois qui, ajustée au bassin, permettait de le vider le soir et de le remplir le matin, les docteurs ayant jugé que la souillure atteignait tout ce qui restait dans un des récipients du sanctuaire pendant la nuit. Cf. Yoma, iii, 10 ; Tamid, iii, 8 ; Middoth, m, 6 ; Clemens, De labro xiieo, Utrecht, 1725, et dans

le Thésaurus d’Ugolini, t. xrc ; Reland, Antiquitates sacrée, Utrecht, 1741, p. 57.

4> L’idée de la mer d’airain peut avoir été inspirée par

260. — Modèle de vase à roues de Larnaca.

D’après Furtwangler, Sittungsberichte der phil. Classe der

K. Bayer. Akademie, part, ii, 1899, p. 411.

des ustensiles analogues en usage dans les pays chaldéens (fig. 258). On a retrouvé à Ninive des bassins ayant près de deux mètres de large ; on en voit plusieurs, sculptés dans les bas-reliefs, qui sont portés par des bœufs. Cf. Layard, Nineveh and Babylon, Londres, 1853, p. 180. Les anciens Chaldéens fondaient de vastes bassins qu’ils

261. — Autre vase à roues d’EnkÔmi (Chypre). D’après Furtwangler, Sitzungsberichte, 1899, part, ii, p. 414.

plaçaient à la porte de leurs temples pour servir à la purification des adorateurs ; ils donnaient à ces vases le nom à’abzou, le même qui sert à désigner l’océan céleste au sein duquel le monde repose. À Lagasch, le roi Ourninà avait ainsi établi une « t grande mer » et une « petite mer », Cf. Sayce, dans les Records of tfie Past, sér. ii, t. i, p. 65, note 1 ; Maspero, Histoire ancienne des peuples de l’Orient classique, Paris, t. i, 1895, p. 756. 987

MER D’AIRAIN — MÉRARITES

5° Pour compléter l’utilité de la mer d’airain, Salomon fit exécuter dix bassins ayant chacun quatre coudées, soit 2 m 10, de large, et contenant 40 baths, soit 15 hectol. 55. La hauteur n’est pas indiquée. Si elle était seulement de deux coudées, soit IKS, et que le bassin fût cylindrique, la capacité de ce dernier montait déjà à plus de 70 hectolitres. La largeur attribuée au bassin comprend donc ses ornements extérieurs ; quant à sa profondeur, elle devait être médiocre. Chaque bassin était monté sur une base d’airain, composée de quatre panneaux ajustés à angle droit et décorés de chérubins, de lions, de palmes et de guirlandes. Cette base quadrangulaire avait quatre coudées, soit 2 m 10 de côté, et trois coudées, soit l ra 57 de hauteur. L’ensemble était monté sur quatre roues d’airain. Au-dessus de la base quadrangulaire était un cercle d’une demi-coudée, soit m 26 de hauteur, servant sans doute à relier la base au bassin lui-même. Aux quatre coins, des espèces de consoles assuraient la stabilité des différentes pièces. Malgré l’imprécision de cette description, on a essayé diverses restitutions (fig. 259) des bassins mobiles, mais elles ne sont pas satisfaisantes. Des bronzes découverts dans l'île de Chypre donnent une idée un peu plus nette de ce que pouvaient être ces bassins, sauf quant aux dimensions. On a trouvé à Larnaka un bassin de bronze composé d’une vasque hémisphérique, montée sur des pieds qui sont eux-mêmes pourvus de roulettes (fig. 260). L’ensemble a 0-39 de haut et 0-33 de large ; il pèse 9 kilogrammes 25. Ce petit meuble est d’une grande simplicité. Cf. A. Furtwângler, dans les Sitzungsberichte der philosoph.-philolog. und histor. Classe der kônig, bayer. Akademie der Wissenschaften, Munich, part, ii, 1899, n. 3 ; B. Stade, dans la Zeitschrift fur die alltestam, Wissenseha.fi, 1901, p. 145. D’après le texte biblique, les bassins du Temple auraient été un peu plus compliqués de forme, probablement à raison de leurs plus grandes dimensions. Un autre meuble analogue à celui de Larnaka a été trouvé à Enkômi (fig. 261). Mais il est assez mal conservé. Cf. A. Murray, dans le Journal of Royal Instit. of Brilish Architects, VU, 1899, p. 20.

— Les bassins étaient placés cinq à droite et cinq à gauche, à l’entrée du parvis des prêtres. III Reg., vii, 27-39 ; II Par., iv, 6. Le texte ne dit pas de quelle manière étaient alimentés les dix bassins. Il est peu probable que l’eau qui leur était destinée fût puisée dans la mer d’airain ; on roulait sans doute ces bassins jusqu'à une prise d’eau disposée de telle manière que le liquide pût se déverser dans ces récipients dont l’ouverture se trouvait à environ trois mètres de hauteur. L’eau coulait en bas par des conduits ménagés dans les bases quadrangulaires ; elle servait spécialement à laver les diverses parties des victimes offertes en holocauste. II Par., iv, 6. Cf. Josèphe, Ant. jud., VIII, iii, 6. Le roi Achaz fit enlever les bases d’airain qui supportaient les bassins. IV Reg., xvi, 17. Plus tard les Chaldéens les retrouvèrent dans le Temple et les emportèreat. IV Reg., xxv, 13.

H. Lesêtre.
    1. MÉRAIOTH##

MÉRAIOTH (hébreu : Merayôt), nom de deux ou trois descendants d’Aaron. La Vulgate l’a écrit Maraïoth dans plusieurs passages. Voir Maraïoth, col. 711.

1. MÉRAIOTH (Septante : MapiïjX ; Alexandrinus : MapatiiB), grand-prêtre, descendant d’Aaron parÉléazar, fils de Zaraïas et père d’Amarias. I Par., vi, 6-7, 50-52 (hébreu, v, 32-33 ; vi, 35-37). Esdras le compte parmi ses aïeux. I Esd., vii, 3. Dans ce passage, la Vulgate (voir col. 712) écrit son nom Maraïoth (Septante : MapetiB). Divers commentateurs croient que le Merayôt (Vulgate : Maraïoth ; Septante : MapaftiO ; Alexandrinus : Maptcifl) nommé, I Par., ix, 11, et II Esd., XI, 11, entre Sadoc et Achitob, est le père d’Amarias, qui ne se trouverait à cette place que par transposition. Achitob et Sadoc étaient ses descendants par son fils Amarias. D’après Lightfoot, A Prospect of the Temple Service, iv, 1, dans ses Works,

2 in-f », Londres, 1684, t. i, p. 907, il aurait été le prédécesseur immédiat du grand-prêtre Héli dans le souverain sacerdoce et c’est à sa mort que le pontificat serait passé de la ligne d'Êléazar dans celle d’Ithamar.

2. MÉRAIOTH, prêtre, fils de Sadoc et père d’Achitob.

I Par., ix, 11 ; II Esd., xi, 11. D’après plusieurs commentateurs, il n’y aurait aucune interversion dans ces' deux passages des Livres Saints et ce Méraioth serait différent du précédent. Voir Méraioth 1.

3. MÉRAIOTH (Septante : M « ptwe), chef d’une famille sacerdotale qui était représentée par flelci (t. iii, col. 565), du temps du grand-prêtre Joacim. II Esd., xil, 15. La Vulgate écrit son nom Maraioth. Voir Maraïoth 2, col. 712. Certains commentateurs l’identifient avec le Merimuth de

II Esd., xii, 3. Voir Merimuth et Marimuth 1, col. 820.

    1. MÉRALA##

MÉRALA (hébreu : Mar'âlâh, « tremblant [?] ; » Septante : MayeXSà), ville frontière de la tribu de Zabulon, sur les confins d’Issachar, entre Sarid et Debbaseth, Jos., xix, 11. L’identification n’en est pas certaine, mais on peut placer avec probabilité le site de Mérala à Ma’lûl, au sud-ouest de Nazareth, au nord de Tell' Schordûd (Sarid), à l’ouest de Debûriyeh (Dabéreeth, t. ii, col. 1195) et au nord-est de Djébata (Debbaseth, t. ii, col. 1327). Ma’lûl est un village situé sur le sommet d’une colline où l’on remarque des d ébris antiques, pierres sculptées, fragments de colonnes et les ruines d’une ancienne église ; aux alentours sont des tombeaux creusés dans le roc. À quelque distance est la fontaine de 'Aïn Ma’lûl. Porter, Handbook for Syria and Palestine, 1868, p. 364. Voir la carte d’IsSACHAR, t. iii, vis-à-vis la col. 1007 : V. Guérin, Galilée, t. i, p. 387-390, a identifié MaHul avec Nahalal. Cette identification paraît moins probable.

    1. MÉRARI##

MÉRARI (hébreu : Merdrî, « triste ; » Septante : Mspapi), nom de deux Israélites.

1. MÉRARI, troisième et dernier fils de Lévi. Gen., XLvi, 11 ; Exod., vi. 16 ; Num., iii, 17 ; I Par., vi, 1, 16 ; xxiii, 6. Tout ce que nous savons de sa personne se réduite ces deux points -, il accompagna Jacob en Egypte, Gen., XL vi, 11, et il eut deux fils, Moholi et Musi. Exod., vi, 19 ; Num., jii, 20 ; I Par., vi, 19, 29 ; xxiii, 21. Mais sa descendance joua un rôle important dans la suite de l’histoire sainte : elle forma, sous le nom de Mérarites, la troisième grande division des lévites. Voir Mérarites.

— I Par., xxiv, 26-27, attribue d’autres fils, entre autres Oziaù, à Mérari, mais ce passage paraît altéré. Voir Oziaû.

2. MÉRARI, de la tribu de Siméon, fils d’Idox et père de Judith, la libératrice de Béthulie. Judith, viii, 1 ; xvi, 8.

    1. MÉRARITES##

MÉRARITES (hébreu : ham-Merarî ; Septante : A Mapapt), famille de lévites, descendant de, Mérari. Num., xxvi, 57. La Vulgate les appelle Meraritæ dans ce passage et Num., iv, 33. Partout ailleurs ils sont désignés sous le nom de « fils de Mérari ». Num., iv, 29, etc.

1° Pendant l’exode. — À l'époque de la sortied'Ëgypte, ils étaient divisés en deux branches, les Moholites et les Musites. Num., iii, 33. Le chef des Mérarites était alors Suriel, fils d’Abihaïel. Le nombre de ses membres était de six mille deux cents âgés d’un mois et au-dessus, Num., iii, 34-35, et de trois mille 'deux cents âgés de trente à cinquante ans. Num., iv, 42-45. Ils furent placés sous la direction d’Ithamar, fils d’Aaron, et chargés, dans le désert du Sinaï, de porter, en qualité de descendants du plus jeune des fils de Lévi, les parties les moins importantes des ustensiles sacrés, les planches du tabernacle, ses colonnes et ses bases, les colonnes du parvis avec les pieux et les cordages et tout l’ameublement qui en dépendait. Num., iii, 36-37 ; iv, 31-33. Pour transpor » '989

MÉRARITES — MERCENAIRE

990,

ter ce lourd matériel, ils reçurent quatre chariots et huit bœufs. Num., vii, 8. En marche, ils suivaient immédiatement, avec les Gersonites, l'étendard de Juda et précédaient ainsi l'étendard de Ruben. Num., x, 11-18. Ils occupaient cette place, afin d’arriver les premiers des lévites au campement avec les Gersonites et de pouvoir dresser le tabernacle de sorte qu’il fût prêt à recevoir le sanctuaire qui était porté par les Caathites, derrière la tribu de Ruben. Num., x. 21. Pendant les campements, les fils de Mérari campaient au nord du tabernacle. Num., iii, 35. Lors du second recensement des Lévites fait par Moïse et Éléazar dans les plaines de Moab, près du Jourdain, les deux branches de Mérarites, les Moholites et les Musites, furent dénombrées avec leurs frères, mais l’auteur sacré ne donne que le total général des lévites, qui fut de vingt-trois mille depuis un mois et au-dessus. Num., xxvi, 57-62.

2. Sous Josué. — Il n’est plus question des fils de Mérari jusqu’au partage de la Terre Promise. À cette époque, on leur assigna pour leur part douze villes avec leurs faubourgs, quatre dans la tribu de Zabulon : Jecnam (t. iii, col, 1213), Cartha (t. H, col. 324), Damna (t. ii, col. 1231) et Naalol ; quatre dans la tribu de Ruben : Bosor, Jaser (voir Jasa, t. iii, col. 1138), Cadémoth (t. ii, col. 12), (Jethson) (t. iii, col. 1523) et Méphaath (la Vulgate ajoute en trop Misor) ; et enfin quatre dans la tribu de Gad : Ramoth de Galaad, qui fut une ville de refuge pour les meurtriers, Manaïm ou Mahanaïm (col. 571), Hésébon (t. iii, col. 657) et Jaser (voir Jazer, t. iii, col. 1150). Jos., xxi, 7, 34-40. Cette liste des villes mérarites se retrouve dans I Par., vi, 63, 77-81, à quelques différences près. Deux des villes de Zabulon, Jecnam et Cartha, sont omises ; Damna est devenue Remmono, leçon qui paraît assez probable (voir Damna, t. ii, col. 1231 et Naalol a été transformé enThabor, changement qu’il est difficile d’expliquer. Voir Jethson, Naalol et Thabor 2.

3° À l'époque des rois. — Nous ne savons rien de l’histoire des Mérarites pendant la période des Juges et le règne de Saûi, en dehors des listes généalogiques, I Par., vi, 44-47 ; mais ils jouèrent un rôle important avec les autres lévites sous le règne de David. Après la conquête de Jérusalem, ils prirent part à la fête de la translation de l’Arche de la maison d’Obédidom à Sion, au nombre de deux cent vingt, sous la conduite d’Asaïa, leur chef (voir Asaïa 3, t. i, col. 1055). I Par. xv, 6. Plusieurs d’entre eux, en particulier Éthan, y figurèrent parmi les musiciens. I Par., xv, 16-19. Ethan (t. ii, col. 2004), appelé aussi Idithun (t. iii, col. 807), devint l’un des trois chefs de chœur de la maison de Dieu, dans l’organisation religieuse établie par David, et il eut ainsi sous ses ordres les Mérarites, qui formèrent un tiers des musiciens et des chantres du Temple, I Par., xxui, 6, 21-23, et furent sous la direction de ses six fils. I Par., xxv, 1, 3, 9-17. Dans les cérémonies sacrées, les fils de Mérari étaient placés à gauche. I Par., vi, 44. Ils servaient les prêtres dans l’oblation des sacrificas et remplissaient aussi, quelques-uns du moins, les fonctions de portiers. I Par., xvi, 41-42 ; lx, 14, 23 ; cf. xxiii, 5-6. — L'Écriture ne nous apprend rien de spécial sur leur histoire, depuis David jusqu'à la captivité de Babylone, excepté sous le règne d'Ézéchias, où^elle énumère des descendants de Mérari parmi les lévites qui purifièrent le Temple. II Par., xxix, 12-15, et sous le règne de Josias, où deux Mérarites, Jahath et Abdias, furent chargés, avec deux Caathites, de diriger les réparations du Temple. II Par., xxxiv, 12.

4 « Après la captivité. — Un certain nombre de Mérarites revinrent de Babylone et de la Chaldée après l'édit de Cyrus et quelques-uns d’entre eux s'établirent à Jérusalem, Séméia, I Par., ix, 14 ; II Esd., xi, 15 ; Obdia. I Par., ix, 16 ; II Esd., xi, 17. D’autres Mérarites accompagnèrent aussi Esdras quand il se rendit en Judée. I Esd., viii, 18-19. — Pour les deux autres branches

lévitiques, voir Caathites, t. i, col. 3, et Gersonites, t. iii, col. 214. F. ViGOUROlïX.

    1. MERCATOR Gérard##

MERCATOR Gérard, géographe, né à Ruppelmonde le 5 mars 1512, mort à Duisbourg le 2 décembre 1594. Après avoir commencé ses études à Bois-le-Duc, il les continua à Louvain, s’appliquant surtout à la philosophie et aux mathématiques. Vers 1559, il se fixa à Duisbourg et reçut le titre de cosmographe du duc de Clèves. Parmi ses ouvrages on remarque : Hamionia Evangelistarum, in-4°, Duisbourg, 1592, dirigé contre Ch. Dumoulin. Citons encore de ce célèbre géographe : Amplissima Terrx Sanctsedescriptio, in-f°, Louvain, 1537 ; Chronologie/, sive temporurn detnonstratio ab initio mundi usque ad annum Christi 1568 ex eclypsibus, observationibus astronomicis, sacrée Scripturse testimoniis et optimis quibusque auctoribus concinnata, in-8', Bâle, 1577. — Voir G. Ghymn, Vie de Mercalor, en tête de l'édition de V Atlas, publiée en 1630 ; Valère André,

Biblioth. Belgica, p. 280.
B. Heurtebize.
    1. MERCENAIRE##

MERCENAIRE (hébreu : sâkîr ; Septante : [u<t6mt('ç ; Vulgate : mercenarius), celui qui est engagé à prix d’argent pour servir ou travailler.

I. Artisans. — 1° Le mercenaire diffère de l’esclave en ce qu’il possède la liberté, ne se loue que pour un temps déterminé et reçoit un salaire. Les Hébreux employaient comme mercenaires soit des compatriotes, soit des étrangers. L’Israélite que la nécessité obligeait à se vendre devait être traité non comme esclave, mais comme mercenaire. Lev., xxv, 40, 50, 53. Il fallait du reste lui rendre la liberté au bout de la sixième année en lui donnant son salaire. Deut, xv, 18. La Loi prescrivait expressément de traiter avec douceur le mercenaire, tant Israélite qu'étranger, et de lui payer son salaire avant le coucher du soleil. Lev., xix, 13 ; Deut., xxiv, 14, 15. Le mercenaire avait droit de se nourrir des fruits spontanés de l’année sabbatique. Lev., xxv, 6. Mais, s’il était étranger, il ne pouvait manger ni la Pàque, Exod., XH, 45, ni les choses saintes offertes dans les sacrifices. Lev, , xxii, 10. — 2° Jacob se loua comme mercenaire chez Laban pour deuxpériodes de septannées. Gen., xxix, 18, 27. Les affamés se louent pour gagner leur pain. I Reg., ii, 6. Salomon, pour la construction du Temple, prit à gage un grand nombre de mercenaires phéniciens et israélites. III Reg., v, 6 ; II Par., ii, 10. Le roi Joas loua' aussi des ouvriers pour réparer l'édifice. Il Par., xxiv, 12. L’ange Raphaël remplit en quelque manière l’office de mercenaire auprès de Tobie. Tob., v, 17. L'Évangile mentionne des mercenaires au service du pêcheur Zébédée, Marc, i, 21, dans la maison du père du prodigue, Luc, xv, 17, 19, à la vigne du père de famille, Matth., xx, 1-8 ; etc. Il était considéré comme dangereux de prendre à gage les insensés et les premiers venus. Prov., xxvi, 10. — 3° La journée du mercenaire était rude, surtout sous le climat palestinien. L’auteur de Job, vii, 1, en fait une image de la vie humaine, et marque la joie du mercenaire à la fin de la fjournée. Job, xiv, 6. Cf. Matth., xx, 12. Les années « comme celles du mercenaire », dont parle Isaïe, xvi, 14 ; xxi, 16, sont des années auxquelles on n’ajoutera pas un seul jour, mais qui seront en même temps des années pénibles. Le mercenaire est naturellement intéressé, et il soupire après son salaire, Job, vii, 2, auquel du reste H a pleinement droit. Matth., x, 10 ; Luc, x, 7 ; I Tim., v, 18. Il ne faut donc pas faire tort au mercenaire, qui use sa vie au service de celui qui l’emploie. Eccli., vii, 22. Le frauder serait commettre une sorte d’homicide. Eccli., xxxiv, 27. La question du salaire des mercenaires revient assez souvent dans la Sainte Écriture, Lev., xix, 13 ; Tob., rv, 15 ; Agg., i, 6 ; Mal., lii, 5 ; Jacob., v, 4 ; etc., ce qui donne à penser que les règles de la justice avaient besoin d'être rappelées à ce sujet. Voir Salaire. De son côté, le

mercenaire envisageait surtout son gain ; son dévouement n’égalait pas celui du propriétaire qui travaille pour son avantage personnel. Joa., x, 12, 13. Dans ce passage, Notre-Seigneur compare le faux pasteur au mercenaire qui ne sait pas donner sa vie pour son troupeau.

II. Soldats. — Au temps des Juges, Abimélech employa soixante-dix sicles d’argent à se constituer un corps de misérables et de gens prêts à tout pour l’aider dans ses projets ambitieux. Jud., ix, 4. Sur les mercenaires engagés dans l’armée à l’époque d’Amasias, IV Reg., viii, 2022 ; II Par., xxv, 6, et sous les Machabées, voir Armée chez les Hébreux, 1. 1, col. 981. Pour se défendre contre David, les Ammonites enrôlèrent des mercenaires recrutés en Syrie et dans les pays voisins. II Reg., x, 6 ; I Par., xix, 6, 7. Pendant que Bénadad, roi de Syrie, assiégeait Samarie, son armée, prise de panique, s’imagina que les Israélites avaient pris à leur solde des troupes héthéennes et égyptiennes, et elle prit la fuite. IV Reg., vii, 6. Jérémie, xlvi, 21, prédisant l’invasion de l’Egypte par Nabuchodonosor, dit : « Ses mercenaires sont au milieu d’elle comme des veaux engraissés ; eux aussi, ils tournent le dos et fuient sans résistance. » La décadence de l’esprit militaire s’était en effet accentuée chez les Égyptiens depuis les derniers Ramessides. Dès la xxie dynastie, « les mercenaires constituaient la portion la plus effective et la plus vivace des armées pharaoniques. » Cf. Maspero, Histoire ancienne des peuples de l’Orient classique, Paris, t. ii, 1897, p. 765-768. Ces mercenaires étaient des Libyens, qui envahirent ainsi peu à peu la vallée du Nil, y reçurent une haute solde, se firent une vie facile et large et devinrent à la longue les maîtres de leurs maîtres. À la veille de l’invasion chaldéenne, Apriès avait dû recourir aux mercenaires étrangers. Cf. Hérodote, ii, 163. Amasis, qui lui succéda après l’avoir détrôné et eut à subir le choc des Chaldéens, ne put le faire qu’à l’aide des mercenaires. Cf. Maspero, Hist. anc., t. iii, 1899, p. 554-558.

Le général syrien, Timothée, prit avec lui des mercenaires arabes pour attaquer Judas Machabée. I Mach., v, 39. Antiochus Eupator avait aussi des armées mercenaires, utrôwraf, conductitii, 1 Mach., yi, 29. Dans les armées grecques et les armées romaines, tous les soldats étaient mercenaires, en ce sens qu’ils touchaient une solde. Les auxiliaires romains qui servaient en j Palestine à l’époque évangélique se trouvaient naturellement dans ce cas. C’est pourquoi saint Jean-Baptiste les exhortait à se contenter de leur solde. Luc, iii, 14.

H. Lesêtre.
    1. MERCURE##

MERCURE (grec : ’Epiir, ?), un des douze grands dieux de l’Olympe grec (iig. 262). — 1° Il est nommé dans les Actes, xiv, 11 (12). D’après la mythologie, il était fils de Jupiter et de Maïa, fille d’Atlas. Il accompagnait ordinairement son père Jupiter dans ses courses sur la terre, par exemple lorsque l’un et l’autre reçurent en Phrygie l’hospitalité de Philémon et de Beaucis. Ovide, Metam., viii, 620-724. Cf. Fast., v, 495. Ce conte était populaire en Asie Mineure et c’est là sans doute ce qui porta les habitants de Lystre en Lycaonie à s’imaginer que ces deux divinités leur apparaissaient en la personne de Paul et de Barnabe. À la vue d’un paralytique de naissance, qui n’avait jamais marché, et qui fut guéri miraculeusement par saint Paul, la foule émerveillée s’écria en lycaonien : « Les dieux se sont faits semblables aux hommes et ils sont descendus au milieu de nous. » Act., xiv, 10. Ils prirent donc les deux apôtres pour Jupiter et Mercure. Ce dernier, d’après la mythologie, était le messager des dieux, Homère, Odyss., v, 28 ; Hymn. in Herm., 3, et de Jupiter, Odyss., i, 38, 84 ; lliad., xxiv, 333, le dieu de l’éloquence, Odyss., i, 86 ; Horace, Od., i, x, 1 ; ©sô ; ô tûv Xéycov ï|-re[iwv, dit Jamblique. Cf. Roscher, Lexikon, t. i, col. 2362, 2388. Paul ayant porté la parole en cette circonstance devint Mercure à leurs yeux et son compagnon fut Jupiter. On voulut donc les honorer en cette

qualité et leur offrir un sacrifice de taureaux selon les rites païens, ce que les deux missionnaires ne purent empêcher qu’à grand’peine. Act., xiv, 11-17. — Mercure était communément représenté comme un jeune homme élancé et imberbe. C’est à tort que quelques commentateurs ont essayé de se représenter ce qu’était physiquement saint Paul en supposant que les Lystriens avaient dû trouver quelque ressemblance entre sa personne et les statues du dieu. L’Apôtre n’avait ni caducée, ni pétase, ni ailes aux talons, comme le dieu grec. Il fut simplement considéré comme le porte-parole de son compagnon et pris à ce titre pour le dieu Hermès, qu’on qualifiait d’ippuiveûî, interpres Divum. Virgile, Mneid., iv, 356. Cf. W. H. Roscher, Ausfûhrliches Leocikon der griechischen und rômischen Mythologie, Leipzig, t. i, 1884-1890, col. 2342-2432 ; cf. t. ii, col. 2802-2834.

2° Le pétase, nétairoç, chapeau à larges bords dont était coiffé Mercure, apparaît dans II Mach., iv, 12, dans une locution grecque (la Vulgate a traduit par fornix) qui signifie que le grand-prêtre hellénisant Jason (voir Jason 4, t. iii, col. 1141), ayant établi un gymnase à la

262. — Zeus et Hermès. Vase peint. D’après Gerhard, Etrusk Vasen, pi. viii, p. 10.

façon des Grecs, à Jérusalem, « y convoquait les jeunes gens aux exercices gymnastiques. » Cela se disait en grec, >iit> icéiaoov ^ev, parce que le dieu du pétase était le modèle et le protecteur des gymnastes. Cf., sur II Mach., iv, 12, J. Frd. Schleusner, Novus Thésaurus Veteris Testamenti, 1820, t. iv, p. 327.

3° Le dieu Mercure est nommé dans la Vulgate, dans le livre des Proverbes, xxvi, 8. Là où le texte hébreu porte :

C’est attacher une pierre à une fronde Que de rendre des honneurs à un insensé,

La Vulgate dit :

Comme celui qui jette une pierre dans le monceau de Mercure (acervus Mercurii),

Ainsi est celui qui rend honneur à un insensé.

h’acervus Mercurii était un tas de pierres. Nous lisons dans le Liber Glossarum publié dans les Œuvres de saint Isidore de Séville, t. Lxxxm, col. 1360, Mercurius, lapidum congeries in cacumine collium. Cf. Macri, Hierolexikon, 6e édit., 2 in-4°, Bologne, 1765-1767, au mot Acervus Mercurii, t. i, p. 11-12. Saint Jérôme a donc rendu le sens de l’hébreu par une sorte de proverbe latin : honorer un insensé est aussi déraisonnable* que de jeter une pierre dans un tas de pierres, comme qui dirait : jeter une goutte d’eau dans une rivière. Les Septante et la Peschito ont traduit l’hébreu (margêmâh)

par « fronde », comme dans la traduction de l’hébreu ci-dessus, mais d’autres le traduisent par « tas de pierres ». Ainsi Gesenius, Thésaurus, p. 1263. F. Vigouroux,

MERE (hébreu : ’êm, correspondant à l’assyrien ummu, et quelquefois hôrdh ; Gen., xlix, 26 ; Cant., iii, 4 ; Ose. ii, 7, ou yôlédét, Prov., xvii, 25 ; xxiii, 35 ; Jer., xv, 9, deux mots signifiant « celle qui engendre » ; Septante : fi^Ttip, xsxoOffa, xi’xxouaa ; Vulgate : mater, genitrix), celle qui porte en son sein et engendre des enfants.

1° Différents sens du mot. — Outre son sens naturel, le plus ordinairement employé, le mot’êm peut encore désigner, par extension, la belîe-mère, Gen., xxxvii, 10 ; cf. xxxv, 19 ; la grand’mère, III Reg., xv, 10 ; l’ancêtre en général, Gen., iii, 20 ; Ezech., xvi, 3 ; celle qui remplit des fonctions presque maternelles vis-à-vis d’un peuple, Jud., v, 7, et une nation par rapport à ses en-, fants. Is., l, 1 ; Jer., l, 12 ; Ose., iv, 5. Le même mot s’emploie en parlant des animaux. Exod., xxii, 29 ; xxiii, 19 ; Deut., xxii, 6. Par assimilation, on donne le nom de « mère » à ce qui est une cause. Ainsi la sagesse est la mère de toutes sortes de biens et de vertus. Sap., vii, 12 ; Eccli., xxiv, 24. Il en est de même de la justice. Eccli., xv, 2. Babylone est la mère des fornications. Apoc, xvii, 5. La « mère des chemins » est un carrefour, d’où les chemins prennent naissance. Ezech., xxi, 26 (hébreu). Le sépulcre est comme la mère de tous les hommes, parce qu’il les recevra tous dans son sein. Eccli., xl, 1. En renversant la métaphore, Jérémie, xx, 17, eût souhaité que le sein de sa mère fût son sépulcre. Job, xvii, 14, appelle la pourriture du tombeau sa mère, parce qu’il descendra dans son sein. La Jérusalem céleste abritera les enfants de Dieu dans son sein ; c’est pourquoi elle est comme leur mère. Gal., iv, 26. Enfin on nomme « ville-mère » ou métropole, celle qui exerce son action sur d’autres villes inférieures. II Reg., xx, 19. On trouve dans des inscriptions le titre de « mère de la synagogue », attribué sans doute à des femmes qui avaient bien mérité de la communauté, parmi les Juifs de la dispersion. Cf. Corp. inscrip. lat., t. v, n » 4411 ; t. vi, n° 29756. — En donnant le nom de mère, de frères ou de sœurs à ceux qui écoutent sa parole, le Sauveur veut indiquer que, par leur fidélité à la grâce, ses disciples contractent avec lui des liens plus étroits que tous ceux de la nature. Matth., xii, 47, 50.

2° Le sein de la mère. — C’est une malédiction pour la mère d’être stérile. I Reg., xv, 33. En faisant cesser cette stérilité, Dieu rend la mère joyeuse. Ps. cxm (cxii), 9. La femme fidèle aux obligations de la vie chrétienne arrive au salut en engendrant des enfants. I Tim., ii, 15. L’expression « dès le sein de la mère » revient souvent pour marquer que quelqu’un a reçu ou fait telle chose depuis qu’il est au monde. Jud., xiii, 7 ; xvi, 17 ; Job, xxxi, 18 ; Ps. xxii (xxi), 11 ; lxxi (lxx), 6 ; cxxxix (cxxxviii), 13 ; Eccli., xl, 1 ; xlix, 9 ; l, 24 ; Is., xiix, 1 ; Matth., six, 12 ; Luc, i, 15 ; Act, , iii, 2 ; xiv, 1 ; Gal., i, 15, etc. On dit dans le même sens « dès les mamelles de la mère ». Ps. xxii (xxi), 10.

3° Les fils de la mère. — À cause de la polygamie en vigueur chez les Hébreux, les enfants du même père sont distingués entre eux par le nom de leurflière. Voilà pourquoi les historiens sacrés ne manquent’pas de nommer la mère des rois ou des personnages considérables. III Reg., xi, 26 ; xiv, 31 ; xv, 2, 10 ; xxiii, 42 ; IVReg., viii, 26 ; xii, 1 ; xiv, 2 ; xv, 2, 33 ; xviii, 2 ; xxi, 1, 19 ; xxii, 1 ; xxm, 31, 36 ; xxiv, 8, 18 ; I Par., ii, 26 ; II Par., xii, 13 ; xm, 2 ; xx, 31 ; xxii, 2 ; xxiv, l ; xxv, 1 ; xxvi, 3 ; xxvii, 1 ; xxix, 1. On appelait ses frères maternels « fils de ma mère ». Gen., xx, 12 ; Deut., xiii, 6 ; Jud., viii, 19. On aimait ses frères utérins bien plus que les autres, Cant., vm, 1 ; il était plus grave de leur manquer d’égards, Gen., xxvii, 29, et plus cruel d’être maltraité ou. abandonné par eux. Cant., i, 5 ; Ps. l (xlix), 20 ; lxix (lxviii),

PICT. DE LA BIBLE.

9. Par contre, les défauts d’un fils faisaient la honte de sa mère, parce qu’on supposait que les fils du même père, mais d’une autre mère, n’avaient pas ces défauts. Prov., x, 1 ; xxix, 15. Saûl, reprochant à son fils Jonathas son amitié pour David, ne manque pas de lui dire qu’il agit ainsi à la honte de sa mère. I Reg., xx, 30.

4° L’amour maternel. — L’amour de la mère pour l’enfant apparaît souvent dans la Sainte Écriture, C’est Agar qui ne veut pas voir mourir son enfant au désert et pleure loin de lui, Gen., xxi, 14-16 ; la mère de Moïse surveillant son enfant confié aux eaux du Nil, Exod., ii, 2-9 ; Anne prenant soin de son fils Samuel, I Reg., i, 22-24 ; la pauvre prostituée qui paraît au jugement de Salomon et préfère abandonner son fils à sa rivale plutôt que de le laisser périr, III Reg., iii, 26, 27 ; la veuve de Sarepta qui obtient d’Élie le retour de son fils à la vie, III Reg., xvii, 17-24 ; la femme de Sunam dont l’enfant, hiort d’insolation, est ressuscité par Elisée, IV Reg., iv, 18-21, 35 ; la mère de Tobie qui verse des larmes intarissables sur le départ et l’absence de son fils, Tob., v, 23-28 ; x, 4 ; la mère des Machabées qui, par son amour héroïque, encourage ses enfants au martyre, II Mach., vii, 1-41 ; la veuve de Naïm dont la douleur touche le Sauveur, Luc, vii, 12-15 ; la Chananéenne qui brave même le refus si dur en apparence de Notre-Seigneur et obtient la guérison de sa fille. Matth., xv, 21-28 ; Marc, vii, 2430. Parfois même cet amour maternel a toutes les ambitions en faveur de fils chéris. Tel il est chez Rébecca, qui fait bénir Jacob à la place d’Ésaû, Gen., xxvii, 6-46 ; chez Bethsabée, qui arrive à faire sacrer roi Salomon son fils, III Reg., i, 15-31 ; chez la mère des fils de Zébédée, qui veut pour ses fils les deux premières places dans le royaume. Matth., xx, 20-28 ; Marc, x, 35-45, etc. — Au nombre des calamités qui devaient fondre sur Israël infidèle, Moïse avait noté celle-ci : « Au milieu de l’angoise et de la détresse où te réduira ton ennemi, tu mangeras le fruit de tes entrailles, la chair de tes fils et de tes filles. » Deut., xxviii, 53. L’amour maternel ne put empêcher des mères d’en venir à cette extrémité pendant l’horrible famine du siège de Samarie, IV Reg., vi, 28, 29, peut-être pendant celui de Jérusalem par les Chaldéens, Lam., ii, 20 ; iv, 10, et certainement pendant le siège par les Romains. Josèphe, Bell, jud., VI, iii, 4. — L’amour maternel est pris comme terme de comparaison pour caractériser l’amour de Dieu. Comme une mère console son fils, ainsi Dieu consolera Jérusalem. Is., lxvi, 13. Le Très-Haut est plus miséricordieux qu’une mère. Eccli., iv, 11. Notre-Seigneur se compare lui-même à la-poule qui^couvre ses poussins de ses ailes. Matth., xxiii, 37.

5° Le rôle de la mère. — Chez les Hébreux, c’était le père qui exerçait l’autorité dans la famille ; mais c’était à la mère, comme dans tous les pays où la polygamie est en usage, qu’était réservée l’éducation des enfants. Chaque mère de famille habitait ordinairement à part avec ses enfants, séparée des autres femmes et des autres enfants de son mari ; c’était le seul moyen d’éviter les querelles trop fréquentes et trop vives suscitées par la jalousie des diverses épouses du même homme. Celui-ci, d’ailleurs, ne pouvait s’occuper lui-même d’élever ses enfants, à cause de leur trop grand nombre et de ses occupations extérieures. L’éducation des enfants étant réservée à la mère, on comprend combien il était important que les Hébreux n’épousassent point des femmes païennes. — Au point de vue des transactions, du mariage des enfants, des rapports sociaux, la mère n’avait qu’un rôle secondaire. Dans certains cas, cependant, elle intervenait à défaut du père de famille. Ainsi Agar, dont Abraham ne peut plus s’occuper, cherche elle-même une femme pour son fils Ismaël. Gen., xxi, 21. Rébecca en réfère directement à sa mère des choses qui la concernent, probablement à cause du grand âge ou peut-être de la mort de son père Bathuel. Gen., xxiv, 28, 55. Voi*

IV. - 32

    1. BATHCEL##

BATHCEL, t. i, col. 1508. Dans la suite des temps, quand la polygamie disparut peu à peu, il y eut moins de raisons pour qu’une mère de famille traitât avec indépendance les affaires de ses enfants. En général, la mère occupait dans la société israélite une place beaucoup plus grande et beaucoup plus honorée que chez les autres peuples. Tous les égards lui étaient assurés grâce à renseignement des Livres Saints qui, dès leurs premiers récits, présentaient la femme comme une aide semblable à l’homme, pour laquelle celui-ci devait quitter fnéme son père et sa mère. Gen., ii, 18, 24. Le livre des Proverbes, xxxi, 10-31, trace un beau portrait de la mère de famille, telle qu’on la concevait chez les Israélites. Elle se met elle-même au travail, gouverne serviteurs et servantes, surveille tout, le jour et la nuit, soulage les malheureux, et fait en sorte que son mari puisse paraître honorablement en public. Elle a des tils qui rendent hommage à son mérite et la proclament heureuse. Quant aux devoirs religieux qu’elle doit accomplir, il est dit seulement qu’elle craint le Seigneur. La foi rituelle, en effet, à part quelques exceptions, ne vise directement que les hommes. À l’époque de Noire-Seigneur, les docteurs considéraient la femme comme frappée d’une sorte d’infériorité religieuse. Elle pouvait remplir certains devoirs, comme réciter les prières quotidiennes, assister dans les synagogues à la lecture de la Loi, porter les phylactères et les franges, se rendre à îérusalem pour la Pâque et les autres fêtes, etc. Mais rien ne l’y obligeait. Au Temple, elle ne pouvait dépasser le parvis des femmes. De ce que la Loi ordonne souvent aux Israélites de transmettre les préceptes du Séigneurà leurs fils, Exod., x, 2 ; xiii, 8 ; Deut., iv, 9, etc., on concluait qu’il n’y avait pas à instruire les femmes à ce sujet, et que même cette instruction était nuisible. Cf. Sota, iii, 4 ; Kidduschin, ꝟ. 29, b. Le sort fait â la mère de famille par la facilité du divorce, toujours prononcé contre elle et même contre son gré, amoindrissait encore sa situation, au moins dans certains milieux. Cependant, en général, cette situation était très honorée, et, en Palestine, on répugnait à témoigner autre chose que du mépris aux femmes de mœurs équivoques, entourées souvent de tant d’hommages dans le monde ^gréco-romain. La mère de famille n’est que rarement’mentionnée dans l’Évangile. Notre-Seigneur veut que le père et la mère de la jeune fille qu’il va ressusciter soient seuls présents au miracle avec les Apôtres. Marc, v, 40 ; Luc, viii, 51. Il annonce qu’à causette lui, il y aura dissentiment et même lutte entre laflUeetla mère, comme entre le fils et le père. Luc, xii, 53. Mais la mère de famille ne figure pas dans certaines paraboles où l’on s’attendrait à sa présence, comme dans la "parabole du père qui dort dans sa maison avec ses enfants, Xuc, xi, 7, dans celle du serviteur préposé au gouvernement de la maison, Luc, xii, 42-45, dans celle de l’enfant prodigue. Luc, xv, 11-24, etc. Ce silence tient sans doute à la réserve que les mœurs du temps et du pays imposaient à la femme même mariée et à l’éloignement où on la tenait des affaires d’ordre public. L’Evangile contribua à relever encore davantage le rôle de-la mère de famille, sans rien lui taire perdre de la réserve qui convient à la femme. C’est ainsi que Priscille et beaucoup d’autres chrétiennes se rendront célèbres par leur foi et leur dévouement.

B » Devoirs envers la mère. — La mère est associée au père-dans-toutes les prescriptions de la Loi concernant les devoirs des enfants. Ansi il faut honorer son père et’sa mère, Exod., xx, 12 ; Deut., v, 16 ; Tobie, iv, 3, recommande expressément à son fils le respect de sa mère. Les’trrres « apientiaux reviennent souvent sur ce sujet. Prov., xstni, 22 ; Eccli., iii, 3, 18 ; vii, 29, etc. Sont égalementdéfendus, à l’égard du père et de la mère, les mauvais traitements et la malédiction, Exod., xxi, 15, sous peine de mort, Lev., xx, 9, l’indocilité, Deut., xxi, 18, et

le mépris. Dent., xxvii, 16. Les sentiments naturels vis-àvis des parents sont si respectables que, quand une captive a été acquise par droit de guerre, on est obligé, avant de l’épouser, de lui laisser un mois pour pleurer son père et sa mère. Deut., XXI. 13. Ces devoirs sont rappelés plusieurs fois dans la Sainte Écriture. Prov., i, 8 ; vi, 20 ; xxiii, 22 ; Eccli., iii, 5, 11, 18 ; Matth., xv, 4-6. 7° Mères nommées spécialement dans la Bible. — Eve, mère des vivants, Gen., iii, 20 ; — Sara, mère d’Isaac, Gen., xi, 20, etc. — Agar, mère d’Ismaël, Gen., xvi, 1 ; — Rébecca, mère d’Ésaù et de Jacob, Gen., xxvii, 15 ; — Lia, Rachel, Zelpha, Bala, mères des fils de Jacob, Gen., xxx, 1-25 ; — la mère de Moïse, Exod., ii, 1 ; — Rahab, mère de Booz, Jos., ii, 1 ; — Anne, mère de Samuel, I Reg., i, 2 ; — Respha, mère de deux fils de Saûl qui furent crucifiés par les Gabaonites, II Reg., xxi, 8-10 ; — Bethsabée, mère de Salomon, III Reg., i, 11 ; . — la veuve de Sarepta, III Reg., xvii, 10-23 ; — la femme de Sunam, IV Reg., iv, 17, 36 ; — la mère de Lamuel, Prov., xxxi, 1 ; — Anne, mère de Tobie, Tob., i, 9 ; — la mère des Machabées, II Mach., vii, 1-41 ; — Elisabeth, mère de saint Jean-Baptiste, Luc, i, 60 ; — Marie, mère de Jésus, Matth., i, 16 ; — Marie, mère de Jacques, Matth., xxvii, 56 ; — Marie, mère de Jean-Marc, Act., xii, 12 ; — Eérodiade, mère de Salomé, Matth., xiv, 8 ;

— la mère des fils de Zébédée, Matth., xx, 20 ; — la veuve de Naïm, Luc, vii, 12 ; — la Chananéenne, Marc, vii, 26 ; — Eunice, mère de Timothée, II Tim., i, 5. — Voir ces différents noms. Pour les mères des rois, voir

Femmes, vii, t. ii, col. 2194.
H. Lesêtre.
    1. MÉRED##

MÉRED (hébreu : Méréd ; Septante : MwptxB, Mup£S), second fils d’Ezra, de la tribu de Juda. I Par., iv, 17. II eut une femme appelée Béthia. Voir Béthia, t. i, col. 1686. Selon la tradition rabbinique, cette Béthia aurait été la fille du pharaon qui adopta Moïse. W. Grott suppose que Béthia n’est autre que Bent-ânta, une des filles de Ramsès II, dont on a retrouvé le sarcophage. W. Groff, La fille de Pharaon, dans le Bulletin de l’Institut égyptien, 1895, p. 316, 320 ; 1896, p. 66. Cette hypothèse est très contestable. Il faut remarquer d’ailleurs que le passage qui concerne Méred semble altéré. Voir Judaïa, t. iii, col. 1778.

    1. MÉRÉMOTH##

MÉRÉMOTH (hébreu : Merémôp ; Septante : Mcpt(i(19), prêtre, fils d’Urie. I Esd., viii, 33. Il est appelé ailleurs par la Vulgate Marimuth et Merimuth. Voir Marimuth 1, col. 820.

    1. MERIBAH##

MERIBAH (bébreu : Meribâh, « querelle, dispute » ), nom donné à deux localités de la péninsule du Sinaï.

1. MERIBAH, nom qui fut donné, en même temps que celui de Massah, à l’endroit où les Israélites murmurèrent à cause du manque d’eau à Raphidim. Exod., xvii, 7. Voir Massah, col. 853.

