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Correspondance de Voltaire/1771/Lettre 8440

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Correspondance de Voltaire/1771
Correspondance : année 1771GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 47 (p. 573-574).
8440. — À M. LE COMTE DE ROCHEFORT.
Décembre.

Je n’ai point changé d’avis, monsieur, depuis que je vous ai vu. Je déteste toujours les assassins[1] du chevalier de La Barre, je respecte le gouvernement du roi. Rien n’est si beau que la justice gratuitement rendue dans tout le royaume, et la vénalité supprimée. Je trouve ces deux opérations admirables, et je suis affligé qu’on ne leur rende pas justice. La reine de Suède disait que la gloire d’un souverain consiste à être calomnié pour avoir fait du bien.

Monsieur le premier président de Toulouse[2] me mande que la première chose qu’il a faite avec son nouveau parlement a été de rendre une entière justice aux Sirven, et de leur adjuger des dépens considérables. Songez qu’il ne fallut que deux heures pour condamner cette famille au dernier supplice, et qu’il a fallu neuf ans pour faire rendre justice à l’innocence.

J’apprends que les assassins du roi de Pologne avaient tous communié, et fait serment à l’autel de la sainte Vierge d’exécuter leur parricide. J’en fais mes compliments à Ravaillac et au révérend père Malagrida.

Mais j’aime mieux me mettre aux pieds de Mme Dix-neufans, que je soupçonne avoir vingt ans, et que vous avez empêchée de rester vierge.

Quand vous serez à Versailles, je pourrai vous envoyer un abrégé de l’Histoire du Parlement[3], très-véridique. Vous pourrez en parler à monsieur le chancelier, qui permettra que je vous fasse tenir le paquet à son adresse.

  1. C’est-à-dire les membres de l’ancien parlement.
  2. Bastard.
  3. L’Histoire du Parlement de Paris, publiée en 1769.