Voyage en France 9/VII

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VII

LA MATEYSINE ET VIZILLE

La Mure d’Isère. — M. Chion-Ducollet et ses administrés. — En Mateysine. — Les lacs Pierre-Châtel ; lac Mort ; Grand lac ; lac de Petit-Chat. — Laffrey. — Le retour de l’île d’Elbe. — Vizille, son château et ses industries.
Vizille, mai.

La Mure est une des petites villes de France dont on s’est le plus occupé depuis quelques années ; le maire M. Chion-Ducollet, a eu d’homériques démêlés avec le Curé, avec les pèlerins de la Salette, avec les processions. Son nom a franchi les étroites limites de la province pour fournir de copieuses chroniques aux journaux de Paris. Même M. Chincholle est allé tout exprès de Paris à la Mure interviewer M. Chion-Ducollet au nom du Figaro ; si ce n’était pas la gloire, c’en est au moins la grosse monnaie.

J’avais rencontré le maire de la Mure chez le préfet, à Grenoble. Il s’était offert, fort obligeamment, à m’accompagner dans sa ville, et nous avions pris rendez-vous pour « un de ces jours ». Un de ces Jours, pour moi, s’est trouvé aujourd’hui, j’avais compté sans la foire. Voici que la petite ville est encombrée d’une foule énorme accourue de toute la Maleysine, même des lointaines vallées des Alpes de Corps, de Mens et de Valbonnais. Or, M. Chion-Ducollet est notaire, son étude était envahie ; j’ai dû me borner à une courte visite sans avoir l’honneur d’être piloté par lui. Je l’ai un peu regretté ; j’aurais voulu étudier de près le « tyran » dont on nous a fait un portrait si peu flatté.

Sa marque, en tout cas, se retrouve dans toute la ville. À la gare, on n’est point encore à la Mure, les bruyants personnages qui assaillent les voyageurs et semblent vouloir les emballer de vive force dans leurs diligences et leurs breaks sont les conducteurs de véhicules pour Corps et le pèlerinage fameux de la Salette. À un quart de lieue seulement commence la ville, régulière de forme comme une bastide du Midi ; la ligne des anciens remparts est devenue un boulevard. La petite ville a des prétentions ; très propre, elle a des plaques au coin de toutes les rues, portant des noms à la saveur bien locale ; elle est éclairée à l’électricité ; son hôtel de ville, tout flambant neuf, est monumental ; des fontaines nombreuses épanchent des eaux abondantes. On devine qu’une action incessante est exercée sur la voirie. M. Chion-Ducollet doit être un homme actif, un peu fébrile même, il lui faudrait un plus vaste théâtre que cette ville peuplée de trois cents douzaines d’habitants. Peut-être faut-il attribuer à la faible étendue de la Mure les incidents qui ont rendu le maire célèbre ; la simple gestion des deniers communaux ne lui a pas suffi, il a voulu réglementer l’existence de ses administrés. Il ne semble pas d’ailleurs que ces derniers s’en plaignent : ils n’ont pas cessé de lui maintenir leur confiance.

La Mure eut jadis un rôle important dans l’histoire militaire du Dauphiné, elle a subi pendant la Ligue un siège fameux durant lequel les femmes elles-mêmes, conduites par une d’elles, la Cotte rouge, soutinrent l’assaut contre les catholiques ; ce n’est plus qu’un centre commercial pour les hautes vallées des Alpes dauphinoises. Sa population féminine travaille à la ganterie pour Grenoble ; les chanvres de la Mateysine y sont peignés et tissés, en partie convertis en toiles d’emballage ; les roches voisines fournissent de la pierre à ciment ; enfin une vieille industrie, celle de la clouterie, persiste malgré les grandes manufactures modernes. Mais la Mure vit surtout par le commerce avec les communes voisines, ses marchés et ses foires.