2. MERIBAH <MÊ), nom qui signifie « eaux de dispute ». Il fut donne aux eaux ou à la fontaine que Moïse fit jaillir miraculeusement dans le désert de Sin, en frappant deux fois le rocher avec sa verge. Num., xx, 13. La Vulgate a traduit Mê-Merîbâh par « Eaux de contradiction ». Voir Eaux de contradiction, t. ii, col. 1523.

    1. MERIBBAAL##

MERIBBAAL (hébreu : Merib Ba’al, I Par., viii, 34 ; Merî Ba’al, I Par., ix, 40, « qui lutte avec Baal ; » Septante : MépcêaiX), fils de Jonathas et petit-fils de Saùl ; il fut père de Micha. I Par., viii, 34 ; ix, 40. Dans les livres

; des Rois, il est appeléMiphiboseth. Voir Miphiboseth 2.
; MÉRIMUTH, prêtre, fils d’Urie. II Esd., iii, 21 ; x, 5 ; 
; xii, 3. Il est appelé ailleurs Marimuth et Mérémoth.

Voir Marimuth 1, col. 820. 997

MERLIN

MÉRODACH

MERLIN Pierre, commentateur protestant français, <nê vers 1535, mort vers 1603. II était fils de Jean Raymond Merlin, surnommé Monroy et fut disciple de Théodore de Bèze. Il joua un rôle important dans la Réforme. II présida le synode de Sainte-Foy en 1587 et celui de Vitré en 1583 ; il prit part aussi comme député des églises réformées de Bretagne au synode de Saumur en 1596. Les ligueurs l’avaient pris particulièrement en haine. Jean Boucher, dans un sermon prêché en juillet 1591, prétendit qu’il était le père d’Henri de Navarre (Henri IV). On l’accusa aussi d’avoir épousé clandestinement Jeanne d’Albret ; de ce mariage serait né d’Aubigné. On a de Merlin : Sermons sur le livre d’Esther, in-8°, La Rochelle, 1591 ; Genève, 1594 ; Job commentariis illustratus Methodo analytica, in-8°, Genève, 1599 ; Sainctes prières recueillies de plusieurs passages de l’Ancien et du Nouveau Testament, in-8°, Genève, 1609. — Voir Eug. et Ém. Haag, La France protestante, t. vii, 1857, p. 387-390.

    1. MÉROB##

MÉROB (hébreu : Mérab, « accroissement ; » Septante : MEpôë, Meptig), fille aînée du roi Saûl. I Reg., xiv, 49. Sa mère devait être Achinoam, fille d’Achimaas, ꝟ. 30. Son père l’avait promise en mariage à celui qui vaincrait Goliath, I Reg., xvii, 25, et quand David eut terrassé le géant, Saül n’osa pas rétracter son engagement, xviii, 17, mais, jaloux de la popularité du jeune héros, il ne le voulait point pour gendre. Il espérait que les Philistins, dans quelque combat, le délivreraient de celui en qui il voyait un rival, ꝟ. 17. Son espoir ne s’étant pas réalisé, il maria sa fille aînée à Hadriel le Molathite, ji. 19, fils de Berzellaï. Mérob (et non Michol, comme porte le texte actuel, voir Hadriel, t. iii, col. 395) eut d’Hadriel cinq fils. David les livra plus tard aux Gabaonites qui les crucifièrent à Gabaon, avec les deux fils de Respha, concubine de Saûl, pour se venger du mal que leur avait fait le premier roi d’Israël. II Reg., xxi, 8-9. — Saûl, qui, contrairement à ses promesses, n’avait pas donné Mérob à David, ne put s’empêcher de le marier ensuite avec sa seconde fille, appelée Michol. Voir Michol. Pour expliquer comment les cinq fils d’Hadriel sont appelés fils de Michol, II Reg., xxi, 8, le Targum, "Walton, Biblia Polygl., t. ii, p. 388, suppose que Michol avait élevé les enfants de sa sœur Mérob, mais il est beaucoup plus probable qu’il y a eu dans ce passage une confusion de noms, résultat de la distraction d’un copiste. La confusion est, du reste, très ancienne, puisqu’on la retrouve dans les anciennes versions (excepté dans la Peschito) et dans Josèphe, Ant.jud., VII, iv, 3.

    1. MÉRODACH##

MÉRODACH (hébreu : Merôdak ; Septante, édit. Swete, Cambridge, 1894, Jér., xxvii, 2 : Màiwfiebt ; mAQ MeuSax, édit ; sixtine, MaipuSà-/) est le grand dieu de Babylone, Mardouk. En caractères syllabiques, ce nom s’écrit d’ordinaire Mar-duh ; mais on trouve aussi, au moins une fois, l’écriture Ma-ru-duk, Rawlinson, The cuneiforrn inscriptions of Western Asia, t. iii, Londres, 1870, pi. 2, n. vi, lig. 8. On n’a pas encore donné d’explication satisfaisante de son étymologie et de sa signification. — Mardouk est le fils d’Éa, dieu de l’abîme et.de Damkina ; et le père de Nabû, dieu de la science des scribes. Il est un des dieux solaires, dans la journée le soleil du matin, et dans l’année le soleil du printemps, peut-être parce que le soleil paraît sortir tous les matins de l’abîme dont Mardouk est « le premier-né ». Le plus employé de « es idéogrammes ►►}- ^ » _*tl semble signifier, d’après les Babyloniens, « fils du soleil. » Rawlinson, The cuneiform inscriptions of Western Asia, t. v, Londres, 1884, pi. 43, b, ligne 56. Son doublet féminin est la déesse Zarpanltum, peut-être originairement l’aurore.

1° À la fin du III* millénaire avant J.-C, sous le règne d’Hammourabi, lorsque Babylone eut conquis la supré matie en Chaldée, elle assigna à Mardouk le rang suprême dans le panthéon chaldéen. Pour affirmer sa suzeraineté, les Babyloniens lui donnèrent le nom du dieu de Nippour, Bel, c’est-à-dire « le Seigneur » par excellence. C’est sous ce nom qu’il figure très souvent à partir de cette époque, soit dans les textes religieux, soit dans les textes historiques. Les fidèles expliquèrent cette prééminence par le rôle qu’avait joué leur dieu dans la création. Au commencement, lui seul avait osé affronter Tiâmat (le chaos), révoltée contre les grands dieux, (fig. 263), et, après avoir abattu le monstre, il avait créé le ciel, les astres, la terre et les hommes. Pour le récompenser, les dieux qu’il avait délivrés des assauts de Tiâmat lui avaient « donné la royauté » (création, iv « tablette, lig. 14) et le pouvoir de fixer le destin du monde.

— Le « roi des rois », le « seigneur des seigneurs » n’oubliait pas son œuvre. Il « prenait soin » de l’univers ; « il soutenait la terre habitée et les extrémités du firmament ; » il communiquait aux hommes les ordres d’Éa, son père, et il disait à son père les souffrances de l’humanité tourmentée par les mauvais démons. « Tu sais tout ce que je sais, répondait Éa ; va, mon fils. » Et Mardouk, le magicien des dieux, par l’emploi des rites mystérieux prescrits par son père, par « l’eau pure » et par le feu, par ses « incantations pures », les incantations d’Éridu, la ville d’Éa, et de l’abîme, détruisait les maléfices de ces démons, « les méchants utukku, » « t les sept esprits mauvais, » qui envahisstnt les maisons, qui donnent aux humains « l’atroce mal de tête » et autres maladies. C’est ainsi qu’il « rendait la vie aux morts ». Il protégeait aussi la nouvelle lune contre les attaques qu’elle subissait de la part de ces mêmes esprits mauvais au cours de ses phases ou aux jours de ses éclipses. Le seigneur de l’incantation était encore le dieu des oracles et des décrets.

Les Babyloniens honorèrent Mardouk de très bonne heure. Dans les contrats de la I re dynastie de Babylone, (fin du III millénaire avant J.-C), sous les prédécesseur^ d’Hammourabi, les contractants jurent par le nom de Mardouk, comme par ceux des dieux de leur ville et du prince régnant. On trouve aussi son nom, sous l’idéogramme ilu TU-TU, dans le récit du déluge, dont la rédaction remonte au moins à la même époque. Hammourabi proclame dans le prologue de son Code que les dieux Anou et Bel ont confié à Mardouk, fils aine d’Éa, divin maître du droit, la totalité des hommes, qu’ils l’ont rendu grand parmi les Igigi (dieux du ciel) ; et, dans la conclusion, que c’est de lui qu’il tient son « pastorat » des peuples. Après lui, tous les autres rois babyloniens continuèrent à honorer Mardouk jusqu’au jour du triomphe de l’Assyrie. Pour avoir le droit de porter le titre de Sarru, « roi, » ils devaient d’abord se rendre à son temple et « saisir les mains » du dieu. Le nom de Mardouk entrait fréquemment dans la composition des noms propres babyloniens, ceux des particuliers comme ceux des princes ; par exemple dans celui de Mérodach-Baladan, mentionné dans l’Écriture. Voir Mérodach-Baladan, col. 1001.

Les Assyriens donnaient sans doute le pas à Asur, leur dieu national, mais ils nommaient aussi Mardouk dans les prologues de leurs annales parmi les grands dieux, leurs patrons. Lorsqu’ils s’emparèrent de Babylone aux vu » et vm » siècles avant J.-C, ils attribuèrent les malheurs de la grande ville à la colère de Mardouk, et pour consacrer la légitimité de leur pouvoir, ils s’astreignirent à « saisir les mains de Mardouk », comme l’avaient fait autrefois les rois indigènes.

Après la chute de Ninive, les monarques du second empire babylonien redoublèrent de piété envers Mardouk. Nabuchodonosor II surtout (604-561) multiplia les constructions et les fondations en son honneur. Cyrus lui-même, quand l’empire de Babylone tomba sous ses coups en 538, se présenta comme le vengeur de Mardouk

délaissé, prétendait-il, par Nabonide, le dernier roi de Babylone. Kambyse l’imita et fit des offrandes au dieu. Mais ses successeurs rompirent avec la tradition. Darius (488) démolit les fortifications de Babylone. Xerxès pilla le temple de Mardouk et le détruisit. Alexandre songeait à le rebâtir quand il mourut. Quelques années plus tard, Antiochus Soter (280-260) essaya de réaliser ce dessein.

Ce temple était VE-saggil, c’est-à-dire « la maison élevée ». Il existait déjà sous Zabum, un des prédécesseurs d’Hammurabi. Ce dernier « s’y tient, dit-il, tous les jours » (Codé, recto, ii, 10). La Mission allemande en a retrouvé les ruines en 1900 sous le tell dit Amrân-ibn

un séjour forcé chez les Ilatti. Recueil de travaux relatifs à la philologie et à l’archéologie égyptiennes et assyriennes, xxiv, 1902 ; Mélanges assyriologigues, par François Martin, tirage à part, p. 8-9. Lorsque le dieu rentrait à Babylone après ces longs exils le peuple l’accueillait avec des transports d’enthousiasme dont nous retrouvons les échos dans les compositions des prêtres ou des scribes. "Voir ibid., p. 1-6, chant sur le retour de Mardouk à Babylone.

Ses fêtes, interrompues par son absence, reprenaient alors leur cours. La plus solennelle était celle de l’Aqitu, ou du Zagmuku, c’est-à-dire du nouvel an. Elle se célébrait au début de l’année babylonienne, au mois de Nisan.

— Le dieu Mérodach luttant contre un monstre. Bas-relief de Ninive. D’après Layard, Monuments of Nineveh, t. ii, pi. 5.

Ali. La ziggurat, ou tour à étages, de Mardouk, portait le nom de E-temen-an-ki, « la maison, fondement du ciel et de la terre » ou « pierre de fondation (première pierre) du ciel et de la terre ». Zarpanit, l’épouse de Mardouk ; Éa, son père ; Nabou, son fils, et son épouse Tasmêtoum ; d’autres dieux, tels que Nouzkou, divinité du feu, avaient leur chapelle dans l’E-saggil, où ils formaient une cour à Mardouk, et, à son tour, Mardouk avait une chapelle dans leurs temples, par exemple dans VE-zida de Nabou. La statue du dieu lui-même trônait dans un sanctuaire appelé YE-kua.

Plus d’une fois, au cours des siècles, elle en fut enlevée par les vainqueurs de Babylone. Le roi Agoum-kakrime, de la fin du xviie siècle av. J.-C. ou du commencement du xvi » (dynastie Kassite), envoya des ambassadeurs aux Hani, peuple dont la situation est inconnue, pour recouvrer la statue de Mardouk qu’ils avaient dérobée. Plus tard, peut-être au commencement du xiie siècle, elle fut encore volée par les Élamites. Nabuchodonosor I K’(vers 1130) la reprit.par la force des armes et put « saisir les mains de Bel ». D’après un texte malheureusement très mutilé, il semble que Mardouk a fait aussi

(mars-avril), pour fêter le retour du printemps et le renouvellement de la nature dus à l’action bienfaisante de la divinité solaire qu’était Mardouk. La statue du dieu sortait de l’E-saggil pour être portée solennellement sur une barque dans la grande rue de Babylone appelée Aiibur-sabum, « Que l’ennemi ne l’emporte pas. » Les autres dieux l’accompagnaient dans cette procession ; Nabou quittait même, pour la circonstance, son temple de l’E-zida à Borsippa. Tous réunis sous la présidence de Mardouk, ils fixaient les destins de l’année ; ce jour-là, les temples regorgeaient de victimes et d’offrandes, et si le roi était absent il rentrait à Babylone pour assister à la fête. Dans les dernières années de l’empire néo-babylonien, les chroniqueurs ont noté comme un signe de deuil que telle année le roi ne rentra pas à Babylone en Nisan pour <i prendre les mains de Bel ». Chronique de Ifabonide-Cyrus, col. 2, lig. 10. Il n’était pas jusqu’aux rois assyriens qui ne fissent du Zagmuku un jour de grande solennité, mais d’une solennité guerrière, comme il convenait à leur tempérament. Asarhaddon demande aux dieux la faveur de pouvoir passer en revue tous les ans au jour du Zagmuku, dans le premier mois* 10<M

MÉRODACH — MÉRODACH-BALADAN

10C

ses équipages, ses armes, ses troupes et le butin pris sur les ennemis. Annales, VI, 47-51.

Les Babyloniens semblent avoir placé d’abord chacune de leurs planètes sous la protection d’un de leurs grands dieux, puis ils ont identifié la planète et son dieu. Bien que Mardouk fût un des dieux du soleil, ils lui attribuèrent une planète qui prit le nom de Mardouk et, dans les derniers temps, de Bel, « le Seigneur. » Voir supra sur les noms du dieu. C’est celle que les Grecs ont pour cette raison appelée Zeûç, et que nous appelons encore Jupiter. Saint Épiphane, Hxr. xri, 2, t. xli, col. 249, la nomme Kwy.tS Bia>, et les Mandéens l’appellent kaukebîl, « r étoile de Bel. i> L’auteur du Livre d’Hénoch, c. viii, 3, édit. Lods, 1892, p. 14, note 3, donne ce nom, Kôkabiel, à un des anges déchus. Nous ignorons si les astronomes babyloniens ont connu l’existence des satellites de Jupiter et s’il faut voir ces satellites dans les quatre chiens que la mythologie de Bahylone donne à Mardouk. Enfin les écoles de Babylonie paraissent avoir identifié encore Mardouk, dans certains cas, à la constellation du Taureau.

2° Mardouk n’est nommé qu’une fois dans l'Écriture, Jer., l, 2 : « Dites : Babylone est prise, Bel est confondu, .Mérodach est consterné. » Dans la pensée du prophète, Bel est-il ici une divinité distincte, le dieu de l’antique Nippour, ou simplement le surnom de Mérodach, employé pour éviter la répétition ? On ne saurait le dire. Partout ailleurs, Is., xlvi, 1 ; Jer., ii, 44 ; Baruch, vi, 40 ; Dan., xiv, 2, c’est sous ce surnom de Bel, « le Seigneur, » que JVfardouk est désigné, comme chez les Grecs.

3° Bibliographie. — Bawlinson, Thecuneiforminscriptions of Western Asia, t. iv, 2e édition, Londres, 1891, pi. 3, pi. 29, etc. ; t. v, Londres, 1884, pi. 51&, lig. 27, etc. ; Cuneiform Texts from Babylonien Tableis in the British Muséum, part. II, Londres, 1896, pi. 26, lig. 13 ; Délégation en Perse, t. il : Textes éternités-sémitiques, IV série par Scbeil, Paris, 1902 (Code d’Hammourabi) ; Sargon, Annales, lig. 309-311, édition Winckler, Leipzig, 1889 ; Schrader, Keilinschriftliche Bibliothek, t. ii, Berlin, 1890, p. 140, lig. 46 ; p. 278, ligne 6 ; t. iii, 2° partie, Berlin, 1890, p. 10, Annales de Nabuchodonosor, col. 1, lig. 1 sq., col. 5, lig. 38-50 ; t. VI, Berlin, 1900, Mylhen und Epen ; Pognon, Les inscriptions babyloniennes du Wadi-Brissa, Paris, 1887, inscription en caractères cursifs, 2 « , 3e et 7e colonnes ; King, The seven Tablets of Création, Londres, 1902 ; Hérodote, r, 283 ; Strabon, xvi, 1 ; Arrien, Exp. Alex., vii, 17 ; Schrader, Die Keilinschriften und das Alte Testament, 3e édition par Winckler et Zimmern, Berlin, 1903, p. 370 ; Jensen, Die Kosmologie der Babylonier, Strasbourg, 1890, p. 88, 134140, etc. ; Zeitschrift fur Assyriologie, t. vi, p. 227 ; Roscher, Ausfùhrliches Lexicon der Griechischen und Bômischen Mythologie, t. ii, 2e partie, Leipzig, 1894-1897, col. 2343 ; Jastrow, Religion of Babylonia and Assyria, Boston, 1898 ; et l'édition allemande, profondément remaniée, du même ouvrage : Die Beligion Babyloniens und Assyriens, 1. 1, Giessen, 1905 ; François Martin, Textes religieux assyriens et babyloniens, l" série, Paris, 1903, introduction, p. yn-viii, 116, 120, etc. ; Weissbach, Das Siadtbild von Babylon, Leipzig, 1904.

FiL-Martin.

    1. MÉRODACH-BALADAN##

MÉRODACH-BALADAN (en hébreu MerôdakBaladdn ; Septante : MoepuSàx B « X « 51v), roi de Babylone, le deuxième de ce nom, en babylonien Mardukaplu-iddin, le MapSone^roiSoç du canon de Ptolémée (lig. 264). Son nom signifie « Mardouk a donné un fils ». U est mentionné dans deux passages de la Bible, Is., xxxix, 1, et IV Beg., xx, 12, où les écrivains sacrés racontent l’ambassade du roi de Babylone à Ézé « hias et la réception que lui fit le roi de Juda. Dans le dernier passage, il est écrit dans le texte hébreu ainsi que dans la Vulgate sous la forme Berôdak{ch)-Baladân, due à une faute de copiste ou à la permutation du d et du 3

dont on trouve d’autres exemples. Cf. Zeitschrift fît Assyriologie, t. ii, 1887, p. 268. Dans les Septante l'écriture est correcte aux deui endroits. — Ce prince ap partientà cette branche de Sémites qui, sous le nom' si Chaldéens, Kaldu, montèrent de l’Arabie orientale sa les bords du golfe Persique, vers le xi" siècle avan J.-C. au plus tard, y établirent de nombreuses pria cipautés et jouèrent un rôle très important dans 1 lus toire de la Babylonie et de l’Assyrie jusqu'à la chute di second empire babylonien, en 538. Mérodach-Baladai ne régna d’abord que sur Bit-Yakin, le plus considérant des royaumes chaldéens du « Pays de la Mer », commi disaient les Assyriens. C’est comme roi de ce pays comme « roi de la Mer », qu’il est mentionné pour la première fois dans les Annales des rois d’Assyrie, pai Théglathphalasar III. Inscription sur briquedeNimrud t

264. — Le roi Mérodach-Baladan. Musée de Berlin. D’après Aegyptischen AUerthûmer, 1 1, pi. 71.

lig. 26-28. Il reconnut la suzeraineté de ce roi en 729 et lui apporta un riche tribut composé en grande partie « d’or, la poussière de son pays ».

Mais son ambition s'étendait bien au delà des limites de Bit-Yakin. Il convoitait le trône de Babylone sur lequel étaient déjà montés d’autres princes du « Pays de la Mer » au XIe siècle. À la mort de Salmanasar IV, en 722, l’avènement d’une nouvelle dynastie à Ninive, celle des Sargonides, et les troubles politiques inséparables de ces changements lui permirent de réaliser ses désirs. Soutenu par BîoumbanigaS, roi d'Élam, il s’empara de la partie méridionale de la Babylonie, alors tout entière sous le joug de l’Assyrie et de son roi Sargon, en 721. Sargon marcha contre les Éternités qu’il rencontra à Dûr-ilu. La Chronique babylonienne B, lig. 33-37, raconte que l’Assyrien subit une grande défaite, mais Mérodach-Baladan n’eut pas la gloire de prendre part au triomphe de ses alliés. Lorsqu’il arriva sur le champ de bataille, la lutte était terminée. Dans ses Fastes, lig. 23, Sargon s’attribue la victoire. S’il l’avait remportée, il n’aurait pas reculé comme il le fit certainement. Affaibli par cet échec et trop occupé sur les autres frontières de son empire, il

dut tolérer l’usurpateur pendant de longues années, et « ce méchantdémon sans respect pour le nom du Seigneur des Seigneurs » (Mardouk), régna 12 ans sur Babylone « contre la volonté des dieux ». Sargon, Fastes, lig. 122124. Naturellement Mérodach-Baladan se donne un tout autre rôle dans l’inscription qu’il nous a laissée, Keilinschriftliche Bibliothek, t. iii, 1™ partie, Berlin, 1892, p. 184, col. 1, lig. 21, à col. 2, lig. 2. Il se dit choisi entre tous les hommes par Mardouk, le grand Seigneur, pour régner sur Babylone. C’est Mardouk lui-même qui a décrété : « Que celui-ci soit le pasteur qui rassemble les dispersés ! » Le dieu a mis en sa main « un sceptre droit, une houlette qui fait prospérer les peuples ». En retour, il est plein de vénération pour Nabou et Mardouk, les dieux de l’E-saggil et de l’E-zida ».

Il semble bien cependant que les accusations de Sargon ne sont pas sans fondement. Mérodach-Baladan opprima ses nouveaux sujets ; il emmena en captivité les notables de Sippara, de Nippour, de Babylone, de Borsippa, et il les enferma dans sa ville de Dour-Yakin, au milieu des marais, pendant que leurs biens étaient la proie des nomades Souli. Les sanctuaires furent abandonnés et pillés, les offrandes cessèrent, les statues des dieux prirent le chemin de l’exil. Sargon, Annales, 359364, édit. Winckler, Leipzig, 1889. Enfin, le moment arriva où Sargon, rassuré sur la sécurité des autres parties de son empire, put reprendre la lutte. Appelé lui aussi et choisi entre tous les rois par « Mardouk qui détestait les mauvaises actions du Chaldéen », Annales, 237-240, il se mit en campagne en 710, écrasa les tribus araméennes du Gamboulou, du Bit-Dakkouri, armées par Mérodach-Baladan, et s’empara des forteresses avancées du roi d’Élam. Annales, 245-286. À ces nouvelles, le Chaldéen épouvanté quitta Babylone au milieu de la nuit avec son armée pour chercher un refuge en Élam. En même temps il sollicitait l’appui de Shutur-Nahundi, Oîuccesseur de IJumbanigas, par l’envoi de ses meubles et de ses ornements les plus précieux. Après la. prise de ses forteresses, UÉlamite s’était sauvé dans les montagnes ; il ne se souciait pas d’irriter encore le colosse assyrien et de s’attirer de nouvelles représailles ; tout en acceptant lesprésents de Mérodach-Baladan, il lui ordonna de rebrousser chemin. Ce fut une cruelle déception pour le Chaldéen. En recevant cet ordre, « il se jeta à terre, il déchira ses vêtements, il prit le rasoir, il éclata en lamentations. » Sargon, Annales, 294. Pendant ce temps, les notables de Babylone appelaient Sargon au trône.’Mérodach-Baladan n’avait d’autre refuge que les marais de son fief du « Pays de la Mer ». Il alla s’enfermer dans sa ville de Dûr-Iakin, en fortifia les défenses, coupa les ponts et amena dans les fossés l’eau de l’Euphrate. Mais là, pas plus qu’en rase campagne, il ne put résister aux furieux assauts des soldats de Sargon. Il fut battu et blessé, Dûr-Iakin fut détruite de fond en comble, et Sargon rendit la liberté aux nobles babyloniens que le Chaldéen tenait captifs. S’il fallait même en croire une version des Annales de Sargon, salle xiv, lig. 18 et 19, « les grandes mains » du vainqueur auraient pris Mérodach-Baladan. Mais ce scribe amplifie évidemment les exploits de son maître. Sargon n’aurait pas laissé la vie à un ennemi aussi détesté et aussi redoutable. Comme le dit expressément le grand texte des Annales, lig. 349, le vaincu « s’enfuit et on ne trouva pas son séjour ». Il reparut en 704 après la moit de Sargon, sous Sennachérib, le fils et le successeur de ce prince, et se fit proclamer de nouveau roi de Babylone. C’est alors, sinon au commencement de son premier règne, que, plus pressé que jamais par le besoin de se faire des alliés et de créer des diversions aux extrémités de l’empire de son puissant ennemi, il envoya une ambassade à Ézéchias. Ce prince, avec autant d’imprudence qu’il en apporta dans l’affaire d’Éqron ou Accaron (Sennachérib, Annales, col. 2, lig- 69-73), fit un accueil cha leureux aux ambassadeurs. Il poussa la confiance et l’orgueil jusqu’à leur montrer son arsenal et ses trésors. Isaïû l’en reprit vivement, et il lui annonça que tous ses trésors prendraient un jour le chemin de Babylone avec les descendants d’Ézéchias emmenés en captivité. IV Beg., xx, 12-19 ; Is., xxxix. Plus clairvoyant que le roi, le prophète savait aussi sans doute ce qu’était le formidable empire de Ninive et ce que pouvait coûter un pacte avec les ennemis de l’Assyrie. Ézéchias ne devait pas tarder à en faire la cruelle expérience : moins de trois ansaprès (701), il voyait son pays ravagé, Jérusalem sur 1& point d’être prise, et il n’était sauvé que par la protection divine. Sennachérib, Annales, col. 3, lig. 1-42 ; IV Beg., xviii, 13-16.

Le second règne de Mérodach-Baladan ne dura quft six mois. Sennachérib fit sa première campagne contrele Chaldéen, que soutenaient cette fois les Élamites, et il battit les confédérés à Kis, en Babylonie. Le vainqueur s’empara de Babylone, des palais et des trésors, du vaincu. Sennachérib, Annales, col. 1, lig. 19 et suiv. La puissance de Mérodach-Baladan avait reçu un coupmortel. Lorsque Sennachérib, après sa campagne de Judée, se dirigea de nouveau sur Bîl-Iakin, le Chaldéen emporta ses dieux « en barque et s’envola comme un oiseau à Nagitiraqqi, au milieu de la mer », pendant que les Assyriens ravageaient son pays et emmenaient ses, frères et ses parents en captivité. Sennachérib, Annales, col. 3, lig. 42-61. Il dut mourir peu après en Élam, car Sennachérib ne le mentionne pas dans le récit d’une troisième expédition qu’il fit encore contre Bit-Iakin. Mais dans sa huitième campagne, à la grande bataille qu’il livra contre les Élamites à Haloule, sur le Tigre, le roi assyrien trouva dans les rangs de ses ennemis un des fils de Mérodach-Baladan. Les descendants du Chaldéen comptèrent encore parmi les ennemis les. plus implacables de l’Assyrie sous Asarhaddon, Annales, prismes À et C, col. 2, lig. 32-40 ; prisme B, col. 2, lig. 1-26 et sous Assurbanipal, Annales, col. 7, lig. 16-50.

On a de Mérodach-Baladan une charte de donation sur pierre noire (fig. 264). La pierre est ornée d’un bas-relief représentant le prince, avec cette inscriptio’n : « Portrait de Marduk-aplu-iddin, roi de Babylone. » Elle est aujourd’hui au Musée de Berlin. — Cf. Beitrâge zur Assyriologie, t. ii, p. 258 ; Schrader, Keilinschriftliche-Bibliothek, t. ii, Berlin, 1890 ; t. iii, l r « partie, Berlin, 1892, p. 182 ; Winckler, Geschichle Babyloniens uni Assyriens, Leipzig, 1892 ; Rogers, À History of Babylonia and Assyria, t. ii, 3e édit., Londres, 1902 ; Schrader, Die Keilinschriften und das dite Testament, 3e édit., Berlin, 1903 ; G. Maspero, Histoire ancienne des peuples de l’Orient classique, Paris, t. iii, 1899 ; Id., Histoire ancienne des peuples de l’Orient, in-12, Paris, 1904.

Fr. Martin.

    1. MÉROM##

MÉROM (EAUX DE) (hébreu : mê-Mèrôm ; Vaticanus : tb Û8wp Mappwv ; À lexandnnus : ù> v8top Mepptov), lieu où Josué rencontra et défit les rois confédérés du nord de Chanaan. Jos., xi, 5, 7.

I. Nom. — Ce nom n’est mentionné qu’en ce seut endroit de l’Écriture. Les Septante et Eusébe, Onomastica sacra, Gœttingue, 1870, p. 278, ont substitué Vn à’m final, Meppwv, Meppâv, sans compter le redoublement de IV. Mais c’est là un changement qui n’est pasrare ; cf. Jecmaam, hébreu : Yoqme’âm ; Alexandrinus.-’I « (iociv, I Par., vi, 68 ; Jéconam, hébreu : Yoqne’àm^ Vaticanus : ’Iextiiv, Jos., xix, 11, etc. La forme Mêrôrn, du reste, n’est pas inconnue dans l’onomastique ancienne, , comme nous le verrons tout à l’heure d’après les inscriptions hiéroglyphiques. Elle se rattache à la racine rûm, n être élevé, » de sorte que l’expression mê-Mêrôm, « les eaux de la hauteur ; » s’appliquerait bien au lac supérieur formé par le Jourdain et appelé Bahrel Hûléh, si l’identification ne présentait certaines difficultés.

II. Identification. — Une opinion commune, en effet^ 1005

    1. MÉROM##

MÉROM (EAUX DE)

♦006

assimile les Eaux de Mérom au lac Houléh, mais elle provoque plus d’une objection. — Et d’abord, nulle part ailleurs le mot mê, état construit de maîm, « eau, » ’ne désigne un lac ; il s’emploie plutôt pour indiquer le courant d’un fleuve : mê hay-Yardên, « les eaux du Jourdain, » Jos., iii, 8, 13, etc. ; une source ou un ensemble de sources : mê’En SéméS, t les eaux de la Fontaine du soleil, » aujourd’hui, selon une croyance générale, la Fontaine des Apôtres, sur la route de Jérusalem à Jéricho, Jos., xv, 7 ; mé Néftôâh, « les eaux de Nephtoah, s Jos., xv, 9, probablement Ain Liflà, à l’ouest de Jérusalem ; mê Megiddô, « les eaux de Mageddo, » Jud., v, 19, les nombreuses sources qui entourent cette

Meppav, à un bourg nommé Merrus, MeppoSç, sRné à douze milles (près de 18 kilomètres) de Sébaste, près de Dothaïn, ce qui nous porte loin du lac Houléh. — Cf. Palestine Exploration Fund, Quarterly Statement, Londres, 1890, p. 50-54.

Ces raisons ont sans doute leur valeur, mais elles s’ont rien d’absolu. — La première montre que l’expression mê-Mèrôm, appliquée à une certaine étendue d’eau, s’écarterait de la manière habituelle de parier des Hébreux, d’après les exemples qui nous sont connus. Mais, en restant une exception, elle n’a rien de contraire aux règles de la langue. On peut la rapprocher de celle qu’on rencontre, I Mach., xi, 67, in tô flStap toO revw, <rop,

2C5. — Vue du lac Houléh.

ville et forment les affluents du Cison ; un réservoir, mê hab-berêkâh ha(-tah(ôndh, (( les eaux de la piscine inlérieure. » Is., xxii, 9. C’est donc plutôt ydm, « mer » ou « lac » qui convenait ici, comme dans yam Kinnerôf, « lac de Cénéroth » ou de Tibériade, Jos., xii, 3 ; ydm ham-mélafy, s la mer de sel » ou la mer Morte. Gen., xiv, 3. — En second lieu, Josèphe, Ant. jud., V, I, 18, place le camp des rois confédérés « à Béroth, BYjptiÔYj, ville de la Haute Galilée, non loin_de Cadès », et il ne fait aucune mention des eaux. 4- En troisième lieu, le terrain de combat semble bien mal choisi sur les bords du lac Mérom : les Chananéens s’enfermaient maladroitement dans un cercle qui, en cas de défaite, devait rendre leur fuite extrêmement difficile. Sans parler du marais qu’elle renferme, la plaine, ou ardh el-Râléh, est entourée à l’ouest, au nord et à l’est, de montagnes bien faites pour arrêter une armée en déroute. Le massif occidental, en particulier, opposait une barrière naturelle aux fuyards qui auraient tenté de s’échapper vers Sidon. Jos., xi, 8. — Enfin Eusébe et saint Jérôme, Onomastica sacra, p. 138, 278, identifient Merrom,

et qui indique « le lac de Génésareth ». Elle rentrerait tout à fait dans les conditions ordinaires si, comme on pourrait le supposer, le lac avait emprunté soa nom à une ville voisine. Les monuments égyptiens, en effet, mentionnent à l’ouest du Bahr et Uùléh une ville de Marama, que l’on a, d’une façon vraisemblable, identifiée avec le village actuel de Meirun ou Meirôn. Cf. A. Mariette bey, Les listes géographiques des pylônes deKarnak, Leipzig, 1875, p. 17 ; G. Maspero, Sur les nonu géographiques de la liste de Thoutmos 1Il qu’on peut rapporter à la Galilée, extrait des Transactions of the Victoria Inslitute, or philosophical Society of Great Brilain, Londres, 1886, p. 3 ; W. Max Mùller, Asien undEuropanach altâgyptischen Denkmâlern, Leipzig, 1893, p. 220. — Josèphe, en plaçant le camp ennemi à Béroth, non loin de Cadès, ne dit pas par là-même ques la bataille eut lieu dans cet endroit. Il nous raconte, dans un autre passage, Ant. jud., XIII, v, 7, que, longtemps après, l’armée de Démétrius vint camper à Cadès et combattit Jonathas Machabée dans la plaine située au-dessous. Pourquoi les rois chananéens n’auraient-ils

pas agi de même ? — Si le pays qui avoisine le lac Houléh offrait quelques dangers pour la retraite, la plaine qui s’étend sur ses bords, principalement vers le sudouest, présentait aussi de grands avantages ; c’est, dans ce district montagneux, un des rares champs de bataille où les princes confédérés pouvaient faire mouvoir leurs chariots de guerre. Il ne faut pas oublier d’ailleurs qu’ils étaient sur leur propre terrain, qu’ils en connaissaient les. moindres déniés et pouvaient ainsi plus facilement échapper à la poursuite des Israélites, étrangers jusquelà à. cette contrée ; la route de Danias à la mer devait leur être particulièrement familière. — En suivant l’opinion d’Eusèbe et de saint Jérôme, le combat aurait eu lieu vraisemblablement dans la plaine appelée Sahel Arrabéh, au-dessous de Dothaïn (Tell Dothân). Mais, en admettant, sur l’autorité de ces auteurs, l’existence d’un village nommé Merrus, il est permis de penser que l’affinité entre ce nom et celui de Merom n’a rien de bien convaincant. Ensuite le champ de bataille est bien éloigné de la capitale de Jabin, chef de la confédération, et de celles des autres alliés : Asor, peut-être Khirbet Harrah, en tout cas certainement située à l’ouest et non loin du lac Hûléh ; Maàon, Khirbet Madîn, à l’ouest de Tibériade ; Sémeron, Semuniyéh, à l’ouest de Nazareth ; Achsaph, Kefr Yâsif, au nord-est de Saint-Jean d’Acre. Voir la carte de la Galilée, t. iii, col. 88. — F. de Hummelauer, Josue, Paris, 1903, p. 239, 272, s’appuyant sur une restitution du texte assez problématique, place Mérom près de Sémeron (Semuniyéh).

III. Description. — La région qui porte le nom de ardh el-Hûléh est une dépression qui s’étend depuis Tell el-Qadi au nord jusque vers le Djisr Benât Ya’kub, « le pont des filles de Jacob, » au sud. Elle est bordée à à l’est et à l’ouest par deux murailles parallèles de montagnes ; d’un côté, celles du Bjôlân, de l’autre, celles de Nephthali. Voir fig. 265. Elle sert de bassin de drainage à tontes les eaux qui descendent des hauteurs environnantes. Aussi n’est-elle, en somme, qu’un immense marais, solidifié à sa partie supérieure par le dépôt graduel des détritus des collines voisines, mais humide et bourbeux à mesure qu’on descend vers le sud, où elle se creuse en forme de cuvette, pour former le lac dont nous parlons. Il est probable que, dans les temps préhistoriques, elle était complètement couverte d’eau. Maintenant encore la saison pluvieuse fait varier les dimensions du lac. Cependant, entre celui-ci et les hauteurs occidentales, s’étend un terrain assez vaste, propre à la culture, où des champs de blé et des pâturages sont séparés par de grands espaces laissés en friche, couverts de roseaux et de carex. La terre, d’un noir rougeâtre, paraît très fertile. Elle est rendue humide par de nombreuses sources qui jaillissent de tous côtés à la surface du sol ; les deux plus importantes sont l’aîn el-Meïlahah et Vaïn el-Beldtah. Dans la plaine sont groupées les tentes des Arabes Ghaûarinéh, quelquefois remplacées par des huttes allongées, quadrangulaires, couvertes en chaume des joncées, et servant d’habitations à quelques familles sédentaires.

Le lac Hûléh a la forme d’une poire ou d’un triangle, dont la base serait au nord et le sommet au sud. Voir figi 266. Élevé seulement de deux mètres au-dessus de la mer Méditerranée, il a de cinq à six kilomètres de long, et, en moyenne, autant de large, pendant la période des basses eaux ; en hiver et au printemps, il déborde souvent à une grande distance. Sa profondeur varie de trois à cinq mètres. L’eau en est très limpide, mais malsaine à cause des détritus organiques qu’elle renferme. Elle nourrit des poissons en très grande quantité ; à sa surface nagent des pélicans, des canards, et surtout de nombreuses grèbes. Le rivage, dont il est très difficile’d’approcher, est formé par un grand nombre de petits ilôts couverts de roseaux élevés et de magnifiques touffes de papyrus, hautes de deux à

trois mètres. Sur ces bords, où l’eau n’est pas profonde, des milliers de poissons s’agitent entre les feuilles énormes des nénuphars (Nuphar lutea) et des nymphéas (Nymphéa alba). Les épais fourrés de roseaux et de papyrus qui entourent le lac deviennent une vraie forêt sur le terrain qui l’avoisine au nord. Là, ce sont des marécages parsemés de petits lacs, où il est impossible de s’aventurer, et à travers lesquels le Jourdain trace son cours sinueux. Voir fig. 267. Un Anglais, M. Macgregor, monté sur une périssoire, a pu le suivre et, après avoii parcouru le lac en tous sens, en a dressé la carte très exacte que nous reproduisons. Cf. Macgregor, The Rob Roy on the Jordan, Londres, 1869, p. 278-305. Les papyrus [Papyrus anliquorum), appelés Babir par les

Ichelbs

266. — Le lac Houléh.

D’après Macgregor, The Rob Roy, p. S.

Arabes, sont ici très beaux. « Le joli lac Hûléh est la limite orientale de l’aire de dispersion de cette remarquable cypéracée africaine qui se rencontre en Syrie, près de Jaffa, et en Sicile, à Syracuse et à Palerme, où elle a été très probablement importée par les Grecs et les Romains. En Asie, elle ne se trouve nulle part au delà du lac Houléh. Ce fait de géographie botanique est intéressant à signaler, car il concorde en tous points avec ceux que fournit la zoologie. Les Chromis, si nombreux dans les eaux du lac de Tibériade, sont des poissons africains qui paraissent avoir accompagné dans leurs migrations les papyrus de la vallée du Nil, ainsi que les crocodiles émigrés dans le fleuve Zerka, près de Césarée. Chromis et papyrus ne se voient absolument plus de l’autre côté de l’Anti-Liban, dans les bassins de l’Oronte, du Tigre et de l’Euphrate, qui présentent cependant des (Conditions climatériques à peu près analogues à celles de la vallée du Jourdain. » Lortet, La Syrie d’aujourd’hui, dans le Tour du monde, t. xliv, p. 341.

1009

    1. MÉROM##

MÉROM (EAUX DE) — MÉROZ (TERRE DE)

1010

Le lac Hûléh est appelé Eeiae^covétî ; ou Sejie^tsv.T&v >îfjivï) « lac Séméchonite, » par Josèphe, Ant. jud., V, v, 1 ; IteH. jud., IV, i, 1. L’étymologie de ce nom est incertaine. Cf. Reland, Palxstina, Utrecht, 4714, p. 262. Le même historien, Ant. jud., XV, x, 3, signale dans cette contrée OùXàOoc, dont le nom semble bien l’équivade Hûléh, et de Nnbin, Rulta ! (mer de), dont il est question dans le Talmud. Cf. A. Neubauer, La géographie du Talmud, Paris, 1869, p. 24, 27. Il donne une brève description du lac, Bell, jud., III, x, 7 ; IV, 1, 1. Les géographes arabes appellent quelquefois celui-ci Buhairah Kadas, « petit lac de Cadès, » ou Buhairah Bâniyas, « petit lac de Banias, » à cause de la proximité

Sisara, sur la montagne du Thabor, qui s’élève isolée au milieu de la plaine et est ainsi désignée par le mot mérômé. Jud., iv, 6, 12, 14.

MÉRONATH1TE (hébreu : ham-Mêrônâtî /Septante : i èx MepocvOwi ; 6 M-ripwvmOi-rr ;  ; ), originaire ou habitant : de Méronath ou Méronoth. Deux Israélites sont appelés Méronathites, Judias (t. iii, col. 1104), préposé aux troupeaux d’ânes de David, I Par., xxvii, 30, et Jadon (t. iii, col. 1104), qui vivait du temps de Néhémie, et travailla avec les Gabaonites et les gens de Maspha à la restauration des murs de Jérusalem. II Esd., iii, 7. On peut supposer, d’après ce dernier passage, que Méronoth

267. — Marécages du lac Houléh. D’après Macgregor, The Bob Roy, p. 288.

de ces deux villes. Mais le nom de Hûléh s’applique constamment et au lac et au district. Cf. Guy Le Strange, Palestine under the Moslems, Londres, 1890, p. 32, 34, 39, 52, 68, etc.

IV. Bibliographie. — E. Robinson, Biblicalresearches in Palestine, Londres, 1856, t. ii, p. 434-440 ; t. iii, p. 392-396 ; Physical geography of the Holy Land, Londres, 1865, p. 180 ; Stanley, Sinai and Palestine, Londres, 1866, p. 391-393 ; W. M. Thomson, The Land and the Book, NewYork, 1882, t. ii, p. 450=455 ; Macgregor, The Bob Roy, Londres, 1869, / p. 278-305 ; G. Schumacher, The Jaulân, Londres, 1888, p. 102 ; Lortet, La Syrie d’aujourd’hui, dans le Tour du monde, t. XLrv, p. 342-346 ; G. A. Smith, The historical Geography ofthe Èoly Land, Londres, 1894, p. 481.

A, Legendhe.

    1. MÉRÔMÉ##

MÉRÔMÉ, nom commun qui a été pris pour un nom propre par la Vulgate. Débora, dans son cantique, Jud., v, 18, dit que Zabulon et Nephthali affrontaient la mort’al merômê àadéh, èx oi{") « YpoO, « sur les hauteurs des champs. » Les troupes conduites par Débora « t Barac s’étaient rassemblées pour combattre contre

était dans le voisinage de Gabaon et de Maspha et qu’il était habité du temps de Néhémie par des Juife revenus de la captivité, mais on ne sait plus rien ni de sa situation, ni de son histoire.

