Cours d’agriculture (Rozier)/COLLETS

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Marchant (Tome onzièmep. 392-395).


COLLETS, (Chasse aux oiseaux.) Les collets de toute espèce présentent, par leur simplicité, un genre de pièges à la portée de tout le monde, et dont l’usage, aussi commun qu’étendu, menace indistinctement toute sorte de menu gibier. Ils sont principalement le fléau de cette foule d’oisillons, que leur petitesse et leur légèreté dérobent au fusil et à une poursuite réglée, et dont les rapines désolent quelquefois les champs et les vergers.

Chacun sait que les collets ne sont autre chose qu’une cordelette d’une matière quelconque, dont une extrémité est nouée en boucle, et dont l’autre, passant par cette même boucle, forme ce qu’on appelle le nœud coulant, qui se serre sur lui-même, lorsqu’une action étrangère tire la cordelette et tend à rétrécir le cercle ou l’anneau que présente le développement du collet. On emploie, pour les faire, plus ordinairement des crins de cheval, quelquefois de la filasse de chanvre, et, pour du gibier un peu fort, des fils de fer ou de laiton, flexibles comme ceux qui servent à monter certains instrumens. Deux crins tordus font un collet capable d’arrêter la plupart des petits oiseaux : on peut en augmenter le nombre, quand on tend pour de plus fortes espèces ; mais quatre crins donnent en général toute la résistance que l’on peut désirer. Quand le gibier, en se débattant, a fait prendre un mauvais pli à ces collets, on les rend à leur état naturel en les mouillant.

Les différentes manières de tendre ce piège lui ont valu diverses désignations : ainsi on distingue les collets trainans, les collets piqués ou à piquet, les collets pendans, et enfin les collets à ressort.

Les collets trainans sont appelés ainsi, parce qu’on les dispose à plate terre, et dans l’intention d’y arrêter, par les pattes, les oiseaux qui marchent et courent, au lieu de sautiller. On les tend plus habituellement le long des raies de champs et des sillons, au moyen d’un cordeau d’une grandeur indéterminée, après lequel on attache, de distance en distance, autant de collets qu’on le juge à propos. Ces distances sont arbitraires ; on peut les éloigner ou les rapprocher à volonté, en observant pourtant, dans ce dernier cas, qu’il ne faut pas que les collets développés se touchent et se mêlent les uns dans les autres. En semant le long de ce piège des graines recherchées des oiseaux, on y en prend une quantité prodigieuse et de toute espèce. (Voyez ce qu’il en a déjà été dit à l’art. Alouette.)

Les collets piqués, ou à piquet, diffèrent des précédens en ce que leur ouverture, au lieu d’être à plat, est élevée verticalement au moyen d’un piquet, et se présente de manière à ce que les oiseaux s’y prennent par le cou. Pour faire ces piquets, on se sert de branches de coudrier et d’autres bois verts, auxquelles ou donne douze, quinze, ou dix-huit pouces de longueur. On enfonce à travers chaque baguette une lame de couteau, et, tenant avec cette même lame la fente entr’ouverte, ou y passe le collet qui y reste à demeure, tant parce que le bois le tient serré, que par le soin qu’on a eu de faire, à son extrémité, un nœud fixe qui l’empêche de se dégager de la fente. On voit ainsi quelquefois deux collets sortir de gauche et de droite, d’après le même piquet. On garnit de ces appareils les bords des haies, des petits sentiers, les chemins des vignes, en général tous les passages des oiseaux. Quand les piquets sont enfoncés en terre, la courbure inférieure des collets ouverts doit encore être éloignée du sol d’un ou deux pouces. Si le chemin où l’on place ces piquets est un peu large, on force les oiseaux à se jeter dans la direction même des collets, en plantant de petits branchages qui ne laissent d’ouverture libre que celle du collet même, et qu’on appele garnitures. Des piquets semblables, mais armés, de plus, d’une baguette transversale au dessus du collet et sur laquelle puissent se poser les oiseaux, servent avec avantage contre ceux d’entr’eux qui perchent pus qu’ils ne marchent. On les dispose dans les haies et à la cime des buissons, et on les amorce de fruits, selon la saison et l’espèce d’oiseaux qu’on cherche à y attirer. On ouvre en rond le collet au dessus de cette amorce, en tâchant toujours de le disposer de manière à ce que l’oiseau ne puisse approcher son bec des fruits, qu’en passant son cou par l’ouverture qui doit l’arrêter.

