Correspondance de Voltaire/1765/Lettre 5904

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Correspondance : année 1765GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 43 (p. 452-453).

5904. — À M. LE COMTE D’ARGENTAL.
30 janvier.

Mon divin ange, vous êtes donc aussi l’ange gardien de M. de Moultou ; je parle du fils, car, pour le père, je crois que sa vessie lui jouera bientôt un mauvais tour, et qu’il comparaîtra devant les anges de là-haut. Le fils a le malheur d’être ministre du saint Évangile dans le tripot de Genève ; c’est son seul défaut. Mme la duchesse d’Enville doit certifier à M. le duc de Praslin que mon petit Moultou est très-philosophe et très-aimable, et point du tout prêtre. Il compte même, en partant de Genève, remercier les pédants ses confrères, et renoncer au plus sot des ministères.

Il craint toujours, et à mon avis très-mal à propos, qu’on ne lui fasse des chicanes en Languedoc, pour avoir prêché la doctrine de Calvin sur les bords du lac Léman. Il supplie très-humblement M. le duc de Praslin de vouloir bien mettre dans le passe-port :

« Pour le sieur de Moultou et son fils, bourgeois de Genève, avec sa femme et ses enfants. »

Permettez qu’aujourd’hui je ne vous parle que des Moultou, et que je réserve les roués pour une autre occasion. Vous me feriez grand plaisir de me dire si Mme d’Argental ne tousse plus. Voulez-vous bien faire agréer à M. le duc de Praslin mes tendres et profonds respects ?