    1. MÉROZ##

MÉROZ (TERRE DE) (hébreu : ’ère ? Mêrôz ; Septante, Codex Vaticanus : Mnjpciï ; Alexandrinus : MaÇeip ; Vulgate : terra Meroz), contrée sur laquelle Débora, en son cantique, Jud., v, 23, appelle ainsi la malédiction du ciel : « Maudissez la terre de Méroz, dit l’ange du Seigneur, maudissez ses habitants, parce qu’ils ne sont pas venus au secours du Seigneur, en aide aux vaillants de l’armée du Seigneur. » « La terre de Méroz » empruntait sans doute son nom à la principale ville du territoire. — Les habitants du pays, pour mériter la colère de la prophétesse, devaient, selon toute apparence, être tenus, en raison de leur situation et de leur parenté, à prêter leur concours aux guerriers ralliés par Barac et Débora. Les tribus qui n’ont point pris part à la lutte, comme Ruben, Dan, Aser et les autres tribus de Galaad sont légèrement blâmées, mais non maudites. Cf. Jud., v, 15-17. Les trois tribus ac

courues à l’appel et. spécialement louées pour leur dévouement et leur courage sont celles de Nephthali, de Zabulon et d’Issachar. Jud., iv, 6, 10 ; v, 15, 18. Non seulement Méroz aurait refusé de se joindre à elles, mais elle aurait encore prêté son appui à l’ennemi en dérobant les fuyards à la vengeance des Israélites vainqueurs : c’est ce que semblerait du moins indiquer Débora en faisant suivre immédiatement la malédiction des Mérozites de la bénédiction invoquée sur Jahel, qui n’a pas craint de frapper Sisara réfugié dans sa tente. Cf. Jud., . y, 23 et 24, et Hummelauer, Commentarius in libros Judicum et Ruth, Paris, 1888, p. 23. Les paroles du cantique de Débora les incriminent seulement de leur abstention, d’où il semble résulter qu’ils appartenaient à l’une de ces trois tribus. — Eusèbe connaît un village de « Méros (Merrous, selon le manuscrit de Leyde), situé à douze milles (16 kilomètres) de Sébaste et près de Dothaïm ». Onomasticon, au mot Meppiv, édit. Larsow et Parthey, Berlin, 1862, p. 286. G. Marnier voit le Méros d’Eusèbe dans la ruine appelée aujourd’hui Mahroûneh, située à peu près exactement à seize kilomètres au nord-nord-est de Sébastiéh, la Sébaste des anciens, à quinze cents mètres à l’est du tell' Dolân, l’antique Dothaïm, et sur la lisière méridionale du sahel 'Arrabéh, la plaine biblique de Dothaïm. Dans la Revue biblique, 1900, p. 591-599. Le nom de Mahroûneh est sans doute assez différent de Méros ou Méroz ; mais Eusébe, en adjoignant celui-ci à Merran, semble le considérer comme identique. La lettre h n’existant point en grec, Mahroun ou Mehran devrait encore se transcrire Mappoûv ou Meppàv, qui aurait pu être prononcé Marrons ou Merrus par les Gréco-Romains, comme Hésêbon est devenu 'E<rëo0î et Esbus, par la suppression de h et le changement de tiens, Mahroûneh, toutefois.ou la Méros indiquée par Eusèbe, devait appartenir à l’ancien territoire de Manassé occidentale qui ne paraît pas avoir pris part à la lutte contre les Chananéens, ni avoir été convoqué à cet effet. — Plusieurs interprètes voient dans Méroz une transcription erronée

pour Mérom ou Méron et le pays dont il s’agit serait ou le territoire des bords du lac Houléh, l’antique Mérom,

ou le territoire du pays actuel de Safed où se trouve une localité du nom de Meirôn, célèbre elle-même dans les Talmuds et les écrits des écrivains juifs. Cf. Ad. Neu "bauer, Géographie du Talmud, in-8°, Paris, 1868, p. 228-230. Cette Meirôn se trouve à six kilomètres à l’ouest de Safed. On rencontre encore un Meroùn erRâs, situé, comme l’indique son nom, sur un sommet élevé, au centre de la Galilée supérieure, à dix-sept kilomètres au nord de cette même ville ; et un khirbet du nom de Mâroûs à douze kilomètres au sud de Qédès, l’antique Cadès de Nephthali, et à huit kilomètres au nord-nord-est de Safed. Cette ruine est assez étendue, d’apparence antique, et l’on voit aux alentours divers tombeaux de forme hébraïque. Toutes ces dernières localités appartiennent au Djebel Çafed, la « montagne de Nephthali » d’autrefois. — L’historien Josèphe nomme encore, Bell, jud., III, iii, 1, une ville de Méroth (Mr, p(o6), dont le nom peut se prononcer Mérôs, qui marquait avec Thella la limite de la Galilée supérieure dans sa longueur, c’est-à-dire d’est à ouest. Le nom de cette ville fortifiée par Josèphe, au commencement de la guerre de Judée, est écrit Mïjpû, ibid., II, xx, 6 (édit. B. Niese), et 'A[171p(ô0, Vita, 37. D’après le géographe Cellarius, ces noms seraient celui de Mérom grécisé ; pour d’autres, ce serait celui de la ville de Meirôn de Galilée. Cf. Reland, Palsestina, p. 895-896 ; Riess, Biblische Géographie, in-f>, Fribourg-en-Brisgau, 1872, p. 63. Mais Méroth opposé à Thella, limite orientale de la Galilée sur la rive du Jourdain, probablement aujourd’hui et-fell, doit se chercher à l’occident, à la même latitude et non loin de Ptolémaïde ou 'Acca. Le nom ne s’y retrouve plus. — J. Schwarz a cru reconnaître Méroz dans Meras sas, nom d’un village situé à une heure au nord-ouest de Beisàn, identique, selon lui, à Mar’esah ou Marhësades Sifrê hagersa. Tebuoth ha'-Arez, nouvelle édit., 1900, p. 205 ; cf. p. 43. Cette identification a été proposée encore par Burckhardt et Robinson. Burckhardt, Travels in Syria and the Holy Land, Londres, 1822, in-4°, p.4 33 ; E. Robinson, Biblical Researches in Palestine, Boston, 1841, t. iii, p. 170. Ce nom répond mal à l’hébreu, selon Armstrong, Wilson et Conder, Nantesand Places in the old Testament, Londres, 1887, p. 224. — Le petit village de Kefr Miser, que quelques voyageurs croient avoir entendu prononcer Kefr Mours, situé à quatre kilomètres à l’est i"Endor et au sud du. mont Thabor, a été pris aussi pour Méroz. La métathèse, dans les anciens noms, n’est pas rare chez les Arabes, et Kefr Misr, voisine du Thabor, où Débora et Barac amenèrent leurs troupes pour la bataille, dans la tribu d’Issachar, se trouve dans les conditions du récit bibliqueCf. Riess, toc. cit., - Dalfi, Viaggio biblieo in Oriente, in-8<V Turin, 1835, t. iv, p. 117. — Le défaut d’indication un peu précise sur la situation de cette ville et de la région du même nom ne permettra sans doute jamais de faire un choix motivé entre ces diverses localités pour les identifier avec Méroz. Toutefois Mârûs paraît être, de tous ces noms, celui qui reproduit le mieux le nom biblique, et sa situation pourrait expliquer à la fois le refus de ses habitants, la colère de Débora et sa malédiction. Barac commença à réunir ses troupes à Cadès, sa patrie, Jud., iv, 6, 10 ; le pays de Mâroûs, situé dans le voisinage de Cadès, dut être des premiers invités à donner l’exemple du courage et de l’abnégation ; le cœur faillit à ses habitants et leur lâcheté eût pu décourager les autres et compromettre l’entreprise projetée par la prophétesse Débora contre les oppresseurs de son peuple.

L. Heidet. MERRHA (grec : Meppœv), localité inconnue. Baruch, iii, 23, parle des marchands de Merrha, qu’il nomme avec ceux de Théman, mais on ne retrouve ce nom nulle autre part ailleurs, ce qui porte à penser qu’il est altéré. On a proposé de lire à la place divers noms. La correction la plus vraisemblable est celle qui lit à la place.de Merrha(n), Médan ou Madian. La Vulgate est traduite sur le grec et là version grecque a été faite sur un original hébreu que nous n’avons plus. Voir. Baruch 6, t. i, col. 1480. Le traducteur a pu lire un 1, r, au lieu d’un i, d, et transformer ainsi Médan (Madian) enMerrhan. Les marchands madianites sont mentionnés dans la Genèse, xxxvii, 28.

    1. MERRICK James##

MERRICK James, érudit anglais protestant, ne le 8 juin 1720, mort à Reading le 5 janvier 1769. Il appartenait à l’université d’Oxford et était très versé dans la connaissance de la littérature sacrée et des langues orientales. On a de lui : Dissertation on Proverbs ix f i'6, containing occasional remarks on other passages in sacred and profane writers, in-4°, Oxford, 1744 ; Annotations critical and grammatical on the three first chapters of the Gospel according to S' John, in-8°, Reading, 1764 ; The Psalms translated or paraphrased in english verse, in-12, Reading, 1765 ; Annotations on the Psalms, in-4°, Reading, 1768. — Voir W. Orme »

Biblioth. biblica, p. 313.
B. Heurtebize.
    1. MERZ Philippe Paul##

MERZ Philippe Paul, théologien catholique allemand, né à Augsbourg, le 12 août 1725, mort dans cette ville le 15 octobre 1754. Il étudia la théologie protestante à Iéna et à Strasbourg. Il se convertit au catholicisme, fit son abjuration à Augsbourg le 12 août 1725 et devint ensuite prêtre et curé de Schwabsoien (Bavière). Il passa les dernières années "de sa vie à Augsbourg. Il est connu par son Thésaurus biblicus, hoc est, dicta, sentenlia et exempla ex sanctis Bibliis collecta, et per locos communes distributa, ad usum concionandi et disputandi,

21n-4°, Augsbourg, 1633, 1738, 1751, 1791 ; in-4°, Venise, 1758 ; Crémone, 1824 ; in-8°, Paris, 1883. VOnomasticum biblicum seu index ac dictionarium histoncoetymologicum, Augsbourg, 1738, forme la seconde partie du Thésaurus. Merz prit pour base de la première partie de son travail, comme il le dit lui-même dans sa Préface, le Thésaurus Bibliorum de l’Anglais Guillaume Alot, et groupa par ordre alphabétique tous les textes se rapportant au même sujet, afin que les théologiens et surtout les prédicateurs les trouvassent tous réunis. — Voir Zapf, Augsburgische Bibliothek, p. Il ; Veith, Bibliotheca Augustana, Augsbourg, 1793, t. x, p. 175 ; And. Ràss, Die Convertiten seit der Reformation, 12 in-8, Fribourg-en-Brisgau, t. ix, 1869, p. 415-425.

MES (hébreu : Maë ; Septante, MouôyJ, quatrième et dernier fils d’Amram, petit-fils de Sem. Gen., x, 23. Dans le passage parallèle, I Par., i, 17, le texte hébreu porte Méêék, les Septante, Mouôx, comme dans la Genèse, et la Vulgate Mosoch, mais la leçon des Paralipo" mènes est probablement fautive. D’après Bochart, Phaleg, il, 11, Opéra, édit. Lensden, Liège, 1692, t. i, col. 83, la postérité de Mas habita le mont Masius, opoç Mâffiov, qui séparait la Mésopotamie de l’Arménie. Cf. Gesenius, Thésaurus, p. 823. Le mont Masius est le Tûr ou Tûr’Abdîn actuel, district montagneux, qui, du côté du sud, finit aux basses plaines de la Mésopotamie et qui est borné, au nord et au nord-est, par le Tigre ; il s’étend des environs de Geziret ibn’Omar, à l’est, jusque vers Mardin, à l’ouest. Il a pour limite au nord-ouest la chaîne du Koros. A. Socin, Zur Géographie des Tûr’Abdin, dans la Zeitschrift derdeutsclwn morgenlândischen Gesellschaft, t. xxxv, 1881, p. 237238. L’opinion de Bochart est encore aujourd’hui admise par bon nombre de savants. H. Guthe, Kurzes Bibelwbrterbuch, 1903, p. 417. Cf. G. B. Winer, Biblisches Bealwôrterbuch, S" édit., t. ii, p. 59 ; H. Riess, Biblische Géographie, 1872, p. 61. Quelques-uns cependant croient que les descendants de Mes sont les Maasai dont parlent les inscriptions cunéiformes. Théglathphalasar III raconte dans le récit de ses guerres contre les Arabes (734732 avant J.-C), qu’il soumit, entre autres tribus, celle des [Ma-as]-’-ai. Tablette de Nimroud, revers, ligne 53, dans Schrader, Keilinschriftliche Bibliothek, t. ii, 1890, p. 20. Elle habitait un pays désert qui est décrit comme « la terre de la soif et de la défaillance, où ne va autsun oiseau du ciel, où ne peut paître ni âne ni gazelle ». Il est aussi question d’un habitant du pays daMaS, dans une tablette du temps d’Asarhaddon ou d’Assùrbanipal, Western Asiatic Inscriptions, t. iv, pi. 54, n° 1. Cf. Frd. Delitzsch, Paradies, p. 302 ; Ëb. Schrader, Keilinschriften und Geschichtsforschung, in-8°, Giessen, 1878, p. 102, 262, 364. Frd. Delitzsch, Wo lag dos Paradies, 1881, p. 242, identifie la terre de Mes (Mai) avec le désert syro-arabe. Ed. Glaser, Skizze der Geschichte und Géographie des Arabiens, t. ii, 1890, rejette cette origine et dit, p. 276 : « J’entends par (la terre de) MaS le désert entier, mais spécialement les oasis [de Djebel Sammar, de Djauf, et je l’identifie avec le MaS de la Genèse, x, 23. » Cf. ibid., p. 260, 310, 419. Il identifie aussi, p. 420, ce MaS avec le MèSâ de Gen., x, 30, ^t le Massa de Gen., xxv, 14. Delitzsch, au contraire, Bas Paradies, p. 259, distingue avec raison la terre de MaS des inscriptions assyriennes du Mai de Gen., x, 30. Pour lui ce dernier est le mont Masius. Mes l’araméen, Gen., x, 23, est formellement distingué dans l’Écriture de Massa l’Ismaélite, Gen., xxv, 14, et rien n’autorise à confondre l’un avec l’autre, non plus qu’avec Messa de Gen., x, 30. Voir Massa 1, col. 852, et Messa 2.

F. Vigouroux.

MÉSA (hébreu : ytf’D, Mê$d’, « salut, délivrance » ), nom d un roi de Aloab et d’un fils de Caleb.

2. MÉSA (Septante : Mapiai), fils aîné de Caleb on Calubi, et frère de Jéraméel, de la tribu de Juda. Son père était fils d’Hesron. Voir Caleb 2, t. ii, col. 58. Mésa fut « le père », c’est-à-dire le fondateur ou le restaurateur de la ville de Ziph. I Par., Il, 42. La ville de Ziph mentionnée ici est, selon la plupart, celle des montagnes de Juda, près du désert de ce nom, Jos., XV, 34 ; I Reg. (Sam.), xxiii, 14 ; xxvi, 1 ; d’après quelques-uns, celle de la Séphéla. Jos., xv, 24. Voir Frd. Keil, Chronik, 1870, p. 47-48. À cause de l’obscurité qu’offre la suite de ce passage dans les Paralipomènes, R. Kittel, The Books of the Chronicles, critical édition, in-4°, Leipzig, 1895, p. 57, lit yïnn, Marêsâh, comme l’ont fait les Septante (voir Hastings, Dictionary of the Bible, t. iii, 1900, p. 349), et l’on peut alléguer le contexte en faveur de cette leçon, mais elle ne résout pas toutes les difficultés. Voir Marésa 1, col. 756.

3. MÉSA (hébreu : ïw>a, MêSa’; Septante : Muai),

roi de Moab, dont la Bible raconte les démêlés avec les rois d’Israël et de Juda. IV Reg., iii, 4-26. Lui-même a laissé le récit de son règne dans une inscription parvenue jusqu’à nous. Nous avons donc à examiner successivement son inscription et le récit biblique pour montrer ensuite comment ils s’éclairent mutuellement.

I. L’Inscription. — Elle a été vue en 1868 par le Rév. Klein, de la mission protestante de Jérusalem ; mais M. Clermont-Ganneau, alors attaché au consulat de France à Jérusalem, connaissait déjà son existence. Les Arabes de Dhîbàn où se trouvait la pierre, voyant l’intérêt qu’y prenaient les Européens la-brisèrent, pensant qu’elle contenait un trésor. Heureusement M. Clermont-Ganneau avait pu se procurer un estampage auparavant. Par ses soins les principaux morceaux ont pu parvenir au Musée du Louvre, où ils sont exposés avec l’estampage (fig. 268). D’après M. Klein, la pierre intacte avaitl m 13de hauteur, O ra 70de largeur, et0 m 35 d’épaisseur. On est aujourd’hui à peu près d’accord sur le texte. En voici la transcription en caractères hébreux ordinaires :

TEXTE

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[3]jni | jsiw. rw 34

Les lettres surmontées d’un point sont douteuses ; les lettres entre crochets sont suppléées par conjecture ; les astérisques marquent la place des lettres illisibles. Les points séparatifs et les petites barres sont dans l’original.

TRADUCTION

4. Je suis Mésa, fils de Camos… roi de Moab, le Dibonite. |

2. Mon père a régné sur Moab durant trente ans et moi

j’ai régné

3. après mon père. | Et j’ai fait ce sanctuaire à Camos

de Qorkha | en signe de salut ;

4. car il m’a sauvé de toutes mes chutes et il m’a fait

triompher de tous mes ennemis. | Amri,

5. roi d’Israël, fut l’oppresseur de Moab durant de longs

jours, car Camos était irrité contre son pays ; |

6. et son fils lui succéda et il dit lui aussi : J’opprime rai Moab ! | C’est de mon temps qu’il parla ainsi,

7. et j’ai triomphé de lui et de sa maison | et Israël a

péri pour toujours. Or, Amri avait pris possession du pays

8. de Mâdaba | et [Israël] y demeura durant ses jours et

le terme des jours de ses fils, durant quarante ans, et

9. Camos [nous] l’a rendue de mon temps. | Et j’ai bâti

Ba’almé’on, et j’y ai fait la piscine, et j’ai bâti

10. Qaryathen. | Or, les gens de Gad habitaient dans le pays d"Alaroth de toute antiquité, et le roi d’Israël s’était bâti

11.’Ataroth. | Et je combattis contre la ville, et je la pris, et je tuai tout le peuple

12. de la ville, spectacle pour Camos et pour Moab ! | Et je m’y emparai de l’autel de son Génie et

13. je le traînai devant Camos à Qiriath. | Et j’y fis ha biter les gens de Saron et de

14. Makharath. ( Et Camos me dit : Va ! prends Nébo sur Israël ! et j’allai

15. de nuit et je combattis contre elle depuis la pointe de l’aurore jusqu’à midi et je la pris

16. et je tuai tout, sept mille hommes et jeunes garçons | et femmes et jeunes filles

17. et servantes, | car je l’avais vouée à l’anathème envers’Astar-Camos, et je pris de là

18. les autels ( ? ou les vases ?) de Iahvé, et je les traînai devant Camos. | Or, le roi d’Israël avait bâti

19. Iahaç, et il y demeurait alors qu’il me faisait la guerre, 1 mais Camos le chassa devant moi ! et

20. je pris de Moab deux cents hommes, toute son élite, | et je les portai contre Iahas et je la pris

21. pour l’annexer à Dibon. | C’est moi qui ai bâti Qorkha, le mur des jardins et le mur

22. de Parrière-ville, | et c’est moi qui ai bâti ses portes,

et c’est moi qui ai bâti ses tours, | et

23. c’est moi qui ai bâti le palais, et c’est moi qui ai

fait la double piscine pour l’eau au milieu

24. de la ville ; | et il n’y avait pas de citerne au milieu de la ville, à Qorkha, et j’ai dit à tout le peuple : Faites-vous

25. chacun une citerne dans sa maison ! et c’est moi qui ai fait creuser les fossés de Qorkha par les prisonniers

26. d’Israël, | et c’est moi qui ai bâti’Aro’er, et c’est moi qui ai fait la route de l’A mon. |

27. C’est moi qui ai bâti Beth-Bamoth, car elle était détruite. | C’est moi qui ai bâti Beser, car elle était en ruines,

28. avec les gens de Dibon, an nombre de cinquante, car tout Dibon est enrôlé | et j’ai placé le

29. nombre complet de cent [hommes] dans les villes

que j’ai annexées au pays. | Et c’est moi qui ai bâti

30. Mâdaba, et Befh-Diblathen | et Befh-Ba’almé’on, et j’y ai porté les pasteurs…

31.. troupeaux du pays. I Et Khoronén où

habitait…

32 et Camos me dit : Descends, combats

contre Khoronén ! | et je suis descendu…

33 [nous l’a rendue] Camos de mon

temps. Et … de là. … dix…

34… année… et c’est moi., .

Pour la justification de la lecture et les notes philologiques et critiques, voir M. J. Lagrange, dans la Revue biblique, 1901, p. 525-536.

II. Conclusions historiques. — Depuis le temps de Moïse, les Israélites s’étaient établis dans le pays de Moab. Un moment submergés par l’accroissement des Moabites, ils avaient repris l’avantage avec David. On dirait que dès lors Moab ne fut plus qu’une tribu sans indépendance et sans roi, II Reg., viii, 2, mais il est douteux que la domination des Israélites s’étendit jamais au sud de l’Arnon qui fut toujours considéré comme la limite légale de Moab. Les troubles qui suivirent la mort de Salomon lui permirent sans doute de relever la tête. Mésa est très fier de se dire fils de son père, mais il ne se donne pas d’autre ancêtre ; il est est donc probable qu’une nouvelle royauté commença dans Moab avec ce prince dont le nom n’est qu’incomplètement conservé, Chamos… Les premiers temps furent prospères, on avait recouvré toute la plaine, depuis l’Arnon jusqu’à Médaba. Amri, roi d’Israël, reprit l’offensive ; il occupa de nouveau Médaba, et sans dépouiller le chef des Moabites du titre de roi, si libéralement prodigué alors, il lui imposa le tribut. Mésa payait au roi d’Israël cent mille agneaux et cent mille béliers à laine ; les grandes plaines de Moab ont toujours été propices à l’élevage du petit bétail. Des garnisons israélites établies jusqu’aux portes de Dibon devaient assurer sa fidélité.

Sous Achab, fils d’Amri, Mésa se tint tranquille. Le règne d’Ochozias d’Israël ne fut qu’une longue maladie d’un an ou deux : <> Moab se révolta contre Israël après la mort d’Achab, » IV Reg., 1, 1, et reprit d’abord Médaba.

On peut s’étonner que Mésa, originaire de Dibon, ait porté son premier effort sur un point si éloigné, au risque de se voir coupé par les stations israélites intermédiaires. A vrai dire, nous ne savons pas s’il se pique de raconter ses exploits en suivant l’ordre du temps. Nous le croirions cependant volontiers. Les Israélites occupaient surtout les villes de l’ouest, situées dans des posilions beaucoup plus fortes, sur les premiers contreforts des montagnes qui baignent leurs pieds dans la mer Morte. Médaba avait probablement une population moabite, puisque Mésa la considère moins comme une conquête que comme une ville recouvrée ; c’est sans doute par là qu’il était plus facile de commencer. Baal Méon, aujourd’hui Main, à deux heures et demie de Médaba, eut bientôt le même sort ; Mésa ne dit pas l’avoir prise, mais seulement bâtie ou plutôt rebâtie. Ataroth lui coûta plus de peine. Il s’agissait d’une ville purement israélite, occupée par la tribu de Gad de toute antiquité. Isolée du reste d’Israël, elle semble avoir pratiqué le culte de son Génie particulier, qu’on pourrait soupçonner n’être autre que Gad, dont les Grecs ont fait la bonne fortune ou la Tyché des cités. Voir Gad 2, t. iii, col. 24. Ce culte du patron, si commun aujourd’hui encore dans l’Orient musulman, n’empêchait pas plus le culte du dieu national qu’il n’est absolument en contradiction avec l’islamisme. Aujourd’hui il s’agit d’un saintd’origine souvent inconnue, peut-être mythologique ; alors c’était une sorte de divinité inférieure, chargée des intérêts du lieu, analogue au Sim ou patron mentionné par les inscriptions sabéennes à côté des grands STELE DE MESA, ROI DE MOAB Musée du Louvre

dieux.. Son autel fut traîné comme un trophée devant l’idole de Chamos établi à Qiriyath, nom qui indique peut-être la capitale religieuse, mais dont l’identification demeure incertaine. La population fut massacrée et remplacée par des gens venus d’ailleurs, sans doute du cœur même du pays de Moab. Mésa tranchait du potentat, mais moins clément que les Assyriens eux-mêmes, ou ne pouvant transporter assez loin de leur point d’attache les populations qu’il voulait faire disparaître de leur sol natal, il les exterminait « pour donner un agréable spectacle à Chamos et à Moab ». Une course rapide, une surprise de nuit, eurent raison de Nébo, ville située près de la célèbre montagne où Moïse était mort. Pour être plus sûr de réussir dans cette entreprise difficile, Mésa avait voué à l’anathème toute la population du pays. Le dieu qu’il invoque sous un vocable spécial, Astar-Chamos, est peut-être la divinité féminine parédre de Chamos. Sept mille personnes du sexe masculin, sans compter les femmes et les filles, furent immolées sans pitié. Dans cette cité comme dans tant d’autres en Israël, on pratiquait sans doute le culte de Jéhovah sur les hauts lieux. Mésa s’empara des objets relatifs à ce culte et pensa les humilier eux aussi devant Chamos. C’était une guerre d’extermination.

Que faisait donc Joram, fils d’Achab et successeur de son frère Ochozias ? Engagé dans des guerres constantes avec les Syriens, moins heureux que son père, il lui était difficile de réduire Moab. La guerre contre les Syriens avait souvent pour théâtre Ramoth de Galaad. S’engager à fond contre Mésa, c’était s’exposer à voir fondre les Syriens sur les derrières de l’armée et à se Irouver pris entre deux ennemis également acharnés. La Bible ne nous parle pas de tentatives faites par Joram dans ce sens, mais il semble bien qu’elles eurent lieu. Entre Médaba et Dibon se trouvait, d’après YOnomasticon d’Eusèbe, la ville de Iahas. Mésa nous dit formellement que le roi d’Israël l’avait prise pour point d’appui pendant qu’il lui faisait la guerre, mais qu’il avait été réduit à fuir devant lui ; Chamos l’avait chassé devant le roi de Moab ! La manière dont ces choses sont dites, sans insister sur la défaite du roi d’Israël, montre que Joram, car ce ne pouvait être que lui, se vit forcé par la guerre syrienne à dégarnir les garnisons de Moab et par conséquent à renoncer à la lutte qu’il avait commencée. Dès lors il suffit à Mésa de réunir deux cents hommes, l’élite de Moab, pour enlever cette torteresse qu’il annexa à Dibon.

Mésa termine ici le récit de ses exploits contre Israël. Il passe à la description de ce qu’il a bâti, restauré, embelli, et la campagne contre Oronaï appartient à d’autres circonstances, car cette ville ne fut jamais comptée parmi les cités d’Israël. On dirait donc, à le lire superficiellement, qu’il n’a jamais cessé d’être l’enfant gâté de la victoire. Cependant son début a quelque chose d’exalté qui trahit ses alarmes. Il était en règle avec Chamos puisqu’il lui avait immolé tout ce qu’il avait voué à l’anathème, puisqu’il lui avait offert en trophée l’autel d’Ataroth et les vases sacrés de Nébo. Et cependant il lui a élevé un sanctuaire, parce que ce dieu l’avait sauvé et lui avait donné de triompher de ses ennemis. Le roi d’Israël, si passif dans tout le récit des conquêtes, avait dit cependant lui aussi : « J’oppri^ meraiMoab ! » Qu’avait-il donc fait dans ce sens ? Ce que Mésa indique discrètement, comme un homme échappé d’un grave danger et fort redevable à Chamos, la Bible le raconte assez longuement.

III. Récit biblique. — Quelques détails de géographie sont nécessaires pour comprendre le récit du quatrième livre des Rois, iii, 4-26. Le territoire de Moab se composait de deux longues plaines, bordées d’un côté par le désert, de l’autre par les montagnes escarpées qui dominent la mer Morte ; elles sont séparées l’une de l’autre par la coupure de l’Arnon, précipice d’environ

mille mètres de profondeur et dont les pentes sont presque inaccessibles. La plaine du nord était le champ de bataille entre Moab et Israël. Des hauteurs d’Hésébon, les Israélites pouvaient atteindre Dibon sans rencontrer d’obstacle. Cette ville elle-même n’avait aucune défense naturelle ; située presque au ras de la plaine, dépourvue d’eau, elle n’était guère qu’un centre pour les tribus qui poussaient leurs troupeaux vers le désert. Battus à cette place, les Moabites risquaient d’être culbutés dans l’Arnon. Is., xvi, 2. En revanche, l’Arnon offrait une barrière infranchissable aux envahisseurs du nord : de ce côté Moab était bien chez lui. Au sud, une autre dépression comparable à l’Arnon, l’ouadi el-Afrsa, le séparait du Djébâl, et, presque au centre de la plaine, une position incomparable défiait toutes les attaques : c’est le Kérak (voir Kir-Moab, t. iii, col. 1895), situé à mille mètres d’altitude, détaché des montagnes de l’est, accessible seulement au sud, mais facile à isoler par un simple fossé. C’est là que Renaud de Châtillon brava si longtemps les armées de Saladin ; c’est là que l’accord général place la capitale de Moab, c’était là qu’il fallait frapper Mésa pour le punir de ses insolentes entreprises. Pour cela, on devait pénétrer par le sud, tourner la mer Morte, passer l’ouadi el-Ahsa dans le Ghôr et gagner les plateaux ; un chemin assez bien tracé le permet encore aujourd’hui sans trop de difficulté. Il va sans dire qu’une pareille campagne ne pouvait être entreprise sans le concours de Juda et même d’Édom qui aurait pu, en survenant par derrière, causer à l’armée israélite le même désagrément que les Syriens au nord. Le roi de Juda accepta sans difficulté de prendre part à l’expédition. Si ce roi était Josaphat, son consentement entraînait celui d’Édom qui vivait sous sa dépendance ; si c’était Ochozias, comme le veut l’ancienne édition des Septante, on doit supposer qu’Édom, récemment affranchi, mais battu par Joram, ne crut pas prudent de s’opposer aux desseins des deux rois de Juda et d’Israël. Il marcha donc avec eux.

Le récit de la campagne a été jugé sévèrement par Stade, Geschichte, p. 534 : « Der Erzâhler berichtet phantastisch…, und ohne das Terrain genau zu kennen. » L’auteur biblique n’aurait pas connu suffisamment le terrain. Reproche étrange dans la bouche d’un savant qui n’est jamais sorti de son cabinet ! Ceux qui ne connaissent pas le terrain sont ceux qui s’obstinent à placer Édom à l’est du Ghôr ; la position d’Édom au sud de Juda une fois reconnue, tout s’explique aisément. Les rois confédérés entreprennent une marche tournante de sept jours ; il leur faut, en effet, contourner le sud de la mer Morte ; mais avant d’avoir pu pénétrer dans Moab, ils étaient déjà morts de soif. Toutes les eaux du Ghôr, qui sont abondantes, descendent, en effet, de l’est, mais elles devaient naturellement être gardées par les Moabites et du moins fallait-il les atteindre. L’armée était vraiment exposée à périr dans le sable brûlant de T’Araba. On consulta le prophète Elisée qui répondit, par égard pour le roi de Juda : « Faites dés fosses de place en place ; vous ne verrez pas de vent et vous ne verrez pas de pluie, et cependant cette vallée se remplira d’eau. » Ici encore Stade croit la plaisanterie facile. Le secret n’en était pas un ; les rois savaient très bien que la vallée d"Arabim contenait des eaux souterraines : il n’y avait qu’à creuser. C’est de la haute fantaisie, car si on avait été dans les vallées moabites, l’eau n’aurait pas manqué, et, d’après le texte, il s’agit de tout autre chose. Ce phénomène, nous l’avons parfaitement compris, lorsque, par un ciel sans nuages, nous vîmes venir à nous de petits filets d’eau courante qui nous barrèrent le chemin dans le désert de Tih. Voir Revue biblique, 1896, p. 445. Il est vrai que la veille nous avions essuyé l’orage, mais la situation des confédérés était toute différente. Des orages terribles venus de la mer peuvent éclater sur les plateaux sans qu’on s’en doute

dans la profonde dépression du Ghôr : les eaux prennent alors leur pente naturelle et descendent soit vers la Méditerranée, soit vers la mer Morte. C’est ainsi que les rois virent à l’aurore les eaux descendre par le chemin d’Édom, et comme on pent le conjecturer avec certitude d’après l’ancienne version grecque, du désert de Chour, c’est-à-dire des plateaux du Tih. Si l’orage s’était déchaîné vers la montée d"Aqrabbim, les eaux devaient s’écouler naturellement par l’ouadi Fiqrê qui est bien le chemin d’Édom. Mais elles ne pouvaient aller bien loin dans le sable brûlant, il importait de les recueillir et c’est pourquoi le prophète avait donné le conseil de creuser non des puits, mais des fosses. Tous les détails portent et concordent avec la situation ; c’est le phénomène du seil, bien connu des Bédouins de l’a péninsule sinaïtique.

Les Moabites-ne pouvaient soupçonner le changement opéré dans la situation. Ceux qui ont visité les rives méridionales de la mer Morte savent quelles étranges couleurs changent parfois l’aspect des objets. Nous avons vu la mer Morte vraiment rouge le soir du 1 er novembre 1897 ; assurément on ne l’eût pas crue changée en sang ; mais, de loin, les Moabites, sachant de science certaine qu’il n’y avait pas d’eau au campement d’Israël, ont pu prendre telle flaque d’eau rougie par l’aurore pour du sang répandu. Ils quittèrent leur position défensive, s’engagèrent eux-mêmes dans un sol, tantôt mouvant, tantôt, rugueux, et furent battus. La contrée était ouverte, les Israélites mirent tout à feu et à sang, détruisant les villes, coupant les arbres, bouchant les sources, pendant que Mésa avec une élite se réfugiait dans sa capitale. Le roi de Moab a passé tout cela sous silence, il fallait s’y attendre. Cependant à quoi fait-il allusion quand il nous dit : C’est moi qui ai bâti Beth-Bamoth, car elle était détruite — c’est le propre terme de la Bible ; — c’est moi qui ai bâti Beser, car elle était en ruines ? À s’en tenir à son premier bulletin de victoire, on ne s’explique pas l’urgence de tant de réparations. Nous voyons même un indice moins facile à relever, mais [peut-être encore plus significatif, dans les constructions qu’il fit à Qorkha. Cette ville était sa capitale, puisqu’il y avait son palais royal. Or, il est évident que tout ce qu’il y construit, sauf précisément ce palais, a pour but de mettre la ville en état de défense. Fut-ce.ayant ou après le siège qu’il y subit, c’est ce qu’il ne dit point ; il se peut que les travaux, commencés à la hâte, furen t terminés à loisir, mais en tout cas une comparaison s’impose entre les travaux entrepris à Qorkha et les mesures prises par Ëzéchias pour.défendre Jérusalem contre Sennachérib. Ézéchias bouçh&la source, qui coulait en dehors de la ville et l’introduit dans la cité ; il répare les murs avec leurs tours, fait un mur extérieur, met ; en ordre l’arsenal. II.Par., xxxii : , 2, 5, 30. Quand on était Jnquiet à Jérusalem, on ^réparait le mur d’Ophel, II Par., xxvii, 3 : lors de ;  ; la..grande alerte décrite par Isaïe, tous les regards settomnaient.vers l’arsenal, bêt-ya’âr, ’e$. ces deux noms ressemblent ; étrangement à ceux des murs bâtis par Mésa ; , S’il-fournit la ville d’eau, il est bien probable qu’il ne : se préoccupe pas à la romaine.de procurer les eaux en : abondance-pour le luxe des bains.-A y regarder de près’, c’*st encore un ? njesure. défensive, analogue à celle d’Ézéchias, Les seules villes : d’Orient qui n’ont pas de citernes Sont celles quiont.l’eau à portée, comme c’est le cas du Kérak ; mais en dehors delà ville. En cas de siège, on se trouvait au dépourvu. Mésa lait une double piscine pour le public, puis commande à chacun de se creuser une citerne dans sa maison. L’expédition des rois eut lieu à la saison des pluies, comme le prouve l’orage dont nous avons vu les effets ; l’ordre était donc très pratique, et aussi la construction des fossés à laquelle on fit travailler les prisonniers faits naguère sur Israël.

Si Ton doutait qu’on puisse parler avec autant de sérénité que Mésa d’une aussi chaude alerte, il suffirait pour s’en convaincre de relire dans II Par., xxxii, le récit de la campagne de Sennachérib contre Ézéchias. On voit bien que le roi d’Assyrie avait eu l’intention de s’emparer des villes de Juda, II Par., xxxii, I, et de Jérusalem, mais il en fut pour sa courte honte, et dès lors le récit se termine comme l’inscription de Mésa : « Et Ézéchias se fit des villes et de nombreux troupeaux. » II Par., xxxii, 29. Des villes prises, du tribut payé, des territoires arrachés à Juda, il n’est pas fait la moindre mention. De son côté, l’historien biblique ne dissimule pas le triomphe final de Mésa, mais ici c’est à son tour à glisser légèrement. Soit qu’iL ait été pris au dépourvu dans ses préparatifs de défense, soit qu’il manquât de vivres, Mésa reconnut bientôt que la résistance était impossible. Avec sept cents hommes, cette élite dont il a parlé, il essaya de se frayer un passage jusqu’au roi d’Aram. Le texte dit Édom, mais le roi d’Édom n’eût pu que le livrer à ses alliés. Aram pour Édom n’est pas même un changement dans l’ancienne écriture. Ce fut en vain. Alors il eut recours à. cette suprême ressource des Carthaginois en péril, le meurtre d’un enfant, et pour être plus agréable à son dieu qui ne peut être que Chamos, il choisit pour victime son propre fils, l’héritier de sa couronne. Il l’immola en holocauste, sur le mur, sans doute pour que le sang versé en l’honneur du dieu le rendît inviolable. De cela non plus il ne s’est pas" vanté, .mais ; dans son cri de triomphe et d’action de grâces au Chamos de Qorkha, n’a-t-on pas comme un écho de ce drame ? C’est à Qorkha que Chamos l’avait sauvé, il veut lui élever un sanctuaire à Dibon, dans sa patrie, pour lui témoigner sa reconnaissance, « parce qu’il l’a sauvé de toutes ses chutes et l’a fait triompher de tous ses ennemis. »

Que se passa-t-il alors ? Cela est demeuré un secret impénétrable. Les Israélites abandonnèrent le siège et rentrèrent chacun chez soi. On a supposé que Mésa avait acheté leur retraite et fait sa soumission ; cette hypothèse ne concorde ni avec ses accents qui paraissent sincères, ni avec le texte sacré. Dans les opinions religieuses d’Israël et de tous les Sémites, un échec final aussi lamentable (le prophète n’avait rien prédit de l’issue définitive de la campagne) né pouvait être attribué qu’à la colère divine ; c’est aussi ce que le texte dit.

Quel fut l’événement interprété comme un châtiment de Jéhovah ? Encore une fois le point demeure obscur. Peut-être les Moabites combattirent-ils dès lors avec l’énergie du désespoir ; peut-être les Israélites redouteront-ils l’efficacité de l’horrible sacrifice ; élevés depuis le règne d’Achab dans des idées â moitié païennes, ils ont pu craindre, non point que Chamos se mît en colère contre eux, mais que Jéhovah, auquel ils ne pouvaient offrir de victimes humaines, se trouvât dans cet état d’infériorité que les anciens coloraient publiquement en disant que leur dieu était en colère. Si on admet que le roi de Juda était Ochozias, le plus simple est de supposer que dès. lors les Syriens étaient en campagne. Les deux rois, Joram et Ochozias, furent : vairiciis dans la première année du règne d’Ochôzias à Ramoth.Gàlaad et peu après tous deux périssaient de la main de Jéhu. Le triomphe de Mésa était complet et il a pn croire, au moment où sombrait la dynastie d’Amri et où Jéhu reconnaissait ; la suzeraineté du. roi d’Assyrie, qu’Israël était perdu, perdu, pour toujours. Israël possédait un germe de vie et de résurrection que Mésa ne pouvait sonpçonner. " - —.. -,

Bibliographie. — Clermont-Ganneau, La stèle de Mésa, roi de Moab, Paris, 1870 (la première publication sur ce sujet) ; Smend et Socin, Die Inschrift des Kônigs Mesa von Moab, Fribourg-en-Brisgau, 1886 ; Clermont-Ganneau, La stèle de Mésa, dans le Journal asiatique^, 1887, t. ix, p. 72 ; Socin et Holzinger, Zur Mesainschrift,

1897 ; Nordlander, Die Inschrift des Kônigs Mesa von Moab, Leipzig, 1896 ; Lidzbarski, Eine Nachprûfung der Mesa Inschrift, dans son Ephemeris fur semitische Epigraphik, n° 1, p. 1-10 ; J. Halévy, dans la Revue sémitique, juillet et octobre 1900 ; W. H. Bennett, art. Moab, dans Hastings, Dictionary of the Bible, t. iii, 1900, p. 403-408 ; Cheyne, Encyclopsedia biblica, t, iii, 1902, p. 3040-3048. M. Albert Lôwy a essayé d’attaquer l’authenticité de la stèle de Mésa, dans À critical Examir nation of the so-called Moabite Stone in the Louvre, 3e édit., Londres, 1903. J. Lagrange.

    1. MÉSCHEK##

MÉSCHEK (hébreu : MêSék), nom ethnique que la Vulgate a toujours rendu par Mosoch, excepté dans le Ps. cxix (hébreu, cxx), 5, où elle a traduit : « Malheur à moi, parce que mon exil s’est prolongé ; » tandis que le texte original porte : « Malheur à moi qui séjourne à Méschék. » Voir Mosoch.

    1. MESÉLÉMIA##

MESÉLÉMIA, hébreu : MeSélémyâhû [et Mesélémyâh, I Par., ix, 21], « celui que Yah récompense ; » Septante : MotreXXefit’a, MoasXXaiiîa ; Alexandrinus, MaoïXXanta [ModoXXàfi, MoooXXaiii', I Par., IX, 21] ; Vulgate : Meseleniia, I Par., xxvi, 1, 2 ; Mosollamia, I Par., ix, 21), lévite, de la famille de Caath. Il vivait du temps de David et fut chargé avec ses fils de la garde d’une des portes du sanctuaire. I Par., xxvl, 1-2. La porte orientale lui échut par le sort. I Par., xxvi, 14. Dans ce passage, la première syllabe de son nom est tombée, et il est appelé en hébreu : Sélémyahû. Septante : EeXe(xia ; Vulgate : Selemia. Ses fils étaient au nombre de sept. L’aîné, qui s’appelait Zacharie, I Par., ix, 21 ; xxvi, 2, fut désigné par le sort pour la garde de la porte septentrionale. 1 Par., xxvi, 14. Outre ses fils, Mesélémia avait sous ses ordres ses frères, ce qui faisait un total de dix-huit hommes forts et robustes, I Par., xxvi, 9, pour garder les deux portes de l’est et du nord. Le ꝟ. 17 nous apprend qu’il y avait, à l’est, six lévites par jour et, au nord, quatre par jour, chargés de monter la garde. Mesélémia, dans I Par., xxvi, 1, est appelé « fils de Coré, d’entre les fils d’Asaph ». Il était, en effet, Corite, mais non descendant d’Asaph, caries Corites descendaient de Lévi par Caath, I Par., vi, 16, 18, 21, tandis qu’Asaph descendait de Lévi par Gersôn. I Par., vi, 39-43. Voir Asaph, 1, t. i, col. 1056. Asaph doit être corrigé en Abiasaph, comme on le lit I Par., ix, 19. Abiasaph était, en effet, un des fils de Coré. Exod., vi, 24.

    1. MÉSENGUY François Philippe##

MÉSENGUY François Philippe, écrivain janséniste français, né à Beauvais le 22 août 1677, mort à SaintGermain-en-Laye le 19 février 1763. Il étudia à Beauvais et à Paris. En 1700, il devint professeur de rhétorique au collège de sa ville natale. En 1707, il fut appelé à Paris au collège dit de Beauvais, dont Rollin était le directeur. Coffin, successeur de Rollin, le chargea de l’instruction religieuse des élèves. Il remplit ces fonctions jusqu’en 1727 où l’opposition qu’il fit à la bulle Unigenitus l’obligea de les résigner. Il alla habiter sur la paroisse de Saint-Étienne-du-Mont et y demeura jusqu’en 1748. Il s'établit alors à Saint-Germain-en-Laye. Il ne cessa qu'à sa mort, qui eut lieu dans sa 86e année, de défendre le jansénisme, malgré les condamnations des papes. De ses nombreux écrits nous ne citerons que son Abrégé de l’histoire et de la morale de l’Ancien Testament, in-12, Paris, 1728 ; Le Nouveau Testament traduit en français avec des notes littérales, in-12, Paris, 1729 ; 3 in-12, 1752 ; Abrégé de l’histoire de l’Ancien Testament avec des éclaircissements et des réflexions, 10 in-12, Paris, 1735-1753 ; Abrégé de l’histoire de V Antien et du Nouveau Testament, 3 in-12, Paris, 17371738 ; Épîtres et évangiles avec des réflexions, in-12, Paris, 1737 ; Lyon, 1810. — Voir [l’abbé Lequeux, ami de Mésenguy], Mémoire sur la vie et les ouvrages de feu

M. l’abbé François Philippe Mésenguy, in-12, Paris, 1763.

    1. MESÉZÉBEL##

MESÉZÉBEL (hébreu : Mesêzab'ël, « celui que Dieu délivre ; » Septante : MaÇEgi)), , Mtau>&ër{k, Bao-mCâ), un des chefs du peuple qui signèrent l’alliance avec Dieu, après la captivité, du temps de Néhémie. II Esd., '%, 21. C’est sans doute le même qui est donné, iii, 4, comme le père de Barachias et le grand-père de Mossolam, l’un de ceux qui travaillèrent à la reconstruction des murs de Jérusalem sous Néhémte, et xi, 24, comme le père de Phathahia, agent du roi de Perse dans l’administration civile de la Judée. Si cette identification est exacte, Mesézébel était de la tribu de Juda et descendait de Zara. II Esd., xi, 24. La Vulgate, qui transcrit le nom hébreu Mesezebel dans II Esd, , iii, 4 ; xi, 24, l'écrit Mesizabel, x, 21.

