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Correspondance de Voltaire/1770/Lettre 7871

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Correspondance : année 1770GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 47 (p. 65).
7871. — À M. LAUS DE BOISSY[1].
Ferney, 28 avril.

Monsieur, Anacréon chantait et dansait, Platon raisonnait ou déraisonnait dans le beau pays de la Grèce, et moi je suis entouré de quarante lieues de neiges, à la fin d’avril, entre les Savoyards et les Suisses ; et tant que les neiges sont sur la terre, je suis privé de la vue. Pardonnez-moi si, dans cet état, je ne réponds qu’en prose à vos très-jolis vers ; je sens tout leur mérite ; mais vous me prenez trop à votre avantage ; ce n’est pas le cas où


HercNardi parvus onix eliciet cadum.
HercNardi parvVejanius, armis
Herculis ad postem fixis, latet abditus agro.


Vous daignez me chercher dans la solitude où je suis enseveli pour me récompenser de mes travaux passés ; je ne puis que vous offrir de sincères et d’inutiles remerciements des fleurs que vous jetez sur le bord de mon tombeau. J’ai perdu la voix ; mais si elle me revient, ce sera pour vous dire combien je suis sensible aux bontés dont vous m’honorez.

  1. Éditeurs, de Cayrol et François.