Code d'instruction criminelle 1808/Livre II, Titre II, Chapitre I

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France
Livre II, Titre II, Chapitre I : Des Mises en Accusation.
(p. 48-54).

Titre Second.

Des Affaires qui doivent être soumises au jury.
Chapitre Premier.
Des Mises en accusation.

217. Le procureur général de la cour impériale sera tenu de mettre l'affaire en état dans les cinq jours de la réception des pièces qui lui auront été transmises en exécution de l'article 133 ou de l'article 135, et de faire son rapport dans les cinq jours suivants, au plus tard.

Pendant ce temps, la partie civile et le prévenu pourront fournir tels mémoires qu’ils estimeront convenables, sans que le rapport puisse être retardé.

218. Une section de la cour impériale, spécialement formée à cet effet, sera tenue de se réunir, au moins une fois par semaine, à la chambre du conseil, pour entendre le rapport du procureur général et statuer sur ses réquisitions.

219. Le président sera tenu de faire prononcer la section au plus tard dans les trois jours du rapport du procureur général.

220. Si l’affaire est de la nature de celles qui sont réservées à la haute-cour impériale, ou à la cour de cassation, le procureur général est tenu d’en requérir la suspension et le renvoi, et la section de l’ordonner.

221. Hors le cas prévu par l’article précédent, les juges examineront s’il existe contre le prévenu des preuves ou des indices d’un fait qualifié crime par la loi, et si ces preuves ou indices sont assez graves pour que la mise en accusation soit prononcée.

222. Le greffier donnera aux juges, en présence du procureur général, lecture de toutes les pièces du procès; elles seront ensuite laissées sur le bureau, ainsi que les mémoires que la partie civile et le prévenu auront fournis.

223. La partie civile, le prévenu, les témoins, ne paraîtront point.

224. Le procureur général, après avoir déposé sur le bureau sa réquisition écrite et signée, se retirera ainsi que le greffier.

225. Les juges délibéreront entre eux sans désemparer, et sans communiquer avec personne.

226. La cour statuera, par un seul et même arrêt, sur les délits connexes dont les pièces se trouveront en même temps produites devant elles.

227. Les délits sont connexes, soit lorsqu’ils ont été commis en même temps par plusieurs personnes réunies; soit lorsqu’ils ont été commis par différentes personnes, même en différents temps et en divers lieux, mais par suite d’un concert formé à l’avance entre elles; soit lorsque les coupables ont commis les uns pour se procurer les moyens de commettre les autres, pour en faciliter, pour en consommer l’exécution, ou pour en assurer l’impunité.

228. Les juges pourront ordonner, s’il y échet, des informations nouvelles.

Ils pourront également ordonner, s’il y a lieu, l’apport des pièces servant à conviction, qui seront restées déposées au greffe du tribunal de première instance;

Le tout dans le plus court délai.

229. Si la cour n’aperçoit aucune trace d'un délit prévu par la loi, ou si elle ne trouve pas des indices suffisants de culpabilité, elle ordonnera la mise en liberté du prévenu; ce qui sera exécuté sur-le-champ, s’il n’est retenu pour autre cause.

Dans le même cas, lorsque la cour statuera sur une opposition à la mise en liberté du prévenu prononcée par les premiers juges, elle confirmera leur ordonnance; ce qui sera exécuté comme il est dit au précédent paragraphe.

230. Si la cour estime que le prévenu doit être renvoyé à un tribunal de simple police ou à un tribunal de police correctionnelle, elle prononcera le renvoi, et indiquera le tribunal qui doit en connaître.

Dans le cas de renvoi à un tribunal de simple police, le prévenu sera mis en liberté.

231. Si le fait est qualifié crime par la loi, et que la cour trouve des charges suffisantes pour motiver la mise en accusation, elle ordonnera le renvoi du prévenu soit aux assises, soit à la cour spéciale, dans le cas où cette cour serait compétente, d’après les règles établies au titre VI du présent livre.

Si le délit a été mal qualifié dans l’ordonnance de prise de corps, la cour l’annullera, et en décernera une nouvelle.

Si la cour, en prononçant l’accusation du prévenu, statue sur une opposition à sa mise en liberté, elle annullera l’ordonnance des premiers juges, et décernera une ordonnance de prise de corps.

232. Toutes les fois que la cour décernera des ordonnances de prise de corps, elle se conformera au second paragraphe de l’article 134.

233. L’ordonnance de prise de corps, soit qu’elle ait été rendue par les premiers juges, soit qu’elle l’ait été par la cour, sera insérée dans l’arrêt de mise en accusation, lequel contiendra l’ordre de conduire l’accusé dans la maison de justice établie près la cour où il sera renvoyé.

