Page:Taine - Les Philosophes classiques du XIXe siècle en France, 1868.djvu/116

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nois. Or, notez bien que le sens de ce morceau se réduit à ceci :

Deux et deux font quatre. La première fois que j’ai vu deux objets avec deux autres objets, et que j’ai compris qu’ils faisaient quatre, je n’ai pas remarqué que toujours, partout et nécessairement, deux et deux font quatre. Cette remarque est venue plus tard, quand, en réfléchissant, j’ai observé ma pensée. On pense d’abord. Et après avoir pensé, on réfléchit sur sa pensée.

N’y a-t-il dans ce morceau que de l’obscurité ? Non, par malheur. Il y a encore une équivoque. Presque toutes les grandes vérités établies par M. Cousin sont bâties sur de tels fondements. Il joue ici sur le sens du mot subjectivité, et il a beau jeu, car le mot est allemand et très-obscur. Une Allemande, dit Gœthe, reconnut que son amant commençait à la tromper, parce qu’il se mettait à lui écrire en français. Un Français peut conclure qu’un philosophe commence à se tromper, lorsqu’il introduit en français des mots allemands. Voici ce que Kant disait et ce que M. Cousin réfute : « Nous connaissons plusieurs axiomes ou propositions nécessaires : par exemple, toute qualité suppose une substance ; et nous ne pouvons imaginer un cas où cet axiome ne soit pas vrai. Mais peut-être cette nécessité vient de la construction de notre esprit, et nous sommes comme des gens nés