Page:Michelet - OC, Histoire de France, t. 1.djvu/168

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
110
HISTOIRE DE FRANCE

portionnée, dont on avait voulu les pénétrer tout d’un coup.

C’est assez tard, et surtout par la philosophie, par la religion, que la Grèce a influé sur la Gaule. Elle a aidé Pélage, mais seulement à formuler ce qui était déjà dans le génie national. Puis, les barbares sont venus, et il a fallu des siècles pour que la Gaule ressuscitée se souvînt encore de la Grèce.

L’influence de Rome est plus directe ; elle a laissé une trace plus forte dans les mœurs, dans le droit et dans la langue. C’est encore une opinion populaire que notre langue est toute latine. N’y a-t-il pas ici pourtant une étrange exagération ?

Si nous en croyons les Romains, leur langue prévalut dans la Gaule[1], comme dans tout l’Empire. Les vaincus étaient censés avoir perdu leur langue, en même temps que leurs dieux. Les Romains ne voulaient pas savoir s’il existait d’autre langue que la leur. Leurs magistrats répondaient aux Grecs en latin. C’est en latin, dit le Digeste, que les préteurs doivent interpréter les lois.

Ainsi les Romains n’entendant plus que leur langue dans les tribunaux, les prétoires et les basiliques, s’imaginèrent avoir éteint l’idiome des vaincus. Toutefois plusieurs faits indiquent ce que l’on doit penser de cette prétendue universalité de la langue latine. Les Lyciens rebelles ayant envoyé un des leurs, qui était citoyen romain, pour demander grâce, il se trouva

  1. App. 40.