Correspondance de Voltaire/1762/Lettre 5063

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Correspondance : année 1762GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 42 (p. 260-261).

5063. — À M.  LE COMTE D’ARGENTAL.
À Ferney, 10 octobre.

Mes divins anges, j’ai bien des tribulations :

La première, c’est de ne point recevoir de vos nouvelles ;

La seconde, c’est d’avoir vu jouer Cassandre, d’avoir été glacé de l’évanouissement de Statira, et d’avoir été obligé de refaire la valeur de deux actes ;

La troisième, c’est d’être malade ;

La quatrième, c’est la belle lettre qu’on m’impute[1], et que je vous envoie. Je voudrais qu’on en connût l’auteur, et qu’il fût pendu. Il y a, dit-on, des personnes à Versailles qui croient ce bel ouvrage de moi, et c’est de Versailles qu’on me l’envoie. Il y a apparemment peu de goût dans ce pays-là ; mais je n’imagine pas qu’on puisse m’attribuer longtemps de si énormes bêtises et de si grandes absurdités. Pour peu qu’on réfléchisse, l’impossibilité saute aux yeux. D’ailleurs, je suis accoutumé à la calomnie.

Vous ne m’avez jamais dit si vous aviez présenté ma petite félicitation[2] à M. le comte de Choiseul. J’attends votre réponse sur le Tronchin, qui peut lui être utile, et qui a assez de mérite et de bien pour se passer d’être utile.

Vous pensez bien qu’en refaisant Olympie n’ai pu songer ni à Mariamne ni à Œdipe. Je ne me porte pas assez bien pour avoir à la fois trois tragédies sur le métier, et une calomnie sur les bras.

Je vous renouvelle mes tendres respects.

  1. Voyez lettre 4872.
  2. C’est la lettre 5030.