Cette disposition, au reste, est celle qui, en général, caractérise les collets pendus, dont ce dernier se rapproche beaucoup. On les dit pendus, parce que toujours élevés assez loin de terre, ils s’attachent aux arbres, aux haies, aux arbustes qui portent des haies, et, lorsque la disette des fruits se fait sentir, s’amorcent avec succès de fruits conservés pour cet usage. On recommande de s’en procurer de factices, lorsqu’on n’a pas eu la précaution d’en garder de naturels.

La forme des supports auxquels on attache et suspend ces collets est assez arbitraire, et dépend beaucoup de l’imagination de l’oiseleur et des localités. Les châssis formés avec une baguette pliée à ses deux extrémités et retenue dans cette position par une corde, de petits cerceaux, des branches d’arbres ou courbées ou même se présentant horizontalement, sont autant de machines que l’on peut garnir de collets pendus. La seule règle d’après laquelle il faille se diriger est de disposer le collet, ainsi que je l’ai déjà dit, de manière à ce qu’il soit élevé au dessus d’un point de repos fixe, sur lequel l’oiseau soit invité à se percher, et d’où il ne puisse approcher les fruits qu’on lui présente, sans engager sa tête dans le cercle que forme le collet au devant de l’amorce.

Tous les lacs qui se serrent par un mouvement élastique quelconque, forment la classe des collets à ressort : j’ai déjà décrit les plus usités d’entr’eux, tels que rejets et raquettes, à l’art. Abreuvoir ; corde à pied, à l’art. Bécasse ; Collet à ressort de fil de fer, à l’art. Canards, (Voyez au reste, pour plus de clarté, les figures de la Pl. IV.) Celles 1, 2, 3, 4 offrent le rejet portatif de M. Clavaux, et ses diverses parties. Les figures 1 et 2 le présentent de profil et par-derrière ; b b en est la base ; m m le montant ; c c le cylindre entouré du fil de fer ou ressort à boudin ; f f fil de fer qui sert de levier ou ressort ; d d, fig. 1 et 3, le cordonnet attaché au fil de fer f, et qui passe par le trou t, pratiqué au haut du montant, pour se déployer, en collet sur la marchette p p, fig. 1 et 4. Cette marchette, engagée au bord du trou t, fig. 1, y est pincée et arrêtée contre le rebord du montant, par le nœud du cordonnet marqué au point n, fig. 3 ; la ligne l l, fig. 4, est le fil qui la tient attachée au montant, afin qu’elle ne se perde point lorsque l’oiseau la fait tomber ; a a est une pointe de fer fichée dans la base du piège, et qui sert à le piquer sur des branches ou troncs d’arbres. Les figures 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, sont celles de la raquette et de ses parties ; k k, fig. 5, est la branche élastique qui en forme le corps ; n, fig. 5 et 6, est le bâton enfoncé en terre contre lequel la raquette est attachée dans une position verticale ; d d, fig. 5, 6 et 9, est le cordonnet qui tient la raquette tendue ; a, fig. 9, est le nœud qui passe par le trou p p, fig 10 et 11 pour arrêter contre le rebord de la branche montante la marchette r fig. 5 et 6. La partie du cordonnet de a en t, fig. 9, sert à former le collet qu’on voit déployé en rond, fig. 5, sur la marchette r ; le petit bâton t, mêmes figures, est l’arrêt qui, lorsque la marchette tombe, empêche le collet de sortir du trou, ce qui serre les pattes

de l’oiseau ; m est le fil qui tient la marchette attachée à sa raquette. Les fig. 7 et 8 présentent deux marchettes, la première taillée pour le trou carré de la fig. 10, et l’autre pour le trou rond de la fig. 11 : celle-ci est simplement aplatie à son extrémité qui pose sur le rebord g, au dessous du trou de la fig. 11. Ces deux figures 10 et 11 sont les extrémités vues en grand de deux branches montantes ; on y distingue aisément le trou o dont elles doivent être percées, le rebord ou mentonnet g, sur lequel s’appuient les marchettes, et on les voit taillées en pointe, afin que les oiseaux ne puissent percher sur leur extrémité.