    1. MESILTAIM##

MESILTAIM, forme duelle, l Par., xiii, 8 ; . iv, 16,

19, 28 ; xvi, 5, 42 ; xxv, 1, 6 ; II Par., v, 12, 13 ; xxix, 25 ; I Esd., iii, 10 ; II Esd., xii, 27, est un des noms hébreux des cymbales. On les appelle aussi selselim. Les deux noms dérivent de la même racine, qui est Vis, sâlal, « tinter, » rendre un son métallique. Arabe, J-o, t ^Ja. Voir Cymbale, t. ii, col. 1163. J. Parisot.

    1. MESIZABEL##

MESIZABEL, orthographe du nom de Mesézébel dans la Vulgate. II Esd., x, 21. Voir Mesézébel.

    1. MESOLLAM##

MESOLLAM (hébreu : Mesullâm, « qui se confie [en Dieu] ; » Septante : MEtroXXâfi), lévite qui vivait du temps d’Esdras. Il l’aida avec plusieurs autres, à dresser la liste des Israélites revenus de captivité qui avaient épousé des femmes étrangères. I Esd., x, 15. Plusieurs commentateurs croient que ce Lévite est le personnage nommé parmi les chefs chargés de la conduite des captifs, qui retournèrent de Babylone à Jérusalem. I Esd., viii, 16. On l’a aussi identifié avec le Mosollam, gardien des portes du Temple, qui est nommé II Esd., xii, 25. Le nom hébreu de MeSulldm fut très commun après la captivité. Voir Mosollam. La Vulgate ne l’a rendu qu’une fois par Mesollam. I Esd., x, 15. Dans I Esd., viii, 16, et II Esd, , xii, 25, elle écrit Mosollam, comme dans les autres passages où il est question d’autres Mesullâm.

    1. MÉSOPOTAMIE##

MÉSOPOTAMIE, plaine située entre le Tigre et l’Euphrate. — I. Nom. — La Mésopotamie est désignée dans le texte hébreu de la Bible sous les noms de 'ârani nahâraim ou Syrie des deux fleuves, Gen., xxiv, 10 ; Deut., xxiii, 4 ; Jud., iii, 8 ; I Par., xix, 6 ; Ps. lx(i.ix), 2 ; paddan 'âràm, plaine de Syrie, Gen., xxv, 20 ; xxviii, 2, 5, 6, 7 ; xxxi, 18 ; xxxv, 9, 26 ; xlvi, 15 ; ou simplement paddan, Gen., XLvm, 7 ; 'êber hannâbâr, le bord du fleuve, Josué, xxiv, 3, 14, 15 ; sedêh 'âram, la plaine de Syrie. Ose., xii, 12. Les Septante traduisent ces termes par Metroîtorajua auquel ils joignent le plus souvent le mot 2up(aç. On trouve aussi Eupi’a itoTajjiûiv, Jud., iii, 8 ; rcÉpav toO irorafioO, Jos., xxiv, 3, 14 ; jreSiov Suptaç. Ose., xii, 12. La Vulgate emploie généralement le mot Mesopotamia et le plus souvent avec le mot Syrise. Dans Osée, xii, elle se sert des mots regio Syrise.

IL Description de la Mésopotamie. — La Mésopotamie est la plaine arrosée par le cours moyen de l’Euphrate et du Tigre, après leur sortie de la chaîne du Taurus jusqu'à la basse plaine de la Babylonie. À l’Orient, le vaste plateau de l’Iran domine les plaines du Tigre et forme un barrage transversal d’où s'épanchent les eaux. La Mésopotamie est comme un déversoir pour les populations des hantes terres voisines, qui peuvent facilement descendre parles vallées. De même les habitants dés chaînes riveraines de la Méditerranée regar

daient aussi vers PEuphrate, par delà l'étroite lisière du désert. Elisée Reclus, Géographie universelle, t. ix, in-4°, Paris, 1884, p. 378. La Mésopotamie se divise en deux parties distinctes. La partie nord que Strabon appelle Parorée est la plus rapprochée des montagnes. Strabon, XVI, I, 23. Elle est arrosée sur ces deux côtés par le Tigre et l’Euphrate, et au milieu par les affluents de l’Euphrate, le Balikh et le Chaboras ou Habor (t. iii, col. 382) qui reçoivent eux-mêmes de nombreux petits cours d’eau. Voir Euphrate, t. ii, col. 2046. Cf. flg. 623, col. 2047. Le sol en est assez fertile. Il y a des forêts. Dion Cassius, lxviii, 26 ; lxxv, 9. Parmi les arbres qui y poussent, la Bible nomme le peuplier, l’amandier

soulève par tourbillons. G. Perrot, Histoire de l’art, t. H, 1884, p. 3-4, 10-13 ; G. Rawlinson, The ftve great monarchies of the ancient eastern World, 4e édit., in-8°, Londres, 1879, t. i, p. 1-4. On y rencontre de nombreux animaux fauves et domestiques, surtout des porcs, des sangliers (fig. 270), des serpents, la plupart inoffensifs, des lions et des panthères. G. Maspero, Histoire.anc, 1. 1, p. 551-561. Voir Euphrate, t. ii, col. 2048. Parmi les produits naturels du pays, Strabon, XVI, s, 24, mentionne des sources de naphte et une pierre appelée gangitide. La Mésopotamie fut une des voies principales du commercedans l’antiquité. C’est par l’Euphrate que passe le chemin qui réunit les lignes de navigation entre l’Inde et

269. — Animaux domestiques. D’après Layard, Monuments of Nineveh, t. ii, pi. 35.

et le platane. Gen., xxx, 37. On y trouve aussi des pâturages qui nourrissent des troupeaux de moutons et de chèvres. Gen., xxx, 31-43 (flg. 269). Entre le Balikh et le Tigre l’hémione et l’onagre erraient par troupes. La plaine située plus au sud est soumise à un régime différent. Elle ne doit sa fécondité qu’aux inondations périodiques du Tigre et de l’Euphrate, qui débordent au printemps. Pline, H. N., v, 26 (21). Pendant six semaines, en novembre et en décembre, il pleut beaucoup, puis les ondées diminuent jusqu’en mai. Pendant l’hiver, le froid n’est pas excessif, cependant le matin une mince pellicule de glace couvre les marais. Pendant six mois, de juin à novembre, la chaleur est lourde pour les hommes comme pour les animaux. Le vent du sud pousse parfois devant lui des tourbillons de sable. Tanl que la terre reste humide, le pays est couvert d’herbes très hautes, où les chevaux et le bétail enfoncent jusqu’au poitrail. Parmi les plantes qui naissent dans le pays se rencontrent les céréales, le froment, l’orge et l'épeautre, ainsi que plusieurs espèces de légumes, la lentille, le pois chiche, le haricot, l’oignon, l’aubergine, le concombre ; on y trouve aussi le sésame, le ricin, le henné, le lin et le chanvre. Les palmiers y rendent les plus grands services aux habitants. La plaine pendant la plus grande partie de l’année est nue et désolée. Au printemps, au contraire, on y voit en abondance des feuilles et des fleurs. Dès le mois de mai, les herbes se dessèchent. Il reste cependant de la verdure sur les bords des fleuves, ce sont des plantes aquatiques, des roseaux, des nénuphars. Ces plantes, serrées les unes contre les autres, offrent l’aspect de vastes prairies. Partout ailleurs l’aspect du pays est mbrne comme celui du désert. Les plantes desséchées forment une poussière grise que le vent

la Méditerranée. Dès que les hommes surent diriger une embarcation, ils prirent cette voie de préférence à celle de l’Iran, si difficile à cause des plateaux et des montagnes qu’il faut traverser. Sous, les Babyloniens, maîtres du port de Térédon sur le golfe Persique et de celui de Tyr sur la Méditerranée, la Mésopotamie

270. — La laie et ses petits au milieu des roseaux. D’après Layard, Monuments of Nineveh, t. ii, pi- 12.

fut la principale voie commerciale du monde par l’Euphrate. Les Perses habitués aux routes de terre arrêtèrent ce mouvement et coupèrent le fleuve par des barrages. Alexandre et les Séleucides restaurèrent la route de l’Euphrate. E. Reclus, Géographie universelle, t. ix, p. 378-379. La Mésopotamie appartenait ethnographiquement aux trois grands peuples sémitiques qui y touchaient ; les Assyriens occupaient la partie orientale sur le Tigre, les Araméens ou Syriens la partie occidentale et septentrionale, enfin le steppe.

du sud était aux Arabes nomades, "Apaëe ? « rx^vîtai. Ces derniers occupaient la région par laquelle passait la route des caravanes, allant de Syrie ou d’Asie-Mineure vers Babylone, Strabon, XVI, i, 26-27. Cf. Xénophon, Anab., i, v, 1. C’est de la partie septentrionale, c'çst-à-dire de celle où habitaient les Araraéens, qu’il est surtout question dans la Bible. La ville principale et la plus ancienne de*cette région était Haran. Voir Haban 3, t. iii, col. 424. Là encore se trouvaient Édesse (flg. 271) et Nisibe, sur le Mygdonius, aftluent du Chaboras. Dans la partie méridionale il n’y avait pas de villes. Les Grecs avaient comparé la Mésopotamie à un vaste navire à cause de sa forme allongée. Strabon, II, i, 23,

teur Éliézer chercher une femme pour lui en Mésopo-. tamie, mais en lui donnant ordre de ne pas permettre à Isaac de retourner dans ce pays. Gen., xxiv, 2-9. Éliézer partit pour la Mésopotamie et vint à Nachor ou Haran. C’est là qu’il rencontra Rebecca, fille de Bathuel, et illa ramena à Isaac. Gen., xxiv, 10-67 ; xxv, 20. Voir Éliézer, t. ii, col. 1678 ; Isaac, t. iii, col. 931. C’est de même en Mésopotamie et à Haran qu’Isaac envoya Jacob pour chercher une femme. Illui ordonna de prendre une des filles de Laban, frère de Rebecca, c’est-à-dire une de ses cousines germaines. Gen., xxviii, 2, 5, 6, 7. C’est près d’Haran que Jacob vit en songe une échelle mystérieuse où les anges montaient et descendaient. Il resta

271. — Orfah (ancienne Édesse). Grande Mosquée. D’après Chesney, The Expédition of Euphrates, t. ii, pi. xxxiv, p. 77

6 ; XVI, i, 22. Les Arabes l’appellent Al-Djeziréh, c’està-dire l'île.

III. La Mésopotamie dans la Bible. — II est pour la première fois question de la Mésopotamie dans la Bible à l’occasion du voyage de Tharé et d’Abraham, d’Ur en Chaldée vers le pays de Chanaan. Tharé et sa famille quittèrent Ur pour se diriger vers Haran ; ils traversèrent donc toute la Mésopotamie du sud au nord. Gen., xi, 31. Voir Haran 3, t. iii, col. 424. Tharé mourut à Haran. Cette migration d’Abraham est rappelée par les Ammonites, quand Holoferne les interroge sur les Juifs. Ils sont, dit le prince des Ammonites, de la race des Chaldéens. Ils habitèrent d’abord la Mésopolamiêy^parce qu’ils avaient abandonné les dieux des Chaldéens pour adorer le Dieu du ciel et ils s'établirent à Charan (Haran). Judith, v, 7. Le livre de Josué, xxiv, 3, 14-15, fait également allusion au retour d’Abraham du bord du fleuve et aux faux dieux que sa race y adorait. C’est d’Haran qu’Abraham, sur l’ordre de Dieu, se rendit dans la terre de Chanaan. Gen., xii, 1, Voir Abraham, t. i, col. 74. Une partie de la famille de Tharé était restée à Haran. Abraham appelait cette ville son pays à cause du séjour prolongé qu’il y avait fait. Pour ne pas marier son fils Isaac à une Chananéenne, il envoya son servi

sept ans en Mésopotamie au service de Laban pour obtenir la main de Rachel, puis ayant été trompé par Laban qui lui avait fail épouser subrepticement Lia, il y resta sept autres années pour obtenir enfin celle qu’il aimait. Gen., xxviii, 10 ; xxix, 30. Après avoir épousé Rachel, Jacob ne quitta pas le pays de son beau-père, car c’est là que naquirent ses douze fils. Gen., xxix, 31-xxx, 23 ; xxxv, 26 ; xlvi, 15. Jacob désirant revoir la terre de Chanaan demanda à son beau-père de le laisser aller et il quitta le pays. Rachel emporta les idoles de son père, ce qui montre que les Araméens de Mésopotamie étaient polythéistes et idolâtres. Gen., xxx, 25 ; XXXI, 19, 34-36. Voir Jacob, t. iii, col. 1062 ; Rachel. Balaam était de Mésopotamie. Sa patrie était Péthor, située au confluent de l’Eùphrate et du Sagur. Num., xxiii, 7 ; Deut., xxiii, 4 ; cf. Num., xxii, 5, dans l’hébreu. C’est par erreur que la Vulgate en fait un Ammonite dans ce verset. Voir Balaam, t. i, col. 1390. Au temps des Juges, un roi de Mésopotamie, inconnu par ailleurs et nommé Chusan Rasathaim, asservit les Juifs pendant huit ans. Othoniel les délivra de son joug. Jud., iii, 10-11. Voir Chusan Rasathaim, t. ii, col. 748. David fit une campagne en Mésopotamie et c’est à cette occasion qu’il composa le Psaume lix (hébreu, lx), ainsi qu’il est dit dans le titre.

IV. - 33 1Ô27

MÉSOPOTAMIE — MESSA

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Cette campagne est probablement l’une de celles dont il est parlé dans Il Reg. (Sam.), viii, 3 ; x, 6-19 ; I Par., xviii, 3. Voir David, t. ii, col. 1316, et Adarézer, 1. 1, col. 211. Dans I Par., xix, 6, nous voyons les Ammonites envoyer mille talents d’argent en Mésopotamie, afin d’y prendre à leur solde des chariots et des cavaliers. Ils y réunissent 32 000 chars, pour combattre David qui resta cependant vainqueur. Il est de nouveau question de la Mésopotamie dans le livre de Judith. Dans sa seconde « ampagne, Holopherne passa l’Euphrate, traversa la Mésopotamie et renversa toutes les places fortes bâties sur le torrent d’Abronas jusqu'à la mer. Judith, grec, ii, 24 ; Vulgâte, ii, 14. Le torrent dont il s’agit est le Chaboras, affluent de l’Euphrate. La Vulgate l’appelle Mambré (col. 635) et la Peschito Jaboc, ce qui est une erreur, car le Jaboc est un affluent du Jourdain. Voir Abronas, t. i, col. 92 ; Jaboc, t. iii, col. 1056. La Vulgate, Judith, m, 1, dit que les rois de Mésopotamie envoient des ambassadeurs à Holopherne, et m-, 14. Au temps d’Assurbanipal, Holopherne traversa la Mésopotamie et maintint dans la soumission les tribus toujours disposées à la révolte. Judith, grec, ii, 24 ; Vulgate, ii, 14 ; iii, 1, 14. La Mésopotamie suivit le sort du reste de l’empire assyrien ; elle passa sous la domination des Babyloniens, puis' sous celle des Mèdes et des Perses. Sous Darius I" la Mésopotamie du nord fit d’abord partie de la satrapie d’Athura ou de Syrie, et la plaine du sud de la satrapie d’Arabie. Inscription de Behistoun, col. 1, lig. 12-17 ; Weissbach-Bang, Die Altpersischen Keilinschriften, in-4o, Leipzig, 1893, p. 12-13 ; G. Maspero, Hist. anc., i. ii, p. 688.

IV. Histoire de la Mésopotamie en dehors de la Bible. — On sait peu de chose de l’histoire de la Mésopotamie jusqu'à l'époque où elle fut soumise aux Perses. Les Hébreux y séjournèrent au temps d’Abraham ainsi que nous l’avons vu plus haut. D’après les inscriptions assyriennes, le pays continua à être habité par des tribus indépendantes ayant chacune leur chef. Chusan Basa thaim qui asservit les Israélites au temps des Juges, était l’un de ces chefs. Jud., iii, 10-11. Au temps de David, les Araméens de Mésopotamie paraissaient avoir subi la domination du roi de Soba, Adarézer. II Reg. , (Sam.), x, 16. Les Assyriens furent souvent en lutte avec ces tribus. ïhéglathphalasar I er traversa toute la Mésopotamie du nord avec ses armées. G. Maspero, Hist. anc, t. ii, p. 643. Assurnazirhabal, en 880, soumit à la domination assyrienne les chefs des tribus araméennes à la suite d’une importante expédition. Maspero, Hist. anc, t. H, p. 28-32, 118. Salmanasar III affermit cette conquête (859-855). Ibid., p. 66. Cf. II (IV) Reg., xis, 13. Cf. F. Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., t. iii, p. 445, 668. Lors de la conquête de l’empire perse par Alexandre, la Mésopotamie fut soumise avec le reste des provinces. C'était une des régions qu’il avait lui-même parcourues avec son armée en suivant une route qui va de Chapsaque sur l’Euphrate à Carrhæ l’ancienne Haran, à Nisibe et de là à Arbèles. Àrrîen, Anab., III, va. Après la mort d’Alexandre, Perdiccas donna la satrapie de Mésopotamie à Archélaûs ; lors du partage de Triparadisos, en 321, Antipater donna la satrapie de Mésopotamie à Amphimachos. Diodore de Sicile, XVIII, xxxix, 6. Elle passa ensuite sous le gouvernement de Blitor qui fut destitué par Antigone ; enfin elle fut soumise à Séleucus I er en 310. Josèphe, Ant. jud., XII, iii, 4 ; Appien, Syriac, 55. Cf. G. Droysen, Histoire de V Hellénisme, trad. fr., t. ii, in-8o, Paris, 1884, p. 32, 133, 293, 515. Nicanor fut satrape sous Antiochus. Pline, H. N., vi, 26 (30). Les Grecs fondèrent dans la Mésopotamie un certain nombre de colonies. Pline, H. N., vi, 26 (30). Les principales sont Nicéphorîon fondée par Alexandre, Pline, H. iV./vi, 26 (30) ; Apamée et Amphipolis fondées par Séleucus I er, Pline, M. N., y, 24 (21) ; Antioche Callirhoé qui porta ensuite

le nom d'Édesse. Pline, H. N., v, 24 (21). Nisibe prit le nom d' Antioche de Mygdonie. Josèphe, Ant. jud., XX, m, 3 ; Strabon, XVI, i, 23. G. Droysen, Histoire de l’Hellénisme, t. ii, p. 670, 739-744. Après la chute de la dynastie des Séleucides, la Mésopotamie fut le théâtre des luttes entre les Parthes, les Arméniens et enfin les Romains. Ceux-ci la conquirent une première fois sous Trajan. Ce prince s’empara d'Édesse où régnait depuis 137 avant J.-C. une dynastie indigène, de Nisibe et de Singara et organisa une province de Mésopotamie. Eutrope, viii, 3. Il ne put conserver ses conquêtes et Hadriendutles ahandonnertoutàfait.DionCassius, LXvm, , 29 ; Spartion, Hadrien, v ; Eutrope, viii, 6. Sous Marcvurèle, la Mésopotamie fut reprise, Capitolin, Marc Antonin, vin et ix, Verus, vi, vii ; Dion Cassius, lxxi, 1 ; cependant le pays ne fut jamais complètement enlevé aux princes indigènes, car nous trouvons encore sous Gordien III un roi d'Édesse. Eckhel, Doctr. Num., t. iii, p. 516. La région gouvernée par les princes d'Édesse s’appelait l’Osrhoëne, elle était sous la suzeraineté des Parthes.

V. Bibliographie. — Strabon, XVI, i, 21-28 ; Olivier, Voyage dans l’Empire ottoman, t. ii, in-4o, 1804 ; Ainsworth, Researches in Assyria, Babylonia and Chaldea, in-8o, Londres, 1838 ; Cl. Chesney, The Expédition of the Survéy of the rivers Euphrales and Tigris, in-8o, Londres, 1850, t. i ; W. K. Loftus, Travels and Researches in Chaldea and Susiana, in-8°, Londres, 1859 ; Hœfer, Chaldée, in-8o, Paris, 1853, p. 151-192 ; F. Lenormant et E. Babelon, Histoire ancienne, 9e édit., in-12, Paris, 1885, t. iv, p. 1-18 ; G. Perrot et Ch. Chipiez, Histoire de l’art dans l’antiquité, t. i, in-4°, Paris, 1884, p. 2-14 ; H. Kiepert, Manuel de géographie ancienne, trad. franc., in-8°, Paris, 1887, p. 89-92 ; G. Maspero, Histoire ancienne des peuples de l’orient classique, 1. 1, 1895, p. 551-564. E. Beurlier.

    1. MESPHAR##

MESPHAR (hébreu : Mispâr, « nombre ; » Septante : Mixo-çôp), un des chefs israélites qui retournèrent de la captivité en Palestine avec Zorobabel. I Esd., ii, 2. Dans le passage parallèle, II Esd., vii, 7, Mesphar est appelé Mespharath.

    1. MESPHARATH##

MESPHARATH (hébreu : Mispérét ; Septante : MadtpapâG), nom, dans II Esd., vii, 7, du chef israélite appelé Mesphar dans I Esd., ii, 2. Voir Mesphar.

    1. MESPHÉ##

MESPHÉ, orthographe, dans la Vulgate, Jos., xviii, 26, du nom d’une ville de Benjamin appelée ailleurs Maspha ou Masphath. Voir Maspha.

    1. MESRAIM##

MESRAIM (hébreu : Mi$raim ; Septante : Medpacv), second fils de Cham, Gen., x, 6 ; I Par., i, 8, et père des Ludim, des Anamim, des Laabim, des Nephtuim, des Phétrusim et des Chasluim (voir ces noms). Gen., x, 13-14 ; I Par., i, 11-12. Ses descendants peuplèrent l’Egypte, qui est appelée en hébreu, de son nom, Misraïm. Voir Egypte, t. ii, col. 1603.

    1. MESROB##

MESROB, traducteur de la Bible en arménien. Voir Arménienne (Version) de la Bible, 1. 1, col. 1010.

MESSA. La Vulgate rend sous cette forme un nom de lieu et un substantif commun, dont elle fait un nom propre. Ces deux mots sont complètement différents en hébreu et ne proviennent pas de la même racine.

1. MESSA (hébreu : Miiâ' ; Septante : Ma<r<rîi), localité mentionnée, Gen., x, 30, dans la description des limites du pays occupé par les Jectanides : « Ils habitèrent depuis Messa en 'allant vers Séphar la montagne de l’Orient. » Ces derniers mots sont diversement traduits, mais, quoi qu’il en soit de leur signification, il est cer

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MESSA — MESSE

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tain, d’après le langage de la Genèse, que Messa se trouvaiten Arabie. Tout le monde est d’accord sur ce point ; les sentiments sont divers lorsqu’il s’agit de déterminer la situation précise de Messa. Bochart, Phaleg, ii, 30, Opéra, Liège, 1692, 1. 1, col. 144, a cru reconnaître Messa dans la MoOo-a de Ptolémée, vi, 8 (MoOÇa d’Arrien, Peripl. ; Muza de Pline, H. N., vi, 23), port de mer bien connu à l'époque classique, dans l’Arabie méridionale, au nord du détroit de Bab el-Mandeb, non loin de la Moka actuelle, sur la mer Rouge. Voir W. Smith, Dictionary of Greek and Roman Geography, au mot Muza, t. ii, 1857, p. 379. Gesenius, Thésaurus, p. 823, et autres commentateurs, Winer, Realwôrlerbuch, 3e édit., t. ii, p. 85 ; Caliver Bibellexicon, 1885, p. 580, au lieu de placer Messa au sud-ouest de l’Arabie en font, au contraire, la frontière septentrionale du pays occupé, d’après eux, par les Jectanides, voir Jectan, t. iii, col, 1215, et l’identifient avec la Mésène des anciens, située à l’embouchure du Tigre. Philostorge, H. E., iii, 7, Pafr. gr., t. lxv, col. 489, la décrit en ces termes : « Avant de se jeter dans la mer, (le Tigre) qui a uni ses eaux à celle de l’Euphrate, se divise en deux grands fleuves. Il se déverse ensuite dans la mer de Perse (ou Golfe persique) par deux embouchures fort éloignées l’une de l’autre, enfermant entre ses deux bras un long espace de terre ; c’est là qu’habite le peuple appelé du nom de Méséniens (I6vo ; tûv Ms<xï)v<5^). » Cf. Dion Cassius, lxviii, 28. Cette position paraît trop septentrionale, si l’on s’en rapporte aux explorateurs récents de l’Arabie qui fixent le domaine des Jectanides dans l’Arabie méridionale, entre le Yémen de nos jours à l’ouest et le Hadramaut à l’est. Cf. Zeller, Biblisches Wôrterbuch, 2 in-8°, Karlsruhe, 1884, t. i, p. 71-72. Éd. Glaser, Skizze der Geschichte und Géographie Arabiens, in-8o, Berlin, 1890, t. ii, p. 336, 420, 437, identifie Massa, Gen., xxv, 14, avec M aciya, près du Djebel Sammar, dans l’Arabie centrale, et pour lui, Massa, Gen., xxv, 14 ; Mes, Gen., x, 23, et Messa ne sont qu’un même nom écrit de trois façons différentes. Cette identification des trois noms n’est pas admissible. Voir Mes, col. 1013. Mais, quoi qu’il en soit de ce point, rien n’empêche d’admettre, conformément à son opinion, que le Djebel Sammar fut la limite septentrionale de la région habitée par les Jectanides qui auraient occupé le pays, au sud de cette montagne, jusqu'à Séphar, placé par lui dans l’Arabie méridionale. Voir Séphar. A. Knobel, Die Vôlkertafel der Genesis, in-8o, Giessen, 1850, p. 182, a identifié Messa avec Biseha, dans le Yémen septentrional, au sud-ouest de la Mecque ; c’est une pure hypothèse. E. Kautzsch, dans Riehm’s Handwôrterbuch des biblischen Altertums, 1893, 1. 1, p. 764. Le problème de l’identification de Messa n’est pas encore résolu d’une manière certaine.

F. VlGOUROlIX. 2. MESSA (hébreu : Massdh). D’après la Vulgate, lorsque le grand-prêtre Joïada voulut faire sacrer dans le Temple le jeune roi Joas, il donna cet ordre aux gardes, après leur avoir assigné leurs postes : « Vous garderez la maison de Messa. » IV Reg., xi, 6. Le traducteur a pris, dans ce passage, un substantif commun pour un nom propre ; îibo, massdh, de ndsah, « arracher, repousser, chasser, » signifie l’actiofTd'éloigner, de repousser et le membre de phrase doi^se traduire : « Vous veillerez à la garde de la maison (du Temple) pour en empêcher l’entrée. »

    1. MESSAL##

MESSAL (hébreu : Mii'âl ; Septante : Mæurâ), ville d’Aser. Jos., xix, 26. Dans Jos., xxi, 30, et I Par., vi, 74, la Vulgate écrit ce nom Masal. Voir Masal, col. 830.

    1. MESSALÉMETH##

MESSALÉMETH (hébreu : Meiullémét, « amie [de Dieu], » Gesenius, Thésaurus, p. 1426 ; Septante : MeffoXXan), fille dUarus (t. iii, col. 443), de Jétéba, ville dont le site est inconnu (t. iii, col. 1518). Elle épousa

le roi de Juda Manassë et fut la mère d’Amon qui succéda à son père sur le trône. IV Reg., xxi, 19. Le nom de cette reine est le féminin du nom propre Mesullâm (Vulgate : Mosollam) qui est fréquent dans TAnciea Testament. L’historien sacré donne, avec le nom de son père, Tindicaliondu lieu d’origine, ce qui n’avait pas eu. lieu pour les reines-mères qui l’avaient précédée, mais qui se reproduit pour toutes celles qui suivent.

    1. MESSE##

MESSE, sacrifice de la loi nouvelle qui est offert par le prêtre sur l’autel et consiste dans l’oblation non sanglante du corps et du sang de Notre-Seigneur sous les apparences du pain et du vin.

I. Nom. — 1° Étymologie. — Le nom de messe ne se lit pas dans l'Écriture ; il tire son origine du missa de l’Ile, missa est, qui correspond à la formule des anciennes liturgies orientales grecques : 'Ev etp’rivi) Xpioxoû nopeu8m(1£v, « partons dans la paix du Christ. » Le mot « lissa lui-même est expliqué de manières diverses. Baronius, Ann. eccles., édit. d’Anvers, 1612, t. i, an. 34, n. lxi, p. 160, le fait venir du mot hébreu hed, missâh, auquel

un grand nombre de traducteurs et de commentateurs donnent le sens d' « oblation », « offrande, » dans Deut., XVI, 10 (Vulgate, oblatio). On a voulu faire dériver aussi missa du grec [hjijuk, « initiation, institution ; » d’autres mots encore. On admet communément aujourd’hui que missa est un substantif ayant le sens de missio, « envoi, » cf. Suétone, Calig., 25, contrairement à l’opinion de ceux qui le prennent comme participe en sousentendant un substantif, hostia, concio, etc. On le trouve avec le sens de « renvoi » dans la Peregrinatio publiée sous le nom de sainte Sylvie par Fr. Gamurrini, in-4o, Rome, 1887, p. 89 : Facit oblationem (episcopus), mane sabbato, jam ut fiât missa. Cf. Duchesne, Origines du culte chrétien, 2e édit., 1898, p. 473. Voir Forcellini, Totius Latinitatis Lexicon, édit. Vincent De-Vit, t. iv, 1868, p. 143 ; S. 'Avit, Epist. i, t. lix, col. 199-200 et la note ; Du Çange, Glossarium médise et infirme Latinitatis, édit. Henschel, t. iv, 1845, p. 433 ; Rohaut de Fleury, La messe, études archéologiques, t. i, 1883, p. 46 ; N. Gihr, Das heilige Messopfer, 4e édit., Fribourgen-Brisgau, 1887, p. 314.

2° Emploi. — Le nom de missa paraît avoir été en usage dès le second siècle dans l'Église latine. Il est employé incontestablement avec cette signification au ive siècle par saint Ambroise. Il écrivait à sa sœur Marcelline, Epist., xx, 4, t. xvi, col. 995 : Ego mansi in munere, missam facere cœpi. Dans un sermon pour le carême, attribué à ce saint docteur, Serm., xxv, 5, t. xvii, col. 656, nous lisons : Qui juxta Ecclesiam est et occurrere potest, quotidie erudiat missam. Cf. au v 8 siècle, Paulin Petricordiensis, Vita Martini, iv, vers 69, t. lxi, col. 1039. Depuis saint Grégoire le Grand, le mot missa est devenu généralement dans l'Église latine le terme employé pour désigner le saint sacrifice.

3° Noni de la messe dans le Nouveau Testament. — Dans le Nouveau Testament, la messe est appelée « la fraction du pain s, ï) r-Xâutç to5 aprou, fractio panis, Act., ii, 42 ; cf. Luc, xxiv, 35 (Matth., xxvi, 26 ; Marc, xcv, 22 ; Luc, xxii, 19 ; I Cor., xi, 24), à cause de la communion, pour laquelle on rompait le pain consacré et qui en était une des parties principales. Voir aussi Act., xx, 7, 11 ; xxvii, 35 ; I Cor., x, 16. Saint Paul, I Cor., , xi, 20, appelle aussi le sacrifice eucharistique xup'.<xxàv ; Stîirvov (Vulgate, dominica csena, « le souper du Seigneur, » à cause du souper ou de la Cène, pendant laquelle le Seigneur avait institué le sacrifice de la Loi nouvelle). Dans la Didac/ié, ix, 3, 4, édit. Harnack, 1884, p. 30, le sacrifice eucharistique est simplement appelé xXd<T|ia, « fraction du pain. » Cf. xiv, 1, p. 53.

II. Institution. — 1° Le sacrifice de la messe avait été préfiguré dans l’Ancien Testament parla Pàque ou im

molation de l’agneau pascal et prophétisé par Malachie, i, 10-11 :

Lequel d’entre vous fermera Les portes

Pour que tous n’allumiez pas inutilement le feu sur mon autel ?

Je ne prends aucun plaisir en vous, dit Jéhovah Sabaoth,

Et je n’agrée point l’offrande de vos mains.

Car du lever du soleil à son couchant

Grand est mon nom parmi les nations,

Et en tout lieu on offre de l’encens à mon nom

Et une offrande (hébreu : minhâh) pure,

Car grand est mon nom parmi les nations,

Dit Jéhovah Sabaoth — (Traduction sur l’hébreu).

Ce sacrifice, cette offrande pure, qui doit être offert en tout Heu et parmi les nations, non plus seulement à Jérusalem, c’est un sacrifice non sanglant, une minhâh ; consistant en une oblation de farine, Exod., xxix, 40, Num., xxviii ; de pain sans levain, Lev., ii, 4, ou d'épis de blé broyés et rôtis. Lev., ii, 14. Notre-Seigneur réalisa la prophétie en instituant le jeudi saint le sacrement de l’Eucharistie où il changea le pain et le vin en son corps et en son sang et en donnant à ses Apôtres et à leurs successeurs l’ordre et le pouvoir d’offrir partout dans la suite des temps le même sacrifice. « J’ai appris du Seigneur ce que je vous ai aussi enseigné, dit saint Paul, I Cor., xi, 22-25, c’est que le Seigneur Jésus, dans la nuit où il fut livré, prit du pain et, après avoir rendu grâces, le rompit et dit : Prenez et mangez, ceci est mon corps qui sera livré, pour vous (la plupart des manuscrits grecs portent simplement : qui est pour vous) ; faites ceci en mémoire de moi. De même, après avoir soupe, [il prit] le calice et dit : Ce calice est la nouvelle alliance en mon sang ; faites ceci, toutes les fois que vous en boirez, en mémoire de moi. » Cf. Matth., xxvi, 26-29 ; Marc., xiv, 22-25 ; Luc, xxii, 19-20. Le concile de Trente, sess. xxii, can. 2, a donné l’interprétation authentique des paroles : « Faites ceci en mémoire de moi. » Si quis dixerit Mis verbis : Hoc facite in meam commemorationetn, Christum non instituisse Apostolos sacerdotes ; aut non ordinasse, ut ipsi aliique sacerdotes offerrent corpus et sanguinem suum, anathema sit. Pour les détails de l’institution, voir Cène, t. ii, col. 408. Cf. G. Bickell, Messe und Pascha. Der apostolische Ursprung der Messliturgie und ihr genauer Anschluss an die Einsetzungsfeier der h. Eucharistie durck Christus, in-8°, Mayence, 1872, p. 77-78 ; J. Corluy, Spicilegium dogmatico-biblicum, 2 in-8°, Gand, 1884, t. ii, p. 398-437.

III. Rites primitifs. — Conformément aux ordres du Seigneur, les Apôtres offrirent le saint sacrifice de la messe, après la Pentecôte, à Jérusalem, avant leur dispersion dans le monde, Act., Il, 42, 46, et divers passages du Nouveau Testament nous apprennent de quels rites ils firent usage dans sa célébration. Ils reproduisirent les diverses circonstances de la Cène dont le sacrifice chrétien était le mémorial et le renouvellement. Ce sacrifice était nni, de même qu'à la Cène, à un repas qu’on appela « le repas du Seigneur », I Cor., xi, 20, comme on l’a vu plus haut. Le repas lui-même, d’après l’opinion d’un grand nombre de commentateurs, ne tarda pas à prendre le nom d’agape (Iv Tat ; « Y<xitatç [Vulgate, in epulis suis], Judæ 12). "Voir Agapes, t. i, col. 260. La « fraction du pain » ou le sacrifice eucharistique, « l’eucharistie, » ainsi que le traduit la version syriaque dans les Actes, ii, 42, avait lieu le soir, comme au moment de son institution, Act., xx, 7 ; cf. S. Justin, Apol. l, 26, t. vi, col. 379, à la clarté des lampes selon l’usage juif, Act., xx, 8, tantôt dans une maison et tantôt dans un autre (xax* oïxov, circa domos), Act., Il, 46, ou bien dans un local spécial (êv èxxXijat’a), I Cor., xi, 18, le lendemain du jour du sabbat ou dimanche (iv asTg p.tï tûv cra66dtTa>v). Act., xx-, 7 '. Cl. Didachê, xiv, 1 (xarà xupiaxirjv), p. 53. La cérémonie sacrée était accompagnée d’une prédication des Apôtres, Act., ii, 42 ; xx, 7 ; on

priait, Act., ii, 42, et l’on chantait des Psaumes (atvoûvtEt tôv ®côv, collaùdanles Deuni). Act, , H, 47 ; cf. Eph., v, 19. On faisait aussi le dimanche une collecte pour les pauvres, I Cor., xvi, 2, mais la partie essentielle de l’acte liturgique, c'était la fraction du pain, c’est-à-dire la consécration du corps et du sang de Noire-Seigneur, Act., ii, 42, 46 ; xx, 7, suivie de la communion, ainsi que le montre le langage de saint Paul. « Le calice de bénédiction que nous bénissons, dit l’apôtre, I Cor., X, . 16, n’est-il pas la communion au sang du Christ ? et le pain que nous rompons, n’est-il pas la communion au corps du Christ ? » Ce langage indique clairement que les fidèles qui assistaient aux saints mystères y faisaient la sainte communion. Cf. I Cor., Xi, 27. Tels sont les rites primitifs de la messe qui se développèrent peu à peu dans les premiers siècles et formèrent les diverses liturgies de l'Église. — Pour la bibliographie, voir N. Gihr, Dos keilige Messopfer, 1887, p. ix-xiv ; Id., Le saint sacrifice de la messe, trad. franç., 21n-8°, Paris, 1894, 1. 1, p. ix-xv ; A. Legendre, L'Église naissante et l’Eucharistie, dans la Revue des facultés catholiques de l’Ouest, t. xi, décembre 1901, p. 194-202.

F. VlGOUROUX.

    1. MESSIANIQUES##

MESSIANIQUES (PROPHÉTIES). Voir JésusChrist, t. iii, col. 1429-1436, et Messie.

    1. MESSIE##

MESSIE (hébreu : mâsiah ; Septante : Xpi<rr6< ;  ; Mecffi’a ; , dans Joa., i, 42 ; IV, 25 : de Taraméen meSiah, avec. redoublement de la seconde consonne ; Vulgate : Chris tus f Messias), nom. sous lequel le Sauveur a été attendu et ensuite connu. Le mot vient du verbe mâSâh, « oindre, » consacrer par une onction et rendre apte à exercer une fonction théocratique, celle de prêtre, Exod., xxviii, 41, celle surtout de grand-prêtre, Lev., iv, 3, 16, celle de prophète, III Reg., xix, 16, et celle de roi israélite. I Reg., ix, 16 ; xv, 1, 17, etc. ; Ps. xviii (xvii), 51 ; xx (xix), -7 ; lxxxix (lxxxviii), 39, 52 ; Lam., iv, 20 ; Hab., m, 3. Dans Isaïe, xlv, 1, le nom est même employé au sujet de Cyrus, à cause du rôle providentiel que ce prince eut à exercer à l'égard des Israélites.

I. Jésus-Christ Messie. — 1° Le mâsiah par excellence est le Sauveur. Ps. ii, 2 ; xlv (xi.rv), 8 ; Dan., ix, 24. Notre-Seigneur fait allusion à ce nom quand il s’applique la prophétie d’Isaïe, lxi, 1, où il est dit : « Jéhovah m’a oint, » mdSah Yehovdh 'ôti. Luc, iv, 21. Voir Christ, t. ii, col. 717. Dans les apocryphes juifs, on. trouve les noms de Messie ou Oint, Renoch, XLvni, 10 ; lu, 4 ; Apoc. Barueh., xxix, 3 ; xxx, 1, etc. ; IV Ésd., vu, 29, de Xpio-rô ; xupîovi, Psal. Salom., xvii, 36 ; xviii, 6, 8, et ceux de ham-mâHah, ou, en araméen, meHâh', etmalkd 'meêiâh, « roi Messie, » dans la Mischna, Berachoth, i, 5 ; Sota, ix, 15. Quand le mot Xpto-rôi ; fut devenu nettement chrétien, Aquila traduisit l’hébreu mâSiah par 'HXetu, nivo4, qui également signifie « oint ». Cf. S. Jérôme, In Is., xxyii, 13, t. xxiv, col. 314 ; In Zach., xiv, 15 ; In Mal., iii, 1 ; iv, 6, t. xxv, col. 1534, 1565, 1578. Pour les Juifs, le nom de Messie désignait le même personnage que les appellations de « fils de l’homme », « élu, » « fils de Dieu, » « fils de David. » Voir Jésus-Christ, t. iii, col. 1438. — Les Talmudistes, Bab. Sukka, 52 a, ont supposé un Messie secondaire, « fils de Joseph » ou « d'Éphraïm », qui devait succomber dans la lutte contre les puissances adverses, tandis que le Messie supérieur, « fils de David, » devait régner. Il n’y a là qu’une fausse interprétation de deux passages bibliques, Deut., xxxiii, 17, et Zach., xii, 10. Cf. Schûrer, Geschichte des jûdischen Volkes in Zeit J. C, Leipzig, t. ii, 1898, p. 537. — Dans le Testament des XII patriarches, il est dit à plusieurs reprises que le Messie doit être à la fois de la tribu de Lévi et de celle de Juda. Siméon, 7 ; Lévi, 2 ; Dan, 5 ; Gad, 8 ; Joseph, 19. Le premier et le troisième de ces passages se retrouvent dans la version arménienne du Testament ; on ne peut

donc guère soupçonner une main chrétienne d’avoir interpolé le texte grec dans le sens d’une double descendance du Messie, dans le but d’expliquer par son origine même son sacerdoce et sa royauté. La parenté de Marie avec Elisabeth, Luc, i, 36, ne prouve nullement qu’elle ait été de la tribu de Lévi. Saint Clément, I ad Cor., 32, 1. 1, col. 271, dit bien que de Jacob sont sortis les prêtres et les lévites, le Seigneur Jésus selon la chair, les rois et les princes par la famille de Juda ; mais sa manière de parler ne suppose pas nécessairement la descendance lévitique du Messie. Aussi saint Augustin, Cont. Faust., xxin, 4, 9, t. xlii, col. 463, 471, combat-il l’assertion de Faustus, prétendant que Joachim, père de Marie, était prêtre et par conséquent de race lévitique. Le renseignement fourni par le Testament est en somme contraire à toute la tradition chrétienne, qui rattache le Messie à la seule tribu de Juda. Cf. Schûrer, Geschichte, t. iii, 1898, p. 257. — Quand l’imposteur Barkochéba, « fils de l'étoile, » parut en Judée sous l’empereur Hadrien, les Juifs voulurent voir en lui le Messie, et le célèbre R. Akiba le reconnut comme tel. Cf. Jer. Taanith, iv, fol. 68 d.

