Correspondance de Voltaire/1763/Lettre 5342

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5342. — À M. LE PRÉSIDENT DE RUFFEY[1].
À Ferney, 23 juillet.

Quid te exempta juvat spinis e pluribus una ?


À quoi sert, mon cher président, de chasser des jésuites[2], quand on conserve un tas de moines qui dévorent la terre dont ils sont le fardeau ?

C’est apparemment pour envoyer son portrait aux singes des terres australes que le petit singe dont vous me parlez s’est fait graver. Il devait m’avertir, j’aurais fait l’inscription.

J’ai vu beaucoup de Bourguignons dans ma retraite de Ferney, qui est assez jolie ; mais c’est vous que j’aurais voulu y voir. Je suis toujours faible, quelquefois aveugle. Je traîne ma vie comme je peux.

J’aurai l’honneur de vous envoyer le second volume de Pierre[3] dès que j’en aurai à ma disposition. Je vous ferai une petite pacotille que je voudrais pouvoir vous apporter moi-même.

Vale, et me ama.

  1. Éditeur, Th. Foisset.
  2. Exclus du ressort du parlement de Dijon par arrêt du 11 juillet 1763.
  3. Le second volume du théâtre de P. Corneille avec commentaire, ou de l’Histoire de Russie sous Pierre le Grand. Voltaire menait de front ces deux ouvrages. Le premier volume de Corneille parut en 1762 ; on ne sait pas si le second avait déjà vu le jour quand ce travail fut interrompu pour donner suite à celui sur Pierre le Grand. Il est positif que la seconde partie de l’Histoire de Russie vit le jour en 1763. Mais le mot pacotille, qui suit, paraît indiquer le théâtre de Corneille, auquel avaient souscrit plusieurs Dijonnais. (Th. F.)