Dans ces hautes régions le paysan est resté quelque peu primitif, il croit encore aux charlatans. Sur la place, l’un de ceux-ci est vêtu, ô combien vaguement, en Arabe. Il s’est fait un burnous avec une pièce de flanelle dont il n’a pas même enlevé la lisière, il s’est plaqué sur la poitrine des médailles de fantaisie. Serrés autour de lui, les Mateysins boivent son boniment, de temps à autre l’un d’eux le tire par son burnous, le mène à part et le consulte. Un homme ainsi vêtu ne peut manquer d’être un grand médecin.

Ces paysans si crédules sont pourtant réputés pour leur finesse. On dit dans le Dauphiné « fin comme un Mateysin » ; défait, ils eut l’esprit plus avisé que leurs voisins, même le nom de la contrée viendrait de l’habileté avec laquelle ils refusèrent de reconnaître les droits des seigneurs, quand, en 1219, la fameuse inondation de la Romanche détruisit aux archives du dauphin les titres féodaux. Cela leur valut le litre de matou on de matois, tandis que dans l’Oisans, où l’on avait reconnu les anciens privilèges seigneuriaux, on fut récompensé par le titre de prud’homme donné aux habitants : les matois de la Mure, les preux de l’Oisans a-t-on dit longtemps et dit-on parfois encore.

La plaine, aux abords de la Mure, est assez morose, la grande végétation ne s’est pas emparée de ce fond d’un ancien lac entouré de hautes et sévères montagnes couvertes de pâturages. Mais bientôt le paysage s’accidente ; ou passe près de la mine d’anthracite de Pierre-Châtel, modeste exploitation d’où le charbon descend, près de la route, par des câbles, dans des paniers munis de patins pour le traînage dans les galeries. Bientôt on atteint un village qui possède de curieux pignons en marches d’escaliers, semblables à ceux des maisons flamandes, c’est Pierre-Châtel. Un peu au delà, au sommet d’une côte, le paysage s’agrandit tout à coup ; les yeux sont attirés d’abord par les gigantesques falaises de la Grande-Chartreuse qui semblent planer dans les airs ; mais, bientôt, une nappe tranquille sollicite le regard le lac de Pierre-Châtel, jolie conque entourée de verdure dans laquelle se reflètent les hauts sommets du Thabor de la Valdens. La route côtoie le lac, masqué par une végétation touffue et que l’on quitte bientôt pour gravir le petit col de Saint-Théoffrey. Si l’on se retourne alors vers le lac de Pierre-Châtel, on aperçoit toute la Mateysine, elle semble se terminer au massif gigantesque de l’Obiou. On redescend, et le lac de Petit-Chat apparaît. De loin, les rives paraissent nues et géométriques, mais à mesure qu’on approche, le lac se fait plus gracieux, de petits golfes découpent les rives, de l’un d’eux sort un ruisseau qui, de chute en chute, va se déverser dans le Grand lac. On aborde celui-ci au village de Petit-Chat, dont la jolie chapelle de style ogival rayonnant attire un instant l’attention.

Mieux encadré que ses voisins, le Grand lac est plus pittoresque ; dominé par la haute et lourde masse de la Grande-Serre, couverte de pâturages, il est bordé de jolies collines bien cultivées, semées de bouquets de bois ; les dentelures de la rive, de petits promontoires de rochers, les bois d’essences diverses, les barques qui le sillonnent eu font un des plus beaux tableaux de ces montagnes, rendu grandiose par l’apparition hautaine du Taillefer et de l’Obiou.

Au delà d’une colline boisée, une autre nappe beaucoup plus petite, mais charmante aussi, le lac Mort, est étalée dans une dépression profonde ; les eaux du lac de Laffrey, abondantes et limpides, s’écoulent par un seuil de rochers, traversent un instant le village et, se frayant un chemin dans un immense ravin rempli de châtaigners énormes, descend de cascade en cascade jusqu’à la Romanche. Le ravin n’a pas 4 kilomètres de développement et le torrent a une chute de plus de six cents mètres. Cette gorge est peu connue encore, elle est cependant supérieure à bien des sites vantés ; les eaux frémissantes bondissent de rocher en rocher, fuient en écume sur de petits plateaux couverts de châtaigners, et aboutissent à la Romanche, en face du faubourg vizillois du Péage. Les châtaignes de ce coin de montagnes passent pour les plus gros et les plus savoureux des marrons de Lyon.