2° Le nom de mâHah, « oint, » suppose une onction reçue par le Sauveur. Is., lxi, 1. Saint Pierre dit que le Père a oint Jésus, Act., iv, 27, qu’il l’a oint dans le Saint-Esprit et dans la puissance. Act., x, 38. L'Évangile ne mentionne aucune onction matérielle reçue par NotreSeigneur durant sa vie. Il s’agit donc ici d’une onction spirituelle, analogue, bien que très supérieure, à celle que reçoivent de Dieu même les chrétiens. I Joa. ; Iꝟ. 20, 27. Cette onction a pourauteur l’Esprit-Saint, que l'Église, dans le Veni Creator, appelle spiritalis unctio. Le Saint-Esprit a oint le Sauveur au moment de son incarnation, Luc, i, 35 ; Matfh., i, 20, et au jour de son baptême. Matth., iii, 16 ; Marc, I, 10 ; Luc, iii, 22 ; Joa., i, 32, 33. Du texte de l'Épître aux Hébreux, i, 9, quelques Pères ont conclu que le Fils de Dieu était « oint » même avant son incarnation ; d’autres ont cru que l’onction ne se rapportait qu'à sa nature humaine. Cf. Petau, De incarn. Verbi, XI, viii, 1-13. Celui-ci résume ainsi leur enseignement, De incarn., XI, ix, 1 : « L’onction et le titre de Christ conviennent l’un et l’autre proprement et directement au Fils de Dieu et à la personne du Verbe, non à cause de la nature divine, mais à cause de l’humanité qu’il a prise, de même que la faim, la soif, la fatigue, la douleur, la mort sont attribuées au Verbe et à Dieu, mais en tant qu’homme ou incarné. Ainsi se concilient entre eux les anciens, attribuant les uns à Dieu même, les autres à l’homme et plusieurs aux deux ensemble, le nom de Christ et l’onction qu’il signifie. » L’onction de l’Esprit-Saint a été complète et parfaite dès le premier instant de l’incarnation du Sauveur. Celui-ci ne pouvait Être moins favorisé sous ce rapport que son précurseur. Luc, i, 15. L’onction qui se fit au baptême, sans pouvoir rien ajouter à la première, eut pour but de fournir un signe visible à Jean-Baptiste, Joa., i, 32, 33, et de marquer le début du ministère public du Sauveur, qui, à dater de ce moment, se mit à prêcher, à faire des miracles, à choisir ses disciples, en un mot, à exercer ses fonctions sacerdotales. Cf. Petau, De incarn., XI, îx, 8-14. — Pour les prophéties messianiques, voir Jés/us-Christ, t. iii, col. 1429-1434. r

3° En vertu de l’onction divine qui le constitue Messie, Jésus devient le fondateur et le chef du royaume de Dieu. Dans les psaumes h et lxxii (lxxi), le Messie avait été annoncé comme le roi établi par Jéhovah sur Sion pour régir tous les peuples dans la justice et la paix. L’idée d’un royaume gouverné spirituellement par l’oint du Seigneur remontait donc à l’Ancien Testament. L’ange annonça à Marie que son fils régnerait sur la maison de Jacob, Luc, i, 32, et ensuite il avertit les , bergers*que celai qui venait de naître était le Christ Seigneur. Luc, H, 11. Il est appelé par les Mages « roi

des Juifs », par Hérode fi le Christ », et par les princes des prêtres, répétant la prophétie de lvnchéé, « le chef qui doit paître Israël. » Matth., Il, 2, 4, 6. Ces trois dénominations désignent équivalemment le même personnage, et ce personnage est si bien fait pour régner qu’Hérode voit en lui un compétiteur et prend ses mesures pour le supprimer. À la synagogue de Nazareth, NotreSeigneur lit le début du texte d’Isaïe, lxi-lxii, qui annonce le nouveau royaume sous une formé allégorique, et il se présente lui-même comme l’oint, le Messie, qui procure l’accomplissement de la prophétie et, par conséquent, vient fonder le royaume attendu. Luc, iv, 17-21. Aux envoyés de Jean, qui l’interpellent pour savoir s’il est le Messie, il répond en citant les miracles qu’il a opérés, Matth., xi, 3-6, et qu’Isale, xxxv, 5, 6 ; lxi, 1-5, avait prédits dans ses descriptions de la restauration d’Israël. De même, quand les Juifs le mettent en demeure de déclarer s’il est le Messie, il les renvoie au témoignage des œuvres qu’il opère au nom de son Père, et qui ont été marquées par les prophètes comme caractéristiques du nouveau royaume. Joa., x, 24-26. C’est en effet au nom de son Père qu’il fonde ; et régit ce royaume ; voilà pourquoi saint Pierre dit aux Juifs, en parlant de Jésus, que Dieu l’a fait « Seigneur et Christ ». Act., Il, 36. Pendant sa passion, le Sauveur revendique pour lui-même le titre de Messie, que les membres du sanhédrin identifient avec celui de « Fils de Dieu ». Matth., xxvi, 63, 64 ; Marc, xiv, 61, 62 ; Luc, xxii, 66-70. Au tribunal de Pilate, ceux-ci l’accusent de se donner comme le Christ-Roi, Luc, xxiii, 2, si bien que le magistrat romain, prenant ce titre dans son sens temporel, demande à Jésus s’il est roi des Juifs. Luc, xxiii, 3 ; Joa., xviii, 33. Le Sauveur répond affirmativement, mais explique que le royaume dont il est roi n’est pas d’institution humaine et ne se défend pas par des moyens humains. Pilate en comprend assez pour conclure que ce royaume ne menace pas l’autorité romaine et décider qu’il n’y a pas là motif à condamnation. Joa., xviii, 36-38. Il retient cependant le nom de Christ' ou de Messie comme équivalant à celui de roi des Juifs, Matth., xxvii, 17, 22 ; Marc, xv, 9, 12, et c’est sous ce dernier titre, que les princes des prêtres remplacent par celui de Fils de Dieu, Joa., xix, 7 ; Matth., xxvii, 42, 43, que Jésus est insulté et crucifié. Joa., xix, 3, 19, 21. Le bon larron est le dernier à faire mention du royaume pendant la vie du Sauveur. Luc, xxiii, 42. Notre-Seigneur est donc celui qui a été oint pour être roi, chef du royaume spirituel, 1' « oint de Jéhovah », le « Fils de Dieu », établi roi sur Sion pour dominer sur toutes les nations. Ps. ii, 2-9. Voir Royaume de Dieu.

IL Idée du Messie chez les Juifs contemporains de Jésus-Christ. — 1° Pour annoncer le règne du Messie futur, les prophètes avaient employé des expressions grandioses qui, à première vue, pouvaient éveiller l’idée d’une domination temporelle. Is., xxxv, 10 ; xl, 9-11 ; xli, 1, 2 ; xlv, 22-25 ; lx, 1-22, etc. Successivement victimes de la captivité et ensuite de la domination étrangère, les Israélites furent naturellement portés à chercher une consolation dans l’espoir du brillant avenir promis par les prophéties. Le joug de l’oppression politique pesait durement sur eux ; ils y étaient d’autant plus sensibles que, fiers des faveurs divines dont ils avaient jadis été l’objet, ils s’imaginaient que leur titre de « peuple choisi », Is., xli, 8, 9, constituait pour eux un droit à l’indépendance nationale et même à l’hégémonie universelle. Cf. Matth., iii, 9. « Nous espérions que ce serait lui qui délivrerait Israël, » Luc, xxiv, 21, disent les disciples d’Emmaûs en parlant de Jésus. « Seigneur, est-ce maintenant le temps où vous rétablirez le royaume d’Israël ? » répètent les Apôtres en se rendant à la montagne des Oliviers d’où Jésus doit s'élever au ciel. Act., i, 6. Le joug du péché, dont les prophètes avaient eu surtout en vue de prédire la délivrance, se faisait

beaucoup moins sentir au commun des âmes. Les Israélites s'étaient habitués en conséquence à concevoir et à attendre un Messie qui les débarrassât de ce dont ils souffraient le plus, la sujétion à l'étranger.

2° À l'époque de Notre-Seigneur, les anciennes prophéties recevaient généralement des docteurs une interprétation conforme à cette idée. Le Messie devait être un roi temporel, un dominateur terrestre que Dieu susciterait) auquel il prêterait sa puissance et qu’il revêtirait de sainteté. C’est ce qu’enseignent les Psaumes de Salomon, xvii, 23-46, qui datent de l'époque de Pompée, le quatrième livre d’Esdras, le livre d’Hénoch, et les autres apocryphes de l'époque. À la venue du Messie, les puissances adverses doivent s'élever contre lui. Orac. Sibyll., , iii, 663 ; IV Esd., xiii, 33-36 ; Henoch, xc, 16. L’antéchrist, I Joa., ii, 18, 22 ; iv, 3 ; II Joa., 7, appelé plus tard parles rabbins Armilus, c’est-à-dire Romulus ; cf. Bousset, Der Antichrist in der Ueberlieferung des Judentums, 1895, et le compte rendu de cet ouvrage par Eaufmann, dans Der Monatsschr. fur Gesch. und Wissensch. des Judenthums, t. XL, 1896, p. 134, était comme la personnification de toutes ces puissances ennemies. Daniel, xi, 1-45, pouvait servir de base à cette donnée. On trouvait dans Joël, iii, l’annonce du châtiment qui devait anéantir tous ces ennemis d’Israël. Bien de plus formel que cette conviction dans les apocryphes, et rien de plus populaire que cette assurance. Cf. Assumpt. Mosis, x ; Henoch, xc, 18-37 ; Psal. Salom., xvil, 27, 39 ; Apoc. Baruch, xxxix, 7-xl, 2 ; lxx, 9 ; lxxii, 2-6, etc. L’extermination doit se faire par les armes, ou par un jugement solennel, IV Esd., xm, 28, 38 ; Apoc. Baruch., XL, 1, 2 ; xlvi, 4-6 ; lii, 4-9 ; lv, 4 ; lxi, 8, 9 ; lxii, 4-9, et un ange doit intervenir pour exercer cette vengeance divine. Apoc Baruch., lxii, 10, 11. On lit dans les Targums de Jonathan sur Is., x, 27, du pseudo-Jonathan et de Jéruschalmi sur Gen., xlix, 11 : « Les peuples seront broyés par le roi Messie… Qu’il est beau le roi Messie qui doit surgir de la maison de Juda ! Il ceint ses reins, s’avance dans la plaine, engage le combat contre ses ennemis et met â mort les rois. » La conséquence de cette lutte victorieuse, c'était l'établissement à Jérusalem d’un grand royaume établi par Dieu même et qui devait dominer le monde entier. On appelait ce royaume « le grand royaume du roi immortel ». Orac. Sibyll., iii, 47, 48 ; cf. Psal. Salom., xvil, 4 ; Assumpt. Mosis, x, 1, 3. Le Messie était destiné à tenir en main « le sceptre de toute la terre », Orac. Sibyll., iii, 49, et Israël devait avoir le bonheur de « monter sur le cou et sur les ailes de l’aigle », Asçumpt. Mosis., x, 8, allusion probable à une victoire définitive sur les Romains. Saint Jérôme, In Joël, iii, 8, t. xxv, col. 982, rappelle ces idées encore en faveur parmi les Israélites de son époque : « Les Juifs se promettent ou plutôt rêvent qu’au dernier temps il seront rassemblés par le Seigneur et ramenés à Jérusalem ; et, non contents de ce bonheur, ils affirment que Dieu même livrera en leurs mains les fils et les filles des Romains, pour que les Juifs les vendent, non aux Perses, aux Éthiopiens et aux autres nations voisines, mais à un peuple éloigné, les Sabéens. » Voir JÉsusCbbist, t. iii, col. 1435-1439 ; Schûrer, Geschichte des jûd. Tolkes, t. ii, p. 530-540 ; de Broglie, Les prophéties messianiques, Paris, 1904, t. i, p. 23-41.

3° Le Messie qui devait accomplir ces hauts faits viendrait de Dieu ; mais on ignorait de quelle manière il apparaîtrait. Joa., vii, 27. On croyait à une apparition soudaine, et il est possible que Satan ait exploité cette croyance dans une de ses tentations, quand il proposa au Sauveur de se jeter du haut du Temple et de se laisser porter par les mains des anges. Matth., iv, 5, 6 ; Luc, iv, 9-11. On comprenait aussi que le Messie ferait reconnaître la divinité de sa mission par des miracles extraordinaires. Après la multiplication dés pains, les Juifs comparent Jé sus àMoïse, mais attendent de lui quelque chose de plus, fort que ce miracle. Joa., vi, 30. D’autres réclament un signe dans le ciel. Matth., xvi, 1 ; Marc, viii, 11 ; Luc., , xi, 16. On n’excluait pas cependant des miracles plus humbles. On lit dans la Mischna, Sanhédrin, 98 : « Quand le Messie doit-il venir ? - Demande-le-lui à lui-même. — Mais où le trouver ? — Tu le trouveras à la porte de la ville, au milieu des pauvres et des malades/ » Cf. Matth., xi, 4, 5 ; Luc, vii, 22 ; Joa., vii, 31.

4° Cette conception d’un Messie temporel, puissant, libérateur politique de son peuple et vainqueur des nations, apparaît continuellement dans l'Évangile. Hérode redoute un Messie de cette nature quand il se dispose à faire périr l’Enfant Jésus. Matth., ii, 13. À la suite de la multiplication des pains au désert, les Galiléens croient avoir trouvé en Jésus le Messie temporel qu’ils attendent et ils songent à-s’emparer de lui pour le faire roi, Joa., vi, 15, c’est-à-dire pour l’obliger à prendre le rôle politique conforme à leurs désirs. A Jérusalem, les Juifs s’indignent de la prétention de Jésus à être le Fils de Dieu, c’est-à-dire le Messie, lui qui leur semble si méprisable et en qui ils ne voient aucune aptitude à réaliser les aspirations nationales. Les pharisiens le rejettent parce qu’il n’est pas assez Messie, c’est-à-dire chef politique disposé à soulever la nation contre les Romains ; les sadducéens le repoussent parce qu’il est trop Messie, c’est-à-dire promoteur d’un nouvel ordre de choses menaçant pour les situations acquises. Les uns et les autres s’entendent pour le trouver dangereux au point de vue politique. Joa., xi, 48. Le peuple cependant, surtout celui qui est étranger à Jérusalem, ne comprend rien à leurs calculs et ne partage pas leur antipathie ; il serait disposé à voir en Jésus le Messie et à prendre parti pour lui. Matth., xxi, 9 ; Marc, xi, 9-10 ; Luc, xix, 38. « Bénie la royauté de notre père David, qui arrive. » Marc, xi, 10. Néanmoins, devant Pilate, ses ennemis l’accusent de tendances politiques, très conformes à l’idée qu’ils se faisaient du messianisme : il est roi des Juifs, Joa., xviii, 33 ; il met tout le peuple du pays en révolution, Luc, xxiii, 5 ; il est le Christ, le Messie, Matth., xxvii, 22 ; en se faisant roi, il se met en révolte contre César, Joa., xix, 12, et les Juifs ne veulent avoir d’autre roi que César, Joa., xix, 15 ; affirmation suggérée à une foule haineuse par les meneurs du sanhédrin, mais radicalement opposée au vœu de la nation, comme le montreront les soulève^ ments qui vont aboutir à la guerre de Judée et à la ruine de Jérusalem. Ainsi les Juifs attendent un Messie temporel, qui réalise leurs idées d’indépendance et de domination. Rome le sait, et, en conséquence, gouverne d’une main ferme et parfois brutale la remuante nation. En Jésus se trouvent les caractères de Messie humble, souffrant et spirituel, auxquels la plupart des Juifs ne veulent prêter aucune attention ; par contre, les caractères de Messie temporel et dominateur, rêvés par les Juifs, lui font défaut, au moins au sens que ceux-ci entendent. Leur déception aboutit à cette solution singulière : comme Jésus n’est pas, vis-à-vis des Romains, ce qu’ils voudraient qu’il fut, ils le rejettent ; mais c’est précisément en l’accusant d'être ce qu’il n’a jamais voulu être, malgré leurs désirs, qu’ils le font con* damner par Pilate. Celui-ci, d’ailleurs, n’est pas dupe de leurs affirmations.

5° Lorsque par la suite les événements eurent déjoué toutes les prévisions d’Israël sur la venue du Messie, les docteurs expliquèrent le retard de son apparition par les péchés du peuple. Le Messie ne pouvait arriver que quand on ferait pénitence. « Si seulement tout Israël faisait pénitence en commun l’espace d’un jour, la délivrance par le Messie s’ensuivrait. Si Israël observait seulement deux sabbats de la manière qui convient, il serait immédiatement délivré. » Sanhédrin, 97 a ; Aboda sara, 9 a. On finit par renoncer à toute attente, parce que la condition,

supposée, la pénitence d’Israël, faisait défaut. « Maudits ceux qui se livrent aux calculs sur le Messie ! Qu’arrivet-il en effet ? Il arrive que le Messie ne se presse nullement de justifier ces supputations imaginaires… Mais si Dieu attend, et si nous, nous attendons, qu’est-ce donc qui empêche le salut ? C’est l’inflexible justice, ce sont nos péchés. Qu’Israël fasse pénitence et il sera sauvé ; autrement, il ne le sera pas. i> Sanhédrin, 98, 99. Cf. II Pet., iii, 3-9. Plus tard, Maimonide et d’autres docteurs reconnurent que beaucoup des prophéties messianiques devaient être entendues en paraboles et en énigmes. Plusieurs avouèrent même que « toute l’œuvre du Messie est spirituelle et divine, mais non corporelle ». Cf. Eb. Hamel, Ex Hos., iii, 4, 5, dans le Thésaurus de Hase et Iken, Leyde, 1732, t. i, p. 1018. La grande erreur des contemporains de Notre-Seigneur fut que, ’pour la plupart, ils ne surent pas se placer à ce point de vue pour interpréter les anciennes prophéties. Cf. Lepin, Jésus Messie et Fils de Dieu, 2e édit., Paris, 1905, p. 1-54.

III. Réserve de Jésus vis-a-vts du titre de Messie.

— 1° Il ne pouvait convenir au Sauveur de prendre publiquement un titre dont la signification était si étrangement faussée. Se présenter au peuple comme le Messie, c’était prendre officiellement la charge des revendications nationales, assumer un rôle politique dont Rome devait immédiatement s’inquiéter, et surtout reléguer à l’arrière-plan ce qui constituait la mission principale du Sauveur, la rédemption par la souffrance et la fondation du vrai royaume spirituel, le « royaume des cieux ». En heurtant ainsi de front l’opinion générale de ses contemporains, Notre-Seigneur savait qu’il se les aliénerait presque tous. Mais il ne pouvait, d’aucune manière, favoriser des prétentions absolument chimériques, basées sur une interprétation grossière, étroite et trop intéressée des prophéties. L’opposition qu’il allait ainsi susciter contre lui procurerait l’accomplissement de sa mission rédemptrice et dégagerait le royaume spirituel des liens du particularisme et de l’exclusivisme qui enchaînaient le messianisme conçu par les Juifs. Il fallait donc s’attendre à ce que Notre-Seigneur, sans nier sa qualité de Messie, en déclinât pourtant le titre dans les occasions où les auditeurs n’étaient pas en mesure de l’entendre correctement.

2° Pendant que Jean prêche et baptise, des émissaires du sanhédrin viennent lui demander s’il est le Christ. Jean répond que non, parle de celui qui doit venir et bientôt après le montre, sans pourtant le désigner formellement comme Messie. Joa., i, 25-30. Cette réserve n’empêche pas André de conclure et de dire à son frère Simon : « Nous avons trouvé le Messie. » Joa., i, 41. Nathanaël, informé à son tour, s’étonne que le Messie » puisse venir de Nazareth ; mais bientôt il reconnaît en Jésus « le Fils de Dieu, le roi d’Israël ». Joa., i, 41-49. Notre-Seigneur laisse dire, parce qu’il va garder à ses côtés ces premiers disciples et saura leur imposer le silence quand il sera nécessaire. À la Samaritaine, il déclare ouvertement que lui-même est le Messie attendu. Joa., iv, 25, 26. Les Samaritains concluent de sa prédication qu’il est le « Sauveur du monde ». Joa., IV, 42. L’antipathie qui les anime contre les Juifs ne leur permet pas de croire que le Messie^puisse venir pour établir l’hégémonie politique de ces derniers. Notre-Seigneur déclare que le salut vient des Juifs, Joa., iv, 22 ; mais en se donnant comme le Messie, il sait qu’il ne court pas en Samarie les mêmes risques de fausse interprétation qu’en Galilée et en Judée. De fait, le titre que lui assignent les Samaritains est très correct, et, même pris dans un sens peu compréhensif, il indique an moins que les étrangers ne seront pas exclus d’un royaume dont les Juifs restreignent le bienfait à eux seuls.

3° Lorsque les envoyés de Jéan-Baptiste viennent lui demander s’il est « celui qui doit venir », c’est-à-dire le

Messie, Notre-Seigneur ne répond pas directement, mais équivalemment, en montrant qu’il fait les œuvres attribuées au Messie par le prophète. Matth., xi, 4, 5 ; Luc, vu, 21, 22. Encore a-t-il soin le plus souvent de prescrire le silence à ceux qui ont été l’objet ou les témoins d’un miracle qui pourrait révéler sa qualité de Messie. Cette défense est intimée au lépreux de Galilée, Matth., vin, 4 ; Marc, i, 44 ; Luc, v, 14 ; à Jaïre et aux siens, après la résurrection de la jeune fille, Marc, v, 43 ; Luc, VIII, 56 ; aux deux aveugles, Matth., IX, 30 ; aux témoins de la guérison du sourd-muet, Marc, vii, 36 ; à l’aveugle de Bethsaïde. Marc, viii, 26. Il ne veut pas que les démons, qui prétendent le connaître, disent qui il est. Marc, I, 34 ; Luc, iv, 41 ; Marc, iii, 12. En voyant tant de miracles, les Galiléens se demandaient en effet : « N’est-ce pas lui le fils de David ? » c’est-à-dire le Messie, Matth., XII, 23, et il ne fallait pas qu’ils arrivassent trop vite à une conclusion affirmative, étant donnée la signification politique qu’ils attachaient à ce titre. Au contraire, au démoniaque de Gérasa, qui veut le suivre après sa délivrance, Notre-Seigneur ordonne de s’en retourner chez lui et de publier le miracle dont il a été favorisé. Luc, viii, 39. Le danger d’un messianisme politique n’existe pas en effet dans cette région païenne. En Judée et à Jérusalem, Notre-Seigneur ne porte pas de semblable défense à ceux qui sont les objets de sa bonté. Il accomplit des miracles parmi les Juifs précisément pour attirer leur attention. Mais, quel que soit l’éclat de ces miracles, guérisons du paralytique et de l’aveugle-né, résurrection de Lazare, il n’est pas à craindre que les Juifs acceptent comme Messie un homme qui répond si mal à leur idéal politique. À son entrée triomphale à Jérusalem, non seulement il laisse librement retentir autour de lui des acclamations d’un caractère nettement messianique, mais il oppose une fin de nonrecevoir aux pharisiens, qui lui demandent de les faire cesser.- Matth., xxvi, 9 ; Marc, xi, 9, 10 ; Luc, xix, 3840 ; Joa., xii, 13. C’est qu’alors le moment est venu pour lui de révéler tout ce qu’il est, malgré les conséquences qui vont résulter pour lui de cette révélation.

4° Interrogé par Jésus, Pierre lui déclare qu’il reconnaît en lui le Christ, le Messie. Matth., xvi, 16 ; Marc, viii, 29 ; Luc, ix, 20. Le Sauveur défend aux apôtres de publier ce qu’ils savent à ce sujet, et aussitôt, pour corriger les idées fausses que peut faire naître dans leur esprit ce titre de Messie, il leur annonce sa passion. Matth., xvi, 20, 21 ; Marc, viii, 30, 31 ; Luc, ix, 21, 22. De fait, cette annonce leur semble si parfaitement contradictoire avec la revendication que Jésus vient de faire du titre de Messie, que Pierre manifeste un violent étonne^ ment et se fait sévèrement rappeler à l’ordre. L’idée formulée par Pierre était à peu près générale parmi les Juifs. Saint Jean, xii, 37, 38, note qu’ils ne croyaient pas à « Quiacruà notre parole ? » c’est-à-dire à la prophétie de la passion qui commence par ces mots. Is., lui, 1. Un Messie souffrant leur paraissait contradictoire et inconcevable. Voir Jésus-Christ, t. iii, col, 1438, 3. C’était pour eux un scandale. I Cor., i, 23. Après la transfiguration, le Sauveur, qui s’apprête à revenir en Galilée, prescrit aux trois témoins du miracle de garder le silence, et, presque aussitôt après, il réitère l’annonce de sa passion. Matth., xvii, 9, 21 ; Marc, ix, 8-9, 30 ; Luc, ix, 36, 44. Pour les apôtres eux-mêmes, il y avait une contradiction irréductible entre ces deux termes, Jésus Messie et Jésus souffrant.

5° Il est donc incontestable que le Sauveur, pendant l’exercice de son ministère apostolique en Galilée, imposa aux témoins de ses miracles une véritable discipline du secret, à laquelle d’ailleurs on ne se soumettait pas toujours. Marc, i, 45 ; Matth., ix, 26 ; cf. Marc ; , v ; 43 ; Matth., IX, 31 ; Marc, vii, 36. Cette discipline n’était pas commandée par une raison d’humilité, car Notre-Seigneur ne l’impose qu’en Galilée, et même’, en una

circonstance, il ordonne de publier le miracle. Luc, vin, 39. Elle avait pour but d’éviter une équivoque dangereuse et d’enlever à la mission du Sauveur tout caractère politique. Le nom de Messie « avait été en quelque sorte capté et confisqué par les pharisiens ; discrètement ils le transformaient en un symbole politique, dans lequel ils incarnaient la libération prochaine, l’inauguration d’un règne sans fin, où les préoccupations morales et religieuses seraient à l’arrière-plan, où le temple et la loi seraient maintenus comme les principaux organes de purification et de sanctification ». Rose, Études sur les Évangiles, Paris, 1902, p. 181 ; Évang. selon S. Marc, Paris, 1904, p. xv-xxviii. Gf. Wrede, Das Messiasgeheimniss in den Evangelien, Gœttingue, 1901, et Revue biblique, 1903, p. 625-628. Répudiant la conception d’un messianisme politique, Notre-Seigneur devait écarter un nom qui, par suite d’une interprétation abusive, en était venu à impliquer cette conception.

IV. Revendication du titre de Messie. — 1° Notre-Seigneur revendique pour lui-même, devant le sanhédrin, le titre de Messie. On lui demande s’il est le Christ, Fils de Dieu. Il répond affirmativement et annonce qu’on verra le Fils de l’homme à la droite de Dieu et venant sur les nuées du ciel. Matth., xxvi, 63-64 ; Marc, Xiv, 61-62. Ce Fils de l’homme apparaissant sur les nuées du ciel avait été prédit par Daniel, vii, 13-14. Les Juifs crevaient qu’il viendrait en effet, dans l’appareil de la gloire et de la puissance, pour abattre leurs ennemis. C’était le Messie sur lequel ils comptaient. Notre-Seigneur leur déclare qu’il est ce Messie et qu’en effet il viendra sur les nuées. Mais les conditions qu’il suppose ne sont pas les mêmes. Cette apparition glorieuse est précédée par celle du Messie humble et souffrant. Les Juifs ne veulent pas entrer dans cet ordre d’idées ; ils accusent le Sauveur de blasphème et le condamnent à mort, procurant ainsi l’accomplissement d’une des conditions essentielles de la mission messianique. — La nécessité de cette condition est rappelée par l’ange aux saintes femmes, Luc, xxiv, 7, e. surtout par le Sauveur ressuscité aux disciples d’Emmaûs : « Il a fallu que le Christ souffrît ces choses et qu’il entrât ainsi dans sa gloire. » Luc, xxiv, 26. Les disciples croyaient à la rédemption d’Israël, Luc, xxiv, 21, mais à une rédemption politique, telle que la comprenaient les pharisiens. Notre-Seigneur remet les choses au point en prenant lui-même le titre de Messie et en expliquant que la souffrance et la mort faisaient partie essentielle du programme messianique. Il revient encore sur cette importante question avant de monter au ciel. Il fait entendre à ses Apôtres que la passion et la mort du Messie no sont pas des accidents fortuits, par lesquels la malice des hommes a cherché à entraver son œuvre, mais qu’ils entraient dans le plan divin révélé par les Écritures, et que la souffrance du Messie était indispensable à la réalisation de ce plan. Pour mieux les convaincre et les mettre à même de convaincre le monde à leur tour, il leur ouvre l’intelligence au vrai sens, des Écritures. Luc, xxiv, 44-46. Notre-Seigneur se déclare donc Messie en faisant de ses souffrances non pas un obstacle dont il a triomphé, mais un moyen qu’il a employé pour justifier son titre.

2° Dans leurs prédications, les Apôtres ne cessent d’affirmer que Jésus est le Messie. Dès son premier discours, saint Pierre explique que les souffrances de Jésus ont été conformes « au dessein immuable et à la prescience de Dieu », et que Dieu l’a fait réellement « Seigneur et Messie ». Act., H, 23, 36. Aux Juifs de Theesalonique, saint Paul démontre par les Écritures que le Messie a dû souffrir et que le Messie, c’est Jésus. Act., xvii, 2, 3. Devant Agrippa, il détend la même thèse. Act., xxvi, 23. Dans ses épltres, il associe presque continuellement le nom de Christ ou de Messie à celui de Jésus. Voir Jésus-Christ, t. iii, col. 1424. Il insiste,

dans sa prédication, sur le supplice du Sauveur et se plaît à parler du Messie crucifié, comme d’un dogme essentiel à l’économie de la religion chrétienne. I Cor-, i, 23-24 ; ii, 1-2 ; v, 7 ; Gal., vi, 14.

3° De ce que Jésus proclame devant le sanhédrin qu’un jour il reviendra sur les nuées du ciel, Matth., xxvi, 63, 64 ; Marc, xiv, 61-62, on n’est pas fondé à conclure qu’il ne sera Messie qu’à l’époque de cette apparition glorieuse. Les termes mêmes de l’interrogatoire ruinent cette hypothèse. Le grand-prêtre ne demande pas à Jésus s’il a la prétention d’apparaître un jour du haut du ciel comme le Messie attendu, mais si, dans le moment même, il est le Christ. Matth., xxvi, 63 ; Marc, xiv, 61. Dans la seconde séance du sanhédrin, les juges interpellent le Sauveur : « Si tu es le Christ, dis-le-nous. » Jésus rappelle que le Fils de l’homme sera assis à la droite du Dieu puissant. « Tu es donc le Fils de Dieu ? » répliquent les Juifs. « Vous le dites, je le suis, » répond-il. Luc, xxii, 66-70. Dans la pensée du sanhédrin, comme dans celle de Jésus, il ne s’agit donc pas d’un Messie futur, mais d’un Messie présent. C’est là précisément ce qui exaspère les Juifs. D’un homme qui promettait d’apparaître un jour sur les nuées du ciel, ils se seraient peu inquiétés ; ils l’auraient attendu à l’œuvre. Il en était tout autrement pour eux de quelqu’un qui se donnait actuellement pour le Messie, et dont la vie se trouvait en contradiction si formelle avec leur attente. — De la parole de saint Pierre qui, après avoir annoncé aux Juifs la résurrection du Sauveur, ajoute que Dieu l’a fait « Seigneur et Christ », Act., Il, 36, on ne peut pas déduire à meilleur droit l’idée que la dignité messianique n’aurait été conférée à Jésus qu’à sa résurrection. Pierre lui-même, pendant la vie mortelle du Sauveur, a solennellement reconnu en lui le Messie. Matth., xvi, 16 ; Marc, viii, 29 ; Luc, ix, 20. Il n’est pas admissible qu’il se contredise. Ce qui est vrai, c’est que ces Juifs, que les miracles et les affirmations du Sauveur n’ont pas convaincus de sa qualité de Messie, vont être obligés de se rendre à ce dernier argument, la résurrection certaine de celui qu’ils ont crucifié. En droit, Jésus a été « Seigneur et Christ » dès son incarnation ; en fait, les Apôtres et un certain nombre de Juifs ne l’ont connu comme tel que durant sa vie publique. La foi de ces derniers est restée faible ; à eux, comme à ceux qui n’ont pas encore cru, saint Pierre présente la résurrection comme le fait qui établit « avec certitude que Dieu a fait Seigneur et Christ ce Jésus que vous avez crucifié t. Il ne dit nullement qu’il n’en soit ainsi que depuis la résurrection. Dans son second discours, saint Pierre dira aux Juifs qu’ils ont crucifié « l’auteur de la vie », et il leur explique qu’il fallait « que le Christ souffrît ». Act., iii, 15, 18. Il est, donc bien clair que, dans sa pensée, Jésus était « auteur de la vie » et « Christ » avant sa résurrection. — Voir Schôttgen, Borx hebraiae et talmudicse, t. ii, De Messia, 1742 ; Mack, Die metsianischen Erwartungen und Ansichten der Zeitgenossen Jesu, dans le Theologische Quartalschrift de Tubingue, 1836, p. 3-56, 193-226 ; Colani, Jésus-Christ et les croyances messianiques de son temps, Strasbourg, 1864, p. 1-68 ; Castelli, Il Messia seconda gli Ebrei, Florence, 1874 ; Schônefeld, Ueber die messianische Hoffnung von 200 vor Christo bis gegen 50 nach Christo, Iéna, 1874 ; Stapfer, Les idées religieuses en Palestine à l’époque de Jésus-Christ, Paris, 1878, p. 111132 ; Briggs, The Messiah o/ the Gospels, New-York, 1894 ; The Messiah of the Apostles, 1895 ; Lepin, Jésus Messie et Fils de Dieu, Paris, 1905, 2e édit., p. 77-217.

H. Lesêtre.
    1. MESSMER Aloys##

MESSMER Aloys, théologien catholique autrichien, né le Il novembre 1822 à Nassereuth (Tyrol), mort à Albano le 23 août 1857. Après avoir fait ses premières études et la philosophie à Inspruck, de 1835 à 1843, il étudia la théologie à Brixen de 1843 à 1847, et après un lOil

MESSMER — MESURE

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an de ministère, il devint professeur d'Écriture Sainte à Brixen de 1848 à 1856. On a de lui des poésies et des travaux' scripturaires. Ces derniers sont : Geschichte der Offenbarung, 2 in-8°, Fribourg-en-Brisgau, 1857 ; 2e édit., t. i, Inspruck, 1869 ; Introductio in libros Novi Testamenti, in-8°, Inspruck, 1858 ; Erklârung des JohannesEvangeliums, in-8°, Inspruck, 1860 ; Erklârung des erstenKorinther-Briefes, in-8°, Inspruck, 1862 ; Erklârung des Briefes an die Galater, in-8°, Brixen, 1862 ; Erklârung des Colosser-Briefes, in-8°, Brixen, 1863. Ces quatre derniers ouvrages sont posthumes et furent publiés par J. C. Mitterrutzner, qui a aussi édité Alois Messmer, ein Lebensbild gezeichnet nach dessen Tagebuch, Briefen, von J. G. Vonbank, 2 in-8°, Brixen, 1860. — Voir Stanonik, dans Allgemeine deutsche Biographie, t. xxi, 1885, p. 500.

    1. MESSULAM##

MESSULAM (hébreu iMesullâm ; Septante : MeffoXXâjji ; Alexandrinus : MsacraX^v), père d’Aslia (t. i, col. 1103) et grand-père de Saphan Je scribe qui vivait du temps de Josias. IV Reg., xxii, 3. Le nom hébreu que la Vulgate écrit ici Messulam est ordinairement transcrit dans la version latine par Mosollam. Voir Mo SOLLAM.

    1. MESURE##

MESURE, unité conventionnelle que l’on compare aux objets pour en connaître le rapport.

I. Nom. — 1° Le mot mesure, mensura, est employé dans la Vulgate pour traduire un certain nombre de mots hébreux, qui tous désignent une évaluation en nombre, en longueur, en poids ou en capacité. Ce sont les mots mâdad, qui signifie également mesure de longueur, Ezech., iv, 5 ; XL, 1 ; et mesure de capacité, Ruth, iii, 15 ; midàh, qui est le terme le plus usité pour toute espèce de mesure, Exod., xxvi, 2, 8 ; Jos., iii, 4 ; I Reg. (Sam.), vi, 25 ; vii, 9, 11, 37, etc. ; mesurai}, qui signifie mesure de capacité, Lev., xix, 35 ; Ezech., iv, 11, 16 ; fdknif, tokén, mafkônét, mesure, quantité, tâche, Exod., v, 8 ; xxx, 32, 37 ; xLV, ll ; Se’ge7, sicle, poids, Exod., xxxviii, 24 ; Num., iii, 47, s’dlis', dans une large mesure, Ps. lxxx (lxxix), 6. Septante : èv [Uzçu, ; Vulgate : in mensura. Le mot grec qui désigne les mesures est le mot [jiTpov, que la Vulgate traduit toujours par mensura. Matth., vil, 2 ; xxiii, 32 ; Marc, iv, 24 ; Luc, vi, 38 ; Joa., iii, 34 ; Rom., xiii, 3 ; II Cor., x, 13, etc.

2° La Vulgate ajoute souvent le mot mensura au nom des mesures de longueur ou de capacité désignées par un nom propre et ayant une valeur déterminée : mensura palmi, Exod., xxxix, 9, etc. ; mensura gomor, Exod., xvi, 18 ; mensura ephi, Ruth., 11, 17 ; ou remplace par ce mot ceux qui désignent des mesures ayant en hébreu un nom spécial.

3° Les Septante donnent souvent la traduction des mesures hébraïques en mesures grecques. Ainsi le bath ou éphi est traduit par xoeûc, III (I) Reg., vii, 25 (26), 38 ; par /omÇ, Ezech., xlv, 10, 11 ; par xotOXï], Ezech., xlv, 14. Les mesures grecques portant ces noms étaient -cependant loin d'équivaloir au Bath. Le x°sù ; ne valait qu’environ 3 '28, le xotvtÇ, 4 ! 37 ; la xotuVti, ! 27. J. Wex, Métrologie grecque et romaine, trad. J. Monet, in-12, Paris, 1886, p. 26-27.

II. Mesures de longueur. — i. dans i' ancien testament. — Tous les peuples anciens ont emprunté les noms des mesures de longueur aux dimensions du « orps humain, doigt, pied, coudée, palme ou paume, etc. Les Hébreux n’ont pas fait exception. Les mesures de longueur usitées chez eux étaient :

1° La Coudée (hébreu : 'ammâh ; Septante : htjt ; u ;  ; Vulgate : cubitus). La coudée était l’unité de mesure de longueur, sa valeur moyenne était la distance qui sépare le coude de l’extrémité du doigt du milieu. Elle était -approximative et non exacte comme sont les mesures modernes. On distinguait deux sortes de coudées, la

coudée vulgaire ou petite coudée et la coudée sacrée ou grande coudée. La coudée vulgaire mesurait m 450 environ et la coudée sacrée, m 525 Les Juifs se servirent aussi des coudées usitées chez les peuples voisins. La coudée commune chaldéenne et assyrienne mesurait environ K 499.et la coudée royale environ O^ôiS. La coudée commune égyptienne était de m 450, la coudée royale de m 525. La coudée commune chez les Perses était de nl 444, la coudée royale de m 532. Chez les Grecs la coudée attique, ht^îï était de m 444, la coudée olympique de m 480. En Asie-Mineure la coudée avait à peu près la mesure de Ta petite coudée babylonienne, O^âS. La coudée romaine était l'équivalent de la coudée attique. Voir Coudée, t. ii, col. 1060.

2° L’Empan (hébreu : zéref ; Septante : ar.tâa>.-f ; Vulgate : palmus) était la moitié de la coudée. Ce mot désigne la paume de la main ou plus exactement la distance comprise entre les extrémités du petit doigt et du pouce étendus. L’empan était l’unité de mesure chez les Chaldéo-Assyriens. Il est figuré sur la statue de l’architecte à la règle qui est au musée du Louvre. L’empan chaldéen mesure m 27425. Voir Coudée, t. ii, col. 1061 ; Palme.

3° Le petit Palme (hébreu : téfah, tofah ; Septante : icrffvfi Vulgate : palmus). Le téfah. était le tiers du zéref ; c'était la largeur de la main ; il équivalait à quatre doigts ; aussi la Vulgate a-t-elle traduit ce mot par son équivalence, quatuor digiti, Ex., xxv, 25 ; xxxvii, 12 ; et même par très uncise. III (I) Reg., vii, 26. Voir Palme.

4° Le Doigt (hébreu : 'esba' ; Septante : SaxtûXo ; , Vulgate : digitus). Le mot hébreu n’est employé pour désigner une mesure que dans Jer., lii, 21. Il équivalait à l'épaisseur du doigt humain ou au quart du petit palme, soit environ à m 0218. Voir Doiot 2, t. ii, col. 1462 ; Coudée, t. ii, col. 1060.

5° Le Gômed. Ce mot n’est employé qu’une fois, pour déterminer la longueur de l'épée à deux tranchants d’Aod. Jud., iii, 16. Les Septante le traduisent par iriuSajji, 4 la Vulgate par palma manus. On n’a aucun renseignement sur cette mesure.

6° La Canne (hébreu : Qdnéh ; Septante : xàXa[io ;  ; Vulgate : calamus), c’est la mesure dont se sert l’homme qui apparaît à Ezéchiel, pour évaluer les dimensions du Temple. Sa longueur est de six coudées et de six tôfàh, c’est-à-dire d’environ 3 Œ 675. Ezech., xl, 5. Il est aussi question de cette mesure dans l’Apocalypse, xxi, 15-16. Voir Canne 2, t. ii, col. 132 ; Coudée, t. ii, col. 1060.

H. MESUHES DE LONGUEUR VANS LE NOUVEAU TESTAMENT. — 1° Le Chemindu Sabbat, Act., 1, 12, qui équivalait à environ six stades, distance de Jérusalem au mont des Oliviers. Josèphe, Ant. jud., XX, viii, 6 ; Bell, jud., V, ii, 3 ; F. Blass, Acta Apostol., in-8°, Gœttingue, 1895, p. 45. Voir Sabbat.

2° Le Stade, Luc, xxiv, 13 ; Joa., xi, 18, mesure grecque équivalente à 600 pieds grecs ou 625 pieds romains, c’est-à-dire à t85 m. Le stade est aussi employé comme mesure de longueur dans II Mach., xi, 5 ; xii, 10, 29. Voir Stade.

3° Le Mille, [lOuov, Matth., v, 41, mesure itinéraire romaine équivalente à mille pas, c’est-à-dire à environ 1480™. Huit stades faisaient donc un mille. Voir Mille.

4° La Brasse (grec : ôp-piâ ; Vulgate passus), Act., xxvii, 28, mesure marine équivalente à la longueur comprise d’une extrémité à l’autre des deux bras étendus. La brasse des anciens équivalait à 1° > 85. Voir Brasse, t. i, col. 1910.

5° Le Pas est dans la Vulgate l'équivalent de deux coudées. Num., xxxv, 4.

III. Mesures de superficie. — L’arpent (hébreu : sémed ; Vulgate -.jugerum). I Reg. (Sam.), xlv, 14 ; Is., v, 10. Les Septante, dans la traduction du passage d’Isaïe, font du sémed la mesure de terrain que peut cultiver une paire de bœufs en un jour. C’est aussi le sens de.

mot jugerum en latin. Pline, H. N., XVIII, iii, 9. Il formait un rectangle de 28 800 pieds carrés romains ou 25 ares, 18 m. carrés, 9 décim. J. Wex, Métrologie greeque et romaine, trad. Monet, in-12, Paris, 1886, p. 21. Le tableau suivant donne la valeur des mesures de longueur chez les hébreux. Les chiffres placés au-dessous de chaque nom indiquent combien il contient d’unités de la mesure suivante, le dernier chiffre est l'évaluation de la mesure en mètres. Cette évaluation est approximative.

Canne 3.217

6 1/2 1 Coudée.. 0, 525

12 2 lZérat 0, 262

36 6 3 ITéfah 0, 0875

144 24 12 4 1 Doigt. 0, 0218

Mesures étrangères.

Stade, 600 pieds grecs, 625 pieds romains. 185°00

Mille, — — 1480-00

Brasse, — — 1-60

Sémed ou jugerum, arpent 2518°*9

IV. Mesures de capacité. — I. mesures hébraïques. — Les mesures de capacité avaient la même contenance pour les solides et pour les liquides, quoique l’unité de. mesure portât des noms différents.

1° L’unité de mesure polir les solides était V'Êfah, "Vulgate, éphi, qu’on croit généralement aujourd’hui avoir été emprunté par les Hébreux aux Égyptiens. On ne sait pas exactement sa contenance, on ne sait que sa valeur relative aux autres mesures de capacité. Voir Ephi, t. ii, col. 1863.

2° L’unité de mesure pour les liquides était le Balh, équivalent à Véphi. Ezech., XLV, 11, 14. Le balh n’est pas mentionné avant l'époque des rois. Ce mot est traduit dans les Septante par part), fiâ-coç ou par des noms de mesures grecques. La Vulgate le traduit par balus, metreta, amphora. Voir Bath, t. i, col. 1506. On évalue approximativement la contenance du bath ou de l'éphi à 38188.

3° Le Hômér, appelé kôr à partir de l'époque des rois, était équivalent à dix baths ou éphis, Ezech., xlv, 11, soit en mesures romaines à 30 modii, Lev., xxvil, 16 ; Is., v, 10, ou 388>80. Voir Cor, t. ii, col. 954.

4° Le Léték ou demi-cor, valant par conséquent cinq baths ou éphis, Ose-, iii, 2.

5° Le $e’dh (grec : aâ-zav ; Vulgate : ordinairement sa~ tum) ou tiers d'éphi, Gen., xviii, 6 ; I Sam. (Reg.), xxv, 18 ; III (I) Reg., xviii, 32 (Vulgate : aratiuncula) ; IV (II) Reg., vii, 1, 16, 18 (Vulgate : modius) ; Is., xxvii, 8 (Vulgate : mensura). Le mot uôtov est la transcription grecque de la forme syro-chaldéenne, sa’ta'- Matth., xiii, 33 ; Luc., xiii, 21.

6° Le Bin, moitié du se’dh ou sixième de l'éphi. Le hin est d’origine égyptienne ; il contenait chez les Hébreux 6'49. Voir Hin, t. iii, col, 713.

7° Le 'Omer ; Vulgate : gomàr, dixième partie de l'éphi. Exod., xvi, 36. Viêèâràn, équivalent du gomor, servait à mesurer les solides et spécialement les farines. Il ne faut pas confondre le Corner ou cor avec Y'ômer. Voir Gomor, t. iii, col. 273.

8° Le Qab ; Vulgate : cabus, tiers du hin, sixième partie du se’dh, dix-huitième de l'éphi, d’une valeur d’environ i'16. Voir Cab ; t. ii, col. 4.

9° LeLôg (Septante : xotûXt] ; Vulgate : sextarius). La contenance du log est assez difficile à déterminer. D’après la Vulgate et Josèphe, Ant. jud., VIII, ii, 9, ce serait la soixante-douzième partie de l'éphi, la douzième du hin et le quart du cab, c’est-à-dire environ 0'50. Le log servait surtout pour les liquides. Voir Log, t. iv, col. 321.

