Code d'instruction criminelle 1808/Livre II, Titre IV, Chapitre I

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France
Livre II, Titre IV, Chapitre Premier : Du Faux.
(p. 101-105).

Titre Quatrième.
De quelques Procédures particulières.

Chapitre Premier.
Du Faux.

448. DANS tous les procès pour faux en écriture, la pièce arguée de faux, aussitôt qu'elle aura été produite, sera déposée au greffe, signée et paraphée à toutes les pages par le greffier, qui en dressera un procès-verbal détaillé de l’état matériel de la pièce, et par la personne qui l’aura déposée, si elle sait signer, ce dont il sera fait mention; le tout à peine de cinquante francs d’amende contre le greffier qui l’aura reçue sans que cette formalité ait été remplie.

449. Si la pièce arguée de faux est tirée d’un dépôt public, le fonctionnaire qui s’en dessaisira, la signera aussi et la paraphera comme il vient d’être dit, sous peine d’une pareille amende.

450. La pièce arguée de faux sera de plus signée par l’officier de police judiciaire et par la partie civile ou son avoué, si ceux-ci se présentent.

Elle le sera également par le prévenu, au moment de sa comparution.

Si les comparants, ou quelques-uns d’entre eux, ne peuvent pas ou ne veulent pas signer, le procès-verbal en fera mention.

En cas de négligence ou d’omission, le greffier sera puni de cinquante francs d’amende.

451. Les plaintes et dénonciations en faux pourront toujours être suivies, lors même que les pièces qui en sont l’objet auraient servi de fondement à des actes judiciaires ou civils.

452. Tout dépositaire public ou particulier de pièces arguées de faux est tenu, sous peine d’y être contraint par corps, de les remettre, sur l’ordonnance donnée par l’officier du ministère public ou par le juge d’instruction.

Cette ordonnance et l’acte de dépôt lui serviront de décharge envers tous ceux qui auront intérêt à la pièce.

453. Les pièces qui seront fournies pour servir de comparaison, seront signées et paraphées, comme il est dit aux trois premiers articles du présent chapitre, pour la pièce arguée de faux, et sous les mêmes peines.

454. Tous dépositaires publics pourront être contraints, même par corps, à fournir les pièces de comparaison qui seront en leur possession : l’ordonnance par écrit et l’acte de dépôt leur serviront de décharge envers ceux qui pourraient avoir intérêt à ces pièces.

455. S’il est nécessaire de déplacer une pièce authentique, il en sera laissé au dépositaire une copie collationnée, laquelle sera vérifiée sur la minute ou l’original par le président du tribunal de son arrondissement, qui en dressera procès-verbal; et si le dépositaire est une personne publique, cette copie sera par lui mise au rang de ses minutes, pour en tenir lieu jusqu’au renvoi de la pièce, et il pourra en délivrer des grosses ou expéditions, en faisant mention du procès-verbal.

Néanmoins, si la pièce se trouve faire partie d’un registre de manière à ne pouvoir en être momentanément distraite, le tribunal pourra, en ordonnant l’apport du registre, dispenser de la formalité établie par le présent article.

456. Les écritures privées peuvent aussi être produites pour pièces de comparaison, et être admises à ce titre, si les parties intéressées les reconnaissent.

Néanmoins les particuliers qui, même de leur aveu, en sont possesseurs, ne peuvent être immédiatement contraints à les remettre; mais si, après avoir été cités devant le tribunal saisi pour faire cette remise, ou déduire les motifs de leur refus, ils succombent, l’arrêt ou le jugement pourra ordonner qu’ils y seront contraints par corps.

457. Lorsque les témoins s’expliqueront sur une pièce du procès, ils la parapheront et la signeront; et s’ils ne peuvent signer, le procès-verbal en fera mention.

458. Si, dans le cours d’une instruction ou d’une procédure, une pièce produite est arguée de faux par l’une des parties, elle sommera l’autre de déclarer si elle entend se servir de la pièce.

459. La pièce sera rejetée du procès, si la partie déclare qu’elle ne veut pas s’en servir, ou si, dans le délai de huit jours, elle ne fait aucune déclaration, et il sera passé outre à l’instruction et au jugement.

Si la partie déclare qu’elle entend se servir de là pièce, l’instruction sur le faux sera suivie incidemment devant la cour ou le tribunal saisi de l’affaire principale.

460. Si la partie qui a argué de faux la pièce, soutient que celui qui l’a produite est l’auteur ou le complice du faux, ou s’il résulte de la procédure que l’auteur ou le complice du faux soit vivant, et la poursuite du crime non éteinte par la prescription, l’accusation sera suivie criminellement dans les formes ci-dessus prescrites.

Si le procès est engagé au civil, il sera sursis au jugement jusqu’à ce qu’il ait été prononcé sur le faux.

S’il s’agit de crimes, délits ou contraventions, la cour ou le tribunal saisi est tenu de décider préalablement, et après avoir entendu l’officier chargé du ministère public, s’il y a lieu ou non à surseoir.

461. Le prévenu ou l’accusé pourra être requis de produire et de former un corps d’écriture; en cas de refus ou de silence, le procès-verbal en fera mention.

462. Si une cour ou un tribunal trouve dans la visite d’un procès, même civil, des indices sur un faux et sur la personne qui l’a commis, l’officier chargé du ministère public ou le président transmettra les pièces au substitut du procureur général près le juge d’instruction, soit du lieu où le délit paraîtra avoir été commis, soit du lieu où le prévenu pourra être saisi, et il pourra même délivrer le mandat d’amener.

463. Lorsque des actes authentiques auront été déclarés faux en tout ou en partie, la cour ou le tribunal qui aura connu du faux, ordonnera qu’ils soient rétablis, rayés ou réformés, et du tout il sera dressé procès verbal.

Les pièces de comparaison seront renvoyées dans les dépôts d’où elles auront été tirées, ou seront remises aux personnes qui les auront communiquées, le tout dans le délai de quinzaine à compter du jour de l’arrêt ou jugement, à peine d’une amende de cinquante francs contre le greffier.

464. Le surplus de l’instruction sur le faux se fera comme sur les autres délits, sauf l'exception suivante :

Les présidents des cours d’assises ou spéciales, les procureurs généraux ou leurs substituts, les juges d’instruction et les juges de paix, pourront continuer, hors de leur ressort, les visites nécessaires chez les personnes soupçonnées d’avoir fabriqué, introduit, distribué de faux papiers nationaux, de faux billets de la banque de France, ou des banques des départements.

La présente disposition a lieu également pour le crime de fausse monnaie ou de contrefaction du sceau de l’État.