C’est à Laffrey que Napoléon, revenant de l’île d’Elbe, rencontra les premières troupes opposées à sa marche : le 5e de ligne et les sapeurs du génie. Les soldats hésitaient à tirer sur l’Empereur ; celui-ci, s’avançant, leur adressa ces paroles fameuses :

« Soldats ! je suis votre général, ne me reconnaissez-vous pas ? S’il est parmi vous un soldat qui veuille tuer son général, me voilà ! »

Les soldats répondirent par le cri de : « Vive l’Empereur ! » et, se mettant à la suite de la vieille garde, descendirent avec elle à Vizille. À la première nouvelle, la ville entière accourait. Les jeunes gens ayant à leur tête le fils du gardien du château de Vizille, Victor Hammer, mon grand-père, alors grand et beau garçon de quinze ans, montèrent à cheval pour se porter à la rencontre de l’Empereur. Victor Hammer est mort l’an passé, c’était le dernier témoin de cette journée pendant laquelle la population de Vizille fît à Napoléon et à ses soldats une réception enthousiaste. Cependant le maire, parlant au nom de la population, rappelait à l’Empereur que la Révolution était née à Vizille, et que si les habitants l’acclamaient, ils espéraient qu’on maintiendrait leurs droits et leurs privilèges.

En descendant la route de Laffrey, l’Empereur, pour la première fois depuis son débarquement et son voyage par les routes encaissées des Basses et des Hautes-Alpes, voyait s’ouvrir devant lui un large coin de France. De là, il découvrait Grenoble et ses vastes fortifications dont la possession l’assurait d’une place d’armes précieuse ; il pouvait, au loin, deviner les immenses plaines du Rhône et de la Saône. S’il devenait maître de ce pays, la France lui appartenait de nouveau. Le touriste ne saurait avoir de si larges pensées, il admire simplement ce paysage grandiose : au fond Vizille, son château, ses usines, commandant l’entrée du beau val d’Uriage ; puis les sommets de la Grande-Chartreuse ; des vallées s’ouvrant à tous les points de l’horizon, les unes larges et ensoleillées, les autres étroites et profondes ; au premier plan les forêts et les « laguets » de Prémol, les champs de neige d’Allemont ; tout cela forme un des plus beaux paysages de la France.

La descente vers Vizille est un enchantement, chaque pas révèle de nouvelles beautés. Si l’on s’écarte de la route on trouve autour de Saint-Pierre et de Notre-Dame-de-Mézage des coins admirables par les châtaigneraies où bruissent les cascades. On passe près de l’antique et belle chapelle romane de Saint-Sauveur ; peu après la route atteint enfin un palier, on est descendu pendant six kilomètres. Le lac de Laffrey dort à 911 mètres et l’on est maintenant à 280 seulement, sur un pont superbe construit en 1758, de pins noble allure et presque aussi hardi que le fameux pont de Claix. Au delà du pont s’ouvre une large rue et, fermant la perspective, un château de belle ordonnance. Nous sommes à Vizille.

Sauf la rue par laquelle nous venons d’entrer, Vizille a des voies plutôt tristes et noires, en réalité ce n’est qu’une longue rue étroite, bordée de hautes maisons sombres. Dans cette rue court un petit chemin de fer qui relie Vizille à la ligne de Gap et au Bourg-d’Oisans. Cette voie ferrée se prolonge sur Uriage et Grenoble par un embranchement. Peut-être ces facilités de communication feront-elles naître de nouveaux hôtels et quelques maisons plus élégantes. En attendant, Vizille possède la vue superbe du Conex que gravit la route de la Mure, elle a surtout son château et le parc merveilleux qui lui fait face. Elle a aussi des ruines précieuses, malheureusement elles ne sont pas ouvertes au public, c’est ce qu’on appelle le château du roi ; là, pendant longtemps, se dressa un château féodal construit par les évêques de Grenoble, il devint plus tard la résidence d’été des dauphins de Viennois, puis propriété particulière des dauphins de France. Il couvrait un rocher isolé encore garni de tours et de remparts, mais les ruines disparaissent sous un épais manteau d’arbres et de lierre, une seule partie reste maintenant visible-, c’est un réservoir d’eau, transformé aujourd’hui en bassin de verdure.