II. mesures étrangères. — 1° Dans le dernier chapitre de Daniel, xiv, 2, dont il ne reste que le texte grec, il est question d’une mesure perse appelée àpTaêr]. L’artabe équivalait an médimne attique, plus trois ché nices, Hérodote, 1, 192, c'ést-â-dire à 55 litres. Polyen, lv, 3, 32, lui donne simplement la valeur du medimne, soit 51>79. C'était à peu près le sixième du hômér. U servait surtout à mesurer les solides. Voir Artabe, 1. 1, col. 1038.

2° Le Modius, boisseau, mesure romaine, est mentionné dans le [Nouveau Testament, Matth., v, 15 ; Marc, iv, 21 ; Luc, xi, 33. Mais il n’est pas question de sa capacité comme mesure. La Vulgate emploie ce mot pour traduire des mesures différentes, tantôt l'éphi, Lev., xix, 36 ; Deut., xxv, 14, 15, etc., tantôt le hômér, Lev., xxvii, 16 ; Is., v, 10 ; tantôt le se'âh.'Vf (II) Reg., vii, 1, 16, 18. Parfois aussi elle donne l'équivalence des mesures hébraïques en modii, mais ces équivalences ne sont pas exactes, le modius latin ne correspondant à aucune mesure hébraïque. Voir Boisseau, 1. 1, col. 1840.

3° L’Apocalypse VI, 6, nomme la mesure grecque appelée Chcenix, Vulgate : bilibris. C'était la 48e partie du medimne, il contenait 1K)79. Voir Chcenix, t. ii, col. 712.

Les mesures de capacité peuvent être groupées d’après deux systèmes suivant leurs relations entre elles.

1° Le système décimal.

Chômer ou Cor

10 Bath ou Éphi

100 10 1 Gomor

2° Le système duo-décimal.

Ephi ou Bath

3 1 Séàh 6 2 1 Hin

18 6 3 1 Cab

72 24 12 4 ILog.

Les valeurs de ces mesures sont indiquées dans le tableau suivant :

litres

I Cor… 338, 29

10 1 Bath-Ephi 38, 88

30 3 1 Séàh 12, 99

60 6 2 1 Hin 6, 49

100 10 3 1/3 1 2/3 1 Gomor 3, Ç8

180 18 6 3 1 4/5 1 Cab… 1, 16

720 72 24 12 71/5 4 1 Log. 0, 29

Mesures étrangères. Cbœnix 0'079

V. Métaphores tirées dés mesures. — La Sainte Écriture emploie souvent d’une manière métaphorique le mot mesure. Avec mesure signifie tantôt parcimonieur sèment, Judith, vii, 11 ; Ezech., iv, 11, 16 ; Joa., iii, 34, tantôt abondamment, Ps. lxxix (hébreu, LXXx), 6 ; Is. xxvii, 8, pour indiquer la perfection du Tout-Puissant, Job, xi, 7-9, dit que sa mesure est plus longue que la terre et plus large que la mer. Dieu a donné à la vie humaine la largeur de la main. Ps. xxxvili (hébreu, xxxix), 6 (la Vulgate traduit : mensurabiles posuistidies). Poids et poids, éphi et éphi, c’est-à-dire fausse mesure, odieuse â Dieu. Prov., xx, 10 ; cf. Amos, viii, 5 ; Michée, vi, 10. Dieu a réglé tout avec mesure, nombre et poids, c’est-à-dire avec ordre et sagesse. Sap., xi, 21. La justice lui sert dé mesure, Is., xxviii, 17 ; la destruction. est symboliséepar le cordeau et le niveau (Vulgate : mensura), Is., xxxiv,

II ; cf. Jérémie, xiii, 25 ; xxxi, 39 ; le même mot signifie au contraire le partage et la prise de possession. Is., xxxiv, 17. Notre-Seigneur Jésus-Christ, pour nous exciter à la charité, dit que Dieu se servira à notre égard de la mesure dont nous nous serons servi à l'égard du prochain. Matth., vii, 2 ; Marc, iv, 24 ; Luc, vi, 38. Le bon économe est celui qui distribue en temps opportun aux serviteurs la mesure de froment. Luc, xii, 42. Reprochant aux Pharisiens leurs crimes, Jésus leur dit : Comblez la mesurede vos pères. Matth., xxiii, 32. Saint Paul recommande aux chrétiens d'être modestes, cha »

cun selon la mesure de la foi que Dieu lui a départie, Rom., xii, 3 ; ceux qui se mesurent à leur propre mesure manquent d’intelligence. Lui-même ne se glorifie pas outre mesure, mais selon la mesuré du champ d’action que Dieu lui a assigné. II Cor., x, 12. La grâce nous a été donnée selon la mesure du don du Christ ; nous devenons hommes faits à la mesuredela stature du Christ ; chacun des membres du Christ opère selon sa mesure d’activité. Eph., iv, 7, 13, 16.

VI. Bibliographie. — Outre les livres cités aux articles concernant chaque mesure, voir J. Benzinger, Hebràische archâologie, in-8°, Fribourg-en-Brisgau, 1894, p. 178185 ; F. Vigouroux, Manuel biblique, 12° édit., in-12, Paris, 1905, t. i, p. 327-332. E. Beurljer.

    1. MÉTABÉEL##

MÉTABÉEL (hébreu : Mehêtab'êl ; Septante : Metaëerj>), grand-père ou ancêtre de Semaïas, fils de Dalaïa. Semaïas fut le complice de Tobie et de Sanaballat dans leurs menées contre Néhémie. II Esd., vi, 10. — Une femme iduméenne porte dans l’original hébreu le même nom que le fils de Dalaïa, mais la Vulgate lui a donné une orthographe différente. Voir Meêtabel 1, col. 932.

    1. MÉTAUX##

MÉTAUX, corps simples, solides, à la seule exception du mercure, et caractérisés par des propriétés particulières, comme la ténacité, la ductilité, la malléabilité, etc.

I. Les métaux dans la Bible. — 1° Les métaux, à l'état natif, se présentent ordinairement dans une gangue ou avec un alliage dont il faut les dégager. La Sainte Écriture fait plusieurs allusions à cette espèce de scorie, qui s’appelle sîg, mot que les Septante rendent toujours par des périphrases, et que la Vulgate traduit tantôt par rubigo, « rouille, » Prov., xxv, 4, tantôt par scoria, ls., i, 22, 25 ; Ezech., xxii, 18, et d’autres fois par des périphrases, Prov., xxvi, 23 ; — Le mot (iitaXia, metalla, est employé une fois, I Mach., viii, 3, mais avec son sens ordinaire de « mine ». — 2° Les métaux mentionnés dans les Livres Saints sont les suivants :

Antimoine, hébreu : pûk ; Septante : oTitu ; Vulgate : stibium. Voir 1. 1, col. 670.

Argent, hébreu : késéf ; Septante : ê?pvupo « ' ; Vulgate : argenlum. Voir t. i, col. 945.

Cuivre, hébreu : nehoSét elneliûiâh ; Septante : xàltioi ; Vulgate : ses. Voir t. ii, col. 1154.

Étain, hébreu bedil ; Septante : xoKruréepo ;  ; Vulgate : stannum. Voir t. ii, col. 1990.

Fer, hébreu : barzél ; Septante : usSripov : Vulgate : ferrum. Voir t. H, col. 2205.

Or, hébreu : zdhdb, 11ârû$, pdz ; Septante : xpwsàç ; Vulgate : aurum. Voir Or.

Plomb, 'ânàk, 'oférêt ; Septante : >.61êoq ; Vulgate : plumbum. Voir Plomb. Ces six derniers métaux sont nommés ensemble Num., xxxi, 22. Il est aussi question de certains alliages de métaux :

Airain, alliage de cuivre et d'étain. Voir Airain, 1. 1, col. 323..

Bronze, même alliage. Voir Bronze, t. i, col. 1943.

Électrum, hébreu : hasmal ; Septante : r É XexTpov, alliage d’or et d’argent. Voir Electrum, t. ii, col. 1655.

Enfin, dans l’Apocalypse, i, 15 : ii, 18, il est question d’un métal appelé yalxoklèavov, aurichaleum, et qui pourrait être un alliage de cuivre et d’or, voir Or, à moins que saint Jean n’ait formé le mot dont il se sert du grec x**x°Ç et de l’hébreu lâbân, « blanc, » pour désigner une sorte de cuivre blanc, alliage de cuivre, d'étain et d’un métalloïde qui donne au composé l’aspect de l’argent. Il est possible aussi qu’il ne s’agisse ici que de cuivre phénicien, en provenance du Liban. Voir Cuivre, t. ii, col. 1157, 1158.

II. La métallurgie chez les Hébreux. — 1° Les Hébreux ne se sont jamais livrés à la grande industrie. Le travail des métaux se faisait par leurs voisins les Phi listins, I Reg., xiii, 19-22, et surtout par les Phéniciens.' III Reg, , vii, 13, 14. Les métaux leur arrivaient par importation. Us apprirent cependant à les utiliser euxmêmes pour en fabriquer des ustensiles, des armes, des objets de décoration, etc. Voir Forgeron, t. ii, col. 2310-2314. Ils savaient épurer l’or et l’argent au creuset, pour les débarrasser du plomb et des scories. Ps. xi (xu), 7 ; Prov., xvii, 3 ; xxvii, 21 ; ls., i, 22, 25 ; Jer.,-n, 2830 ; Ezech., xxii, 18-22 ; Mal., iii, 2, 3. Sur cette opération, voir Creuset, t. ii, col. 1116. Us pouvaient fondre les métaux, Exod., xxxii, 4 ; ls., i, 25, etc., les marteler et les polir, ls., xli, 7, et même les réduire en parcelles semblables à la poussière. Exod., xxxii, 20.

2° Les Livres Saints parlent fréquemment d’objets fabriqués avec l’or, l’argent, le cuivre et le fer. On peut en voir l’indication à chacun de ces mots. Au désert, les Hébreux utilisèrent les connaissances métallurgiques qu’ils avaient acquises en Egypte. Il fallait à leurs ouvriers une grande habileté pour fabriquer les multiples objets d’or et d’airain qui constituèrent le mobilier sacré du Tabernacle, l’arche d’alliance avec ses chérubins, la table de proposition, le chandelier d’or, Exod., xxv, 10-40, les plaques ou lames d’or, destinées à recouvrir les meubles en bois, Exod., xxv, 11 ; xxvi, 32 ; etc., ensuite pour couler le veau d’or. Exod., xxxii, 4. Après l'établissement en Chanaan, on trouve encore parmi les Hébreux le fondeur, çôrêf, àpyijpox<51roç, argentarius, capable de fondre une statue et de la tailler au ciseau. Jud., xvii, 3, 4. Le travail des métaux ne prit d’extension qu'à l'époque de Salomon ; mais les ouvrages nécessaires à la construction et ' t à l’aménagement du Temple et des palais s’exécutèrent sous la direction d’Hiram, le Phénicien, habile à travailler l’or, l’argent, l’airain et le fer. II Par., ii, 14. Cet appel à un étranger suppose que, chez les Hébreux, il n’y avait personne qui fût capable de mener à bonne fin cette exécution. L’entreprise confiée à Hiram comporta des revêtements d’or sur les murailles du sanctuaire, sur les deux grands chérubins, sur différents motifs de sculpture, III Reg., VI, 22, 28, 32, 35 ; la fonte des deux grandes colonnes d’airain, de la mer et des dix bassins d’airain, et d’une grande quantité d’ustensiles d’or. III Reg., vii, 15-50 ;

II Par., iii, 15-17 ; iv, 1-22. Les objets d’airain, qui étaient de dimensions considérables, furent coulés, par pièces séparées que l’on monta ensuite, dans des moules argileux. Pour exécuter cette opération, on choisit un terrain propice, dans la plaine du Jourdain, entre Sochoth et Sarthan. III Reg., vii, 46 ; II Par., iv, 17. Voir Colonnes du Temple, t. ii, col. 856-858 ; Mer d’airain, col. 982. Les citations des prophètes, indiquées plus haut, montrent qu’après les grands travaux exécutés sous Salomon, l’industrie métallurgique ne s’exerça chez, les Hébreux que dans d’assez modestes proportions. De temps en temps seulement, il est question de veaux d’or,

III Reg., xii, 28 ; IV Reg., xvii, 16 ; Il Par., xi, 15 ; II Esd., ix, 18, et de statues, III Reg., xiv, 23 ;

IV Reg., xvii, 10 ; II Par., xxviii, 2 ; xxxiii, 19 ; Jer., XLin, 13, fabriqués en vue des cultes idolâtriques. Il n’y eut rien à fondre pour le second Temple, puisque les usten* siles d’or et d’argent enlevés par Nabuchodonosor furent rendus à Zorobabel. I Esd., vi, 5. — La fonte des métaux exigeait une haute température et des opérations assez compliquées. L’argent fond vers 1000° et l’or vers 1200°. On obtenait cette température dans des fours spéciaux, dans lesquels on activait la combustion au moyen de soufflets. Voir FORGERON, t. ii, 'col. 2312, fig. 677, et Four, col. 2336, 2337. Des fondants alcalins, potasse, soude, etc., ajoutés au minerai, en facilitaient la tusion. Le cuivre ne fond que vers 1150°. On réduisait les minerais de cuivre oxydé ou carbonate dans un fourneau, au contact do charbon et à l’aide des fondants. Les opérations du raffinage sont assez complexes. On les poussait aussi loin que le permettaient les moyens à la

disposition des anciens. Quand le métal avait été coulé dans les moules, on achevait l’exécution du travail par le battage, le martelage, le polissage, opérations auxquelles se prêtent très bien l’or, l’argent et le cuivre, à raison de leur malléabilité et de leur ductilité. Si les pièces étaient de dimensions considérables, comme les colonnes du Temple, la mer d’airain, etc., on les coulait par morceaux, dont on faisait ensuite l’assemblage et l’ajustage.

III. Chez d’autres peuples. — 1° Dans le livre de Daniel, ii, 31-34, il est parlé de la statue que Nabuchodonosor vit en songe. Cette statue, qui avait la tête d’or, la poitrine et les bras d’argent, le ventre et les cuisses d’airain et les jambes de fer, n’a jamais existé. Mais l’idée en était suggérée au roi par les monuments qu’il avait ordinairement sous les veux. Les Chaldéens savaient exécuter toutes sortes d’objets en métal, et même des mers d’airain qu’on plaçait à l’entrée des sanctuaires. Cf. Maspero, Histoire ancienne des peuples de l’Orient classique, Paris, 1895, t. i, p. 756, 757 ; t. ii, 1897, p. 534. Ils fabriquaient de colossales statues d’or. Au rapport de Diodore de Sicile, ii, 9, 5, la pyramide de Babylone, É-Saggatu, était couronnée par trois grandes statues d’or. Une statue d’or massif, de douze coudées de haut, occupait l’intérieur de la pyramide de Borsippa. Hérodote, i, 183. Il n’est donc pas étonnant que Nabuchodonosor ait eu ensuite la fantaisie d'élever une statue d’or de soixante coudées de haut. Dan., iii, 1. Il est probable que dans les soixante coudées était comprise la hauteur du piédestal et que la statue elle-même, au lieu d'être massive, ne comportait qu’un revêtement d’or plus ou moins épais. Cf. Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, Paris, 4896, t. iv, p. 299-302. La statue de Bel, dontparle ailleurs Daniel, xiv, 6, était d’argile, mjXôç, à l’intérieur, et de bronze ou de cuivre, ^a^-ôç » à l’extérieur. Baruch, vi, 50, dit aussi des statues de Babylone qu’elles sont |0Xtva xai T.epiypvaa. xal Re.çii&pyvçia, lignea, inaurata et inargentata, « en bois et recouvertes d’or et d’argent. » Ce genre de statues ne comportait donc que des placages de métaux. — 2° À Éphèse, les orfèvres fabriquaient des réductions en argent du temple de Diane. Act., xix, 24, 27. Voir DÉMÉTRius 3, t. ii, col. 1364 ; Dune, t. lï, col. 1405 ; Orfèvre. — 3° On a cru que la ville phénicienne de Sarepta, sârfat, située sur la côte entre Tyr et Sidon, tirait son nom du verbe sàraf, « fondre. » Cf. Gesenius, Thésaurus, p. 4187. Il y aurait donc eu là autrefois des fonderies de métaux. Le fait est possible. Ce qui est certain, c’est que les Phéniciens fabriquaient beaucoup de verre dans cette ville ; on trouve encore dans les ruines et sur le rivage les traces nombreuses de cette fabrication. Cf. Lortet, La Syrie d’aujourd’hui, Paris,

1884, p. 113. Aussi le nom de la ville serait-il plus probablement dû à la fonte du verre.
H. Lesêtre.
    1. METHCA##

METHCA (hébreu : Mitqâh ; Septante : Maôexxol), vingt-deuxième station des Israélites dans le désert du Sinaï, située entre Tharé et Hesmona. Nuin., XXXHI, 2829. L’emplacement en est inconnu.

    1. MÉTRÉTE##

MÉTRÉTE (grec : u.ttpir)T-nç ; Vulgate : metreta), mesure pour les liquides, équivalant à peu près au bath. Aussi la Vulgate traduit-elle le mot bath par metreta. II Par., ii, 10 ; iv, 5. On rencontre le mot grec t>.eTp » ]TTJ « , dans les Septante. II Par., iv, 5. Le même mot se trouve dans la partie grecque de Daniel, xiv, 2. H est traduit dans la Vulgate par amphora. Dans le récit des noces de Cana, il est dit que les urnes dont se servaient les Juifs pour les purifications contenaient chacune deux ou trois métrètes, Joa., ii, 6 ; c’est-à-dire deux ou trois baths. Le métrète était la plus grande mesure attique pour les liquides. Démosthène, Contr. Phenipp., 20. — Le ueT(W)Triç valait 12 -^deç, 72 ?l<rræ 144 xottoai, c’est-àdire environ 39 litres, c'était donc à peu près l'équiva lent du bath, qui valait 38'88. J. "Wex, Métrologie grecque et romaine, trad. P. Monet, in-12, Paris, 1886, p. 24-26. E. Beurlier.

    1. MÉTRI##

MÉTRI (hébreu : ham-Matrî ; Septante : Ma-crapOi famille de la tribu de Benjamin, que le texte hébreu appelle & la Mathrite ». Celui qui lui donnait son nom était un ancêtre de Cis et de Saûl. Lorsque Samuel fit désigner par le sort le futur roi d’Israël, le sort tomba, parmi les douze tribus, sur la tribu de Benjamin, et parmi les familles de Benjamin, sur celle de Métri, et parmi les membres de la famille de Métri, sur Saûl. I Reg., x, 21.

MÉTRIQUE HÉBRAÏQUE. Voir Hébraïque (Langue), t. iii, col. 490-491.

METS, aliments. Voir Nourriture.

    1. MEUBLES##

MEUBLES, MOBILIER (hébreu : kelî, comme l’assyrien kalû, kalûtu ; Septante : erxeûoç, axeûvi ; Vulgate : vas, vasa, supellex), ensemble d’objets de nature assez diverse, constituant l’aménagement d’un édifice ou d’une maison, la charge d’un homme, etc. Le mot kelî paraît

272. — Vases et ustensiles égyptiens en bronze. Musée de Berlin. D’après Aegyptische AUerthùmer, pi. 5.

se rattacher au radical kûl, « mesurer, contenir, » et à l’assyrien kullu, « tenir, porter, lever. » Cf. Buhl-Gesenius' Handwôrterbuch, Leipzig, 1899, p. 360. Il embrasse dans sa signification assez large toutes sortes de vases de terre et d’airain, Lev., VI, 28 ; xi, 33 ; Jer., XIX, H ; xxxii, 14 ; les ustensiles du tabernacle, Exod., xxvii, 3 ; xxxvin, 3 (fig. 272) ; divers petits ustensiles de ménage, bassins, vases, etc., Is., xxii, 24 ; la vaiselle, III Reg., x, 21 ; tout le ménage de quelqu’un, Gen., xxxi, 37 ; Jos., vu, 24 ; son habillement, Deut., xxii, 5 ; les bagages du voyageur, Jer., xlvi, 19 ; Ezech., su, 3 ; l’attirail d’un attelage de bœufs, II Reg., xxiv, 22 ; l’ensemble d’une

parure de toilette, Is., lxi, 10 ; des navires en papyrus, Is., xviii, 2 ; des instruments de musique, II Par., xxx, 21 ; xxxiv, 12 ; Ps. lxxi (lxx), 22 ; Am., 'vi, 5 ; des engins de destruction, Gen., xux, 5 ; 1s., xxxii, 7 ; Ezech., ix, 2 ; des moyens de défense, I Mach., xiv, 10 ; des armes de toute nature, Gen., xxvii, 3 ; Jud., xviii, 14 ; Ps. vii, 14 ; Eccle., îx, 18 ; Jer., xxi, 4 ; li, 25, 20 ; Judith, xvi 23 ; l'équipement d’un berger, Zach., xi, 15 ; les agrès d’un bateau, Jon., i, 5, etc. La même expression se retrouve dans le Nouveau Testament pour désigner les meubles de la maison, Luc, xvii, 31 ; les objets de toutes sortes qui y sont gardés, Matth., xii, 29 ; Marc, iii, 27 ; les ustensiles du Temple, Hebr., ix, 21 ; des agrès de navire, Act., xxvil, 17 ; un objet portatif quelconque. Marc, xi, 16. On appelle vases d'élection, de colère ou de miséricorde, Act., IX, 15 ; Rom., ix, 22, 23, les hommes qui sont l’objet du choix divin, de la colère ou de la miséricorde. Saint Paul recommande au chrétien de traiter son corps, iras-jo ; , t’as, avec respect et sainteté. I Thés., iv, 4. Le mobilier des Israélites était peu compliqué, ce qui se comprend dans un pays où la vie se passe presque tout entière en plein air. Quand la Sunamite veut meubler une chambre pour Elisée, elle y met « un lit, une table, un siège et un chandelier ». IV Reg., iv, 10. Qu'à ces quatre meubles on ajoute un moulin à bras, Deut., xxiv, 6, et une cruche, voir Cruche, t. H, col. 1136, l’on aura à peu près tout ce qui semblait nécessaire pour rendre une maison habitable. Quelques cavités ménagées dans l'épaisseur des murs servaient à ranger un certain nombre d’objets accessoires, comme les couvertures, les vêtements de rechange, les vases pour la cuisine ou la conservation des denrées, etc. Les gros, ustensiles de cuisine, comme le four à pain, le fourneau, etc., n’encombraient guère l’intérieur de la maison, puisque la cuisine se faisait ordinairement dehors. Voir Cuisine, t. ii, col. 1146. — Les maisons des riches comportaient un mobilier plus considérable que le contact avec les civilisations étrangères rendit peu à peu plus compliqué. Voir Maison, col. 586 ; Palais. Le traité Kelim, le premier du sixième livre de la Mischna, s’occupe du mobilier des maisons et des règles à suivre pour lui garder ou lui rendre la pureté légale. — Sur les meubles proprement dits, voir Boisseau, 1. 1, col. 1840 ; Chaire, t. ii, col. 508 ; Chandelier, t. ii, col. 541 ; Chaudière, t. ii, col. 620 ; Lampe, t. iv, col. 54 ; Lit, t. iv, col. 285 ; Moulin, Siège, Table, Tapis. Cf. Jahn, Archxolog. biblic, dans le Cursus complet. Scripturse Sacrx, de Migne.

Paris, 1852, col. 852-853.
H. Lesêtre.
    1. MEULE##

MEULE (hébreu : tefyôn, tâhânah, rêhvyîm, pélah, rékéb ; Septante : puiXo ; , èrcijiiSXtov, X£80 ; [uvixd ; ou [ivlivii ;  ; Vulgate : mola, lapis molaris), ustensile de pierre servant à réduire le grain en farine.

I. Les meules des anciens. — 1° Quand les premiers hommes ont connu l’usage du blé, ils se sont préoccupés de le réduire en farine pour en faire du pain, bien que, même au temps de Notre-Seigneur, on eût gardé l’usage de manger les grains de blé encore frais sans les moudre. Matth., xii, VI, 1 ; Luc, vi, 1. Dans le principe, on se contenta d'écraser le grain dans un mortier. Voir MORTIER. On perfectionna ensuite le procédé et l’on_écrasa le blé sur une pierre dure à l’aide d’une autre pierre mise en mouvement à grand effort. Un monument égyptien (fig. 273) représente une femme agenouillée devant une pierre oblongue, creusée légèrement à la surface, et écrasant le grain à l’aide d’une pierre plus petite qu’elle pousse et ramène des deux mains. La farine ainsi obtenue était mélangée de son, de poussière et de débris de pierre ; elle renfermait des grains à peine concassés et d’autres encore entiers. Les dents avaient à compléter le travail. Aussi celles des vieillards se retrouvent-elles souvent usées jusqu'à la gencive. Les Chaldéens employaient le même procédé. Sur un ca chet chaldéen (fig. 274), on aperçoit en haut, à gauche, une femme agenouillée qui broie le grain, et devant elle de petits disques qui ont l’air d'être des pains préparés

273. — Égyptienne écrasant le grain avec une pierre. Musée du Caire.

pour la cuisson. Cf. Maspero, Histoire ancienne de& peuples de l’Orient classique, Paris, t. i, 1895, p. 320, 699, 739.

2° Les Hébreux ont connu de bonne heure les meules à mains. Ils s’en servaient au désert, Num., xi, 8, comme ils le faisaient antérieurement dans la terre de Gessen. Il n’est pas à croire cependant qu’ils aient emporté avec eux des objets aussi pesants ; le désert leur fournissait en abondance les pierres nécessaires pour moudre, d’autant qu’ils n’avaient pas dû prendre beaucoup de blé avec eux. La meule se composait de deux pierres. L’une,

274. — Femme chaldéenne broyant le grain.

D’après Heuzey et de Sarzec, Découvertes en Chaldée,

pi. 30 bis, n. 13.

plus lourde et plus dure, s’appelait pélah falifit, « t meule de dessous, n Dans Job, XLI, 15, il est dit du crocodile qu’il a le cœur dur comme la meule de dessous. Les versions prennent cette meule inférieure pour une enclume, axii, (ov ivriXatoi ; , malleatoris incus. La meule supérieure était appelée rékéb, « la coureuse, » ou pélafr rékéb, « la meule coureuse, » îmiJAiai, « la meule de dessus, » le catillus des Latins. Deut., xxiv, 6 ; Jud., rx, 53 ; II Reg., xi, 21. L’ensemble de l’appareil prenait le nom de rèhdyîm, « les deux meules. » Exod., XI, 5 ; Is., xl vii, 2. Les Hébreux broyaient la manne à la meule, Num., xi, 8, comme plus tard ils broyèrent le blé. Les meules étaient si indispensables dans un ménage qu’il était défendu de prendre en gage soit les deux meules, rêhàyîm, soit même la meule de dessus, rékéb, ce qui eût été prendre en gage la vie même. Deut., xxiv, 6. Cf. Josèphe, Ant. jud., IV, viii, 26. C'étaient ordinairement t051

MEULE

1052

des femmes qui manœuvraient la meule, Matth., xxiv, 41, et spécialement des esclaves. Exod., xi, 5. Le travail était fort pénible. Quand les Philistins eurent pris Samson, ils l’emprisonnèrent à Gaza et le mirent à la meule. Jud., xvi, 21. Isaïe, xlvii, 2, menace Babylone du même sort, quand il lui dit : « Prends les meules et mouds de la farine. » Jérémie constate que les jeunes hommes de Juda ont été mis à la meule par les Chaldéens. Lam., v, 13. — Saint Jérôme traduit ; dans ce dernier passage, le mot tehôn, « meule, s par impudice abusi sunt, les Chaldéens « ont indignement abusé des jeunes gens ». Cette traduction se réfère à un passage de Job, xxxi, 10, où il est dit : « Si mon cœur a été séduit par une femme…, que ma femme soit la meule, fithan, pour un autre, » c’est-à-dire qu’elle soit son esclave. Le verbe tâhan est pris dans un sens obscène par les Septante, la Vulgate, le Targum, etc., comme le grec (liXXstv. Cf. Théocrite, iv, 58. Ce sens peut convenir dans le passage de Job ; il est beaucoup moins probable dans celui de Jérémie. — Chez les anciens auteurs, le travail de la meule est toujours présenté comme propre aux esclaves et aux condamnés. Cf. Odyss., vii, 103 ; Théophraste, Char., 5 ; Aristophane, Nub., 1358 ; Callimaque, Del., 242 ; Térence, Andr., i, 2, 29 ; Phorm., ii, 3, 19 ; Plaute, Asinar., i, 1, 16 ; Epidic, i, 2, 42 ; Mercat., ii, 3, &2 ; Mostel., i, i, 16 ; Psenul., v, 3, 33 ; Pen., i, 1, 21, etc.

3° Les meules.se perfectionnèrent avec le temps, de manière à fournir, avec plus de facilité, un meilleur

275. — Moulin à bras de Pompéi.

D’après Baumeister, Denkrnaler des klassichen AUertums,

t. ii, p. 933.

travail. Les anciens avaient un moulin à bras, y_sipoIiûXti, Xénophon, Cyr., vi, 2, 31, mola manuaria ou trusatilis, Aulu-Gelle, iii, 3, 14, que l’on tournait. On en a découvert de nombreux spécimens à Pompéi, dans les boutiques des boulangers et il n’est pas de ruines de villes antiques où l’on ne trouve des débris de meules. La base du moulin de Pompéi (fig. 275) estformée d’une pierre surmontée d’une partie conique, la meta, d’environ deux pieds de haut. L’autre pièce de l’appareil affecte la forme d’un sablier ; c’est, le catillus. Sa partie inférieure emboîte le cône de. la meta ; la partie supérieure, évasée en entonnoir, sert de trémie pour le blé, qui descend par quatre trous percés à travers l'étranglement du catillus. Une barre de bois, s’insérant dans deux cavités ménagées de chaque côté de cette dernière pièce, permettait aux esclaves dé faire tourner le catillus sur la meta. Le grain, broyé par le frottement des deux pièces l’une sur l’autre, tombait en farine dans une rigole inférieure. Les Hébreux ne se sont pas servis communément d’appareils aussi perfectionnés. Cependant saint Matthieu, xxiv, 41, suppose deux femmes occupées à mettre en mouvement la même meule. Elles avaient un moulin fort analogue à celui qui est encore en usage en Orient, et qui est connu sous le nom de richd, à peu près comme les rêhâyîm de la Bible (fig. 276). Cf. Riehm, Handwôrterbuch des bibl. Alterlums, Bielefeld, 1894, t. ii, p. 1041. Ce moulin,

qu’on trouve dans tout l’Orient, se compose de « deux petites meules, larges de 58 à 60 centimètres, épaisses de 6 à 10. Celle de dessous est légèrement convexe, pour faciliter la chute de la farine. L’autre l’emboîte exactement. Au milieu de la meule supérieure, seule mobile,

276. — Moulin à bras. — À gauche, les deux meules superposées. A droite, au-dessous, meule inférieure ; au-dessus, coupe de la meule supérieure. D’après Riehm, Handwôrterbuch des bibli~ schen AUertums, 1894, t. ii, p. 1041.

est un assez large trou, traversé diamétralement par une petite pièce de bois ou de fer, percée elle-même d’un trou où s’engage le pivot de fer s'élevant au centre de la pierre inférieure. Le moulin est ordinairement posé à terre sur une peau : une ou deux femmes, accroupies l’une en face de l’autre, tournent la pierre supérieure par un manche de bois planté debout sur la meule et près du bord. Si deux femmes travaillent ensemble, l’une d’elles tourne de la main gauche et se sert de la droite pour mettre le grain dans le trou central, que le petit moyeu ne ferme pas entièrement (fig. 277). Les meilleurs moulins à main se fabriquent dans le Ledja, l’ancienne Trachonitide, avec la lave poreuse et relativement légère qui forme presque tous les rochers du pays. C’est unarticle d’exportation dans tout l’Orient ». JalUen, L’Egypte, Lille, 1891, p. 271, 272. La manœuvre du moulin, bien que longue et pénible, est invariablement confiée aux femmes. « Quoiqu’on ait cherché à établir quelques moulins à Jafla, la plupart du temps les habitants font eux-mêmes leur farine, en broyant le grain entre deux petites meules de lave que les femmes

277. — Bédouines tournant la meule. D’après une photographie.

tournent l’une sur l’autre au moyen d’une cheville de bois. Que dé fois n’ai-je pas vu des mères de famille, épuisées, manœuvrer ainsi sans relâche, pendant des heures entières, ces machines primitives et grossières, permettant à peine de moudre la farine nécessaire à la nourriture de leur mari et de leurs enfants ! Que de fatigues elles éprouvent pour avoir le pain d’une seule journée ! Jusqu’au moment où ces malheureuses pourront se reposer dans la paix de la tombe, elles seront condamnées à ce dur travail ! » Lortet, La Syrie d’aujourd’hui, Paris, 1884, p. 381. Le frottement d’une, meule sur l’autre produit un bruit continu. Dans sa prophétie contre Juda, Jérémie, zxv, 10, dit que le Sei

gneur fera taire « la voix de la meule et la lumière de la lampe », double signe de la vie dans une maison. Saint Jean emploie la même image à propos de la ruine de la grande Babylone. Apoc., xviii, 22. Le bruit de la meule est encore aujourd’hui caractéristique des lieux

278. — Cheval tournant la meule.

Bas-relief du Vatican. D’après Baumeister,

Denkmâler des klassichen AUertums, t. ii, p. 933.

habités en Orient. On l’entend parfois une grande partie de la nuit. L’Ecclésiaste, xii, 3, 4, dit aussi dans sa description allégorique de la vieillesse : « Alors chôment celles qui avaient coutume de moudre (les dents), parce qu’elles ne sont plus en nombre… et le son de la meule s’affaiblit. » Il est d’ailleurs assez probable qu'à la voix de la meule se joignait parfois la voix de celles qui la ournaient et qui charmaient par des chants les longs

nana. C'était une meule tournée par un âne, au lieu de l'être par un homme. Cf. Caton, De re rust., H ; Ovide, Fast., vi, 318, etc. Un marbre du Vatican (fig. 278 ; représente cette meule. Elle a la même forme que celles des boulangers de Pompéi, mais elle est naturellement plus considérable. Un cheval la tourne ; il a des plaques de cuir sur les yeux pour n'être pas incommodé par le mouvement gyraloire. Il se pourrait que les Philistins, en crevant les yeux à Samson, Jud., xvi, 21, aient voulu le mettre en état de tourner une meule semblable à la meule à âne. Il est toutefois plus probable qu’ils songèrent surtout à exercer leur vengeance et à rendre la fuite impossible à leur ennemi. Cf. F. L. Goetz, De pistrini$veterum, Zwickau, 1730 ; Hoheisel, De molismanualibus veterum, Gedan, 1728, tous deux dans le Thésaurus d’Ugolini, t. xxix ; Ch. Dezobry, Morne au siècle d’Auguste, 5e édit., 1886, t. iii, p. 419-428. Sur le moulin à olives, voir PRESSOIR.

II. Le poids des meules. — 1° Quand Abimélech eut pris la ville de Thébès, les habitants se réfugièrent dans une tour et montèrent sur le toit. Abimélech s'étant approché de la porte pour y mettre le feu, une femme jeta d’en haut sur sa tête un pélal} rékéb, la partie supérieure d’une meule, xXâ<j|/.a imj.ûim, fragmen moles. Il fut tué sur le coup. Jud., ix, 53 ; II Reg., xi, 21. Une pareille pierre, tombant de haut, devenait un projectile redoutable. Cf. Odyss., vii, 103 ; Suétone, Tib., 51. — Notre-Seigneur, en parlant de ceux qui portent au mal les petits enfants, dit qu’il vaudrait mieux pour, eux être jetés au fond de la mer avec une meule à âne attachée au cou. Matth., xviii, 6 ; Marc, ix, 41 ; Luc., ! xvii, 2. Ainsi ils périraient sûrement, mais du moins ils ne feraient pas périr l'âme de ceux qui sont incapables de se défendre. La submersion n'était pas un supplice juif. Cf. Exod, , I, 22. Les Romains l’employaient pour châtier le parricide, cf. Cicéron, Pro Rose Jm 23 Juvmal vin 214 et partout on le considé X. 4

&

fj ' % N*.

279. — rierro avec inscription chrétienne. 280. -^ Pierre avec inscription musulmane.

D’après Loi-tet, La Syrie, p. 661.

ennuis de leur mouvement monotone. Chez les Grecs, il est question d’une iropûXioc ù>Sr, « chant de la meule, » pendant le travail de la mouture. Cf. Élien, Var. hUt., vii, 4. — Sur les dents comparées à la meule, tahândh, Eccle., xii, 3, voir Dent, t. ii, col. 1381.

4° Enfin, dans saint Matthieu, xviii, 6, et saint Marc, ix, 41, il est parlé de meule à âne, puiXoç ôvtx<5 ; , tnola asi rait comme un grave supplice. Cf. Suétone, Octav., 67 ; Quinte Curce, x, 4 ; Josèphe, Ani. jud., XIV, xv, 10 ; Bell, jud., i, xxii, 2, etc. Parfois, on attachait au corps des objets pesants pour qu’il allât au fond de l’eau sans pouvoir surnager. Cf. Jer., ii, 63. Josèphe, Cont. Apion., r, 34, rapporte un récit de Lysimaque d’après lequel un roi d’Egypte, que celui-ci appelle Bocchoris, aurait dé

cidé de faire périr les lépreux en les jetant dans la mer enveloppés de feuilles de plomb. Lactance, De mort, persec, 15, t. vii, col. 238, dit que l’empereur Galère faisait jeter des chrétiens dans la mer avec des meules au cou. Actuellement encore, dans la baie de Beyrouth, les pêcheurs d'épongés qui ont â aller chercher leur butin à quinze ou vingt mètres de profondeur, plongent en tenant à la main des dalles de marbre qui pèsent plusieurs kilogrammes et les entraînent rapidement au fond. Ces dalles portent des figures et des inscriptions chrétiennes (fig. 279) ou musulmanes (fig. 280). selon la religion des pêcheurs, et sont munies d’un trou dans lequel passe une corde pour les ramener dans le bateau. Cf. Lortet, La Syrie d’aujourd’hui, Paris, 1884, p. 660-661. En parlant du supplice de la submersion avec une meule au cou, Notre-Seigneur veut donner une idée de la gravité du péché que commettent ceux qui scandalisent les petits. — Dans l’Apocalypse, xviii, 21, saint Jean dit qu’un ange puissant prit une pierre pareille à une grande meule et la jeta dans la mer en disant : « Ainsi sera précipitée violemment Babylone, la grande ville, et on ne la trouvera plus. » Cette pierre figure la grande Babylone dont la chute et la ruine seront sans retour. On ne la reverra pas plus qu’on ne revoit une lourde pierre qui a été précipitée de haut dans le fond

de la mer.
H. Lesêtre.
    1. MEURTRE##

MEURTRE, MEURTRIER. Voir Homicide, t. iii, Col. 740.

    1. MEUZEL##

MEUZEL, MŒZEL, Wblfgang, dit MUSCULUS,

théologien protestant, né le 8 septembre 1497 à Dieuze en Lorraine, mort à Bâle le 30 août 1563. Agé de 15 ans, il entra dans un monastère de bénédictins près de Lixheim et fut ordonné prêtre. La lecture des ouvrages de Luther ébranla sa foi, et ayant été élu prieur, il refusa cette charge. Bientôt il se mit à prêcher les nouvelles doctrines, quitta son monastère, vint habiter Strasbourg et s’y maria en 1527. Deux ans plus tard, il y devenait ministre et pouvait se livrer à son goût pour l'étude. En 1531, le sénat d’Augsbourg l’invita à venir dans cette ville, et depuis lors il prit part aux diverses assemblées tenues entre les catholiques et les protestants. Ayant refusé en 1548 de souscrire à l’Intérim d’Augsbourg, il dut quitter cette ville. L’année suivante la ville de Berne lui offrait une chaire de théologie. Parmi ses écrits nous mentionnerons : Commentant in D. Joannis Evangelium, in-f°, Bâle, 1545 ; Commentarii in Matthœum, in-f°, Bâle, 1548 ; Commentarii in Psaimos, una cum nova venione latina, in-f°, Bâle, 1550 ; Commentarii in Genesim, in-f », Bâle, 1554 ; Commentarii in Epistolam ad Romanos, in utramque Epistolam ad Corinthios, in-f°, Bâle, 1555 ; Commentarii in Esaïam prophetam, in-f », Bâle, 1557 ; Commentarii in Epistolas ad Galatas, et ad Ephesios, in-f », Bâle, 1559 ; Commentarii in Epistolas ad Philippenses, Colossenses, Thessalonicensésetinprimamad Timotheum, in-f°, Bâle, 1565. — Voir la Vie de W. Menzel composée par son iils Abraham et publiée dans le recueil : Synopsis festalium concionum, authore D. Wolf. Musculo Drusano, in-12, Bâle, 1595 ; Walch, Biblioth. theologica, t. iv, p. 455, 498, 540, 638, etc. ; Dupin, Biblioth. des auteurs séparés de l'Église romaine du xvi « siècle,

t l (1718), p. 399.
B. Heurtebize.
    1. MEXICAINE##

MEXICAINE (VERSION) DE LA BIBLE. Les

Mexicains aborigènes, à l'époque de la conquête espagnole, parlaient de nombreux dialectes. Le plus répandu était l’aztèque ou mexicain proprement dit. Il est désigné par le simple qualificatif de nahuatl, « clair, sonore. » Il est pauvre « n éléments phonétiques, mais abondant en mots fort longs. Quelques-uns ont de dix à douze syllabes. Tls ne sont pas cependant usités dans

le langage parlé et paraissent devoir leur origine à la nécessité d’exprimer les idées chrétiennes qu’enseignaient les 'missionnaires. Comme aucun des termes en usage ne pouvait les rendre, on créa de nouvelles expressions formées par la réunion de plusieurs radicaux significatifs. — De bonne heure on traduisit une partie des Livres Saints en mexicain. Le dominicain Didacus de Santa-Maria traduisit les Évangiles et les Êpltres à Mexico (1579) et le Franciscain Louis Rodriguez, les Proverbes. Mais il n’est rien resté de ces versions. En 1829, un agent de la Société biblique appelé Ihomson fit traduire le Nouveau Testament d’accord avec l'évêque de Puebla, mais la traduction de saint Luc fut seule imprimée. — Voir Bible of every Land, 1860, p. 465 ; W. Canton, À History of the British and Foreign Bible, t. ii, Londres, 1904, p. 94, 97, 471.

MEY (Jean de), théologien calviniste hollandais, né en 1617, mort le 19 avril 1678. Docteur en médecine et en théologie, il enseigna à Middelbourg cette dernière science, en même temps qu’il exerçait les fonctions de ministre. On a de cet auteur : Commentaria physica, sive eaypositio locorum Pentateuchi in quibus agitur de rébus naturalibus, in-4°, Middelbourg, 1651 ; Sacra physiologia sive exposilio locorum Scripturse in quirbus agitur de rébus naturalibus, in-4°, Middelbourg, 1661 ; Handboek der Spreuken Salomonis, in-4°, Middelbourg, 1667. Ses œuvres complètes ont été publiées à Delft, in-f », 1704. — Voir Walch, Biblioth. theol., t. iv,

515.
B. Heurtebize.
    1. MEYER Heinrich AugustWilhelm##

MEYER Heinrich AugustWilhelm, théologien luthérien allemand, né à Gotha le 10 janvier 1800, mort à Hanovre le 21 juin 1873. Après une éducation solide reçue au lycée de sa ville natale, il s’adonna à l'étude de la théologie luthérienne à l’université de Iéna (1818-1820). A partir de 1823, il fut pasteur en plusieurs localités, sans cependant cesser de poursuivre activement ses études. En 1837, il fut nommé « Superintendent » à Hoya et qua-, tre ans plus tard Consistorialrath et pastor primarius de l'église de Neustadt (Hanovre). De 1848 à 1861 il fut examinateur pour la théologie et plus tard Ober-Consistorialrath. Ayant pris sa retraite en 1865, il la consacra au perfectionnement de ses écrits.

Ses œuvres les plus remarquables sont : Das neue Testament, griechisch, nach den besten Hilfsmitteln kritisch revidiert, mit einer neuen deutschen Uebersetzung und einem kritischen und exegetischen Kommentar, 2 inr8°, Gœttingue, 1829. — Son œuvre capitale est intitulée : Kr’uisch-exegetischer Commentar zum neuen Testament, 16 in-8°, Gœttingue, 1832-59. Les différentes parties de cet important ouvrage ont été publiées dans l’ordre suivant : Die drei synoptischen Evangelien, 1832 ; Johannes, 1834 ; Apostelgeschichte, 1835 ; RBmerbrieꝟ. 1836 ; Corinther I, 1839 ; Corinther II, 1840 ; Galater, 1841 ; Epheser, 1843 ; Pillipp., Coloss., Philemon, 1847. Son œuvre fut conlinuée et. achevée par ses jeunes collaborateurs et ses amis, parmi lesquels nous citerons Huther, Lûnemann, Dûsterdieck. Une fois terminée, on édita plusieurs nouvelles éditions de l'œuvre complète. En 1898, on en a publié à G-œttingue la 9° édition.