On trouve, fig. 12, 13, 14 et 15, la corde à pied tendue, et les pièces dont se compose cette espèce de rejet.

r r est le bâton élastique fiché en terre, dont la courbure forme le ressort qui doit relever la corde m et serrer le collet b b, fig. 12, contre le piquet à crochet renversée, fig. 12 et 13 ; e, fig. 12 et 14, est le piquet simple après lequel s’arrête le crochet de la marchette d d, fig. 12. À l’autre extrémité de cette marchette, au point i, se voit le cran qui sert à recevoir l’extrémité i du petit bâton i v fig. 13 ; ce petit bâton, taillé en bec au point i, et creusé au point v, s’engage par ce bout sous le pli du crochet c, fig. 12, et dans le cran de la marchette par l’autre bout. De plus, il est attaché au point o à la corde m, qui, tendant à le relever par l’effort du ressort r, ne fait au contraire que le tenir serré entre le cran de la marchette et le pli du crochet. On conçoit que, par ce mécanisme, la marchette d d est soutenue à quelque distance de terre, et dans une position horizontale ; au dessus de cette marchette s’étend en rond le collet b b b, qui n’est que le prolongement de la corde m attachée au haut de la branche R. Si ce piège est tendu par le travers du chemin de certains oiseaux piétineurs, on sent que, pourvu qu’ils posent un pied sur le milieu de la marchette d d, ils la font baisser, et que le cran de son extrémité d i, fig. 12, abandonne par-là le bec de l’arrêt v i. Alors la branche R ne trouvant plus d’obstacles, se relève avec la corde n y et serre par-là le collet b b, et l’oiseau dont il embrasse les pieds contre la tête du piquet c.

Le collet à ressort de fil de fer, fig. 16, 17 et 18, est celui décrit à la chasse des Canards. Dans la fig. 16, il est armé et prêt à jouer ; dans la fig. 18, il est détendu, et un oiseau y est arrêté par les pattes ; a a, fig. 16 et 18, est la base ou la planchette de bois sur laquelle le ressort de fil de fer est monté : au dessus de ces points a a, on voit les attaches f f, qui tirent le ressort sur cette petite planche. Ce ressort e e, mêmes figures, est, comme on le voit, une branche de fer tournée en spirale sur son milieu, et dont les deux bras doivent rester naturellement étendus comme ils le sont fig. 18, et ne se trouvent serrés l’un contre l’autre, comme dans la fig. 16, que par un effort étranger. C’est à les retenir dans cet état que servent les pointes ou arrêts 2 2, fig. 16 et 17 ; ces deux pointes sont plantées droites dans la partie plate de la marchette du piège qui se voit toute entière fig. 17 : elle est aplatie aux deux tiers de sa longueur de o en r. Cette partie s’ajuste sous la base a a, et est cachée par elle de manière que la partie r s dépasse seule, comme dans la fig. 16 ; cette même partie r s est arrondie et se présente à l’oiseau garnie de quelque amorce ; sur cette portion r s se développe en rond la corde t t t t, disposée en nœud coulant, et dont l’extrémité, passée dans les deux œillets qui terminent les branches du ressort, s’arrête dans un trou i, sous la base même du piège. Comme la marchette n’est pas plus large que la base du ressort, il faut que cette base soit échancrée au dessus de l’arrêt m, fig. 16 et 18, pour laisser passer les pointes 2 2, destinées à recevoir les bras e e, comme on voit qu’ils le sont fig. 16. Lorsque le piège étant dans cet état, un oiseau vient à presser sur la partie r s de la marchette, il dégage les pointes 2 2, et, les bras s’écartant, serrent le nœud coulant t t t t, et pincent le gibier par les pattes contre l’arrêt m, comme on le voit fig. 18. Pour que la marchette qui a abandonné la base se retrouve toujours sous la main de l’oiseleur, il a la précaution de l’attacher à cette base au moyen des trous o, mais en prenant garde que cette attache ne lui ôte point la mobilité qu’elle doit avoir pour obéir à la première pression qu’elle éprouve.

C’est avec ce même ressort que l’on obtient la pince d’Elvaski, si, au milieu des œillets qui terminent les bras e e, fig. 16, on suppose que ces bras croisent l’un sur l’autre, en formant le coude comme l’extrémité des broches à rôtir ordinaires que l’on tourne à la main.

(S.)