Correspondance de Voltaire/1764/Lettre 5694
Anges, que je fatigue, et qui ne vous lassez pas de faire du bien, voici un petit billet[1] pour le conjuré Lekain. Mais ces extrêmes chaleurs, ce terrible mois de juillet, font frémir l’ex-jésuite.
N’est-ce pas en Éthiopie qu’on va au conseil dans des cruches pleines d’eau ? Je crois qu’il n’y a plus que ce moyen d’aller à la Comédie cet été.
Je crois que la Gazette littéraire m’a brouillé avec l’abbé de Sade. Ce n’est pas que je me reconnaisse à la main d’un grand maître[2] dont l’abbé Arnaud a désigné l’auteur des Remarques sur Pétrarque ; mais enfin vous savez que j’avais demandé le plus profond secret. Je vous supplie de gronder l’abbé Arnaud de tout votre cœur. Encore une fois[3], je n’aime point Pétrarque, mais j’aime l’abbé de Sade. Je vois que j’ai été prévenu sur l’article d’Algarotti[4], et que la Gazette littèraire est servie beaucoup plus promptement que je ne pourrais l’être. Il me restera la partie du caprice. Dès que je trouverai un livre nouveau, je le prendrai pour prétexte pour débiter mes rêveries, comme j’ai fait sur l’article des songes[5] : cela m’égayera quelquefois, et pourra égayer la Gazette. Mais à présent je n’ai pas trop envie de rire, mes yeux ne vont pas trop bien, ma santé fort mal. Que mes deux anges se portent bien, et je suis consolé.
- ↑ Le billet qui suit.
- ↑ En insérant dans sa Gazette littéraire l’article sur les Mémoires de Pétrarque, qui, dans la présente édition, est tome XXV, page 186, l’abbé Arnaud avait mis en note : « … La lettre que nous insérons ici respire le goût et décèle la main d’un grand maître. »
- ↑ Il l’avait déjà dit dans la lettre 5684.
- ↑ La Gazette littéraire du 20 juin contenait un petit article de moins d’une page sur Algarotti. L’article de Voltaire n’en fut pas moins inséré dans la feuille du 27 juin ; voyez tome XXV, page 195.
- ↑ Cet article sur les songes avait paru dans la Gazette littéraire du 20 juin ; voyez tome XXV, page 192.