Après la mort de l’auteur plusieurs savants comme Weiss, Wendt, Sieffert, etc., se mirent en devoir de refondre quelques parties séparées du Commentaire, en suivant plus ou moins la méthode rationaliste, tandis que Meyer se bornait presque exclusivement à l’interprétation grammalico-historique. À ce point de vue son ouvrage mérite des éloges, auxquels n’ont point droit ses successeurs rationalistes. — Voir Wagenmanu, dans Allgemeine deutsche Biographie, Leipzig, t. xxi, 1885, p. 580-81 ; Herzog, Realencyclopedie fur protest.

Theol., 2= éd., t. IX, p. 732-34 : Cornely, Introductio in S. Script., 1. 1, p. 728-30 ; Kurzer Lebensabriss Meyers, dans la 4° éd. de la ix" partie du Kritisch-exeget. Commentar., Gœttingue, 1874, et dans l’avant-propos de la 7e éd. de la 1° partie du même ouvrage.

E. Michels.

MÉZA (hébreu : Mizzdh ; Septante : MoCé, dans Gen., xxxvi, 15, et dans IPar., i, 37 ; Alexandrinus : Mo-/é), le dernier des quatre fils de Bahnel qui était un des fils d'Ésaû par Basemath, Gen., xxxvi, 13 ; I Par., i, 37. Il fut un des chefs Çallûf) iduméens, Gen., xxxvi, 17, mais la région où il habitait et la tribu qu’il gouverna sont inconnues.

    1. MÉZAAB##

MÉZAAB (hébreu : Mê Zâdb, « eaux d’or » ; Septante : MatÇoâë ; omis dans I Par., i, 50), père de Matred et grand-père maternel de Méétabel (col. 982), laquelle fut la femme d’Adar (Adad, I Par., i, 50 ; voir Adad 2, t. i, col. 165), le huitième et dernier des rois d'Édom énumérés Gen., xxxvi, 39 ; IPar., i, 50. Les Targumistes et les anciens rabbins ont imaginé que Mézaab, à cause de la signification de son nom, était orfèvre ou raffineur d’or. Cf. Qumst. heb. inPar., 1, 50 ; Patr. Lat., t. xxiii, col. 1367. Plusieurs critiques modernes croient que ce passage de la Genèse est altéré et que Mézaab est un nom de ville ou de pays, peut-être Dizahab. Deut., i, 1. Voir Dizahab, t. ii, col. 1453.

M EZUZA (hébreu : mezûzâh) inscription que les Jui fs suspendaient à leurs portes. La Loi avait ordonné aux Israélites d’avoir sans cesse à la main et devant les yeux certains préceptes et de les écrire sur les poteaux de leurs maisons et surleurs portes. Deut., VI, 8, 9 ; xi, 20. Dans l’Ancien Testament, il n’est fait mention d’aucun personnage qui ait vu dans cette prescription autre chose qu’une invitation pressante à ne jamais oublier la Loi. Après la captivité, quand se développa le pharisaïsme, on se mit à entendre la prescription dans le sens le plus littéral, d’où l’institution des tephillim, voir Phylactères, et de la mezuza. Ce dernier mot se lit plusieurs fois dans la Bible, au pluriel, mezûzôt, avec le sens de « poteaux de porte ». Exod., xii, 7 ; xxi, 6 ; Deut., vi, 9 ; xi, 20, etc. Sur un morceau de parchemin, on écrivait, en lettres hébraïques carrées, cf. Megilla, i, 8, formant vingt-deux lignes, les deux passages

du Deutéronome, vi, 4-9 ; xi, 13-21. Sur le revers du parchemin, on traçait le nom de Dieu, iw, Saddai ; on roulait le parchemin et on l’enfermait dans un jonc ou une boîte oblongue munis d’une ouverture de manière à laisser apparent le mot Saddai (fig. 280). On suspendait ensuite le tout au poteau droit des portes de la maison et des chambres. Les portes des synagogues ne portaient point la mezuza ; au Temple, on ne la fixait

(^

280. — Mezuza.

D’après Kitto, Cyclopsedia of Biblical Literature,

1876, t. lit, p. 153.

qu'à la porte de Nicanor. Cf. Josèphe, Ant. jud., IV, vin, 13 ; Berackoth, iii, 3 ; Schabbath, viii, 3, etc. Parmi es sept petits livres du Talmud de Jérusalem, le second rai te de la mezuza. Cette pratique, du reste, n'était observée que par les Juifs rigoristes attachés à l’observance littérale et servile des préceptes. L’Evangile, qui parle des phylactères et des franges, Matth., xxiii, 5, ne fait aucune allusion à la mezuza. Cf. Dassovius, De ritibus Mezuzse, dans le Thésaurus d’Ugolini, t. xxi ; Iken, Antiquitates sacrée, Brème, 1741, p. 536 ; Schûrer, Geschichte des jûdischen Volkes, Leipzig, t. ii, 1898, p. 484-485.

H. Lesêtre.

DICTIONNAIRE

DE LA BIBLE

TOME QUATRIEME

DEUXIÈME PARTIE

MIAMIN — PAVOT ENCYCLOPEDIE

DES

SCIENCES ECCLÉSIASTIQUES

RÉDIGÉE PAR

LES SAVANTS CATHOLIQUES LES PLUS ÉMINENTS

DE FRANCE ET DE L’ÉTRANGER

1° DICTIONNAIRE DE LA BIBLE

Publié par F. VIGOUROUX, prêtre de Saint-Sulpice

Ancien professeur a l’Institut catholique de Paris, Secrétaire de la Commission biblique

2° DICTIONNAIRE DE THÉOLOGIE CATHOLIQUE

Commencé soug la direction de A. VACANT, prof, au Sém. de Nancy, Continué sous celle de Eug. MANGENOT, professeur à l’Institut catholique de Paris.

3° DICTIONNAIRE D’ARCHÉOLOGIE CHRÉTIENNE

ET DE LITURGIE

Publia par le R me dom Fern. CABROL, abbé de Farnborough et dom H. LECLERCQ.

4° DICTIONNAIRE D’HISTOIRE ET DE GÉOGRAPHII

ECCLÉSIASTIQUES

Publié par Mgr Alfred BADDRILLART, recteur de l’Institut catholique de Paris, Albert VOGT, docteur es lettres, et Urbain ROUZIÈS.

5° DICTIONNAIRE DE DROIT CANONIQUE

(En préparation) DICTIONNAIRE

DE LA BIBLE

CONTENANT

TOUS LES NOMS DE PERSONNES, DE LIEUX, DE PLANTES, I>' ANIMAUX

MENTIONNÉS DANS LES SAINTES ÉCRITURES

LES QUESTIONS THÉOLOGIQUES, ARCHÉOLOGIQUES, SCIENTIFIQUES, CRITIQUES

RELATIVES À l' ANCIEN ET AU NOUVEAU TESTAMENT

ET DES NOTICES SUR LES COMMENTATEURS ANCIENS ET MODERNES

PUBLIÉ PAR

F. VIGOUROUX

PHETIIE DE S.UNT-SOLPICE

AVEC LE CONCOURS D’UN GRAND NOMRRE DE COLLABORATEURS

DEUXIEME TIRAGE

TOME QUATRIÈME

DEUXIÈME PARTIE

MIAMIN— PAVOT

J » ARIS

LETÛUZEY ET ANÉ, ÉDITEURS

76 bi ', RUE DES SAINTS-PÈRES, 76 bis 1912

TOUS DROITS RÉSERVES Imprimatur Parisiis, die 6 Januarii 1908.

f Franciscus, Card. RICHARD, Arch. Par. DICTIONNAIRE

DE LA BIBLE

M

(suite)

M E£UZA (hébreu : mezûzdh), inscription que les Juifs suspendaient à leurs portes. La Loi avait ordonné aux Israélites d’avoir sans cesse à la main et devant les yeux certains préceptes et de les écrire sur les poteaux de leurs maisons et sur leurs portes. Deut., vi, 8, 9 ; XI, 20. Dans l’Ancien Testament, il n’est fait mention d’aucun personnage qui ait vu dans cette prescription autre chose qu’une invitation pressante à ne jamais oublier la Loi. Après la captivité, quand se développa le pharisaïsme, on se mit à entendre la prescription dans le sens le plus littéral, d’où l’institution des tephillini, voir Phylactères, et de la mezuza. Ce dernier mot se lit plusieurs fois dans la Bible, au pluriel, mezûzôt, avec le sens de « poteaux de porte ». Exod., xii, 7 ; xxi, 6 ; Deut., vi, 9 ; xi, 20, etc. Sur un morceau de parchemin, on écrivait, en lettres hébraïques carrées, cf. Megilla, I, 8, formant vingt-deux lignes, les deux passages du Deutéronome, vi, 4-9 ; xi, 13-21. Sur le revers du parchemin, on traçait le nom de Dieu, nv, saddai ; on roulait le parchemin et on l’enfermait dans un jonc ou une boîte oblongue munis d’une ouverture de manière à laisser apparent le mot saddai (fig. 280). On suspendait ensuite le tout au poteau droit des portes de la maison et des chambres. Les portes des synagogues ne portaient point la mezuza ; au Temple, on ne la fixait qu'à la porte de Nicanor. Cf. Josèphe, Ant. jtid., IV, vin, 13 ; Berachoth, iii, 3 ; Schabbath, viii, 3, etc. Parmi les sept petits livres duTalmud de Jérusalem, le second traite de la mezuza. Cette pratique, du reste, n'était observée que par les Juifs rigoristes attachés à l’observance littérale et servile des préceptes. L’Evangile, qui parle des phylactères et des franges, Matth., xxiii, 5, ne fait aucune allusion à la mezuza. Cf. Dassovius, De ritibus Mezuzx, dans le Thésaurus d’Ugolini, t. xxi ; Iken, Antiquitates sacrée, Brème, 1741, p. 536 ; Schûrer, Gesehichte des jûdischen Volkes, Leipzig, 1898, t. ii,

p. 484-485.
H. Lesêtre.
    1. MIAMIN##

MIAMIN (hébreu : Miyâmin, « de la droite » ), nom de plusieurs Israélites dans le texte hébreu. La Vulgate a transcrit le nom de l’un d’entre eux, I Par., xxiv, 9, par Maiman (voir Maïman, col. 579), et elle a écrit Miamin un nom que l’hébreu écrit Minydmîn. II Esd., xii, 17 et 40 (41). On regarde Miamin comme une contraction de Minydmîn. Voir Miamin 3. Un Lévite qui vivait du temps d’Ezéchias, II Par., xxxi, 15, et que le texte original appelle aussi Minydmîn, est nommé dans

la Vulgate et dans les Septante Benjamin. Il fut chargé avec quelques autres, sous la direction de Coré (voir Coré 6, t. ii, col. 972), de la distribution des revenus sacrés aux autres Lévites.

1. MIAMIN (Septante : Meauév ; Sinaiticus : 'Ajj.ctp.Eiv ; Alexandrinus : Meouju’ia), un d’entre « les fils » de Pharos qui avait épousé une femme étrangère. Esdras l’obligea à la renvoyer. I Esd., x, 25.

2. MIAMIN (Septante : Mia|uv), un dés prêtres qui signèrent l’alliance contractée entre Dieu et le peuple du temps de Nèhémie. II Esd., x, 7 (hébreu, 8).

3. MIAMIN (Septante : Mtajufv), un des prêtres qui revinrent de la captivité de Babylone avec Zorobabel. II Esd., xii, 5. Certains commentateurs pensent que c’est le même prêtre qui signa l’alliance du temps de Néhémie. II Esd., x, 7. Si l’identification est fondée, il aurait atteint un âge très avancé. Plusieurs croient aussi que c’est le Miamin mentionné, II Esd., xii, 17, 40 (hébreu, 41), - et que le texte hébreu appelle Minydmîn dans ces deux passages. Dans II Esd., xii, l7, Phelti est nommé comme représentant de la famille sacerdotale de Miamin et de Moadia. Comme deux noms sont unis dans cet endroit, quelques critiques soupçonnent que Phelti représentait la seule famille de Moadia et que le nom du représentant de la famille de Miamin est tombé du texte. Ce Miamin peut être celui qui était revenu de la captivité de Babylone et qui serait mort avant cette époque, ou bien il faut l’identifier avec le Miamin que la Vulgate appelle Maiman (col. 579). Dans ce cas le Miamin dont parle II Esd., xii, 40, serait un autre personnage du même nom. Il sonna de la trompette à la dédicace des murs de Jérusalem relevés par Néhémie.

    1. MIBAHAR##

MIBAHAR (hébreu : Mibhar, « choix » ; Septante : MeêaâX ; Alexandrinus : Mocëâp), fils, d’après la Vulgate, d’Agaraï, un des vaillants soldats de David. I Par., xi, 38. Le texte hébreu peut se traduire « fils d’un Agaréen », ou bien « le Gadite », c’est-à-dire de la tribu de Gad, en changeant le-i, r, en t, d. Voir Agaraï, 1. 1, col. 263. La correction « le Gadite », facile à expliquer par la confusion qui s’est établie assez souvent entre le d et le r de l’alphabet hébreu, s’appuie dans le cas présent sur cette circonstance que Mibahar semble

correspondre dans la liste parallèle des gibborîm de David à Bonni (hébreu : Bânî), le Gadite.II Reg., xxiii, 35. Trois manuscrits hébreux de Kennicott, les-versions syriaque et arabe portent « le Gadite ». I Par., XI, 38. Le nom de Mibahar peut être aussi altéré, mais les diverses tentatives qu’on a faites pour essayer d’en rétablir la forme primitive ne sont pas satisfaisantes.

    1. MICHA##

MICHA, nom, dans la Vulgate, de sept Israélites dont l’orthographe est plus ou moins différente en hébreu, selon que la forme en est pleine, développée ou contractée. La signification en est : « Qui (est) comme Yàh ou Jéhovah. » La Vulgate elle-même a rendu de façons diverses les noms hébreux. Voir Michée.

1. MlCHA (Mîkâ’, dans II Reg. (Sam.), ix, 12 ; Mikâh, dans I Par., viii, 34, etc. ; Septante : Mt^â), de la tribu de Benjamin, fils de Mîphiboseth ou Méribbaal, petit-fils de Jonathas et arrière-petit-fils de Saiil. II Reg., IX, 12 ; I Par., viii, 33-34 : ix, 39-40. Micha eut plusieurs fils : Philhon, Mélech, tharaa et Ahaz. I Par., viii, 35 ; lx, 41.

2. MICHA (hébreu : Mîlcydh Septante : Mi^otsaç), père d’Achobor. Achobor ou Abdon (t. i, col. 147) était un des principaux de la cour de Josias, roi de Juda. IV Reg., xxil, 12 ; II Par., xxxiv, 29. C’est peut-être le même que le Michée, fils de Gamarias, dont parle Jérémie, xxxvi, 11. Voir Michée 3, col. 1063.

3. MICHA (hébreu : Mikâh ; Septante : Mr/ô), de la tribu de Ruben, fils de Séméi et père de, Réia.

I Par., v, 5.

4. MICHA (hébreu : Mikà’; Septante : Mi^â), lévite de la branche de Gerson, descendant d’Asaph, fils de 71chri ou Zébédée et père de Mathanias. I Par., IX, 15 ; il Esd., xi, 17, 22. Voir Mathanias 2, col. 863.

5. MICHA (hébreu : Mikâh ; Septante. : Mt-xi), lévite, fils d’Oziel, de la branche de Caath, frère de Jésia et père de Samir. I Par., xxiii, 20 ; xxiv, 24-25. Il fut un des chefs des lévites du temps de David.

6. MICHA (hébreu : Mîkâ’: Septante : Mi^i), lévite contemporain de Néhémie. Il fut un des signataires de l’alliance contractée entre Dieu et son peuple. II Esd., x,

II (hébreu, 12).

7. MICHA (Septante : Mt^i), de la tribu de Siméon, père d’Ozias. Ozias était un des princes de Béthulie, lors du siège de la ville par Holoferne. Judith, vi, 11.

    1. MICHAEL##

MICHAEL (hébreu : Mîkâ’êl, « qui (est) comme Dieu ? » Septante : Mt^a^X), nom d’un archange et de neuf ou dix Israélites. Ce nom avait été déjà porté par un Israélite du temps de Moïse ; les autres Michaël ont vécu entre l’exode et le retour de la captivité de Babylone.

1. MICHAEL, père de Sthur, de la tribu d’Aser. Sthur fut l’explorateur de la tribu d’Aser envoyé par Moïse du désert de Pharan dans la Terre Promise pour la visiter et en rendre compte ensuite au peuple. Num., xiii, 14 (hébreu, 13).

2 et 3. MICHAEL, chef d’une famille de la tribu de Gad, qui résidait dans le pays de Basan. I Par., v, 13. C’est peut-être le même qui est mentionné dans le verset suivant comme fils de Jésési et père de Galaad. I Par., v, 14 Un certain nombre de commentateurs les distinguent cependant l’un de l’autre.

4. MICHAEL, lévite, fils de Basaïaset père de Samaa, un des ancêtres du musicien Aseph. I Par., vi, 40.

5. MICHAEL, de la tribu d’Issachar, fils d’Izrahia, frère aîné d’Obadia, de Joël et de Jésia, un des chefs de famille de sa tribu. I Par., vii, â. Il e^st peut-être le même que le père d’Amri. Voir MiChæl 8.

6. MICHAEL, de la tribu de Benjamin, fils de Baria, un des chefs de famille de sa tribu. I Par., viii, 16.

7. MICHAEL, de la tribu de Manassé, un des chefs des troupes de sa tribu, qui alla rejoindre avec plusieurs autres David à Siceleg. I Par., su, 20.

8. MICHAEL, père d’Amri, du temps de David le chef de la tribu d’Issachar. I Par., xxvii, 18. Voir Michæl 5.

9. MICHAEL, un des fils du roi Josaphat. Son père laissa la Couronne à son fils aîné Joram, mais il donna de grandes richesses à ses autres enfants et Joram les fit tous périr quand il se fut affermi sur le trône. H Par., xxi, 2-4.

10. MICHAEL, père de Zébédia et fils ou descendant de Saphatias. Zébedia revint en Palestine en même temps qu’Esdras, a^ant avec lui quatre-vingts hommes. I Esd., vm, 8.

11. MICHAEL, archange. Voir Michel.

1. MICHAELIS Christian Benedict, orientaliste protestant, né à Élrich le 26 janvier 1680, mort à Halle le 23 janvier 1764. Il fut successivement dans cette dernière ville professeur de philosophie, de théologie et de langues orientales. De ses divers écrits nous mentionnerons : Vberiores annotaliones phïlùlogics ?, exegeliess in hagiographos Veteris Testamenti libros, 3 in-4o, Halle, 1720 : une partie des notes sont de son frère Jean-Henri

Michæiis.
B. Heurtebize.

2. MICHAELIS Jean, théologien protestant suédois, né à Slralsund le 27 janvier 1812, mort à Greifswalde te Il mars 1674. Il étudia à Kcpnigsberçr, à Rostock et à. Leyde etdevint à Greifswalde professeur d’éloquence, puis de théologie. Il exerçait en même temps les fonctions, de ministre en cette, ville. On a de lui, outre un lexique hébreu : Notée exegetico-critiese in Novum Testamentum prsscipue quoad hellenistica, in-4o, Rostock, 1706, publié par son fils Pierre Michæiis. — Voir Walch, Biblioth.

theologica, t. iv, p. 600.
B. Heurtebize.

3. MICHAELIS Jean David, théologien allemand protestant, né à Halte te 27 février 1717, mort à Goettingue le 22 août 1791. Il suivit les cours de l’université de Halle et en 1740 fit un voyage en Angleterre pendant lequel il se créa des relations avec les savants de Londres et d’Oxford. De retour à Halle, il reprit ses études sur les Livres Saints et les langues orientales : En 1746, il fut nommé professeur de philosophie à l’université de Gœttingue dont il fut bibliothécaire de 1761 à 1763. On lui doit une traduction allemande de la Bible. L’Ancien Testament fut publié à Gotha de 1769 à 1783 en 13 in-4o ; le Nouveau Testament de 1788 à 1792 en 2 in-4o. Parmi ses autres écrits nous mentionnerons : Tractatio critica de variis lectionibus Novi Testamenti caute colligendis et dijudicandis, in-4o, Halle, 1749 ; Paraphrasen imd Anmerkungen ûber die Briefe Pauli, in-4o, Brème, 1750 : il s’occupe des Épîtres aux Galates, aux Éphésieris, aux Philippiens, aux Colossiens, aux Thessaloniciens, à Timothëe, à Tite et à Philémon ; Curse in versionem syriæam Actuum Aposlolorum, in-4°, Goettingue, 1755 ; Ueber die <irei wichtigsten Psalmen von Christo xvi, xl und ex, n-8°, Gœttingue, 1759j Erklàrung des Briefes an die Éebfâer, 2 in-4°, Francfort, 1762 ; Epistolie de lxx hebdonwvibus DanielU,

in-8°, Londres, 1773 ; Einleitung indiegôtllichen Schriften des Neuen Bmdes, in-i », 1750 ; 2 in-4°, 1787-1788 ; Einleitung in die Qôttlichen Schriften des alten Bundes, in-4°, Hambourg, 1787 : ouvrage incomplet ; Observationes philologicse et criticæ in Jereniise Vaticinia et Threnos, in-4°, Gœttingue, 1793. On lui doit encore Orientalische und exegetische Bibliothek qui parut à Francfort, in-8°, de 1771 à 1789, et Neue oi-ienlaliscke und exegetische Bibliothek publié à Gœttingue, in-8°, de 1786 à 1793. Les derniers fascicules sont de Tychsen. — Voir I. D. Michælis Lebenschreibung von ihm selbst abgefasst, in-8°, Leipzig, 1793 ; C. G. Heyne, Elogium J. D. Michælis, in-4°, Gœttingue, 1791.

B. Heurtebize.

4. MICHAELIS Jean Henri, orientaliste allemand protestant, né Klettemberg en Saxe le 15 juillet 1667, mort à Halle, le 10 mars J738. Après avoir suivi les cours de l’université de Leipzig, il devint professeur au collège théologique de Halle, et en 1699 il fut choisi pour enseigner le grec et l’hébreu à l’université de cette ville. Parmi ses écrits nous remarquerons : Dissertatio de Paradiso, in-4°, Halle, 1695 ; Dissertatio de Angelo, Job, xxxui, 23, in-4°, Halle, 1701 ; Nova versio latina Psalterii Mthiopici cum notis philologicis, in-8°, Halle, 1701 ; De peculiaribus Ebrseorwm loquendi modis, in-4°, Halle, 1702 ; De codicibus manuscriptis biblico-hebraicis maxime Erfhurtensibus, in-4°, Halle, 1706 ; Dissertationes de textu Novi Testamenti grœco, in-4°, Halle, 1707 ; De usu lxX interpretum in Novum Testamentum, in-8°, Halle, 1709 ; De Isaïa propheta ejusque vaticinio, in-4°, Halle, 1712 ; De libro Coheleth, seu Ecclesiastes Salomonis, in-8°, Halle, 1717 : De Cantico Canticorum Salomonis, in-8°, Halle, 1717 ; Notx in Jobum, in-4°, Halle, 1720 ; Adnotationes in Psalmos, in-4°, Halle, 1720 ; Introductio historico-theologica in S. Jacobi Epistolam catholicam, in-4°, Halle, 1722. On lui doit en outre une édition de la Bible hébraïque : Biblia hebraica, 2 in-4°, Halle, 1720. Il collabora au travail de son frère Chrétien-Benoit Michælis : Uberiores annotaliones philologicse exegeticee in hagiographos Veteris Testamenti libros, 31n-4 « , Halle, 17-20. — Voir Walch, Biblioth. theologica* t. nr, p. 86, 90, 100 ; t. iv, p. 202, 479, 484, etc.

B. Heurtebize.
    1. MICHAIA##

MICHAIA (hébreu : Mîkâyàhû, « qui (est) comme Jéhovah ? » Septante : Mcta^i), fille d’Uriel de Gabaa ; elle fut une des femmes de Boboatn et la mère d’Abia, roi de Juda. Michaïa est probablement une altération du nom deMaacha. Voir Maacha4, col. 465-466. —Dans le texte hébreu, plusieurs Israélites portent le nom de Mîkâyàhû ou Mîkdydh ; la Vulgate les a appelés Michteas. Voir Michée.

    1. MICHAS##

MICHAS (hébreu : Mîkdyehû et Mîkdh ; Septante : Mf/aion ; Alexandrinus : Mi^i), Éphraïmite qui vivait dans la montagne d’Éphraïm avant l’établissement de la royauté en Israël. Son histoire est racontée dans le premier appendice du livre des Juges, xvii-xviii. Il s’était emparé de onze cents sicles d’argent que sa mère avait ramassés. Effrayé des imprécations de sa mère contre le voleur, il les lui restitua, et celle-ci remit deux cents sicles à un orfèvre ou fondeur, afin qu’il en fit une pésél (idole taillée, sculptée) et une massêkâh (idole ou objet en fonte). Jud., xvii, 3. La différence entre lesr deux mots pésél et massêkâh n’est pas facile à déterminer. Le Codex Vaticanus les traduit par fXu7tT15v et xuveutôv ; l’Alescandrinus omet le second mot ; Vulgate : Sculptile atque confatile. Keil, Josua, Richter und Ruth, 1863, p. 328, suppose que le premier mot désigne l’idole sculptée et le second, la base en fonte sur laquelle elle était placée. Fr. von Hummelauer, Comment, in Jud., 1888, p. 298, pense que pésél est une idole en bois qui fut recouverte de lamelles-d’argent ou d’or, et c’est cette enveloppe métallique qui est appelée massêkâh. D’au tres commentateurs croient que Michas fit fabrique ! * deux idoles, l’une sculptée, l’autre fondue. Voir Idole, ii, 17° et 21°, t. iii, col. 820, 821. Quoi qu’il en soit, on ne peut douter que Michas n’ait voulu faire exécuter une image de Jéhovah. Son nom même, dont le sens est : « Qui est comme Jéhovah ? » montre que sa famille adorait Jéhovah, mais de plus, le texte met formellement dans la bouche de la mère ces paroles ; « Que mon fils soit béni de Jéhovah ! » et : « Je consacre de ma main cet argent à Jéhovah pour mon fils, afin d’en faire un pésél et une massêhâk. » Jud-, xvii, 2-3. L’idolâtrie de Michas consista donc à adorer, non pas un faux dieu, mais le vrai Dieu lui-même sous la forme d’une image (idolum), contrairement à la loi mosaïque qui proscrivait toute représentation sensible. Exod., xx, 4 ; Deut., IV, 15-19. Michas peut sembler cependant avoir agi avec une certaine bonne foi, soit qu’il ignorât la prescription de Moïse, soit qu’il l’interprétât mal, car il dit, Jud., xvii, 13, après avoir attaché un lévite à son culte domestique : « Je sais maintenant que Jéhovah me fera du bien, puisque j’ai ce lévite pouf prêtre. » Ces paroles montrent qu’il connaissait la loi d’après laquelle la tribu de Lévi seule était consacrée au service de Jéhovah, mais aussi que, ou bien il la connaissait imparfaitement, puisqu’il confiait à un simple lévite les fonctions sacerdotales, qui étaient réservées exclusivement aux descendants d’Aaron, ou bien qu’il n’en observait que ce qui lui plaisait.. Il avait, en effet, violé cette prescription auparavant, en faisant prêtre un de ses fils. Il avait, de plu3, violé d’autres points de la loi, en établissant « une maison de Dieu » dans sa demeure, et en faisant un éphod (t. ii, col. 1865) et des theraphim, ’espèces d’idoles domestiques. Voir Idole, ii, 30°, t. iii, col. 822, et Theraphim. Il fut puni de toutes ces infidélités : pésél, massêkâh, éphod, theraphim, et le lévite lui-même lui furent enlevés de force par les Danites, qui établirent à Dan (Laïs) un sanctuaire desservi de la même façon. — Pour l’histoire du lévite, qui s’appelait Jonathan, voir Jonathan 1, t. iii, col. 1614, et pour l’épisode des Danites, voir Dan 3, t. ii, col. 1245-1246.

F. VlGOUROUX.

    1. MICHÉA##

MICHÉA (hébreu : Mikâyâh ; Septante : Mtxaictç ; omis dans plusieurs manuscrits grecs), prêtre qui vivait du temps de Néhémie. Il sonna de la trompette lors de la dédicace des murs de Jérusalem restaurés. II Esd., xii, 40 (hébreu, 41).

    1. MICHÉE##

MICHÉE (Vulgate : Michxas), nom, dans notre version latine, de deux prophètes et de deux personnages de la cour des rois de Juda. Voir Micha, col. 1059, pour la forme hébraïque de ce nom.

1. MICHÉE (hébreu : Mikdyehil(Mtkâh, IIPar., xviir, 14) ; Septante : Mtxataç), fils de Jemla, prophète de Samarie. Après trois ans de paix entre Acliab d’Israël et Bénadad de Damas, le roi d’Israël voulut reprendre sur le roi de Syrie Ramoth de Galaad et il proposa à Josaphat, roi de Juda, dont le fils Joram avait épousé la fille d’Achab, Athalie, de prendre part avec lui à cette campagne. Josaphat se montra disposé à le faire, mais lui demanda de consulter préalablement Jéhovah. Achab rassembla donc ses quatre cents prophètes, qui lui promirent la victoire. Le roi de Juda, se défiant de leur prédiction, requit un prophète de Jéhovah. Achab se décida alors à appeler Michée, quoiqu’il l’eût pris en haine, dit-il, parce qu’il lui annonçait toujours des maux et jamais du bien. III Reg., xxii, 1-8. Josèphe, qui ajoute au récit biblique plusieurs détails, dont les uns sont vraisemblables et les autres ne paraissent pas dignes de foi, dit que Michée était le prophète innommé qui avait prédit au fils d’un prophète qu’il serait dévoré par un lion, parce qu’il avait refusé de le frappera la tête selon l’ordre de Jéhovah. Un autre l’ayant frappé, 1063’MICHÉE - MICHÉE (LE LIVRE DE)

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il se présenta blessé à Achab, lui reprocha d’avoir laissé échapper Bénadad de ses mains, et lui annonça que Dieu le châtierait de cette faute. III Reg., xxii, 3543. De là, d’après Josèphe, Ant. jud., VIII, xiv, 5, la haine du roi pour Michée. Quoi qu’il en soit, le fils de Jemla annonça d’abord ironiquement la victoire à Achab, comme le faisaient Sédécias, fils de Chanaana, etles autres faux prophètes d’Israël, mais aussitôt après, il lui prédit le sort funeste qui lui était réservé à Ramoth Galaad. Sédécias ayant frappé à la joue Michée, qui lui avait reproché, ainsi qu’à ses collègues, de tromper le roi par des mensonges, apprit de lui comme son maître le châtiment qui allait fondre sur lui. Achab, irrité, fit jeter le prophète en prison pour le punir à son retour, mais il périt sur le champ de bataille, selon la prédiction divine. III Reg., xxii, 9-37 ; II Par., xviii, 3-34. Voir Achab 1, t. i, col. 123-124. — Il n’est plus question de Michée dans l’Écriture, mais, quoiqu’il n’apparaisse qu’en passant, son rôle n’en est pas moins très remarquable. Nous voyons par cet épisode, comme plus tard par l’histoire de Jérémie, et par plusieurs autres faits, que les faux prophètes étaient nombreux à cette époque et que les prophètes véritables avaient à lutter contre eux et souvent à en souffrir. Michée attribue leurs fausses prédictions à l’esprit de mensonge. Il dit à Achab : « J’ai vu Jéhovah assis sur son trône et toute l’armée du ciel se tenait devant lui, à sa droite et à sa gauche. Et Jéhovah dit : Qui trompera Aehab pour qu’il monte et tombe à Ramoth Galaad ? Et l’un répondit d’une manière et l’autre d’une autre. Alors un esprit vint se présenter devant Jéhovah et lui dit : Moi, je le tromperai. Et Jéhovah lui demanda : Comment ? Et il répondit : J’irai et je serai un esprit de mensonge dans la bouche de tous ses prophètes. Jéhovah lui dit : Tu le tromperas et tu l’emporteras ; va et fais ainsi. Maintenant donc Jéhovah a mis un esprit de mensonge dans la bouche de tous tes prophètes ; Jéhovah a prononcé du mal contre toi. » III Reg., xxii, 19-23. Dieu avait donc permis à l’esprit de mensonge de tromper Achab, afin qu’il trouvât, dans sa crédulité même, le châtiment de son impiété. Cette scène rappelle celle par laquelle débule le livre de Job, i, 6-12 ; ii, 1-6. Cf. aussi Zach., iii, 1-5 ; Ps. lxxxviii (lxxxix), 8-9 ; Is., vi, 1-4 ; Dan., x, 4-21. Ces grandes images préparaient celles que nous lisons dans plusieurs des prophètes postérieurs à Michée. Elles nous présentent Dieu sous des symboles dont nous ne trouvons pas de trace dans le Pentateuque. La distinction des esprits bons et mauvais s’y dessine de plus en plus manifestement. Nous y voyons enfin que, si l’homme se perd, c’est par sa faute, et parce qu’il résiste à Dieu, lequel permet le mal, mais nous donne les moyens de l’éviter. F. Yigouroux.

2. MICHÉE (hébreu : Mîkâyâhû ; Septante : Mc/afa ; ), un des chefs du peuple qui vivait du temps de Josaphat et que ce roi envoya dans les villes de Juda, la troisième année de son règne, avec plusieurs autres grands officiers et avec des prêtres et des lévites pour instruire ses sujets de la loi de Dieu. II Par., xvii, 7.

3. MICHÉE (hébreu : Mîkdyehù ; Septante : Mtxataç), fils de Gamarias et petit-fils de Saphan, contemporain de Jérémie. La cinquième année du règne de Joakim, 604 avantJ.-C, au neuvième mois (novembre-décembre), Baruch lut les prophéties de Jérémie dans le Temple, dans la chambre de Gamarias. Le fils de ce dernier était présent. Ayant entendu la lecture, il alla raconter au palais du roi, aux principaux de la cour, ce qui s’était passé. Ils firent appeler Baruch, et quand ils eurent pris connaissance des prophéties, ils recommandèrent à Baruch d’aller se cacher avec Jérémie ; ils remirent ensuite les oracles qui venaient de leur être communiqués à Élisama le scribeJoakim prévenu, se les fit lire par Élisama et, après en avoir entendu trojsôu quatre pages, il s’empara

du rouleau, le coupa avec un canif et le jeta dans un brasier plein de charbons ardents qui était devant lui, malgré Gamarias et quelques autres. Il voulut aussi faire saisir Baruch et Jérémie, mais on ne les trouva point. Jer., xxxvi, 9-26.

4. MICHÉE (hébreu : Mîkàh ou Mikayâh ; Septante : Miyat’oç M ou Mec^afa ; , Mixaiac ; Vulgate : Michxas), le sixième des petits prophètes. Son nom hébreu, qui est une abréviation de Mîkâyhû, Jud., xvil, 2, 4, signifie : « qui est comme Dieu ? » Saint Jérôme, In Mich., t. xxv, col. 115, s’appuyant sans doute sur le mot hébreu mâkak ou mùk, Lev., xxv, 25, 35 ; Ps. cvi, 43, l’interprète : « humilité. » Michée était originaire de Morasthî, Mich., i, 1 ; Jer., xxvi, 18, village situé au sud-est de Jérusalem, dans les environs de Geth. C’est pour cela que les Septante et la Vulgate l’appellent, Mich., i, 1, le « Morasthite » : tôv toO Ma>paa6eî ; Morasthites. Il est différent d’un autre prophète du même nom, fils de Jemla, qui vivait un siècle auparavant. III Reg., xxii, 8, 25, 26, 28. Voir Michée 1. Michée a dû vivre assez longtemps dans son pays natal’, car il en connaît bien les localités. Mich., i, 10-15. Il prophétisa à Jérusalem sous les règnes de Joatham, d’Achaz et d’Ézéchias, Mich, , i, 1, et fut par conséquent contemporain d’Isaïe. Le livre attribué à saint Épiphane, De vitis proph., 13, t. xliii, col. 407, a conservé les traditions suivantes concernant la vie de Michée. Il dit que ce prophète issu de la tribu d’Éphraïm, fit beaucoup de choses contre Achab, roi de Juda, et qu’il fut mis à mort par son fils Joram, parce qu’il l’avait repris de son impiété et de ses crimes. Après sa mort, il fut enseveli dans un tombeau près du monument d’Énacim. L’auteur du De vitis a confondu sans doute le petit prophète, qui ne fut contemporain ni d’Achab ni de Joram, avec Michée 1. La même erreur se retrouve dans le Chronicon paschale, Patr. gr., t. xcii, col. 365. D’après Sozomène, H. E., vii, 29, t. lxvii, col. 1505-1508, le corps de Michée fut trouvé à la fin du règne de l’empereur Théodosë à dix milles d’Éleuthéropolis en Palestine. V. Ermoni.

5. MICHÉE (li. livre de). — î. Division et analyse.

— Quelques auteurs, comme Driver, lnlrod., 7e édit., 1898, p. 326, divisent la prophétie de Michée en deux parties : i-v, vi-vii. Mais la division la plus naturelle est celle en trois parties, correspondant à trois discours, dont chacun commence par : « Écoutez, » i-ii, m-v, vi-vn. — 1° La première partie, i-ii, contient des menacés et annonce des châtiments : les péchés d’Israël seront punis, i, 2-5 ; Samarie sera dévastée, jt. 6-8 ; Juda sera ravagé et ses habitants seront transportés en captivité, ꝟ. 9-16 ; les vices des grands et des opulents sont la cause de tous ces maux, ii, 1-11 ; le prophète promet aux bons le retour de la captivité et des temps meilleurs, J. 12-13. — 2° Dans la deuxième partie, m-v, le prophète commence par s’élever contre les iniquités des princes et des magistrats, m, 1-4 ; il fait ensuite des menaces contre les faux prophètes qui trompent le peuple, ꝟ. 5-8 ; il annonce la ruine de Sion etdu Temple àcausede leurs iniquités, ꝟ. 9-12 ; il prédit un âge de prospérité, iv, i~5 ; les Hébreux déportés reviendront dans leur patrie, $. 6-10 ; ils seront puissants et subjugueront leurs ennemis, ; fr. 11-13 ; il annonce la naissance du Sauveur, v, 2-3 (cf. Matth., ii, 6 ; Joa., vii, 42) ; les Juifs seront forts contre leurs ennemis, jf.4-8 ; l’idolâtrie sera abolie, ꝟ. 9-13, et les peuples idolâtres seront châtiés, ꝟ. 14. — 3° Le troisième discours, vi-vii, est nn simple dialogue entre Dieu et son peuple ; annoncedela discussion, vi, 1-2 ; Dieu rappelle les bienfaits dont il a comblé Israël, il- 3-5 ; le prophète montre comment on peut apaiser la colère de Dieu, % 6-8 ; il prédit de terribles châtiments, si le peuple continue de vivre dans le dérèglement, ꝟ. 9-16 ; il implore néanmoins le pardon de Dieu pour les coupa

blés, vii, 1-14 ; Dieu se laisse toucher et promette retour d’Israël, et une gloire bien plus grande que celle des autres peuples, ꝟ. 15-17 ; enfin il termine en louant la bonté et 1^ miséricorde de Dieu, ꝟ. 18-20. — Sous le rapport des événements ou de l’objet des prophéties, Michée prédit : l’invasion de Salmanasar, i, 6-8 (cf. IV Reg., xvii, 4-6) ; celle de Sennachérib, i, 9-16 (cf. IV Reg., xviii, 13) ; la destruction de Jérusalem, iii, 12 ; vu, 13 ; la captivité de Babylone, iv, 10, et le retour, iv, 1-8 ; vii, 11 ; l’établissement du royaume messianique, iv, 8, et la gloire de Bethléhem, v, 2.

II. Authenticité. — L’authenticité de la prophétie de Michée en général n’a jamais été niée ni contestée ; deux preuves surtout l’établissent : 1° la citation qu’en fait Jérémie, xxvi, 18 ; 2° les rapports qui existent entre Michée et Isale, son contemporain. En voici quelques exemples : Mich., ii, 11, et Is., xxviii, 7 ; Mich., m r 5-7, et Is., xxtx, 9-12 ; Mich., iii, 12, et Is., xxxii, 13-14 ; Mich., iv, 1-5, et Is., ii, 2-5 ; Mich., v, 2-4, et Is., vii, 14 ; vin, 9-15.

III. Intégrité. — La critique, par une minutieuse dissection du texte, a plutôt dirigé ses attaques contre l’intégrité. Tous les chapitres ont été soumis à l’examen le plus rigoureux. Pour procéder avec ordre, nous diviserons cette matière en trois points.

I. chapitres i-ni. — La prophétie de la fin de la captivité de Juda, ii, 12-13, a été attribuée par Stade et Kuenen à un auteur contemporain de l’exil, et par Wellhausen à un auteur postexilien ; la raison, c’est que, d’après eux, ce passage ne s’enchaîne nullement à ii, 11.

— Mais, comme le fait remarquer Driver, Introd., p. 328, cette hypothèse ne repose sur aucun fondement solide. L’idée de dévastation ou d’exil se trouve déjà énoncée dans i, 16k ; ii, 4, 5, et reviendra dans iii, 12 ; de plus ii, 12-13 a son parallélisme dans IV, 6-7 ; enfin la préservation d’un petit « reste » avait déjà été annoncée bien avant par Amos, ix, 8-9 ; cf. aussi Ose., xi, 11. Ce qu’on peut dire c’est que ii, 12-13 n’est peut-être pas à sa place naturelle.

il. cBAPirnss iv-v. — Wellhausen regarde ces deux chapitres qui traitent de la gloire du Messie et du Messie lui-même, comme un appendice ajouté à iii, 12 par une main postérieure ; il pense cependant qu’ils contiennent des paroles de Michée, comme v, 10-14, et probablement iv, 9-10, excepté dans le ꝟ. 10, ce qu’on appelle « la clause babylonienne », c’est-à-dire les mots « et tu viendras jusqu’à Babylone ». Cheyne paraît être du même avis. — Le rejet en bloc de ces deux chapitres n’est pas possible, car la critique interne remarque que le style est le même que celui du reste de la prophétie.

— C’est pourquoi d’autres critiques ont été plus modérés : Stade, dans la Zeitschrift fiir die Alttest. Wissenschaft ^SSi, p. 165 ; 1883, p. 1 ; 1884, p. 291, regarde.’iv, 1-3, 11-13 ; v, 1-4, 7-15, comme des additions postexiliennes, destinées à atténuer, par une perspective d’espérance, le sombre tableau de iii, 12 ; ces passages auraient cependant été regardés comme l’œuvre de Michée lui-même, et dans cette persuasion, une main plus récente y aurait ajouté iv, 5-10 ; v, 5-6. Kuenen, a critiqué cette opinion, s’appuyant sur cette raison que la perspective historique n’est pas la même dans les deux chapitres ; il croit toutefois que certaines parties supposent encore l’existence de la monarchie ; conséquemment il n’assigne à un auteur exilien ou postexilien que iv, 6-8 (supposant l’exil de Babylone), 10 (la clause babylonienne), 11-13 (qui supposerait la période assyrienne et rappellerait la défaite des ennemis imaginaires d’Ézéchiel, xxviii-xxix, et de Zach., xii, 14), et peut-être l’allusion aux Astarthês (Vulgate : luci, « bois sacrés » ), v, 13-14. — W. R. Smith et Nowack, dans la Zeitschrift fur die Alttest. Wissenschaft, 1884, p. 285, regardent iv, 11-13, comme une addition postérieure. Driver, Introd., p. 330, tout en reconnaissant que les raisons de ces deux critiques

ne manquent pas d’une certaine force, remarque cependant qu’elles ne sont pas décisives ; car les prophètes, dans leurs descriptions de l’avenir, ne sont pas toujours cohérents avec eux-mêmes (cf. par exemple, Is., iii, 25-26 et xxix, 5-8). De plus iv, 11-13, peut ne pas être de la même époque que iii, 12 et iv, 9-10, et par conséquent refléter une nouvelle phase des conceptions de Michée. Toutefois, le même auteur regarde comme une glose marginale la « clause babylonienne », iv, 10, parce qu’elle serait incompatible avec la victoire promise aux Juifs, iv, 11-13, et le ton général de v, 2-6. Toutes ces objections ne reposent au fond, comme on le voit, que sur la négation à priori de l’inspiration prophétique.

i/l. chapitres vi-vn. — Ces deux chapitres, qui contiennent un dialogue entre Dieu et son peuple, ont été intégralement attribués par Ewald à un prophète écrivant au temps de Manassé. Ce critique s’appuie sur les différences qu’on remarqne entre i-v et vi-vii : 1° Dans i-v, Michée ne s’élève que contre les chefs de la nation, tandis que les chapitres vi-vii, englobent dans leurs récriminations le peuple tout entier ; 2° dans VI, 16, les mots : « Les ordres d’Amri et toute œuvre de la maison d’Achab, » se rapportent directement au temps de Manassé ; 3° les différences de style sont sensibles : vi-vii est dramatique dans ses peintures ; la prophétie se déroule entre interlocuteurs, ce quiest étranger aux prophètes ; le ton élégiaque se rapproche de Jérémie. Wellhausen, Einleitung de Bleek, 4e édit., p. 425, admet les conclusions d’Ewald, sauf pour vii, 7-20, qu’il regarde comme une addition postexilienne ; Giesebrecht, Beitràge, 1890, p. 216, qui se range à cette opinion, s’appuie sur deux raisons : 1° l’état décrit dans vu, 7-20, est tout à fait différent de celui qui est décrit dans vii, 1-6 ; 2° vii, 7-20 aune grande ressemblance avec Is., XL-LXvl. Mais, remarque Driver, Introd., p. 334. ces deux arguments ne sont pas démonstratifs : le contraste entre vii, 7-20, et vii, 1-6, est réel et suppose un Intervalle d’au moins un siècle entre les deux situations ; mais le prophète décrit deux situations différentes, et d’autre part Je temps n’est rien dans la représentation prophétique ; quant à la ressemblance avec Is., xl-lxvi, elle est aussi sensible, comme le montra le tableau suivant : Mich., vii, 8 b, 9 b, et Is., xlii, 16 ; lxii, V> ; Mich., vii, 9 a, et Is., xlii, 24, 25 ; lxiv, 5t-Mich. , vii, 10, et Is., xlix, 25, 26 ; li, 23 ; Mich., vii, 11, et Is., lviii, 12 ; Mich., vii, 12, et Is., xliii, 5-16 ; xux, 12 ; Mich., vii, 14, et Is., lxiii, 17 b ; lxiv, 9 ; lxv, 9, 10 (cf. Jer., l, 19) ; Mich., vii, 15, et Is., xli, 18 ; xliii, 1617 ; xlvhi, 21 ; Mich., vii, 16-17, et Is., xlv, 14 ; liv, 15 ; Mich., vii, 18-20, et Is., xliii, 25 ; xliv, 22 ; liv, 8-9 ; lv, 7 b ; toutefois Mich., vii, 7-20, ne contient aucune de ces claires allusions à l’exil, comme on en trouve dans Is., xl-lxvi. Il faut ajouter que la mention de l’Assyrie plutôt que de Babylone dans Mich., vii, 12, et l’emploi, vu, 15, du mot -.Misrâîm, pour désigner l’Egypte, qu’on ne trouve que dans Is., xix, 6 ; xxxvii, 2 (cf. IV Reg., xix, 24), sont en faveur de l’authenticité des chapitres vi-vm.