Le château delphinal était déjà une ruine lorsque Lesdiguières devenu, à la suite des guerres civiles et des luttes contre le duc de Savoie, le véritable roi du Dauphiné, voulut construire une demeure en rapport avec la haute situation qu’il s’était acquise. En 1598, alors que son maître Henri IV devenait roi incontesté, il échangea une partie de ses terres contre le marquisat de Vizille qui comprenait 58 paroisses de l’Oisans, de la Mateysine et des environs de la ville jusqu’à Vif. La construction fut longue, en 1620 seulement le château fut achevé ; pour l’époque ce fut une merveille, aucun grand seigneur n’avait encore fait édifier une aussi vaste et somptueuse demeure. Une grande partie de la vallée, quatre-vingts hectares environ, était close de murs et formait un parc vraiment royal.

Pour accomplir une telle œuvre, la fortune la plus énorme n’aurait pu suffire si Lesdiguières n’avait imaginé de commander de corvée tous les habitants de son marquisat. Le jour où les ouvriers d’une paroisse étaient requis, on en faisait l’annonce devant l’église et le héraut terminait par ces simples mots qui décidaient les plus récalcitrants : « Viendrez ou brûlerai. » Grâce à ce procédé il fut possible d’avoir continuellement des ouvriers nombreux sur les chantiers. Bientôt la forteresse dressa orgueilleusement ses tours, déploya devant le parc son perron à double évolution, entr’ouvrit sur le château du roi le grand portail donnant accès à h cour d’honneur et orné d’une statue équestre de Lesdiguières.

Après la mort de Henri IV, le vaillant soldat dont le Béarnais avait fait un maréchal de France, François de Bonne, le petit gentilhomme du Champsaur qui avait gagné tous ses titres l’épée au poing, fut sollicité d’abjurer le protestantisme ; il y consentit. En échange, Louis XIII lui donna d abord le titre de duc de Lesdiguières, du nom de son château des Diguières, puis la dignité de connétable. Cependant, le vieux soldat hésita longtemps, saint François de Sales réussit à le convertir. Lorsque la nouvelle fut connue, le maréchal de Créqui, envoyé du Roi à Grenoble, réunit la noblesse et demanda solennellement au duc s’il était catholique. Lesdiguières, se tournant vers le Parlement et les seigneurs, leur dit : « Messieurs, allons à la messe. »

Et le compagnon d’armes du baron des Adrets alla à la cathédrale entendre la messe de l’archevêque d’Embrun. Après la cérémonie le duc fut investi de la dignité de connétable, « pour, disait la lettre du Roi, avoir toujours ôté vainqueur et n’avoir jamais été vaincu.

Quelque temps après, le roi vint à Grenoble et fut, au château de Vizille, l’hôte du connétable, à qui son père devait en partie sa couronne.

Après la mort du connétable, le château passa au duc de Créqui son gendre ; plus tard, après la mort du dernier duc de Lesdiguières, il devint la propriété du maréchal de Villeroy. Mais le château était trop loin de la cour, d’ailleurs ses vastes dimensions le rendaient difficilement habitable, les descendants de Villeroy le vendirent à l’un industriel, Claude Perler, originaire de Mens, qui avait doté la province de nombreux établissements ; il y créa une fabrique de toiles peintes. Quand, en 1788, les États du Dauphiné n’osèrent se réunir à Grenoble, ville forte occupée par une garnison nombreuse, Claude Perier leur offrit asile. C’est dans la salle du jeu de paume, à l’entrée de la vallée d’Uriage, que se tint l’assemblée, sous la présidence du comte de Morges. La réunion dura seize heures, l’adresse au roi qui y fut votée fut le premier signal de la Révolution française.

En 1888, la ville de Vizille a inauguré au pied du château, sur un terre-plein en partie entouré par les eaux des ruisseaux venus du parc, un monument commémoratif de cette grande journée ; le regretté M. Carnot, président de la République, présida la cérémonie, il avait reçu l’hospitalité au château où l’avait invité M. Casimir-Perier qui devait le remplacer à la présidence.


