Page:Blanc - Histoire de dix ans, tome 2.djvu/308

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le sujet de toutes les conversations et le champ de bataille de tous les partis.

Plus que personne, le président du conseil, M. Laffitte, était intéressé à ce que la chambre fut promptement dissoute. Isolé dans le ministère depuis la retraite de M. Dupont (de l’Eure), entouré de collègues qui parlaient de résistance quand il parlait de mouvement, sans influence sur les affaires de l’Intérieur que M. de Montalivet lui-même ne réglait qu’en sous-ordre, sans influence sur les affaires de l’extérieur qui obéissaient à une impulsion aveuglément secondée par M. Sébastiani, sans autre consolation que les éclairs d’une popularité prête à s’éteindre, M. Laffitte assistait avec une mélancolie secrète à la ruine de ses espérances. Les témoignages d’une auguste amitié ne suffisaient plus à son âme devenue soupçonneuse, et il serait volontiers rentré dans la vie privée où le rappelait le soin de sa fortune s’il n’eût été retenu par cette croyance que son pays avait encore besoin de lui, dernière et touchante illusion d’un patriotisme trop facile !

Mais cette illusion même allait pour jamais s’évanouir. M. Laffitte, je l’ai dit, ne différait pas essentiellement par ses opinions de la majorité de la chambre. Cependant, il avait de plus qu’elle un honorable penchant à se rapprocher du peuple, à servir timidement sa cause, à mériter son estime. Voilà ce qu’on ne lui pardonnait pas. Beaucoup, d’ailleurs, croyaient flatter le roi, en combattant un homme auquel le roi devait tant de reconnaissance.

La chambre et le ministère se trouvaient donc