IV. CaNonicité. — La canonicité de la prophétie de Michée n’a jamais été contestée ; elle a toujours fait partie du Canon juif ou chrétien. Voir Canon, t. ii, col. 138-167. Les Pères ont cité Michée comme Écriture canonique. Cf. Kilber, Analysis biblica, édit. Tailhan, in-8°, Paris, 1856, t. i, p. 499^500.

V. Texte, style et langue. — Le texte original est l’hébreu. La prophétie de Michée se trouve dans toutes les versions. Elle se distingue par l’élévation des pensées et la beauté des expressions. Ce qui caractérise le style de Michée, ce sont des jeux de mots, ce qui est d’ailleurs commun à tous les écrivains orientaux, Mich., i, 10-15 ; vi, 11 ; des images et des comparaisons pittoresques, Mich., i, 16 ; H, 12-13 ; iv, 9-10 ; des transitions brusques. Mich., iii, 12-iv, l ; iv, 9-11 ; vii, ll-12. La prophétie, iv, 1-3,

se compose, d’après Bickell, Carmina Vet. Test, metrice, p. 211, de 18 vers heptasyllabiques. Michée a beaucoup de rapports avec Isaïe. Cf. Trochon, Les petits prophètes, in-8°, Paris, 1883, p. 250. On remarque aussi des différences, qui tiennent à l’origine et au caractère des deux prophètes : Isaïe écrit comme un homme appartenante la société cultivée ; Michée au contraire parle comme un homme du peuple ; il se montre sympathique aux paysans dans leurs souffrances ; il attaque plus directement qu’Isaïe les injustices dont ils étaient victimes de la part de leurs chefs. Mich., iii, 3-4. Isaïe parait plus préoccupé des mouvements politiques de son temps, et Michée plus préoccupé d’idées religieuses et morales. Cf. Driver, Introd., p. 326.

VI. Prophétie messianique. — Mich., v, 2-5, est une prophétie littéralement messianique ; voir la traduction d’après l’hébreu dans Vigouroux, Manuel bibl., t. ii, p. 817. 1° Le Nouveau Testament l’a entendue dans ce sens. Cf. Matth., ii, 6 ; Joa., vii, 42. 2° La tradition en a donné la même interprétation. 3° Les caractères décrits dans la prophétie ne peuvent convenir qu’au Messie’Cf. Knabenbauer, In Proph. minores, in-8°, Paris, 1886, 1. 1, p. 440-445. — La citation de la prophétie, dans saint Matthieu, ir, 6, diffère du texte original : Et tu Bethlehem Ephrata, parvulus es in millibus Juda, dit Michée, v, 2.

— Et tu Bethlehem terra Juda, nequaquam minima es in principibus Juda, dit Matth., ii, 6. On a donné plusieurs explications de cette variante textuelle. Les uns ont regardé comme possible que saint Matthieu ait suivi une explication répandue parmi les Juifs de son temps, suivant laquelle on ne voulait pas, pour l’honneur de la maison de David, reconnaître le peu d’importance de Bethlehem ; cette opinion n’est pas probable, car elle donne au passage, contrairement au texte, une tournure interrogative : « Et toi Bethlehem, terre de Juda, serais-tu trop petite ? » D’autres pensent que Michée et saint Matthieu se sont placés à deux points de vue différents : le premier parlerait de la grandeur matérielle de Bethlehem, et le second de sa grandeur morale. Saint Jérôme, In Mich., ii, 5, t. xxv, col. 1197, croit que saint Matthieu a reproduit, en historien fidèle, les paroles de Michée, telles que les scribes les avaient prononcées. L’opinion la plus probable, c’est que saint Matthieu s’est contenté de rapporter le sens de la prophétie sans s’attacher aux termes mêmes. Quoi qu’il en soit, la signification messianique de la prophétie n’est nullement altérée.

"VII. Bibliographie. — La plupart des commentateurs sont ceux qui ont commenté les douze petits prophètes en général ; on peut en voir la liste dans le Man. bibl., t. ii, p. 783, note 1 ; Knabenbauer, In proph. min., t. i, p. 5-9. Comme ouvrages spéciaux, on peut mentionner : le commentaire de Gaspar Grisar, Salamanque, 1570 ; L. Reinke, Der Prophet Micha, in-8°, Giessen, 1874 ;

  • C. P. Caspari, Veber Micha den Morasthiten und seine

prophetische Schrift, in-8°, Christiania, 1851-1852 ; "Roorda, Comment, in vaticinia Miches, Leyde, 1869 ;

  • E. C. Arnaud, Étude sur le prophète Michée, in-8°,

Genève, 1882 ; "Ryssel, Untersuchûngen ùber die Teœtgestalt und die Echtheit des Bûches Micha, in-8°, Leipzig, 1887 ; ’T. K. Cheyne, dans la Cambridge Bible for Schools, 1882, 1895 ; *J. Taylor, Tlie Massoretic Text and the ancient versions of Micha, in-8°, 1891 ; * H. J. Elhorst, De prophétie van Micha, in-8°, Arnheim, 1891 ; * W. H. Kosters, dans la Theologisch Tijdschrift de Leyde, 1893, p. 249 ; *J. T. Beck, Erklârung der Propheten Micha und Joël, in-16, Gutersloh, 1898.

V. Ermoni.

    1. MICHEL##

MICHEL (hébreu : Mikd’êl ; Septante : Mix<x^ ; Vulgate : Michæl), l’un des trois anges nommés dans la Bible (fig. 281). Voir Michæl, col. 1060. Trois passages de la Sainte Écriture font mention spéciale de l’ange Michel.

I. La vision de Daniel. — La troisième année de

Cyrus, le prophète Daniel eut une vision au cours de laquelle un personnage, envoyé vers lui, lui annonça la prochaine délivrance des Israélites. Mais, ajouta-t-il, « le chef du royaume de Perse m’a résisté vingt et un jours, et Michel, un des premiers chefs, est venu à mon secours, et je suis demeuré là auprès des rois de Perse. » Dan., x, 13. Le même personnage dit encore au prophète : « Maintenant je vais retourner combattre le chef de la Perse, et, au moment où je m’en irai, voici le chef de Javan qui viendra…, et il n’y en a pas un qui se tienne avec moi contre ceux-là, sinon Michel, votre chef. » Dan., x, 20, 21. Parlant ensuite de la délivrance finale d’Israël, Daniel dit : « En ce temps-là se lèvera Michel,

281. — Saint Michel. D’après le tableau de Raphaël peint pour François I". D’après une photographie.

le grand chef, qui tient pour les enfants de ton peuple. » Dan., xii, 1.

1° Dans ces différents textes, un chef, Sar, apyrmv, est attribué au royaume de Perse, à Javan, c’est-à-dire aux Grecs, et à Israël. Ces chefs ne sont pas des hommes, puisque, d’une part, le chef du royaume de Perse est distinct des rois de Perse, et que, d’autre part, Israël n’a jamais eu pour chef temporel un homme du nom de Michel. Ceux qui veulent que le « chef du royaume de Perse » soit Cyrus, oublient que ce prince n’est pas un êar, mais un roi, méléh, titre que le prophète ne manque pas de lui donner quand il parle de lui. Dan., i, 21 ; x, 1. Il n’y a pas à s’arrêter non plus à l’idée de quelques interprètes qui, dans le prince des Perses, ont voulu voir un démon qui s’efforçait de nuire à ce royaume. Cf. Cassien, Coll. patrum, viii, 13, t. xlix, col. 738 ; De la Haye, Bibl. maxim. in Dan., x, dans le Curs. compl. Scripturx Sacras de Migne, Paris, 1841, t. xx, col. 318. Les Pères sont à peu près unanimes à voir dans ces princes des Perses, des Grecs et des Israélites, des anges chargés de veiller sur ces peuples. Cf. S. Clément, 1 Cor., xxxix, 1, t. i, col. 269 ; Clément d’Alexandrie, Stront., vi, 17 ;-vu, 2, t. ix, col. 389, 413 ; Origène, In iien., ix, 3 ; In Exod., viii, 12, t. xii, 213, 352 ; Cont. Gels., v, 29, t. xi, col. 1224 ; Eusèbe, Dem. evang., iv, - 10, t. xxii, col. 272 ; S. Basile, I »

1069

MICHEL

1070

Js., x, 240, t. xxx, col. 540 ; Adv. Eunom, , iii, 1, t. xxix, col. 656 ; S. Grégoire de Nazianze, Poem. dogm., vii, 13-26, t. xxxvji, col. 410 ; S. Jean Chrysostome, In Colos. , iii, 3, t. lxii, col. 322 : S. Cyrille d’Alexandrie, Cont. Jul., iv, t. lxxvi, col. 680 ; Théodoret, In Dan., x, 13, t. lxxxi, col. 1496 ; S. Hilaire, In Ps. cxxjx, 7, t. ix, col. 722 ; S. Jérôme, In Dan., x, t. xxy, col. 556 ; S. Augustin, In Ps, Lxxxrm, 3, t. xxxvii, col. 1121, etc. Cf. Petau, De angelis, II, viii, 10-15. La plupart d’entre eux s’appuient sur un texte du Deutéronome, xxxii, 8, où Moïse dit que « Dieu fixa les limites des peuples d’après le nombre des enfants d’Israël », ce que les Septante ont traduit : « d’après le nombre des anges, » ayant lu sans doute « fils de Dieu » au lieu de « fils d’Israël ». A ce texte ainsi compris en grec, plusieurs Pères, saint Basile, Théodoret, etc., joignent le texte de Daniel pour établir l’existence d’anges préposés à la surveillance et à la garde des peuples divers. Cf. Schabbath, 156.

2° Michel est appelé successivement « un des premiers chefs », puis « votre chef », par rapport au peuple auquel appartient Daniel, et enfin « le grand chef », au point de vue de la protection d’Israël. Il suit de là qu’il occupe un rang élevé dans la hiérarchie des anges et qu’il a été spécialement chargé par Dieu de prendre soin du peuple israélite. Aux yeux des Juifs cependant, le titre de « chef » donné à l’ange Michel n’empêchait pas que Dieu ne fût le chef direct et le protecteur immédiat d’Israël. Cf. Eccli., xvii, 14, 15 ; Targ. Jerus., sur Deut., xxxii ; Midrasch rabba, sur Deut., c. ii, etc. L’ange Michel est reconnu comme protecteur du peuple juif par Targ., sur Cant., viii, 9.

3° La vision de Daniel montre que les anges préposés à la garde des nations exercent activement leur ministère. L’ange de la Perse s’oppose pendant vingt et un jours à un dessein dont l’exécution paraît désirable, qui est cependant combattu par d’autres anges, et que l’ange Michel est seul à défendre. Ce dessein ne peut être que la délivrance du peuple israélite, annoncée dans cette vision du prophète. L’ange des Perses, puis celui des Grecs s’opposent à cette délivrance immédiate, parce que, croit saint Grégoire, Moral., XVII, xii, 17, t. lxxvi, col. 20, les Israélites n’ont pas encore suffisamment expié leurs fautes envers Dieu. Il y a lieu de penser que le châtiment d’Israël ne préoccupait pas exclusivement les deux anges des Perses et des Grecs, mais que ceux-ci voulaient prolonger le séjour des captifs au milieu de leurs vainqueurs, surtout à cause des avantages d’ordre moral qui en résultaient pour ces derniers. Cette discussion, qui dure de longs jours entre des anges chargés de peuples dont les intérêts sont différents, suppose que, pour ces anges, la volonté de Dieu reste mystérieuse dans le cas qui les intéresse. Chacun exerce alors son influence dans le sens qui lui paraît le plus conforme au bien. Sitôt la volonté de Dieu connue, tous s’inclinent, et c’est ainsi que l’ange Michel obtient la libération de son peuple. Cf. S. Grégoire, ibid. ; S. Thomas, Sum. theol., I", q. cxiii, a. 8 ; Petau, De mundi opific, IV, xiii, 16.

4° Le prophète Daniel est le premier à faire connaître les noms des deux anges Gabriel et Michel, et à attribuer à des anges la garde des nations. Ce dernier point n’est cependant pas sans analogie avec ce que la Sainte Ecriture raconte d’un bout à l’autre sur le rôle des^ariges vis-à-vis des hommes. Gen., xvi, 7 ; Num., xXn, 22 ; Jud., Il, 1 ; II Reg., xxiv, 16, etc. On a cherchée établir une relation de similitude entre les anges, gardiens des nations, et les génies intermédiaires admis par les Perses. Dans le système religieux de Zoroaslre, on trouve d’abord, au-dessous d’Ormuzd, six Ameshaspentas, génies supérieurs ou énergies qui président aux règnes et aux forces delà nature. Puis viennent des milliers de Yazatas, chargés de veiller dans le détail au jeu des organes du monde visible. Avec les derniers d’entre eux

se confondent presque les Fravashis ou nourriciers, sortes de génies féminins qui s’unissent à chaque homme pour le nourrir, combattre les démons et procurer la pratique et l’avènement du bien. Cf. J. Darmesteter, Lé Zend-Avesta, Paris, 1892-1893, t.i, p. 5-19, 23-25 ; t. ii, p. 296-322, 500-505. Alors même qu’il faudrait admettre un certain développement de Pangélologie hébraïque au contactdes doctrines perses, voirt.l, col. 590, une influence réelle serait ici difficile à prouver. Les Fravashis pourraient tout au plus être assimilés aux anges gardiens, avec cette différence essentielle que ces derniers sont de purs esprits qui ne s’unissent pas aux hommes. Quant aux Ameshaspentas et aux Yazatas, leur nature est assez mal définie et leur pouvoir ne s’étend que sur le monde matériel, tandis que les anges chargés des nations exercent leur tutelle sur des êtres raisonnables. Du reste, il est question des anges dans la Bible bien avant le contact avec les Perses, et, ni par leurs noms sémitiques ni par la nature de leurs fonctions, les anges bibliques ne dérivent des génies zoroastriens. Cf. de Broglie, Cours de l’hist. des cultes non chrétiens, Paris, 1881, p. 41 ; Lagrange, La religion des Perses, Paris, 1904, p. 50-51.

5° L’ange Michel est ordinairement compté parmi les sept anges qui se tiennent devant le Seigneur et dont il est plusieurs fois question. Tob., xii, 15 ; Apoc, i, 4 ; v, 6 ; viii, 2. Ces sept anges n’ont rien de commun avec les sept grands officiers des rois de Perse. Esth., i, 10 ; I Esd., vii, 14. L’histoire deTobie à pour théâtre l’Assyrie et non la Perse. Quant à saint Jean, il serait plus qu’arbitraire de rattacher ses inspirations à des usages perses. On sait aussi que les six Ameshaspentas sont parfois portés au nombre de sept par l’addition soit d’Ormuzd, soit d’un autre génie appelé Sraoscha. Cf. Darmesteter, Le Zend-Avesta, t. i, p. 357-372. Avec ces génies, les sept anges n’ont guère de commun que leur nombre ; or, le nombre sept était un des nombres sacrés et symboliques des Hébreux dès l’origine. Gen., XXI, 30 ; Exod., xii, 15 ; xx, 10 ; Lev., xxiii, 18, etc. Lés rapports sont donc trop superficiels entre les idées zoroastriennes et les données bibliques sur les anges, pour que l’on puisse admettre logiquement une influence directe des premières sur les secondes. Du reste, sur une question fondamentale, l’Écriture donne une solution très antérieure et très supérieure à celle de Zoroastre. Pour ce dernier, Ormuzd et Ahriman sont deux personnifications du bien et du mal, indépendantes l’une de l’autre et limitant mutuellement leur puissance. Dans la Bible, Jéhovah est le créateur tout-puissant, et Satan, le prince du mal, n’est qu’un être créé et subordonné. Job, 1, 12 ; il, 6 ; cf. Gen., iii, 14, 15.

II. L’Épître de saint Jude. — Parlant du démon, à l’occasion de ceux qui vivent dans l’immoralité, saint Jude, 9, s’exprime ainsi : « L’archange Michel lui-même, lorsqu’il contestait avec le diable et lui disputait le corps de Moïse, n’osa pas porter contre lui une sentence d’exécration, mais il se contenta de dire : Que le Seigneur te corrige ! » La Vulgate emploie ici le verbe imperet : « Que le Seigneur te commande ! » Le grec a le verbe ÊTceTi|13v, « blâmer » et « infliger » la peine due à un forfait. L’apostrophe est empruntée à Zacharie, iii, 2, : îg l ar Yehôvdh bekâ, « que Jéhovah te reproche, » te contraigne ; Septante : èjctTi|J.T|<Tai xiipto ; èv <rot ; Vulgate : increpet Dominus in te.

1° Michel est qualifié d’archange, àpxâxyi^at, nom qui correspond aux titres de « l’un des premiers chefs » ou de « grand chef » qui lui sont donnés par Daniel. Voir Archange, t. i, col. 911. Dans la classification théo- «  logique, les archanges n’occupent que le huitième rang de la hiérarchie angélique, et Michel appartient à cet ordre. Cf. Pseudo-Denys, De cœlest. hierarch., IX, 2, t. iii, coi. 259. Les titres qui lui sont attribués n’auraient donc qu’une valeur relative. Néanmoins, sons le nom

d’anges, la Sainte Écriture comprend souvent tous les esprits célestes, sans distinction d’ordres. Cf. Heb., i, 4-7, 13, 14, etc. Un archange peut dès lors être un des principaux anges, c’est-à-dire un des chefs de la hiérarchie céleste. Quant à Michel en particulier, plusieurs croient qu’il prit la place de Lucifer, après l’avoir terrassé ; or, on regarde comme probable que Lucifer était le premier de tous les anges. Cf. S. Thomas, Sum. theol., l a, q. lxiii, a. 7. En réalité, on manque de renseignements autorisés pour déterminer exactement la dignité de Michel et des autres archanges nommés dans la Bible. « En tout ceci, rien de certain, dit Petau, De angelis, II, vi, 16 ; tout ce qu’on en dit procède de conjecture et d’opinion, peut par conséquent s’étendre à l’infini et ne doit être utilisé qu’avec grande réserve par le théologien, obligé à traiter solidement des choses divines. »

2° L’archange Michel conteste avecle diable et lui dispute le corps de Moïse. Cette contestation se conçoit entre les deux esprits, dont l’un défend le plan divin tandis que l’autre le combat. Apoc., xii, 7-9. Ici, la di ?pute a pour sujet le corps de Moïse ; mais saint Jude ne donne aucune explication sur le motif de cette dispute. Le Deutéronome, xxxiv, 5, 6, raconte que Moïse mourut dans le pays de Moab, sur le mont Nébo, que Josué l’inhuma dans la vallée de Beth-Phogor et que personne ne sut l’emplacement exact de cette sépulture. Dans cette vallée était honorée une divinité moabile, appelée Béelphégor. Voir Béelphégor, t. i, col. 1543, et Bethphogor, 1. 1, col. 1710. On a fait diverses suppositions pour expliquer la contestation : Satan aurait voulu que l’honneur de la sépulture fût refusé à Moïse parce qu’il avait tué un Égyptien, Exod., ii, 12 ; ou bien il aurait désiré que son sépulcre fût connu et visible sur le mont Nébo, afin d’y devenir pour les Israélites un objet d’idolâtrie ; ou encore il se serait opposé à l’inhumation dans la vallée de Bethphogor, de peur que le voisinage des restes du propbète ne nuisit au culte de l’idole. Cf. Fromond, In Epist. Judée, dans le Sacrœ Scripturss curs. compl. de Migne, Paris, 1857, t. xxv, col. 988 ; Wouters, In Epist. cathol. dilucidat., q. yji, ibid., col. 1036-1037. On ne peut rien affirmer à ce sujet. Voir Moïse.

3° Plusieurs Pères ont pensé que saint Jude avait emprunté à un apocryphe, l’Assomption de Moïse, ce qu’il dit ici à propos de la discussion entre Michel et Satan. Voir Apocalypses apocryphes, t. i, col. 759 ; Clément d’Alexandrie, Enarr. in epist. Judce, t. ix, col. 733 ; Origène, De princip., iii, 2, t. xi, col. 303 ; Didyme d’Alexandrie, Enarr. in epist. Judse, t. xxxix, col. 1815 ; Photius, Amphiloch. qux&t., 151 al. 183, t. ci, col. 813 ; Protogène de Sardes, Cité par Gélase de Cyzique, Comment. actor. concil. Nicgen., ii, 20, t. lxxxv, col.’1234, et dans Mansi, Sacr. concil. collect., t. ii, p. 860. Sain ! Jérôme, In Tit., i, 12, t. xxvi, col. 608, admet aussi l’emprunt, mais observe que l’utilisation par saint Jude d’un passage de l’apocryphe n’entraîne nullement l’approbation du livre tout entier. Le seul texte que l’on possède de VAssomption de Moïse est une ancienne traduction latine, retrouvée et publiée par Ceriani, Monum. sacr. et prof an., 1. 1, fasc. I, Milan, 1861, p. 5564, mais dont la fin manque. C’est dans cette fin que devait être racontée la mort de Moïse et qu’il était vraisemblablement question du combat auquel saint Jude fait allusion. L’absence de ce dernier morceau ne permet pas de savoir en quels termes l’apocryphe parlait de l’événement, ni s’il donnait plus de détails que saint Jude. Cf. Schùrer, Geschichte des jûdischen Volkes im Zeit I. C, Leipzig, t. iii, 1898, p. 217. Cette discussion entre deux esprits n’avait pu être connue que par une révélation faite peut-être à Josué ; le souvenir en avait été conservé par tradition orale et faisait partie de la Hagada. Voir Midrasch, ii, 2°, col. 1709. C’est là que J’auteur de l’apocryphe avait pu la recueillir peu après la

mort d’Hérode le Grand. Il n’importe donc guère de préciser à quelle source saint Jude a puisé, que ce soit directement à la Hagada, on au livre qui s’était inspiré de cette dernière,

. 4° L’archange, bien qu’ayant en face de lui le chef des anges révoltés et condamnés, n’osa pas porter de sentence contre lui. Il eut encore égard à l’ancienne dignité de Lucifer et préféra que l’ordre vînt de Dieu en personne. Saint Jude établit un contraste entre cette réserve de l’archange et l’effronterie des hérétiques. « Que le Seigneur te corrige ! » Ces paroles, qu’elles aient été insérées ou non dans l’Assomption de Moïse, se retrouvent dans un passage de Zacharie, iii, 2, où c’est Jéhovah lui-même qui dit à Satan, adversaire du grandprêtre Jésus : « Que Jéhovah te réprime ! » Comme il paraît assez anormal que Jéhovah lui-même parle ainsi et que, dans le verset précédent, c’est l’ange de Jéhovah qui est indiqué, il est à croire que, comme dans d’autres passages bibliques, Jéhovah est nommé pour l’ange qui parle en son nom. Cf. Rosenmùller, Proph. minor., Leipzig, 1816, t. iv, p. 153. Voir Ange, t. i, col. 586. L’archange Michel aurait donc prononcé lepremier une parole qui a été ensuite répétée par un autre ange de Jéhovah.

III. Le combat de l’Apocalypse. —

Saint Jean, dans une de ses visions, décrit ainsi ce qui se passa au ciel : « Il y eut un combat dans le ciel ; Michel et ses anges combattaient contre le dragon ; le dragon et ses anges combattaient, mais ils ne purent vaincre et leur place même ne se trouva plus dans le ciel. » Apoc, xii, 7-8. Saint Jean identifie ensuite le dragon avec l’ancien serpent, le diable et Satan. Ce combat est décrit dans une vision qui montre la femme enfantant, puis poursuivie par le dragon chassé du ciel et protégée contre ses attaques.

1° D’après le contexte, ce combat n’est nullement celui qui a eu pour cause, à l’origine, la révolte de Lucifer el de ses anges. La femme qui enfante est incontestablement et en premier lieu l’Église, dont Satan cherche à faire périr les enfants. Le combat se livre dans le ciel, il est vrai, mais seulement dans un ciel où peut pénétrer Satan, que les visions prophétiques nous montrent admis en présence de Dieu. Job, i, 6 ; ii, 1 ; Zach., iii, 1. D’ailleurs saint Jean suppose formellement comme antérieurs au combat, et la chute de Satan, qui a entraîné avec lui le tiers des étoiles, cf. S. Thomas, Sum. theol., I a, q. lxiii, a. 8, et la tentation du paradis terrestre, puisque le dragon n’est autre que l’ancien serpent. Apoc, xii, 4, 9. En fait, les Pères n’invoquent pas ce passage de l’Apocalypse pour l’appliquer à la chute primordiale de Satan et de ses anges. Cf. Petau, De angelis, III, iii, 1-18. Seul, André de Césarée, In Apoc. comm., t. evi, col. 215, se sert de Apoc, xii, 9, 10, mais seulement pour caractériser le rôle ordinaire de Satan. Quel que soit le sens qu’on donne à l’Apocalypse, et qu’on entende le chapitre xii des commencements de l’Église ou de la fin des temps, cf. S. Grégoire le Grand, Hom. in Evang., xxxix, 9, t. lxxvi, col. 1251, il est certain que le combat dont il est parlé dans ce chapitre ne se rapporte pas à l’épreuve des anges. C’est donc dans un sens toutaccommodatice que l’on joue sur le nom de Michel, pour montrer l’archange terrassant Lucifer révolté, au cri de : « Qui est comme Dieu ? » Ce sens est accepté par Bossuet, Élév. sur les mystères, 4e sem., 3 « élév., Bar-le-Duc, 1870, t. viii, p. 416, qui, pourtant, dans son Explication de l’Apocalypse, xii, 7, t. ii, p. 229, entend par ce combat celui que Satan livre contre l’Église.

2° Un vieux mythe babylonien met aux prises Mardouk (Mérodach), le champion des grands dieux, et Tiâmat, personnification du chaos, qui s’était révoltée contre la souveraineté des dieux. Mardouk l’attaque, l’enveloppe d’un filet, et, pendant qu’elle ouvre la gueule pour avaler la bourrasque poussée contre elle, lni enfonce sa lance, lui déchire la poitrine et lui ôte la vie. Cf. Sayce, The Assyrian Story oftlie Création, dans les Records oftlie

Past, II’sér., t. i, p. 137-140 ; Jensen, Die Kosmologie der Babylonier, Strasbourg, 1890, p. 280-287. Un autre mythe non cosmogonique raconte la lutte de Bel contre le dragon. Bel n’est probablement pas autre que Bel-Mardouk, mais le dragon n’est pas Tiâmat, c’est un monstre marin qui cherche à mettre à mal la * terre et ses habitants. Bel-Mardouk le terrasse et devient le maître du pays. Cf. Jensen, Mylhen und Epen, p. 4446, dans la Keilinschriftliche Bibliothek de Schrader, t. vi, Berlin, 1900. Ce mythe, très populaire en Chaldée, y a été souvent représenté. Dans une de ces représentations (voir fig. 263, col. 999), Bel a le diadème sur la tête et une double paire d’ailes aux épaules ; de chaque main il brandit la foudre trident contre le monstre. Ce dernier est une bête mâle, qui réunit les caractères du lion, du griffon, de l’oiseau et de l’habitant des eaux. Un mythe analogue se retrouve jusque dans la légende chrétienne, d’après laquelle des dragons sont terrassés par sainte Marthe, saint Front, saint Georges, etc. Aussi bien, rien n’était-il plus naturel que de prêter la figure d’un animal extraordinaire et terrible au mal physique ou moral dont on était délivré par un personnage puissant. Cf. Lagrange, Etudes sur les religions sémitiques, Paris, 1905, p. 369-383. Mais ces mythes ont-ils exercé une influence sur les écrivains sacrés ? Quelques auteurs le prétendent. La trace en serait visible dans les passages qui décrivent la lutte de Jéhovah contre Rahab, Job, ix, 13 ; xxvi, 12, 13, ou la puissance avec laquelle il contient la violence de la mer. Job, xxxviii, 8-11 ; Is., ii, 9, 10 ; Ps. lxxxix, 10-13, etc. Us concluent de là que le combat de Michel contre le dragon, dans l’Apocalypse, ne serait qu’une réminiscence de la lutte de Jéhovah contre Rahab, et par conséquent une transposition facilement reconnaissable des mythes de Mardouk victorieux de Tiâmat, ou de Bel-Mardouk victorieux du dragon. Cf. H. Gunkel, Schôpfung und Chaos in, Vrzeitund Endzeit, Leipzig, 1895, p. 171-398 ; Bousset, Die Offenbarung Johannis, Gœttingue, 1896, p. 395, 398 ; Loisy, Les mythes babyloniens, Paris, 1901, p. 31-40. Buhl, Gesenius’Handwôrterb., Leipzig, 1899, p. 763, rapproche aussi Rahab de la Tiâmat babylonienne. Il y a en effet analogie entre certaines conceptions cosmogoniques des Hébreux et celles des Chaldéens. La communauté d’origine explique ces ressemblances de forme, sans qu’on soit toujours autorisé à étendre au fond même des idées l’analogie des expressions. De ce que des textes poétiques empruntent des images chaldéennes pour parler de la puissance créatrice de Jéhovah, Une suit pas logiquement que les écrivains sacrés se soient représenté Dieu sous la figure de Mardouk. Pour beaucoup de traditions d’ailleurs, avant de décider si les Hébreux sont tributaires des Chaldéens, il faudrait écarter par des arguments péremptoires l’hypothèse si naturelle de traditions primitives, plus ou moins modifiées par le génie inventif des poètes chaldéens, mais plus fidèlement conservées par les ancêtres directs d’Abraham, et, en tous cas, ramenées à leur pureté primitive par les auteurs inspirés. Cf. Loisy, Les mythes babyloniens, p. 101-102. Quant à l’assimilation établie entre Michel et Mardouk, le dragon satanique et Tiâmat, elle est plus contestable. On se figure difficilement que saint Jean ait été si bien au courant des mythes babyloniens et les ait transposés pour le besoin de son exposition doctrinale. Sans doute, il y a lutte entre Michel et le dragon comme entre Mardouk et Tiâmat. Mais faut-il faire dériver de l’épisode babylonien toutes les histoires bibliques qui opposent deux personnages l’un à l’autre ? Les héros babyloniens représentent des forces de la nature, les personnages de l’Apocalypse sont de purs esprits ; les premiers combattent inconsciemment pour l’organisation du monde physique, les seconds luttent intelligemment pour ou contre l’établissement du royaume spirituel ; Mardouk et Tiâmat sont des êtres

flottants, mal définis, dont les exploits sont conçus d’une manière qui défie le bon sens ; Michel et Satan ont une histoire dont la Bible fournit les éléments, avec parcimonie, sans doute, mais assez nettement ; leur rôle se développe logiquement, depuis la tentation de PÉden jusqu’aux derniers événements prédits ou décrits par l’Apocalypse. Saint Jean n’avait pas à emprunter les éléments descriptifs de sa vision à des traditions étrangères ; si, sous ce rapport, il voulait suivre des modèles, il en trouvait parmi les anciens prophètes d’Israël, qu’il a d’ailleurs imités si souvent. Mais à supposer même qu’on pût démontrer une certaine dépendance du récit de saint Jean par rapport au mythe babylonien, comme on a pu le faire pour la vision des chérubins d’Ézéchiel, voir Chérubin, t. ii, col. 664, n’en resterait pas moins à constater l’originalité de sa doctrine et l’harmonie parfaite de sa vision avec toutes les données prophétiques et apocalyptiques de la Bible. Cf. Jacq. Simon (Loisy), Chronique biblique, dans la Revue d’hist. et de liltér. relig., Paris, 1897, p. 467.

3° Dans ce passage de l’Apocalypse, Michel apparaît clairement comme le protecteur de l’Église, à l’égard de laquelle il remplit la même fonction qu’autrefois à l’égard d’Israël. Au début de l’histoire des Israélites, Satan avait cherché à nuire à l’ancien peuple en intervenant à propos du corps de Moïse et Michel l’avait combattu. Dès le commencement de l’Église, Satan s’efforce encore de faire périr ses enfants et Michel le terrasse. L’archange est donc à bon droit considéré comme protecteur de l’Église. Daniel, xii, 1, avait déjà annoncé ce rôle, en présentant Michel comme défenseur du peuple élu, à l’époque messianique et à la fin des temps. L’Église lui reconnaît officiellement ce titre. Elle l’appelle le « préposé du paradis », II Noct., 2 ant., xxix Sept. ; le « prince de la milice des anges », il Noct., resp. 1 ; « prince très glorieux, » u Vesp., ad Magnif., et, dans les litanies des saints, elle lui assigne la première place après la Sainte Vierge. Elle implore son secours : « Archange Michel, viens au secours du peuple de Dieu, » nNoct., ant. 1, xxix septemb. ; « c’est lui qui se tient debout pour vos fils, >' resp. 3. À cause de sa lutte victorieuse contre l’ennemi du salut des âmes, elle le considère surtout comme le défenseur des âmes que vont passer dans l’autre vie. C’est lui « à qui Dieu a confié les âmes des saints, pour qu’il les conduise au joyeux paradis », // Noct., resp. 2 ; il est le « messager de Dieu pour les âmes justes ». /// Noct., ant.l. « Archange Michel, je t’ai établi prince sur toutes les âmes à recevoir. » Laud., ant. 3. À l’alléluia de la messe de sa fête, comme dans la prière qui suit la messe, elle lui dit : « Saint archange Michel, défends-nous dans le combat, pour que nous ne périssions pas dans le terrible jugement. » À l’olfertoire de la messe des Morts, elle demande que « le porte-étendard saint Michel les introduise dans la sainte lumière », et, dans les prières pour la recommandation de l’âme des agonisants, elle supplie « que saint Michel les reçoive, lui, l’archange de Dieu, qui a mérité d’être placé à la tête des milices célestes ». C’est dans la même pensée qu’elle nomme l’archange parmi les saints auxquels se fait la confession des péchés, afin qu’il défende le pécheur repentant. Déjà, dans la tradition juive, Chagigah, 11 6 ; Menachoth, 110 a, l’ange Michel était considéré comme offrant à Dieu chaque jour les âmes justes sur l’autel de la Jérusalem céleste. La pensée de l’Église sur le saint archange Michel est heureusement exprimée par les hymnes composées en son honneur par Raban Maur, Notker le Bègue, Adam de Saint-Victor, etc. Cf. U. Chevalier, Poésie liturg. Iradit. de l’Église cath. en Occident, Tournai, 1894, p. 237-242.

— Voir Ma’Germain et Brin, Saint Michel archange, 2e édit., in-18, Paris, 1883 ; Frd. Wiegand, Der Erzengel Michæl in der bildenden Kunst, in-8°, Stuttgart,

1886 ; Bousset, Der Antichrisi in der Ueberlieferung des Judenthums, des neuen Testaments und der alten Kirche, Gœttingue, 1896, p. 151-153, 166, 171 ; cf. Revue biblique, 1896, p. 652, 653 ; W. Lueken, Miehæl. Eine Darstellung und Vergleichung der jâdischen und der morgenîândisch-christlichen Tradition von Erzengel

Miehæl, in-8°, Gœttingue, 1898.
H. Lesêtre.

1. MICHOL (hébreu : Mikal, peut-être forme contractée de Mîka’êl, « qui (est) comme Dieu ? « Septante : MeX-^iiX ; Joséphe, Ant. jud., VI, XI, 4, Mzyaka), la plus jeune des deux filles de Saùl et femme de David. Sa mère devait être Achinoam. IReg., xiv, 49-50. Saül avait promis de donner sa fille aînée, Mérob, en mariage au vainqueur de Goliath, mais il ne tint pas sa parole. Voir Mérob, col. 997. Il lui promit cependant plus tard de lui donner Michol qui l’aimait, à la condition qu’il tuerait cent Philistins. David en tua deux cents et il épousa Michol, Il avait alors une vingtaine d’années. IReg., xviii, 19-28. Elle lui sauva la vie peu de temps après, lorsque Saûl voulut le faire périr. Ayant appris que son père envoyait ses gardes pour s’emparer de David, elle le fit échapperde la maison par la fenêtre et mit un theraphim ou une espèce de mannequin dans son lit afin qu’on le crût malade. Lorsque la supercherie fut découverte, son mari était en sûreté. Saùl fit de violents reproches à sa fille ; elle se justifia en disant que David l’avait menacée de la tuer. I Reg., xix, 12-17. Elle devait rester plusieurs années sans revoir David. Son père se vengea en la mariant de force à Phalti ouPhaltîel de Gallim. IReg., xxv, 41. Son premier époux la recouvra plus tard, en mettant pour condition à sa réconciliation avec Abner, l’ancien général de Saül et le soutien d’Isboseth, son rival, que Michol lui serait rendue. Abner la lui ramena, en effet, malgré les pleurs de Phaltiel. II Reg., iii, .12-16. L’affection était-elle le seul motif de la conduite de. David ? La politique n’y était-elle pas pour sa part ? Avec quels sentiments Michol reprit-elle sa place auprès de lui, où elle trouvait deux autres femmes, Abigaïl et Achinoam ? Nous l’ignorons. Elle reparaît seulement en une circonstance, lors du transfert de l’arche de la maison d’Obédédom à Jérusalem, et c’est pour faire des reproches à David. En regardant par la fenêtre du palais la procession solennelle, elle avait vu David, revêtu d’un manteau de byssus et d’un éphod de liii, dansant et jouant devant l’arche, « et elle l’avait méprisé dans son cœur. » Il Reg., vi, 16 ; I Par., xv, 29. Quand le roi revint, elle alla à sa rencontre et lui manifesta violemment sa désapprobation. David lui répondit avec vivacité en lui rappelant le rejet que Dieu avait fait de son père et en justifiant sa conduite par ses sentiments de piété. Lé texte sacré termine le récit en disant : « Et Michol, fille de Saûl, n’eut point d’enfant jusqu’au jour de sa mort. » II. Reg., VI, 20-25. Le nom de Michol se lit encore une fois II Reg., xxi, 8, mais on admet communément que c’est Mérob qu’il faut lire à la place. Voir Mérob, col. 997. Josèphe, Ant. jud., VII, iv, 3, prétend, en s’appuyant évidemment sur II Reg., xxi, 8, que Michol serait revenue plus tard auprès de Phaltiel, qu’il désigne sans le nommer, et en aurait eu cinq enfants, mais cette affirmation est formellement contredite par II Reg., vi, 25. Le Targum sur Ruth, iii, 3, appelle Phaltiel, hàsîdà’, « pieux, » et dit qu’il plaçait une épée entre lui et Michol pendant leur mariage. Les Qusest. hebr. in I Reg., Xxv, 44, dans les Œuvres de saint Jérôme, t. xxiii, col. 1344, font allusion à cette tradition. Elles disent de plus, in II Reg., m, 5 ; vi, 23, col. 1347, 1350, que Michol est la même qu’Égla (t. ii, col. 1599), qui donna à David Jéthraam et qu’elle mourut en couches, mais tout cela ne repose sur aucun fondement.

2. MICHOL, nom donné par la paraphrase chaidaïque au prophète dont l’histoire est racontée III Reg., xiii,

12. C’était un faux prophète, selon les uns ; un vrai prophète, selon les autres. Voir Keil, Die Rucher der Kùnige, 1865, p. 154.

MICHTHAM. Voir Miktam.

. MIDI (hébreu : négêb, sâhârayim, duel de sokar, « lumière, » par conséquent « la double lumière », la lumière dans sa plus grande force, nehôn hay-yôm, Prov., iv, 18, « le fort du jour » ; Septante : u.s.ci)(iëp ! a, vôtoç ; Vulgate : meridies, meridÀanum), le moment du jour où le soleil est au plus haut point de sa course. En hébreu, comme dans la plupart des langues, le midi désigne plusieurs choses différentes. — 1° La région. Un pays, une montagne, une ville sont au midi quand ils se trouvent, par rapport à un spectateur ou relativement â d’autres lieux, du côté où brille le soleil quand il est au milieu de sa course. Gen., xii, 9 ; Exod., xxvi, 18, 35 ; Num., ii, 10 ; Jos., x, 40 ; Ezech., xx, 46 ; Act., vin, 26, etc. Le côté méridional d’une construction, d’un objet fixe, etc., est celui qui est tourné juste en face du soleil à midi. Exod., xxvii, 9, etc. — 2° L’heure. Le midi désigne également le milieu du jour, c’est-à-dire le moment où le soleil, parvenu à son plus haut point dans le iirmamènt, mettra autant de temps à descendre sous l’horizon qu’il en a mis à monter. Le moment exact de midi ne pouvait pas être déterminé avec précision chez les Hébreux, Le cadran solaire d’Ézéchias, Is., xxxviii, 8 ; IV Reg., xx, 9-11, était une rareté. Voir Cadran solaire, t. ii, col. 26. Pratiquement, d’ailleurs, on n’avait pas besoin de fixer le milieu du jour avec grande exactitude, et l’heure de midi se rapportait approximativement à un temps plus ou moins long. Ainsi saint Jean, xix, 14, dit qu’il était « à peu près la sixième heure », allant de midi à trois heures, quand le Sauveur fut livré aux Juifs par Pilate, et saint Marc, xv, 25, dit que c’était « la troisième heure », allant de neuf heures à midi, quand on le crucifia. Cette double indication revient à dire que le chemin de l’Antonia au Calvaire fut parcouru par le Sauveur et son cortège autour de midi, avec une certaine latitude dans ! a détermination de l’heure. — C’est à midi que Joseph prit son repas avec ses frères, Gen., xun, 16 ; que mourut d’insolation le fils de la femme de Sunam, IV Reg., iv, 20 ; que Jésus s’assit au puits de Jacob pour attendre la Samaritaine, Joa., iv, 6 ; que les ténèbres commencèrent à couvrir la terre le vendredi-saint, Matth., xxvii, 45 ; Marc, xv, 33 ; Luc, xxiii, 44 ; que saint Pierre priait. Act., x, 9, etc. — 3° La lumière. À midi, la lumière du soleil a son plus vif éclat. Cette lumière est un symbole de la prospérité du juste, Job, xi, 17 ; Prov., iv, 18, de son innocence, Ps. xxxvii (xxxvi), 6, de sa bienfaisance. Is., lviii, 10, etc. L’absence de la lumière à midi est un signe de la malédiction divine ; Am., viii, 9. Aller à tâtons en plein midi, c’est être frappé d’aveuglement moral par la justice de Dieu. Deut., xxviii, 29 ; Job, v, 14 ; Is., lix, 10. Une ville attaquée ou un pays ravagé en plein midi ont la ruine à craindre, car l’ennemi est assez puissant pour n’être pas obligé d’opérer la nuit et par ruse. Jer., vi, 4 ; xv, 8 ; xx, 16. Le « démon du midi », Ps. xci (xc), 6, dont parlent les versions, n’est autre chose que « la ruine qui dévaste en plein midi », qétéb ydiûd sâhârayim. , qui s’attaque à l’homme en plein jour comme la flèche, aussi bien que d’autres fléaux qui le surprennent pendant la nuit. Les Septante ont rattaché yaèûd au mot $êd, « idole, » qu’ils traduisent ordinairement par « démon ». Dans un passage de Job, xxiv, 1 1, il est parlé des malheureux qui endurent les ardeurs du soleil, meridiati sunt, au milieu des récoltes. Le verbe hébreu correspondant, yaçhiru, vient de sâhar, c’est-à-dire de la même racine que $âharayîm, d’où le sens adopté parla Vulgate, et reconnu par Buhl-GesePage:Dictionnaire de la Bible - F. 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