Le château et le parc appartiennent encore, en effet, à la famille Casimir-Perier, mais ils doivent être acquis par le département qui y installera un musée dauphinois et un asile de vieillards[1]. Le cinquième président de la République y est rarement venu ; cependant, dans sa jeunesse, il y passa une partie de ses vacances. Les habitants de Vizille se souviennent encore de ce jeune homme à la figure sérieuse et pensive, qui, un livre à la main, parcourait à pas lents les allées bordant la « nappe », pièce d’eau transparente, où se déversent, par une belle cascade, les eaux de la fontaine de la Dhuys, pendant que son père, celui qui devait être le ministre de M. Thiers, pêchait des truites avec une habileté consommée. On eût bien surpris les Vizillois de ce temps-là, en plein second empire, après Solférino, en leur disant que ce grave jeune homme serait un jour président de la République.

Le château est d’une grandeur et d’une majesté réelles ; ses hautes tours, son beffroi, ses escaliers monumentaux sont d’un puissant effet dans le paysage.

Le parc est un des charmes, le plus grand, de Vizille. Le mur construit par le connétable et qui a résisté depuis deux cante ans aux intempéries n’a pas moins de 44 kilomètres de développement. Au fond, dans un vaste bassin ombragé d’arbres plusieurs fois centenaires, jaillit une source admirable, la Dhuys ; les eaux vont ensuite sous un dôme de verdure, border la romantique allée des Soupirs, où les grands arbres s’alignent en longue perspective.

Mais l’aspect des lieux a bien changé, le parc est aujourd’hui une sorte de jardin anglais ; au temps du connétable, il faisait déjà prévoir Versailles et sa nature artificielle. Un vieil auteur en parle ainsi avec enthousiasme :

« Ces dragons, ces serpents, gardiens du château et de la fontaine qui baigne ses pieds, ce jeu de paume, cette ménagerie, ce parc enclos de longues murailles, ces allées, ces forges, ces martinets, ces remparts contre l’impétuosité de la Romanche, ces parterres, ces vergers, ces sources d’eaux claires et limpides, coulant avec tant de douceur, jamais enflées ni troublées… »

Les forges et les martinets avaient fait place aux usines des Perier et à de nombreux établissements, dont les constructions seules subsistent. L’industrie a quitté le château et s’est portée au dehors. L’abondance des eaux a attiré des Lyonnais, ils y ont installé trois de leurs plus vastes usines de soierie. Elles sont en partie dans la ville même, en partie dans son faubourg du Péage. 1,380 femmes et 250 hommes sont employés dans les quatre établissements consacrés à la soierie.

Les forges et laminoirs situés à l’entrée de la ville vers Grenoble occupent 110 ouvriers ; la belle papeterie de MM. Peyron renferme 60 femmes et 150 hommes ; une fabrique de carton compte 110 ouvriers ; une scierie en occupe 20 ; les voies ferrées du Dauphiné, dont Vizille est la gare principale, ont au dépôt 80 employés ou journaliers. Enfin 180 métiers à bras installés à domicile travaillent pour les fabricants de soieries.

C’est un chiffre total de 2,270 ouvriers et ouvrières sur une population de 4,252 habitants. Le développement industriel de la ville est loin d’avoir atteint toute son intensité ; la force motrice de la Romanche n’a pas été complètement employée. Les eaux nées dans le parc peuvent donner encore des centaines de chevaux. On en aurait des milliers en aménageant pour l’industrie les beaux lacs de Laffrey, qui assureraient à Vizille une chute de près de 700 mètres.

Tout cela sera un jour utilisé comme l’a été la Fure dont les eaux sont moins abondantes et la chute infiniment moins considérable. Le voisinage du bassin houiller de la Mure, les antres gisements d’anthracite reconnus dans les montagnes voisines, contribueront sans doute aussi à cet accroissement.

  1. Ces projets ne se sont pas réalisés, le château et le parc sont devenus la propriété d’industriels lyonnais.