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DISSOLUTION DE L’EMPIRE CARLOVINGIEN

l’heure, Radholf ou Rollon va fermer la Seine, sur laquelle il s’établit (911), du consentement du roi de France, Charles-le-Simple ou le Sot. Il n’était pas si sot pourtant de s’attacher ces Northmans, et de leur donner l’onéreuse suzeraineté de la Bretagne, qui devait user Bretons et Northmans les uns par les autres. Rollon reçut le baptême et fit hommage, non en personne, mais par un des siens ; celui-ci s’y prit de manière qu’en baisant le pied du roi il le jeta à la renverse. Telle était l’insolence de ces barbares.

Les Northmans se fixent donc et s’établissent. Les indigènes se fortifient. La France prend consistance, et se forme peu à peu. Sur toutes ses frontières s’élèvent, comme autant de tours, de grandes seigneuries féodales. Elle retrouve quelque sécurité dans la formation des puissances locales, dans le morcellement de l’Empire, dans la destruction de l’unité. Mais quoi ! cette grande et noble unité de la patrie, dont le gouvernement romain et francique nous ont du moins donné l’image, n’y a-t-il pas espoir qu’elle revienne un jour ? Avons-nous décidément péri comme nation ? N’y a-t-il point au milieu de la France quelque force centralisante qui permette de croire que tous les membres se rapprocheront et formeront de nouveau un corps ?

Si l’idée de l’unité subsiste, c’est dans les grands sièges ecclésiastiques, qui conservent la prétention de la primatie. Tours est un centre sur la Loire ; Reims en est un dans le Nord. Mais partout le pouvoir féodal limite celui des évêques. À Troyes, à Soissons, le comte l’emporte sur le prélat. À Cambrai et à Lyon il