234. Les arrêts seront signés par chacun des juges qui les auront rendus; il y sera fait mention, à peine de nullité, tant de la réquisition du ministère public, que du nom de chacun des juges.

235. Daus toutes les affaires, les cours impériales, tant qu’elles n’auront pas décidé s’il y a lieu de prononcer la mise en accusation, pourront d’office, soit qu’il y ait ou non une instruction commencée par les premiers juges, ordonner des poursuites, se faire apporter les pièces, informer ou faire informer, et statuer ensuite ce qu'il appartiendra.

236. Dans le cas du précédent article, un des membres de la section dont il est parlé en l’article 218, fera les fonctions de juge instructeur.

237. Le juge entendra les témoins, ou commettra, pour recevoir leurs dépositions, un des juges du tribunal de première instance dans le ressort duquel ils demeurent, interrogera le prévenu, fera constater par écrit toutes les preuves ou indices qui pourront être recueillis, et décernera, suivant les circonstances, les mandats d'amener, de dépôt ou d'arrêt.

238. Le procureur général fera son rapport dans les cinq jours de la remise que le juge instructeur lui aura faite des pièces.

239. Il ne sera décerné préalablement aucune ordonnance de prise de corps; et s’il résulte de l’examen qu’il y a lieu de renvoyer le prévenu à la cour d’assises, ou à la cour spéciale, ou au tribunal de police correctionnelle, l’arrêt portera cette ordonnance, ou celle de se représenter, si le prévenu a été admis à la liberté sous caution.

240. Seront, au surplus, observées les autres dispositions du présent Code qui ne sont point contraires aux cinq articles précédents.

241. Dans tous les cas où le prévenu sera renvoyé à la cour d’assises ou à la cour spéciale, le procureur général sera tenu de rédiger un acte d’accusation.

L’acte d’accusation exposera, 1° la nature du délit qui forme la base de l’accusation, 2° le fait et toutes les circonstances qui peuvent aggraver ou diminuer la peine; le prévenu y sera dénommé et clairement désigné.

L’acte d’accusation sera terminé par le résumé suivant :

En conséquence N... est accusé d'avoir commis tel meurtre, tel vol, ou tel autre crime, avec telle et telle circonstance.

242. L'arrêt de renvoi et l'acte d'accusation seront signifiés à l'accusé: et il lui sera laissé copie du tout.

243. Dans les vingt-quatre heures qui suivront cette signification, l’accusé sera transféré de la maison d’arrêt dans la maison de justice établie près la cour où il doit être jugé.

244. Si l’accusé ne peut être saisi ou ne se présente point, on procèdera contre lui par contumace, ainsi qu’il sera réglé ci-après au chapitre II du titre IV du présent livre.

245. Le procureur général donnera avis de l'arrêt de renvoi à la cour d'assies ou à la cour spéciale, tant au maire du lieu du domicile de l'accusé, s'il est connu, qu'à celui du lieu où le délit a été commis.

246. Le prévenu à l'égard duquel la cour impériale aura décidé qu'il n'y a pas lieu au renvoi à l'une de ces cours, ne pourra plus y être traduit à raison du même fait, à moins qu'il ne survienne de nouvelles charges.

247. Sont considérés comme charges nouvelles, les déclarations des témoins, pièces et procès-verbaux, qui, n’ayant pu être soumis à l’examen de la cour impériale, sont cependant de nature, soit à fortifier les preuves que la cour aurait trouvées trop faibles, soit à donner aux faits de nouveaux développements utiles à la manifestation de la vérité.

248. En ce cas, l'officier de police judiciaire, ou le juge d'instruction, adressera, sans délai, copie des pièces et charges au procureur général de la cour impériale; et sur la réquisition du procureur général, le président de la section criminelle indiquera le juge devant lequel il sera, à la poursuite de l'officier du ministère public, procédé à une nouvelle instruction conformément à ce qui a été prescrit.

Pourra toutefois le juge d'instruction décerner, s'il y a lieu, sur les nouvelles charges, et avant leur envoi au procureur général, un mandat de dépôt contre le prévenu qui aurait été déjà mis en liberté d’après les dispositions de l'article 229.

249. Le procureur impérial enverra, tous les huit jours, au procureur général, une notice de toutes les affaires criminelles, de police correctionnelle ou de simple police, qui seront survenues.

250. Lorsque, dans la notice des causes de police correctionnelle ou de simple police, le procureur général trouvera qu'elles présentent des caractères plus graves, il pourra ordonner l’apport des pièces dans la quinzaine seulement de la réception de la notice, pour ensuite être par lui fait, dans un autre délai de quinzaine du jour de la réception des pièces, telles réquisitions qu'il estimera convenables, et par la cour être ordonné, dans le délai de trois jours, ce qu’il appartiendra.